Le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale liste une série de recommandations en faveur des personnes immunodéprimées
Dans une note du 28 mars, le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale liste une série de recommandations en faveur des personnes immunodéprimées. Dans “l’état actuel de l’évolution de la pandémie”, le Conseil indique que port du masque (FFP2) doit être “poursuivi” pour ces personnes pour pouvoir fréquenter les lieux clos. A ce titre, il recommande le maintien du remboursement intégral des masques FFP2 et de leur gratuité.
Par ailleurs, il propose des mesures de soutien, à l’instar de messages encourageant le maintien volontaire des gestes barrières, l’amélioration de la qualité de l’air ainsi que le renforcement de la sécurité au travail. Par exemple, en offrant une possibilité d’isolement pour ces personnes si elles le souhaitent (bureau individuel et non open space) ou en poursuivant l’accès au télétravail complet.
actuEL CE
Loi santé au travail : bientôt un cahier des charges pour le portail numérique de dépôt du DUERP
Un décret publié au Journal Officiel précise les modalités selon lesquelles le cahier des charges du déploiement et du fonctionnement du portail numérique de conservation du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) sera établi.
Pour rappel, la loi pour renforcer la prévention en santé au travail du 2 août 2021 a introduit une nouvelle obligation de dépôt du document unique sur un portail numérique.
Ainsi le DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels) devra être déposé “sur un portail numérique déployé et administré par un organisme géré par les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel”. Le texte précise que ce portail doit préserver “la confidentialité des données contenues dans le document unique”.
L’accès doit aussi être restreint (par l’intermédiaire d’une procédure d’authentification sécurisée) aux personnes et aux instances habilitées à le déposer ou à y avoir accès.
Les organisations patronales devront “définir les modalités du déploiement d’un portail numérique pour centraliser ce dépôt”, selon Pascale Gruny, sénatrice co-rapportrice du texte (LR, Aisne). Il reviendra à l’exécutif, par voie réglementaire d’en déterminer les modalités et les délais.
En termes de dates, le DUERP devra être déposé sur ce portail :
à compter du 1er juillet 2023, pour les entreprises de 150 salariés et plus ;
à compter de dates fixées par décret, en fonction des effectifs des entreprises, et au plus tard à compter du 1er juillet 2024, pour les entreprises dont l’effectif est inférieur à 150 salariés.
Les précisions du décret
Le décret du 5 avril 2022 indique que les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel devront transmettre au ministre chargé du travail au plus tard le 31 mai 2022 en vue de leur agrément par arrêté :
leur proposition conjointe de cahier des charges du déploiement et du fonctionnement du portail numérique ;
les statuts de l’organisme gestionnaire du portail numérique.
Cette proposition conjointe de cahier des charges devra être transmise à la Commission nationale de l’informatique et des libertés par l’administration compétente. A défaut d’avis conforme de cette commission, les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel disposent d’un délai d’un mois à compter de la date de réception de l’avis pour arrêter un cahier des charges conforme à cet avis et le transmettre au ministère chargé du travail.
En l’absence des agréments d’ici le 30 septembre 2022, les mesures d’application nécessaires à l’entrée en vigueur seront déterminées par décret en Conseil d’Etat.
Thales : salariés et syndicats organisent “une oraison funèbre du dialogue social”
Le torchon brûle entre les syndicats et la direction de Thales. En conflit depuis plusieurs mois autour des négociations salariales, le climat ne s’apaise pas chez ce groupe électronique spécialisé dans l’aérospatiale, la défense, la sécurité et le transport terrestre, et qui emploie en France 4 000 salariés sur 15 sites. Aujourd’hui à Élancourt (Île-de-France), syndicats (CGT, CFTC, CFDT, CFE-CGC) et salariés de plusieurs sites se réunissent autour d’une “oraison funèbre du dialogue social”, “une inhumation (…) dont ils se préparent à porter le deuil” (communiqué intersyndical en pièce jointe). Selon eux, la direction refuse de faire vivre le dialogue social et de calmer la crise actuelle. Pour Anthony Perrocheau, coordinateur CFDT (majoritaire) que nous avons pu contacter, “rien ne bouge, le DRH est en déplacement à l’étranger et son supérieur ne prend pas de décision”. Il dénonce également “des mises au pas mesquines”, à savoir des menaces de licenciement à peine voilées à l’égard des salariés qui se mobilisent.
La direction a également assigné en justice plusieurs salariés et représentants du personnel. Si les audiences devant le tribunal de Versailles ont été repoussées au 7 avril, le tribunal de Beauvais a interdit (sous astreinte de 300 € par infraction et par personne) aux salariés de bloquer l’accès au site de Méru (Hauts-de-France).
actuEL CE
Accord de performance collective : l’OIT alerte sur la mise en œuvre du licenciement “sui generis”
Dans son rapport dévoilé lors de l’audience du 31 mars dernier sur le barème d’indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’Organisation internationale du travail (OIT) pointe un autre risque éventuel de non-conformité du droit français à la convention n° 158.
Le sujet concerne les accords de performance collective (APC) et la rupture du contrat de travail qui peut s’ensuivre si le salarié n’accepte pas l’application de l’accord à son contrat de travail.
L’OIT estime ainsi que, “au-delà de l’affirmation expresse par l’article L. 2254-2 du caractère réel et sérieux du licenciement basé sur le refus du salarié de la modification de son contrat de travail consécutive à la signature d’un accord de performance collective, le juge doit pouvoir continuer à procéder à un véritable contrôle judiciaire”.
En effet, est-il indiqué, “le texte de l’article L. 2254-2 ne fait que rappeler l’exigence selon laquelle tout licenciement doit reposer sur une cause réelle et sérieuse. Il appartient au juge dans le cadre des procédures judiciaires relatives au licenciement fondé sur l’article L. 2254-2 de déterminer s’il existe ou non un motif valable au sens de l’article 4 de la convention, à savoir si le motif du licenciement est fondé sur « les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service », étant établi que, au cours du débat judiciaire, la charge de la preuve ne devra pas reposer sur le seul salarié”.
Cette position rejoint celle prise par la Cour de cassation dans un arrêt du 2 décembre 2020 s’agissant des anciens accords de mobilités de la loi du 14 juin 2013, duquel on peut en déduire pour les accords de performance collective que l’entreprise devra bien démontrer les nécessités de fonctionnement ou celles de préserver ou développer l’emploi afin que le licenciement soit considéré comme justifié.
actuEL CE
[Présidentielle 2022] L’association RDS interpelle les candidats sur le dialogue social
Réalités du dialogue social (RDS) a adressé une lettre aux candidates et candidats à la présidence de la République afin d’attirer leur attention sur un des enjeux déterminants pour le prochain mandat : le raffermissement de la participation des corps intermédiaires aux décisions publiques. Dans cette lettre ouverte que nous reproduisons ci-dessous, l’association détaille trois champs sur lesquels le dialogue social doit jouer un effet de levier et pour lesquels les partenaires sociaux ont besoin d’un terrain législatif favorable comme, par exemple, la possibilité donnée aux élus du personnel de pouvoir communiquer par mail avec tous les salariés.
Madame, Monsieur, Vous êtes candidate ou candidat à l’élection présidentielle de 2022. Parmi les enjeux déterminants pour le prochain mandat, il en est un que nous souhaitons partager avec vous, à savoir l’utilité du dialogue social et de la participation des corps intermédiaires aux décisions publiques, tout particulièrement pour garantir une qualité de vie aux citoyens.
Nous réunissons des directions d’entreprises et des organisations syndicales
Notre Association, Réalités du dialogue social, réunit plus de 300 adhérents, représentant à la fois des directions d’entreprise et des organisations syndicales, avec l’ambition de promouvoir le dialogue social à tous les échelons et sous toutes ses formes. Reconnue d’intérêt général, elle s’adresse aussi bien aux acteurs du monde du travail qu’aux jeunes générations, futurs managers et/ou syndicalistes.
Les apports du dialogue social ont spécifiquement été démontrés en pleine crise sanitaire dans les entreprises, les branches et au niveau interprofessionnel, et le seront certainement pour accompagner les conséquences humaines, politiques, économiques et sociales de la guerre en Ukraine. Cette période particulière de la pandémie éclaire sur la capacité à confronter des regards et même des intérêts, non concordants au premier aspect, permettant de trouver des solutions pour sauvegarder les entreprises et les emplois. Elle s’est traduite par une intensification du dialogue et a permis de limiter les jeux de postures car il n’y avait pas de réponses toutes faites, tant du côté́ syndical que côté patronal. Pour autant, si les relations entre les acteurs sociaux ont gagné en intensité et en fréquence, cette priorisation donnée au dialogue ne garantit en rien sa qualité et sa production.
L’élaboration de solutions collectives ne peut se passer de la présence de corps intermédiaires
La nature des échanges, pour gérer cette crise, est le plus souvent le fruit de relations antérieures. Comme le résume un de nos membres : « Nous bénéficions de la culture sociale en temps de paix qui se révèle en temps de guerre ». C’est la raison pour laquelle nous disons volontiers que le dialogue social est à l’entreprise ce que la prévention est à la santé.
Cette expérience Covid conforte notre conviction que l’élaboration de solutions collectives ne peut se passer de la présence de corps intermédiaires. Parce que le dialogue est utile aux hommes, aux organisations et à la société. Il est générateur de bien-être pour toutes celles et ceux qui travaillent, qu’ils soient salariés, agents de la fonction publique ou indépendants. Il permet de faire évoluer la performance sociale, économique, mais aussi environnementale, de l’entreprise ou de toute autre structure. Il faut continuer à mener des projets qui font comprendre l’avantage, pour notre économie mais aussi pour notre société, de s’écouter les uns les autres, d’accepter des points de vue différents et légitimes.
Il est primordial que les partenaires sociaux puissent s’emparer des sujets qui préoccupent les citoyens pour leur avenir, en termes de travail, de pouvoir d’achat et de qualité de vie. Cela suppose un terrain législatif favorable pour leur permettre de prendre en main ces questions. Sur la base des travaux que nous avons réalisés ces dernières années avec nos membres, nous identifions trois champs sur lesquels le dialogue social doit jouer un effet de levier.
1. L’accompagnement des citoyens dans les mutations du monde du travail
Le monde du travail va être bousculé de manière profonde sous l’effet du numérique mais aussi de l’évolution de la relation au travail. Nous assistons à un éclatement des lieux, des rythmes et temps de travail, des statuts et des contrats. Si le télétravail, exacerbé par la pandémie, occupe depuis plusieurs mois la table des négociations, ces transformations posent une autre question : la capacité des corps intermédiaires, quels qu’ils soient, à représenter tout type de travailleur, où qu’il soit.
Donner aux élus du personnel les moyens de communiquer avec tous les salariés d’une organisation
Si la mise en place d’élections professionnelles pour les indépendants des plateformes numériques en mai 2022 constitue une première avancée, nous distinguons un autre vecteur d’amélioration : donner les moyens aux représentants du personnel de communiquer avec tous les collaborateurs d’une organisation d’autant plus dans le schéma actuel d’éparpillement des lieux de travail.
Les conditions d’accès des élus et des organisations syndicales à la messagerie électronique professionnelle, qui reste tributaire de la signature d’un accord d’entreprise (contrairement à l’intranet pour lequel la loi El-Khomri du 8 août 2016 avait levé cette contrainte), devraient être facilitées et encadrées. De plus, cette évolution participerait à la mise en visibilité des actions et du rôle des syndicats ou d’autres collectifs : un enjeu de taille pour ces organisations confrontées à des difficultés d’attractivité alors que se profilent le renouvellement des comités sociaux économiques (CSE) et les élections dans la fonction publique.
2. L’accélération de la transition écologique en déplaçant le curseur de l’engagement, au sein des entreprises, des directions RSE aux partenaires sociaux, aux membres de la gouvernance et aux salariés
La loi Climat et Résilience du 22 août 2021 est un premier pas mais il va falloir aller au-delà, en développant ou enclenchant le processus au plus près des entreprises, des filières et des territoires. Les partenaires sociaux vont dorénavant devoir discuter, entre autres, de l’impact social de la transition écologique en termes d’emploi et de mutation des métiers (GPEC verte) ou encore du niveau des émissions de gaz à effet de serre des entreprises.
Renforcer la négociation collective sur le champ environnemental
S’il faut parvenir collectivement à appréhender l’ampleur des transformations, des investissements et des coûts que cela va générer, y compris pour les consommateurs finaux, nos récents travaux sur le sujet montrent que les bases d’un « dialogue social vert » se consolident petit à petit sans nécessiter un changement profond des modèles d’activité.
Les axes d’amélioration résident en les moyens alloués aux partenaires sociaux, insuffisamment prévus par la loi Climat et Résilience, et en un renforcement de la négociation collective sur ce champ environnemental. Il n’existe pas d’accord spécifique ; seules des clauses vertes se retrouvent dans une multitude d’accords de groupe ou d’entreprise dont l’objet est plus large (qualité de vie au travail, responsabilité sociale et environnementale, télétravail, dialogue social…). De plus, ces clauses n’ont pas, pour la plupart, de portée normative.
3. L’adaptation de la gouvernance d’entreprise pour porter au mieux les sujets sociétaux et les aspirations des travailleurs
La législation (loi Rebsamen du 17 août 2015, loi Pacte du 22 mai 2019) a renforcé la présence d’administrateurs salariés dans les plus hautes instances de décision des entreprises en France. Toutefois, force est de constater qu’elle l’appréhende sous l’angle quantitatif (taille des structures éligibles et nombre d’administrateurs) et non sous celui, qualitatif, des missions et apports de ces représentants des salariés.
Faciliter l’exercice des représentants des salariés des conseils d’administration
Il s’agit désormais de faciliter l’exercice de leurs responsabilités : parcours d’intégration, accès aux différents comités où sont préparées, voire prises les décisions, valorisation, reconnaissance du mandat tant auprès des collaborateurs, du corps managérial que des organisations syndicales…
Les grandes mutations, qui façonnent actuellement notre société, demandent des réflexions stratégiques de plus en plus intégrées que les administrateurs salariés sont en mesure de mener, aux côtés des autres administrateurs, grâce à la connaissance fine qu’ils ont de leur entreprise et à leur fibre sociale.
La vocation de notre Association, depuis ses origines, est de montrer, par le partage d’expériences, toutes les possibilités de relations sociales fructueuses. Dans le cadre de notre mission de sensibilisation et de promotion du dialogue social, nous avons ainsi souhaité attirer votre attention sur un certain nombre de préoccupations des acteurs sociaux et vous interroger sur la façon dont vous placeriez le dialogue social dans votre stratégie en tant que future présidente ou future président de la République. Nous serions honorés que vous réagissiez plus précisément aux trois sujets précités et nous communiquerons votre réponse à nos membres.
Nous vous prions de croire, Madame, Monsieur, à notre considération distinguée.
Patrick BÉZIER, président, et les membres du bureau de Réalités du dialogue social.
Syntec : revalorisation des salaires minimaux dans la branche
La Fédération patronale (Fédération Syntec et Cinov) a signé, le 31 mars, avec la CFDT et la CFTC, un avenant de revalorisation des salaires minimaux des salariés de la branche des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (1 100 000 salariés). Concrètement, les salaires minimaux sont relevés de 4,9 % pour le premier niveau et de 3,5 % pour le deuxième niveau ETAM ; de 2,5 % pour le reste de la grille “ETAM ” et pour la grille “cadres”.
Ces augmentations s’appliqueront à toutes les entreprises de la branche le mois suivant l’extension sollicitée auprès du ministère du Travail. L’application est attendue au cours du troisième trimestre. Les partenaires sociaux ont également convenu d’engager de nouvelles négociations salariales au cours du deuxième trimestre 2023.
[Présidentielle 2022] Faut-il (encore) réformer les retraites ?
Age de départ, niveau des pensions, nombre d’annuités… La plupart des candidats à l’élection présidentielle proposent une réforme des retraites dans leurs programmes. Mais une telle réforme est-elle nécessaire ? Est-elle seulement souhaitable ? La réforme idéale serait-elle paramétrique ou systémique ? Quid de l’indexation des pensions : sur les salaires ou sur l’inflation ? Une table ronde de l’Ajis (1) a tenté de faire le point sur ces sujets avec Pascale Coton, Pierre-Louis Bras et Antoine Bozio.
Emmanuel Macron l’a annoncé : lui Président instaurerait l’âge de départ à la retraite à 65 ans au lieu de 62. Dans son sillage, les autres candidats ont fixé leurs curseurs de 60 à 65 ans. Pour autant, la nécessité financière d’une réforme ne va pas de soi, comme l’explique Pierre-Louis Bras, président du Conseil d’orientation des retraites (COR).
“Il n’y aura pas d’explosion des dépenses de retraite”
Si la part des retraites dans la richesse nationale a augmenté pendant la crise sanitaire, atteignant 14,2 % du PIB, elle devrait revenir à 13,6 % d’ici la fin de la décennie 2020. Toutes les hypothèses de croissance indiquent qu’elle diminuerait ensuite. “Et donc, les dépenses en pourcentage de PIB (produit intérieur brut) n’explosent pas. La plupart des gens pensent que le vieillissement de la population causera un débordement des dépenses mais c’est faux car la part des retraites versées va diminuer par rapport aux rémunérations et aux richesses produites”, explique Pierre-Louis Bras.
Une réforme peut rester politiquement légitime
Une réforme motivée par une explosion des dépenses de retraite ne serait donc pas justifiée. “Pour autant, relativise le président du COR, une réforme peut rester politiquement légitime”. Pierre-Louis Bras dresse également la filiation entre les dépenses publiques, dont les retraites ne sont qu’un pan, et le programme de stabilité européen d’avril 2021. Ce document, transmis chaque année par les États de la zone euro à la Commission européenne en vertu du pacte de stabilité et de croissance, présente l’évolution des finances publiques pour l’année passée, l’année en cours et les trois années suivantes. Avec les programmes de réforme nationaux, il permet de vérifier et de coordonner les politiques budgétaires des États de l’Union européenne. Des éléments à rapprocher du fameux critère des 3 % issu du traité sur le fonctionnement de l’UE : les déficits des États membres ne sont pas censés excéder 3 % du PIB, la dette publique devant rester inférieure à 60 % du PIB.
Dès lors, on comprend mieux pourquoi les gouvernements enchaînent les réformes des retraites. Outre l’idéologie politique qui s’y niche, ces réformes correspondent également aux exigences européennes de maîtrise des dépenses publiques. Ainsi conclut Pierre-Louis Bras : “La trajectoire des retraites n’est pas toujours compatible avec le programme de stabilité, les retraites représentant 25 % des dépenses publiques à elles seules. Donc la question des retraites, c’est plus globalement celle des finances publiques !”.
L’avenir des retraites ne se lit pas dans les chiffres
Une position que n’adopte pas Pascale Coton, vice-présidente de la CFTC, membre du CESE en tant que représentante des salariés : “L’avenir des retraites ne se lit pas que dans les chiffres”, assume-t-elle. La négociatrice syndicale des retraites penche de toute façon pour une réforme systémique qui résoudrait enfin l’inégalité envers les femmes qui touchent des pensions inférieures de 40 % à celles des hommes. Supprimer l’âge légal serait pour elle une solution, car “quand on dit qu’on va travailler plus longtemps, on met plus de vieux au chômage et on creuse ainsi la caisse du chômage au lieu de celle des retraites”. Mais pour l’économiste Antoine Bozio, il suffirait de déterminer une enveloppe de dépenses de retraites et de jouer ensuite sur les mécanismes d’indexation.
Indexer sur les salaires ou sur les prix ?
A la question “Faut-il une réforme des retraites “, Antoine Bozio répond par le prisme des dépenses “qui constituent un choix politique”. Le fondateur et président de l’institut des politiques publiques s’explique : “Dans les années 80, on a décidé d’une indexation sur les prix dans le but de réduire les dépenses. Cela a conduit à une baisse du taux de remplacement et à une baisse des pensions par rapport au dernier salaire perçu avant la retraite”.
On n’a aucune visibilité sur la croissance
Un choix qui pousse les Français à compléter leur retraite par de l’épargne. Le choix d’une indexation sur les prix a également pour conséquences de relier le niveau des retraites à la croissance économique du pays : “La croissance compense les variations démographiques et les évolutions de l’espérance de vie. Le vrai problème, c’est qu’on ne connaît pas notre croissance à l’horizon des 25 prochaines années mais on veut que les retraites compensent les écarts de niveaux de vie entre les actifs et les retraités. Sauf qu’en termes de croissance, on n’a strictement aucune visibilité. C’est un vrai sujet”, s’inquiète-t-il.
Ces éléments posés, l’économiste et inspirateur du système universel prôné par Emmanuel Macron pendant son quinquennat, évoque plusieurs scénarios possibles : soit réindexer les retraites sur les salaires, ce qui serait selon lui coûteux, soit continuer de contenir les dépenses et agir sur les droits à la retraite et reporter l’âge légal. Ce dernier scénario conduisant à terme à une augmentation du taux de remplacement et des pensions, remarque Pierre-Louis Bras, qui prône de maintenir la norme selon laquelle les Français partent à la retraite lorsqu’ils atteignent le taux plein. “Rien ne les empêche cependant de partir plus tôt avec une pension moins élevée mais d’avoir du temps pour s’occuper de leurs petits-enfants”, conclut-il.
Il faut d’abord travailler sur l’emploi des seniors
Pascale Coton préférerait une indexation sur les salaires “car c’est plus linéaire, on peut se donner une perspective sur 20 ans”. La vice-présidente de la CFTC recommande également d’attendre les pleins effets de la réforme Touraine : “Aujourd’hui, avec 43 annuités de cotisation, on part à la retraite entre 63 et 64 ans. Pourquoi déjà parler aux Français de ne partir qu’à 65 ans ? Il faudrait d’abord travailler sur l’emploi des seniors car ils veulent savoir quand ils pourront partir pour se consacrer à leur famille, et c’est pour cela que j’ai publié l’avis du CESE sur l’accueil de la petite enfance, cela fait partie du sujet des retraites, de même que la natalité”.
Pour mémoire, la réforme qui tient son nom de la ministre des Affaires sociales et de la Santé de François Hollande prévoit d’exiger un trimestre supplémentaire de cotisations toutes les 3 générations. En 2035, elle doit aboutir à une moyenne d’âge de départ de 64 ans, et ce sans aucune nouvelle réforme…
Que penser du projet de réforme d’Emmanuel Macron ?
Un projet à l’évidence “trop raide” pour la CFTC : “Emmanuel Macron a calculé que les premiers cotisants qui vont travailler 4 mois de plus sont ceux qui sont nés en 1961. Et ceux qui vont travailler jusqu’à 65 ans sont la génération de 1969”, analyse Pascale Coton. La syndicaliste trouve de plus “incroyable qu’on dise à un salarié de partir plus tard sans examiner ses conditions de travail”. Sans compter l’idée qu’une femme touche 40% de moins qu’un homme et que la protection sociale compense la différence : “Le Medef ne veut pas rentrer dans ce débat et le gouvernement non plus, donc il y aura rapidement confrontation. Parce que travailler plus sans réduire les inégalités, c’est non”, prévoit-elle.
Les points n’apportent rien à la définition d’un système de retraites
Pour Antoine Bozio et Pierre-Louis Bras, un report de l’âge légal à 65 ans reviendrait à s’éloigner du système à points tenté pendant le quinquennat finissant. “C’est donc donner plus de poids aux bornes d’âge”, indique Antoine Bozio. Le président du COR rappelle quant à lui qu’il n’y avait pas le mot ‘points’ dans le programme du candidat Macron de 2017 ! Les points étaient une concession, le rapporteur Delevoye avait cru que FO et la CFDT allaient applaudir. Mais les points n’apportent rien à la définition d’un système de retraites. C’est juste l’introduction d’un double taux de change : un à l’achat des points pendant la vie active, un autre à la revente des points, au moment du départ en retraite”. Et Pierre-Louis Bras d’ajouter que c’est un système impossible à piloter, “auquel personne ne comprend rien, alors qu’avec des euros, on sait de quoi on parle”. Il y aurait donc peu de chances de revenir à ce projet. Les retraites restent cependant un sujet de préoccupation à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle.
Association des journalistes de l’information sociale
Marie-Aude Grimont
CSE unique, moyens syndicaux : comment Orpea “maîtrise” son dialogue social et ses IRP
Dans leur rapport sur Orpea, les inspections des finances et des affaires sociales s’étonnent du choix fait par l’entreprise de n’avoir qu’un CSE et qu’une CSSCT unique pour toute la France, un comité social et économique doté de moyens a minima et dont les réunions ne font guère de place aux expressions critiques, du fait de la position dominante d’un syndicat maison peu porté sur la revendication. Par ailleurs, l’avocat de la CGT s’étonne de ne pas avoir encore d’audience fixée pour sa demande d’annulation des élections professionnelles d’Orpea de 2019.
Alors qu’Etienne Margot-Duclot, l’avocat de la CGT, s’étonne de ne toujours pas avoir eu d’audience fixée pour la demande -également soutenue par la CFDT et FO- d’annulation des élections professionnelles de 2019 formulée le 9 février devant le tribunal de proximité de Puteaux, le gouvernement a fini par rendre public, hier, le rapport du 31 mars 2021 de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale des affaires sociales sur Orpea.
Rappelons que cette affaire a viré au scandale après la mise en cause par le livre de Victor Castanet des méthodes de gestion des établissements pour personnes âgées contrôlées par le groupe.
Sur la base de 45 rapports d’enquête des Agences régionales de santé (ARS), les deux inspections relèvent “des critiques convergentes” sur la gestion des ressources humaines d’Orpea. En cause : “sous-effectif, turn over et recours excessif aux CDD, insuffisante formation à la prise en charge du patient, excès dans les “glissements” de tâches” (lire le rapport en pièce jointe).
Conséquence : “Le suivi et la qualité de la prise en charge des résidents sont altérés à la fois par de fréquents sous-effectifs (personnel infirmier, aide-soignant et auxiliaires de vie affectés aux résidents) et par une instabilité des équipes avec pour conséquence qu’une proportion significative de salariés peut mal connaître l’établissement, les collègues et les résidents”.
Favoritisme syndical ?
Dans la partie relative aux relations sociales au sein de l’entreprise, qui nous intéresse essentiellement ici, le rapport des deux inspections semble d’abord prudent au sujet des accusations de favoritisme (à l’égard du syndicat maison Arc-en-ciel), de discrimination syndicale (visant les autres syndicats) voire de fraude électorale formulées par les syndicats CFDT, CGT et FO.
“Le rôle de la direction dans le développement du syndicat Arc-en-Ciel (ndlr : le syndicat maison d’Orpea) a pu être critiqué, dit le rapport. Certaines organisations syndicales estiment que la direction serait intervenue dans le résultat des élections de multiples manières dont aucune n’était vérifiable par la mission. Par ailleurs, le Défenseur des droits n’a jamais été saisi et la liste des contentieux pour discrimination syndicale ayant touché Orpea sur les dernières années ne fait pas apparaître d’atypie pour une entreprise d’un tel effectif”.
Mais le rapport est ensuite plus incisif. Il juge “probable” que la direction d’Orpea entretienne “de facto” des “relations plus étroites avec Arc-en-ciel”.
Les inspecteurs notent qu’aucune rencontre bilatérale n’est organisée entre la DRH et les organisations syndicales, “comme c’est souvent la pratique ailleurs”, ces contacts se limitant à la préparation et à la tenue des réunions du CSE. Un CSE unique dans lequel Arc-en-Ciel “fournit la très grande majorité des élus” (Ndlr : 69% des élus du CSE unique appartiennent à Arc-en-Ciel, 14% à la CGT, 11% à l’UNSA, 6% à la CFDT).
Des frais remboursés pour certains
Cette situation, dit la mission de contrôle, “a pu contribuer à renforcer la proximité entre Arc-en-ciel et la direction et entretient chez les autres organisations le sentiment de disposer d’une information moins complète, plus rapide et moins précise que celle dont dispose Arc-en-ciel”.
Les élus d’Arc-en-ciel bénéficient d’une prise en charge directe de leurs frais de déplacement
En outre, outre, la mission a pu constater à l’occasion d’un de ses déplacements que des élus Arc-en-ciel bénéficiaient “d’une prise en charge directe de leurs frais de déplacement auprès de leur directeur d’établissement alors qu’en principe, c’est le système de l’avance de frais qui s’applique, y compris aux élus du CSE d’autres organisations syndicales”.
À tout le moins, enchaînent les deux inspections, “un effort de transparence permettant à chaque organisation de vérifier que les pratiques sont les mêmes pour toutes serait de nature à réduire le sentiment d’inégalité de traitement exprimé par certains élus”.
Le rapport s’attache aussi à décrire de façon critique la centralisation et les moyens des instances représentatives du personnel, comme nous le relevions dès le 1er février 2022.
Un CSE unique à la main du syndicat majoritaire
Grâce aux ordonnances de 2017, Orpea a pu mettre en place un CSE unique pour l’ensemble de l’activité France, avec une commission de santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) unique elle aussi, “alors même que chacun des Ephad représente un lieu de travail complexe et accidentogène et qu’il aurait pu à tout le moins être prévu une commission par la direction régionale”. Un tel choix étonne la mission, selon laquelle cette centralisation limite par ailleurs les interactions entre l’inspection du travail et les salariés du groupe (lire notre encadré). Le rapport parle même d’une solution “extrêmement malthusienne pour une entreprise de cette taille” (220 établissements et 13 000 salariés).
L’affichage syndical est restreint au seul siège social
Les moyens du CSE en matière de crédit d’heures s’alignent sur le minimum réglementaire (34 heures/mois par élu), de même que le nombre d’élus (35 titulaires, dont seulement 11 pour la CGT, 6 pour l’UNSA et 4 pour la CFDT). Les 45 représentants de proximité prévus par l’accord de mise en place du CSE signé par Arc-en-ciel ne permettent pas d’avoir un moins un élu par Ephad. Ces représentants de proximité, quasiment tous Arc-en-ciel, donnent “au syndicat majoritaire une capacité de déploiement très supérieure à celle des organisations minoritaires”. En outre, depuis un accord de 2016, les possibilités d’affichage syndical sont restreintes au seul siège national (sic).
Les demandes d’expertise sont quasi-systématiquement refusées
Comme l’ont déjà dit publiquement la CGT, la CFDT et FO, la mission relève que les demandes des organisations syndicales minoritaires de faire intervenir des cabinets d’expertise de leur choix, “comme cela est la pratique courante”, sont “quasi-systématiquement refusées”. Quant aux réunions du CSE, la lecture des procès-verbaux montre que les échanges font peu de place “aux positions critiques des OS, en dépit de leurs demandes, et préservent a contrario un certain espace à la direction et aux positions syndicales lorsque celles-ci confortent cette dernière”. Comme, de surcroît, le rapport observe que la délégation de pouvoirs des directeurs d’exploitation doit s’exercer, au sujet des relations sociales, “en lien étroit avec le siège”, les deux inspections en finissent par conclure à une “volonté de maîtrise particulièrement forte du dialogue social”.
Une négociation d’entreprise “très peu dynamique”
Cette volonté de contrôler le dialogue social va de pair avec “une négociation d’entreprise très contrainte et très peu dynamique”, euphémise le rapport. En effet, “aucun agenda social n’est construit, encore moins discuté avec les organisations”. La situation dominante d’Arc-en-ciel au sein de l’entreprise (“aucune OS ne peut s’opposer à un accord signé par Arc-en-Ciel”) fait que les positions du syndicat maison sont donc “surdéterminantes dans la définition du contenu des droits sociaux des salariés d’Orpea”.
Un maigre bilan pour les accords collectifs
Problème pour les salariés : ce syndicat ne se montre guère revendicatif. Le rapport note que cette OS a signé des accords “conduisant à un affaiblissement notable des organisations syndicales, notamment minoritaires”. Sur le plan salarial, le syndicat maison limite ses revendications “à un 13eme mois” sans se montrer active lors des NAO (négociations annuelles obligatoires). Quant aux conditions de travail, Arc-en-ciel a accepté un accord excluant du temps du travail le temps d’habillage et de déshabillage. Surtout, l’organisation majoritaire centre son action sur les oeuvres sociales, avec par exemple un accès à un réseau national de crèches. Rare exemple de fruit conventionnel, l’accord d’intéressement, mais son montant (500€ à 750€), s’avère “très inférieur au benchmark des grandes groupes, en moyenne de 1 828€ selon la Dares”.
26 demandes d’autorisation de licenciements de salariés protégés en 2019
Selon le rapport, depuis 2018, l’inspection du travail a réalisé 313 interventions dans les établissements Orpea en France, dont 207 ont donné lieu à des observations écrites, 2 à des mises en demeure (égalité F/H et installations sanitaires), 88 à des décisions. Celles-ci concernent “essentiellement des demandes d’autorisation de licenciements de salariés protégés” avec pas moins de 26 demandes en 2019, 4 en 2020 et 2 en 2021. Détail donné par le rapport : “La répartition des motifs est la suivante : 13 pour motif “Inaptitude”, 9 pour “motif disciplinaire” et 10 ruptures conventionnelles. 4 refus ont été notifiés concernant des demandes pour motif disciplinaire. Ils concernent les établissements de Puteaux (siège social), Neuilly et Soubise (2 décisions). Deux de ces décisions ont fait l’objet d’un recours hiérarchique dont une a été confirmée et une annulée avec changement de sens (autorisation)”.
Bernard Domergue
L’ASS, l’ATA et l’AER revalorisées à compter du 1er avril 2022
Un décret du 6 avril 2022 revalorise, à compter du 1er avril 2022, l’allocation de solidarité spécifique (ASS), l’allocation temporaire d’attente (ATA) et l’allocation équivalent retraite (AER).
Le montant journalier de l’allocation de solidarité spécifique est fixé à 17,21 euros ;
Le montant journalier de l’allocation temporaire d’attente est fixé à 12,12 euros ;
Le montant journalier de l’allocation équivalent retraite est fixé à 37,20 euros.
Un second décret du 6 avril 2022 revalorise l’allocation de solidarité spécifique (ASS) à Mayotte. Le montant journalier de l’allocation de solidarité spécifique à Mayotte est fixé à 8,61 euros à compter du 1er avril 2022.
Métiers en tension : deux filières artisanales s’engagent à développer l’emploi et les compétences
Le ministère du Travail a conclu, le 30 mars, deux chartes de développement de l’emploi et des compétences dans les secteurs de la boucherie-charcuterie artisanale et de la boulangerie-pâtisserie artisanale. Objectif : répondre aux besoins de recrutement de ces filières tout en renforçant leur attractivité, “confrontées depuis plusieurs années à des difficultés de recrutement”.
Concrètement, après un travail d’identification des besoins en emplois, l’Etat et les représentants de ces secteurs s’engagent à :
Développer l’orientation des jeunes et des adultes vers ces secteurs, en menant des actions de sensibilisation en lien avec les opérateurs du service public de l’emploi ;
Accompagner les entreprises et leurs salariés dans la mise en place de mesures en faveur de l’attractivité des métiers, notamment en améliorant les conditions de travail ;
Faciliter, accompagner les recrutements et agir sur la qualité de l’emploi, en renforçant les liens des entreprises du secteur avec Pôle emploi et les missions locales ;
Développer les compétences et contribuer à la construction de parcours de formation, en renforçant le recours à l’apprentissage et en modernisant l’offre de formation.
Cette démarche s’inscrit dans le cadre du chantier sur les métiers en tension défini par l'”agenda social” proposé par le Premier ministre aux partenaires sociaux en 2020.
actuEL CE
Rupture conventionnelle : le recours au téléservice désormais obligatoire
Les conditions de dépôt à l’administration de la demande d’homologation de la rupture conventionnelle individuelle ont été modifiées. Depuis le 1er avril 2022, les employeurs doivent utiliser le téléservice.
L’employeur et le salarié peuvent décider en commun de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée en concluant une convention soumise à une homologation administrative. La partie la plus diligente adresse la demande d’homologation à la Dreets (direction régionale du travail et de l’emploi) compétente. Auparavant, les parties à la convention de rupture pouvaient, au choix, utiliser le téléservice “TéléRC” ou transmettre à l’administration un formulaire type valant convention (Cerfa n° 14598*01).
► Les conventions de rupture conclues avec dessalariés protégésne sont pas concernées par le téléservice compte tenu de la spécificité de la procédure d’autorisation par l’inspection du travail (article L.1237-15 du code du travail).
Le décret du 13 décembre 2021 rend l’utilisation du téléservice “TéléRC” obligatoire pour effectuer la demande d’homologation de la convention de rupture auprès de la Dreets. Par exception, lorsqu’une partie à la convention indique à la Dreets compétente ne pas être en mesure d’utiliser le téléservice, elle peut effectuer sa démarche par le dépôt d’un formulaire.
Ces mesures s’appliquent aux demandes d’homologation présentées à compter du 1er avril 2022.
►L’utilisation de “TéléRC” présente de nombreux avantages. Elle permet à l’employeur de s’assurer que les champs obligatoires du formulaire ont bien été renseignés, que les délais légaux sont respectés et que l’indemnité de rupture est au moins égale au minimum légal. Selon le ministère du travail, ces contrôles permettent de limiter les risques d’irrecevabilité ou de refus d’homologation de la demande lors de l’instruction par la Dreets.
actuEL CE
Rupture irrégulière d’un contrat d’apprentissage : les congés payés sont dûs
Si le contrat d’apprentissage peut être rompu sans motif durant ses 45 premiers jours d’exécution en entreprise, les possibilités de rupture sont très restreintes au-delà.
Les contrats conclus jusqu’au 31 décembre 2018 pouvaient être rompus par accord entre les parties ou décision du juge, ceux conclus après cette date pouvant l’être par accord entre les parties ou par décision unilatérale de l’une d’elles (démission de l’apprenti ou licenciement pour faute grave, force majeure, inaptitude ou exclusion définitive du centre de formation).
Hors de ces cas, la rupture est nulle, donc sans effet : l’employeur doit verser à l’apprenti les salaires qui auraient dû lui être versés jusqu’au terme du contrat d’apprentissage. Et, précision intéressante apportée par un arrêt du 16 mars dernier, il doit aussi lui verser l’indemnité relative aux congés payés afférents.
actuEL CE
[Veille JO] Les textes parus cette semaine : Covid-19, restauration collective, formation, santé, plateformes
Nous vous proposons un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) cette semaine, c’est-à-dire du vendredi 1er avril au jeudi 7 avril inclus, susceptibles de vous intéresser, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous ne parlons pas ici des très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, ce domaine étant couvert par notre baromètre des branches (lire le dernier baromètre) que vous retrouvez une fois par mois dans nos colonnes.
Covid-19
Un décret du 4 avril 2022 institue une aide « coûts fixes consolidation association » visant à compenser les charges fixes non couvertes des entreprises sous forme associative dont l’activité est particulièrement affectée par l’épidémie de covid-19.
Un décret du 4 avril 2022 institue une aide « coûts fixes rebond association » visant à compenser les coûts fixes non couverts des entreprises sous forme associative dont l’activité est particulièrement affectée par l’épidémie de covid-19.
Un décret du 5 avril 2022 précise la prolongation des adaptations temporaires exceptionnelles du dispositif de soutien à l’emploi du plateau artistique de spectacles vivants diffusés dans des salles de petite jauge et de l’aide unique à l’embauche dans le spectacle.
Droits des salariés
Un décret du 4 avril 2022 définit les modalités de l’expérimentation de solutions de réservation de repas en restauration collective.
Environnement / Développement durable
Déclaration de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) pour une directive ambitieuse de l’Union européenne sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de droits de l’Homme et d’environnement dans les chaînes de valeur mondiales.
Fonction publique
Un accord fixe la mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique.
Un décret du 1er avril 2022 précise la réalisation par l’Imprimerie nationale de documents relevant des ministères sociaux.
Une décision du 5 avril 2022 fixe les parts respectives de femmes et d’hommes composant les effectifs pris en compte pour la détermination du nombre de représentants du personnel au sein du comité social d’administration de proximité de l’Autorité de la concurrence.
Une décision du 8 mars 2022 porte création à l’Autorité de la concurrence d’un comité social d’administration de proximité.
Formation
Une décision du 10 mars 2022 porte enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles et au répertoire spécifique.
Un décret du 4 avril 2022 précise la revalorisation de la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle.
Un arrêté du 31 mars 2022 porte prorogation du titre professionnel de technicien de maintenance d’engins et de matériels de chantier et de manutention.
Nominations
Un arrêté du 24 mars 2022 modifie l’arrêté du 4 octobre 2019 portant nomination des membres des comités techniques nationaux de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles des salariés agricoles.
Un décret du 1er avril 2022 porte nomination de la directrice des ressources humaines, par intérim, au secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales (Mme Marie-Françoise Lemaitre).
Un arrêté du 1er avril 2022 porte nomination à la commission spécialisée relative aux questions transversales, aux acteurs de la prévention en entreprise, aux études et à la recherche du conseil d’orientation des conditions de travail.
Un arrêté du 1er avril 2022 porte nomination à la commission générale du Conseil d’orientation des conditions de travail.
Un décret du 6 avril 2022 revalorise l’allocation de solidarité spécifique, l’allocation temporaire d’attente et l’allocation équivalent retraite.
Santé et sécurité
Un décret du 5 avril 2022 précise le cahier des charges du déploiement et du fonctionnement du portail numérique de conservation du document unique d’évaluation des risques professionnels et aux statuts de l’organisme gestionnaire du portail.
Travailleurs des plateformes
Un décret du 4 avril 2022 est pris pour l’application de l’article 114 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (“verdissement des plateformes”).
Une ordonnance du 6 avril 2022 renforce l’autonomie des travailleurs indépendants des plateformes de mobilité, porte organisation du dialogue social de secteur et complète les missions de l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi.
Ukraine
Un décret du 5 avril 2022 institue une aide pour les entreprises du secteur des travaux publics particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la guerre en Ukraine.
actuEL CE
Handicap : la DOETH 2022 est exigible le 5 ou 16 mai 2022
L’Urssaf rappelle que la DOETH (déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés) annuelle doit être réalisée sur la DSN d’avril, exigible le 5 ou 16 mai 2022.
À cet effet, l’Urssaf a communiqué mi-mars :
l’effectif d’assujettissement à l’OETH ;
le nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (BOETH) devant être employés ;
l’effectif des bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (BOETH) employés ;
l’effectif de salariés relevant d’un Ecap (emploi exigeant des conditions d’aptitudes particulières).
L’Urssaf rappelle sur son site Internet que la déclaration annuelle au titre de 2021 doit avoir lieu via la DSN d’avril 2022, qui sera exigible le 5 ou 16 mai 2022.
Il en est de même pour le paiement de la contribution, devant être versée en cas de non-respect de l’obligation d’emploi (employer au moins 6 % de personnes handicapées dans les entreprises d’au moins 20 salariés). Celui-ci doit être réalisé sur la DSN d’avril 2022, exigible le 5 ou 16 mai 2022.
La Cour de cassation juge pour la première fois qu’après la clôture des opérations de vote, seul le juge saisi d’une contestation des élections peut accéder aux listes d’émargement et les contrôler. Elle précise aussi que dans le cadre d’un scrutin se déroulant sur plusieurs jours, les conditions d’ancienneté pour être électeur et éligible s’apprécient à la date du premier jour du scrutin.
L’ordonnance 2017-1386 du 22 septembre 2017 a autorisé le recours au vote électronique pour l’élection des représentants du personnel au comité social et économique (CSE). Un arrêt du 23 mars 2022 apporte des précisions inédites sur les personnes habilitées à accéder à la liste d’émargement, ainsi que sur la date d’appréciation de l’ancienneté des électeurs et des candidats aux élections du CSE en cas de vote électronique.
Après le scrutin, la liste d’émargement n’est accessible qu’au juge
Le décret 2017-1819 du 29 décembre 2017 et l’arrêté SOCT0751067A du 25 avril 2007 précisent les conditions de sécurité et de confidentialité dans lesquelles un vote électronique peut être valablement organisé. Un tel système de vote doit notamment pouvoir être scellé à l’ouverture et à la clôture du scrutin (C. trav. art. R 2314-8).
S’agissant plus particulièrement de la liste d’émargement, le Code du travail dispose qu’elle n’est accessible qu’aux membres du bureau de vote à des fins de contrôle de déroulement du scrutin (C. trav. art. R 2314-16) et qu’elle est conservée sous scellés par l’employeur ou le prestataire qu’il a retenu, jusqu’à l’expiration du délai de recours et, lorsqu’une action contentieuse a été engagée, jusqu’à la décision juridictionnelle devenue définitive (C. trav. art. R 2314-17). L’article 5 de l’arrêté du 25 avril 2007 ajoute qu’en cas de contestation des élections, les listes d’émargement sont tenues à la disposition du juge.
Après la clôture du scrutin, l’employeur peut refuser l’accès à la liste d’émargement
La Cour de cassation déduit de ces dispositions réglementaires, qui définissent strictement les conditions d’accès à la liste d’émargement en matière de vote électronique, que la liste d’émargement n’est accessible qu’aux membres du bureau de vote et, après la clôture du scrutin, qu’au juge saisi d’une éventuelle contestation des élections, à l’exclusion de toute autre personne, qu’il s’agisse d’électeurs, de candidats ou d’organisations syndicales ayant déposé des listes de candidats.
Elle approuve donc le tribunal judiciaire d’avoir rejeté la demande d’annulation des élections formée par le syndicat et le salarié requérants, qui reprochaient à l’employeur de ne pas leur avoir donné accès à la liste d’émargement après les opérations électorales et scellement des fichiers supports.
► Notons que, contrairement à ce que soutenaient les requérants, il n’existait pas de principe général du droit électoral conférant à tout électeur, candidat et organisation syndicale ayant déposé une liste de candidatures un droit d’accès à la liste d’émargement à la fin des opérations électorales.
Une partie intéressée peut toutefois demander au juge de la contrôler
Pour autant, la Cour de cassation ne prive pas les parties intéressées de tout recours en cas de doute sur le contenu d’une liste d’émargement et partant, sur la régularité des opérations électorales. En effet, elle déduit de l’arrêté du 25 avril 2007 et de l’article R. 2314-17 du Code du travail précités qu’elles peuvent, dans ce cas, demander l’intervention du juge après la clôture du scrutin. Elle juge en effet que, même si elles ne disposent pas d’un droit d’accès aux listes d’émargement, les parties intéressées peuvent, après la clôture du scrutin, contester judiciairement les élections et demander au juge que lesdites listes soient tenues à sa disposition afin qu’il procède à leur vérification.
► Remarquons que la Cour de cassation ne reprend pas à son compte l’objection soulevée par le tribunal judiciaire qui, pour refuser aux requérants l’accès à la liste d’émargement, s’était notamment appuyé sur le fait qu’aucun élément ne permettait de douter de la régularité des opérations de vote. En effet, dans son attendu de principe, la Haute Juridiction n’impose pas aux parties intéressées de motiver leur demande.
L’ancienneté pour être électeur et éligible s’apprécie à la date du premier jour du scrutin
Mais qu’en est-il en cas de recours au vote électronique se déroulant sur plusieurs jours ? Les conditions d’électorat et d’éligibilité doivent-elles être réunies dès le premier jour du scrutin ou à la date de clôture du premier tour des élections ?
Un protocole préélectoral optant pour la date de clôture du premier tour
En l’espèce, la réponse à cette question revêtait une importance particulière car elle déterminait l’éligibilité d’une candidate aux élections du CSE (1). En effet, au premier jour du scrutin la salariée concernée ne disposait pas d’une ancienneté suffisante, alors qu’à la date de clôture du premier tour du scrutin elle remplissait cette condition.
► Pour rappel, est éligible aux fonctions de membres du CSE le salarié ayant travaillé dans l’entreprise depuis au moins un an (C. trav. art. L 2314-19). En revanche, pour être électeur, il suffit que le salarié ait travaillé depuis au moins 3 mois dans l’entreprise (C. trav. art. L 2314-18).
C’est cette dernière date que le protocole préélectoral avait retenue pour apprécier la condition d’ancienneté des candidats aux élections. A tort, pour les requérants qui estimaient, au contraire, que la condition d’ancienneté devait être remplie par la salariée candidate dès le premier jour du scrutin, soit à une date à laquelle elle était susceptible de recueillir des voix sur son nom. Ils avaient donc sollicité du tribunal judiciaire l’annulation du premier tour du scrutin dans les collèges concernés en invoquant l’inéligibilité de la salariée élue, faute pour cette dernière de remplir la condition d’ancienneté requise au premier jour du scrutin.
Mais leur demande est rejetée par le tribunal judiciaire, qui valide la date retenue par le protocole préélectoral. Pour le premier juge, en effet, l’appréciation de l’ancienneté peut être fixée par le protocole préélectoral le dernier jour du scrutin dès lors que cette date favorise le principe de participation des salariés à la détermination collective des conditions de travail inscrit au préambule de la Constitution de 1946.
Il ajoute que si les élections avaient été annulées, l’employeur aurait été contraint d’en organiser de nouvelles et la salariée aurait largement disposé de l’ancienneté requise pour être éligible.
Son jugement est cassé, la Haute Juridiction considérant pour sa part qu’en cas de recours au vote électronique se déroulant sur plusieurs jours, les conditions d’ancienneté dans l’entreprise pour être électeur et éligible s’apprécient à la date du premier jour du scrutin. Elle indique que si un protocole préélectoral peut, par des dispositions plus favorables, déroger aux conditions d’ancienneté exigées par les articles L 2314-18 et L 2314-19 du Code du travail précités, il ne peut pas modifier la date d’appréciation de ces conditions.
► À notre avis. Ce faisant, la Cour de cassation ne semble plus privilégier l’intérêt du salarié, comme elle l’avait sous-entendu jusqu’à présent. En effet, dans les arrêts précités, elle avait refusé la prise en compte d’une autre date que celle du premier tour du scrutin pour éviter de « priver les salariés des droits électoraux qu’ils tiennent de la loi ». Or, en retenant que la condition d’ancienneté doit s’apprécier dès le premier jour du scrutin, elle prive de ces mêmes droits des salariés qui ne justifieraient pas d’une ancienneté suffisante à cette date. Bien que la Cour de cassation ait pris position sur la condition d’ancienneté, il nous semble que sa décision est transposable aux autres conditions d’électorat et d’éligibilité posées par les articles L 2314-18 et L 2314-19 du Code du travail.
1.Après la clôture du scrutin, il appartient aux parties intéressées de demander au juge, en cas de contestation des élections, que les listes d’émargement soient tenues à sa disposition. Dès lors, un tribunal qui n’est saisi d’aucune demande de vérification des listes d’émargement doit rejeter la demande d’annulation des élections formée par un syndicat et un salarié requérant reprochant à l’employeur de leur avoir opposé un refus à leur demande d’accès à la liste d’émargement, un tel refus étant justifié au regard des conditions réglementées d’accès à cette liste en matière de vote électronique. 2. En cas de recours à un vote électronique se déroulant sur plusieurs jours, les conditions d’ancienneté dans l’entreprise pour être électeur et éligible s’apprécient à la date du premier jour du scrutin. Si un protocole préélectoral peut, par des dispositions plus favorables, déroger aux conditions d’ancienneté exigées par le Code du travail, il ne peut modifier la date d’appréciation de ces conditions.
Elodie Expert
La mise en œuvre d’une réorganisation peut débuter avant l’homologation du PSE qui l’accompagne
L’employeur peut mettre en œuvre une réorganisation alors que le PSE qui l’accompagne n’a pas encore été homologué, dès lors que le CSE a été saisi en temps utile des projets de restructuration et de compression des effectifs.
Dans un arrêt du 23 mars 2022, la Cour de cassation se prononce sur le “timing” à respecter par l’employeur qui met en œuvre une réorganisation accompagnée d’un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi). Elle précise que la mise en œuvre de la réorganisation n’est pas subordonnée à la décision de validation ou d’homologation du PSE. Autrement dit, les mesures ainsi appliquées ne sont pas irrégulières dès lors que le CSE a été saisi en temps utile du projet.
Une dispense d’activité consécutive au refus d’une mutation
Une société envisage de se réorganiser en regroupant certaines de ces agences. Dans ce contexte, un salarié se voit proposer une mutation dans une autre agence. Suite à son refus, le 4 septembre 2015, l’employeur l’informe qu’il est mis à disposition de la société à son domicile, avec maintien de son salaire, à compter du 30 novembre 2015.
Entre la date de son refus de mutation et celle de son placement en dispense d’activité, l’employeur consulte, le 3 novembre 2015, le comité d’établissement (désormais CSE d’établissement) sur la procédure de licenciement collectif pour motif économique et élabore un PSE pour la vingtaine de salariés ayant refusé la modification de leur lieu de travail. Ce PSE est homologué par l’administration le 12 mai 2016.
Une dispense d’activité irrégulière
Le 17 juin 2016, le salarié est licencié pour motif économique après avoir refusé toutes les propositions de reclassement. Il saisit le conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Il soutient que son placement en dispense d’activité rémunérée, dans le cadre de la réorganisation, est irrégulier car intervenue alors que le PSE n’a pas encore été homologué.
La cour d’appel lui donne gain de cause. Elle estime que la “Note technique sur le projet de réorganisation et plan de sauvegarde de l’emploi” dont la version finale date du 21 avril 2016, ne peut être mise en œuvre avant le 12 mai 2016, date de son homologation par l’administration.
Elle prononce, par conséquent, la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur et le condamne à payer au salarié la somme de 35 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel né de la rupture de son contrat de travail.
Possibilité de mettre en œuvre la réorganisation sans attendre
La Cour de cassation censure l’analyse du juge d’appel. Se fondant sur les articles L. 1233-25, L. 1233-30 et L. 2323-31 (désormais art. L. 2312-39) du code du travail, elle considère que si le CSE doit être saisi en temps utile des projets de restructuration et de compression des effectifs, la réorganisation peut être mise en œuvre avant la date d’homologation du PSE par l’administration.
Les mesures ainsi prises ne sont pas irrégulières.
Karima Demri
Les employeurs en difficulté en raison du conflit en Ukraine peuvent reporter leurs cotisations
L’Urssaf propose un plan de résilience économique et sociale aux entreprises qui rencontrent des difficultés financières en raison du conflit en Ukraine.
Dans un communiqué diffusé sur son site le 1er avril 2022, l’Urssaf informe que les employeurs mis en difficultés par la hausse des prix de l’énergie ou la perte de débouchés à l’export, peuvent demander un délai de paiement de leurs cotisations sociales patronales pour les prochaines échéances.
A cet égard, les dispositifs déjà mis en place dans le cadre de l’épidémie de Covid-19 sont renforcés par le gouvernement, il est prévu que :
les employeurs qui auraient reçu un plan d’apurement peuvent en demander le report ou la renégociation auprès de leur Urssaf ;
les employeurs qui bénéficient déjà d’un plan d’apurement ou ont reçu une proposition de plan d’apurement de la part de l’Urssaf, peuvent en renégocier les modalités, et demander un démarrage différé de leur échéancier.
L’Urssaf met à disposition un guide et un flyer afin d’orienter les employeurs qui souhaiteraient bénéficier de ces mesures.
actuEL CE
[Présidentielle 2022] Stéphanie Dos Santos, secrétaire adjointe de CSE : “Avec l’instance unique, nous avons beaucoup perdu”
Secrétaire adjointe du CSE de l’Institut Gustave Roussy, qui emploie 3 900 personnes à Villejuif, près de Paris, Stéphanie Dos Santos estime que le comité social et économique (CSE) ne permet pas de traiter correctement les problèmes liés aux conditions de travail. “Nous étions 45 élus. Avec le CSE, nous ne sommes plus que 25”, déplore-t-elle en souhaitant le retour du CE, CHSCT et DP.
C’est lors du salon Eluceo du stade de France, le 9 mars à Saint-Denis (93), que nous avons rencontré plusieurs élues du CSE de l’Institut Gustave Roussy (1) , dont l’imposante silhouette domine la bretelle autoroutière au sud de Paris, à Villejuif (94). Comme de nombreux autres élus du personnel ayant connu les anciennes instances (2), la secrétaire adjointe du comité, élue CGT, ne mâche pas ses mots contre le comité social et économique, désormais unique instance représentative du personnel : “Nous avons beaucoup perdu avec le CSE”, dit-elle.
Perdu quoi ? D’une part, une instance autonome en matière de santé au travail, le CHSCT. Le comité d’hygiène, sécurité et conditions de travail a été remplacé par une commission santé et sécurité dont les moyens et les prérogatives lui paraissent trop limités, ce qui ne permet pas selon l’élue d’être efficacement au service du personnel, alors que les salariés “sont en souffrance”, comme “tous les personnels qui travaillent dans les hôpitaux”. D’autre part, le passage au CSE a fait perdre à la représentation du personnel des élus : le CSE ne compte plus que 25 élus titulaires, contre 45 du temps du CE. Stéphanie Dos Santos souhaiterait donc voir rétablies les anciennes instances : le comité d’entreprise, le CHSCT, les délégués du personnel (sur ce sujet, voir les propositions du Cercle Maurice Cohen).
Quand nous l’interrogeons ensuite, à l’occasion de cette série sur la présidentielle, sur les préoccupations du personnel dont elle aimerait voir les candidats se saisir, l’élue CGT répond pouvoir d’achat, “avec des salaires trop faibles”, mais aussi conditions de travail, “la pression subie au travail poussant de nombreuses personnes à changer de métier ..
(1) Etablissement de santé privé d’intérêt collectif (Espic) à but non lucratif, Gustave Roussy est le premier centre anti-cancer d’Europe.
Bernard Domergue
Élections professionnelles : panorama des décisions récentes (septembre 2021-janvier 2022)
Plusieurs arrêts rendus ces derniers mois apportent des précisions ou rappellent des règles relatives aux élections professionnelles. Notre tableau récapitulatif de jurisprudence.
Les élections professionnelles donnent lieu à de nombreuses décisions de jurisprudence. Certaines de ces solutions ne tranchent pas une incertitude ou n’élaborent une règle, mais rappellent le droit applicable, précisent certains cas particuliers ou encore fournissent des illustrations intéressantes. Nous vous présentons sous forme de tableau une sélection de ces arrêts du mois de septembre 2021 au mois de janvier 2022.
Pour chaque collège électoral, les listes de candidats qui comportent plusieurs candidats sont composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale (C. trav., art. L. 2314-30).
La liste syndicale présentant l’unique candidature d’un homme n’est pas conforme aux dispositions de l’article L. 2314-30 (Cass. soc., 5 janv. 2022, n° 20-17.227). ► Confirmation de jurisprudence Les dispositions de l’article L. 2314-30, éclairées par les travaux parlementaires, s’appliquent aux organisations syndicales qui doivent, au 1er tour pour lequel elles bénéficient du monopole de présentation des listes de candidats et, par suite, au second tour, constituer des listes qui respectent la représentation équilibrée des femmes et des hommes. Elles ne s’appliquent pas aux candidatures libres présentées au second tour des élections professionnelles (Cass. soc., 10nov. 2021, n° 20-17.306). ► Confirmation de jurisprudence
Liste incomplète
Une organisation syndicale est en droit de présenter une liste comportant moins de candidats que de sièges à pourvoir, dès lors que la liste respecte les prescriptions du code du travail relatives à proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré.
Lorsque la liste incomplète ne respecte pas la proportion respective des femmes et des hommes dans le collège considéré et rappelée dans le protocole préélectoral, cette irrégularité constatée entraîne l’annulation de l’élection du nombre d’élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidat du sexe surreprésenté en surnombre, et ce même si la candidate dont l’élection est annulée est la seule élue de la liste, ou si la parité est respectée au vu des résultats obtenus lors du scrutin (Cass. soc., 10 nov. 2021, n° 20-17.874). ► Confirmation de jurisprudence
Sanction
La constatation par le juge, après l’élection, du non respect par une liste de candidats de la proportion d’hommes et de femmes entraîne l’annulation de l’élection d’un nombre d’élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d’hommes que celle-ci devait respecter. Le juge annule l’élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l’ordre inverse de la liste des candidats (C. trav., art. L. 2314-32).
La sanction s’applique, peu important que la liste n’ait obtenu qu’un seul élu : l’élection de ce candidat du sexe surreprésenté doit être annulée (Cass. soc., 5 janv. 2022, n° 20-20.946). ► Confirmation de jurisprudence Les conflits existant au sein de l’entreprise qui auraient empêché les femmes de se présenter sur les listes d’un syndicat ne peuvent justifier le non-respect des règles de représentation équilibrée (Cass. soc., 22 sept. 2021, n° 20-16.556). ► Précision
Intérêt à agir
Une organisation syndicale qui a vocation à participer au processus électoral a nécessairement intérêt à agir en contestation de la régularité des élections (jurisprudence).
Une organisation syndicale qui a vocation à participer au processus électoral, a nécessairement intérêt à agir en contestation de la régularité de l’élection de membres élus du CSE, au regard des règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes instituées par les dispositions d’ordre public absolu de l’article L. 2314-30 du code du travail. Peu important qu’il n’y ait aucune conséquence sur la mise en place du CSE, le syndicat requérant étant majoritaire au sein de cette instance suite aux élections contestées (Cass. soc., 10 nov. 2021, n° 20-60.265).
► Précision
Vote électronique
Envoidesélémentsde vote
Pour se connecter sur place ou à distance au système de vote, l’électeur doit se faire connaître par le moyen d’authentification qui lui aura été transmis, selon des modalités garantissant sa confidentialité (Arr. 25 avr. 2007, NOR : SOCT0751067A, art. 6 : JO, 27 avr.).
Le léger retard dans l’envoi des éléments de vote n’avait eu aucune incidence sur le résultat de l’élection, faisant ainsi ressortir que les irrégularités relevées n’étaient pas déterminantes de la qualité représentative de la fédération dans l’établissement. Dans cette affaire, les courriers contenant les codes confidentiels et les professions de foi destinés aux salariés de l’entreprise avaient été postés le 13 novembre au lieu du 7 novembre précédent. Or, le tribunal a constaté d’une part que ces courriers étaient parvenus aux électeurs le 14 novembre, jour de l’ouverture du scrutin, ou le lendemain au plus tard, en sorte que le premier tour s’étant déroulé jusqu’au 21 novembre 2019, tous les salariés avaient été en mesure de voter, d’autre part que, le jour de l’ouverture du scrutin, des courriels avaient été adressés aux salariés leur permettant de récupérer leurs codes secrets (Cass. soc., 5 janv. 2022, n° 20-17.883). ► Illustration
Authentification
Des précautions suffisantes ont été prises lorsque la procédure de secours, détaillée dans le protocole préélectoral, précisait que l’électeur pouvait demander une réédition de son identifiant ou une régénération de son mot de passe en appelant un numéro vert ou via un formulaire en ligne, dont il fallait donner son nom, prénom et date de naissance mais aussi son lieu de naissance (donnée secrète) pour l’obtenir, et qu’en outre, la régénération d’un mot de passe avait automatiquement pour effet de rendre inutilisable le mot de passe précédent et qu’elle était enregistrée au sein du système de vote, avec mention du nom de l’électeur, de la date et de l’heure de l’envoi (Cass. soc., 24 nov. 2021, n° 20-17.073). ► Illustration
Séverine Baudouin
Paritarisme, syndicalisme, représentativité : les propositions CFE-CGC à la veille de l’élection présidentielle
Le document de 200 pages fait figure de profession de foi à quatre jours du scrutin. Intitulé « Restaurer la confiance », ce vaste programme couvre aussi bien la protection sociale, l’écologie et l’Europe que la réindustrialisation. Mais lors de sa conférence de presse, le président de la CFE-CGC François Hommeril a surtout évoqué les syndicats, le paritarisme et la représentation des salariés. Focus sur ses propositions en la matière.
“Le document a été envoyé aux candidats à la présidentielle, mais seule Nathalie Arthaud a répondu”, indique le président de la CFE-CGC. Il y a pourtant matière à réflexion dans l’épais volume donné à l’entrée de la conférence de presse de François Hommeril hier, mardi 5 avril, à Paris (synthèse en pièce jointe). Le chantier pharaonique de restaurer la confiance concerne en effet toutes les institutions sans excepter syndicats et représentants du personnel. A ce titre, une mesure phare du syndicat des cadres est remise sur la table : réserver aux seuls adhérents syndicaux les effets des accords collectifs.
Revoir l’effet “erga omnes” des accords collectifs
François Hommeril relève un paradoxe : “Aujourd’hui, se syndiquer est vu par l’employeur comme un acte hostile, mais signer un accord est positif. Sauf que pour cela, il faut des syndicats et des adhérents”. La CFE-CGC propose donc de réserver les effets des accords aux seuls adhérents syndicaux. Au contraire, dans le système actuel, les organisations syndicales et patronales négocient pour l’ensemble des salariés de la branche. Les conventions collectives s’appliquent à tous les salariés et employeurs entrant dans son champ d’application (une fois publié l’arrêté d’extension), et non aux seuls membres des syndicats signataires. C’est l’effet « erga omnes » des accords collectifs (en français “à l’égard de tous”), par opposition à l’effet “inter partes” qui ne s’applique qu’aux parties à l’accord.
Pour le syndicat des cadres, ce système “désincite les salariés à se syndiquer”. Réserver les effets des accords aux seuls adhérents permettrait donc de revitaliser les syndicats, d’élargir leur base d’adhérents et de renouveler les équipes. Une forme de lutte aussi contre la discrimination quand les salariés craignent les foudres de l’employeur. En 2019, le 12ème baromètre du Défenseur des droits a en effet établi que la peur des représailles de la part de la direction est le facteur qui dissuade le plus les salariés de s’engager dans une activité syndicale.
Quant à la question de la constitutionnalité d’une telle mesure, François Hommeril affirme : “Ce n’est pas mon problème. On me dit depuis cinquante mille ans que les syndicats n’ont pas beaucoup d’adhérents. C’est vrai, mais on a quand même un problème avec la discrimination syndicale. Si on veut une représentativité impliquant la capacité des acteurs à s’engager dans la négociation, il faut aller jusqu’au bout et réserver l’effet des accords aux adhérents. Que les gens fassent leurs choix !”. Et comme toutes les propositions “s’emboîtent comme des poupées”, cette mesure est à relier à la revalorisation des parcours syndicaux.
Sauver le soldat paritarisme
“Le paritarisme constitue une voie de régulation autonome entre le ‘tout Etat’ et le ‘tout marché’, indique la CFE-CGC en introduction de la partie consacrée à la confiance dans le paritarisme. « Le dispositif a fait ses preuves, ajoute François Hommeril, et nous sommes prêts à nous y engager”. Mais le président relève qu’il faut une représentation concrète du terrain. La pique vise le Medef “qui décide de tout alors qu’il ne représente pas l’ensemble de l’économie. Ses positions sont guidées par les multinationales, un champ qui n’est pas appelé à se développer et qui met sous pression toute la chaîne de valeurs”. Et le président de la CFE-CGC d’appeler à un rééquilibrage du système de représentativité patronale. Celui-ci n’a fait l’objet d’aucune étude universitaire, indique le document de propositions. C’est même “un angle mort” des travaux sur la négociation collective, “un entre-soi gangréné par des guerres intestines”. Le ton est donné. Pour la CFE-CGC, le Medef bénéficie d’un système qui favorisent les entreprises à fort effectif salarié, alors qu’il a le nombre le plus faible d’entreprises adhérentes comparé aux autres syndicats patronaux. “Cela nuit au dialogue national interprofessionnel et de branche”, constate la CFE-CGC qui veut une meilleure représentation des petites entreprises et relancer le débat public à ce sujet.
Côté salarié, pour sauver le soldat paritarisme, il faut aussi que les acteurs se connaissent et se reconnaissent. Un chantier qui passe selon François Hommeril par la reconnaissance et la valorisation des parcours syndicaux. Il soulève aussi la baisse des moyens liés aux mandats causée par les différentes évolutions législatives depuis vingt ans. Un constat qui concerne aussi les élus de CSE.
Réforme du CSE : plutôt une réflexion sur les moyens qu’un retour en arrière
Sur le sujet des élus du CSE, la CFE-CGC s’inquiète d’un appauvrissement des instances représentatives du personnel (IRP). Son document rappelle qu’elle “a toujours dénoncé les dangers de la fusion des IRP”. Préconise-t-elle pour autant le retour aux anciennes instances (CE, DP, CHSCT) ? “J’ai peu d’espoir sur le sujet, répond François Hommeril. La responsabilité serait de reconnaître que cela ne fonctionne pas, c’est le constat de tous ceux qui se sont penchés sur le CSE. Le législateur avait une volonté idéologique qui ne correspond pas à l’expérience du terrain. Le CSE correspond à une vision minimaliste voire méprisante du rôle d’élu à qui on assigne des missions qui ne peuvent être remplies de façon correcte”.
François Hommeril penche donc plutôt pour un renforcement de la formation des élus et un travail sur les représentants de proximité. “Cela prendra du temps, reconnaît-il, il faudra travailler petit à petit pour revenir à une représentation des salariés plus équilibrée”.
► Un replay de la conférence de presse est disponible sur YouTube
François Hommeril : “Le sujet des retraites nous appartient”
Le président de la CFE-CGC réagit aussi aux projets de réforme des retraites qui émergent des programmes des candidats à l’élection présidentielle, en partant d’un constat simple : “J’essaie d’objectiver les choses à partir des rapports du Conseil d’orientation des retraites (COR). Il faut certes prendre ses avis avec prudence car les prospectives sont toujours chamboulées par les crises économiques et démographiques. (…) On voit arriver la fin du papy-boom, il n’y a donc pas de menace aujourd’hui sur les retraites, les réserves ont augmenté de trois milliards d’euros”. Aucune inquiétude économique donc. François Hommeril ne relâche pas la pression pour autant, peut-être en prévision de futurs conflits sociaux : “Le sujet des retraites nous appartient. Il doit être mis à l’abri de toutes les tendances idéologiques. C’est un sujet que nous maîtrisons très bien et on ne laissera pas passer les balivernes”. A bon entendeur…
Marie-Aude Grimont
Emmanuel Macron envisage de modifier le conseil d’entreprise pour le rendre plus attractif
Devant l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis), les deux représentants du candidat Emmanuel Macron, Anne de Bayser et Pierre Bouillon, ont répondu hier aux questions de la presse sur le programme du président sortant, les retraites et l’emploi étant au centre des débats. S’il était élu, Emmanuel Macron pourrait modifier le cadre du conseil d’entreprise pour le rendre plus attractif.
Que signifie la petite phrase sibylline du programme d’Emmanuel Macron évoquant “la poursuite de la modernisation du code du travail ?” Pierre Bouillon, chef du pôle idées de la LREM (La République en Marche, le parti du président sortant), a donné devant les journalistes de l’Ajis un début de réponse : “L’idée, c’est d’aller plus loin que les ordonnances de 2017, en renforçant le rôle des salariés dans les conseils d’administration, et en facilitant le développement du conseil d’entreprise”. Rappelons que le conseil d’entreprise permet à une entreprise de mêler dans une même instance les consultations prévues pour le CSE et la compétence de négociation (en lieu et place du délégué syndical), le conseil d’entreprise étant doté, en contrepartie, d’un avis conforme de l’instance au moins sur le sujet de la formation professionnelle.
De nouveaux textes en vue
C’est, pourrait-on dire, une simplification supplémentaire des instances représentatives du personnel (IRP) seulement accessible par voie contractuelle. Mais cette possibilité offerte aux entreprises, parfois présentée en 2017 et 2018 par l’exécutif comme l’évolution souhaitable de la représentation du personnel et de la négociation en entreprise, n’a guère été utilisée. On estime le nombre de conseils d’entreprise à seulement une vingtaine, avec des dispositions peu innovantes selon certains experts de la négociation collective.
Des nouveautés sur le conseil d’administration ?
Il faut donc s’attendre, en cas d’élection d’Emmanuel Macron, à des modifications du code du travail sur le conseil d’entreprise afin de le rendre plus attractif. Il en irait de même sur les représentants des salariés dans les conseils d’administration, mais il n’est pas évident que cela concerne les seuils déclenchant leur présente, ou le nombre des représentants des salariés dans les conseils d’administration. La réforme pourrait viser, comme le suggère par exemple l’association RDS (lire leur tribune dans cette même édition), une amélioration du statut des salariés qui siègent dans les CA. Reste que l’entourage du candidat refuse d’être plus précis sur ces projets, comme si Emmanuel Macron entendait se ménager toutes les possibilités de réforme à venir au sujet du dialogue social et des IRP.
Mais le sujet essentiel des échanges de la presse sociale avec les représentants d’Emmanuel Macron a touché hier aux retraites, à l’insertion et à l’emploi.
Retraites : 65 ans, avec prise en compte de la pénibilité
Oui, Emmanuel Macron veut à nouveau réformer les retraites, et cette fois en relevant l’âge de départ à 65 ans. “Comment financer des projets ambitieux et humanistes ? Nous ne voulons pas augmenter les impôts, ni baisser les pensions des retraites, nous pensons qu’il y a une capacité collective à travailler davantage et plus longtemps”, justifie Anne de Bayser, une haute fonctionnaire qui a été secrétaire adjointe de l’Elysée de 2017 à octobre 2020 et qui anime aujourd’hui le groupe des relais de la société civile de la campagne d’Emmanuel Macron.
Ce ne sera pas un copier-coller du précédent projet de réforme des retraites
Le relèvement à 65 ans, si l’on comprend bien, ne sera donc pas négociable. En revanche, la représentante du candidat estime que les questions de la pénibilité, des carrières longues et du maintien en emploi des séniors seront abordées dans la future concertation qui devrait s’ouvrir rapidement en cas de victoire d’Emmanuel Macron. Mais attention, “on ne veut pas recréer de régimes spéciaux ni une usine à gaz”. Irait-on vers trois grands régimes ? “On en discutera pour trouver le régime le plus juste et le plus lisible possible. Le précédent projet de réforme était ambitieux et cohérent mais n’était pas suffisamment simple pour convaincre malgré, on l’a oublié, de très nombreuses concertations autour de Jean-Paul Delevoye. Nous ne ferons donc pas un copier-coller du précédent projet de réforme”, prévient Anne de Bayser.
Cette dernière défend la cohérence du programme du président sortant, en reliant la réforme des retraites au projet d’une généralisation du compte épargne temps et d’une amélioration du cumul emploi retraite, deux éléments qui permettraient à ses yeux de faciliter la formation tout au long de la vie et donc le maintien dans l’emploi des séniors. Sur les retraites, avec cette affiche d’une mesure d’âge non négociable, ne risque-t-on de voir la France renouer avec grèves et manifestation ? “Les discussions seront sans doute franches et difficiles, mais sur une question aussi importante, je n’imagine pas qu’on n’ait pas autour de la table tous les partenaires sociaux”, répond Anne de Bayser.
L’insertion en emploi
Sur l’insertion et l’emploi, l’ancienne secrétaire générale de l’Elysée a défendu le projet du candidat au sujet du RSA, qui consiste à demander aux bénéficiaires de travailler 15 heures à 20 heures par semaine “pour une activité permettant d’aller vers l’insertion professionnelle”.
30% des personnes qui ont droit au RSA ne le perçoivent pas
Cette proposition a suscité un véritable tollé à gauche. Un tollé injustifié selon l’entourage d’Emmanuel Macron. “On a tout entendu, comme : “Vous voulez obliger les gens à travailler sans les payer !” Mais le vrai scandale, quand on parle de pauvreté, c’est plutôt de constater que dans certains territoires, les bénéficiaires du RSA ne sont jamais accompagnés et peuvent rester au RSA pendant des années. Nous, nous pensons que personne n’est inemployable et que tout le monde peut s’insérer dans un emploi, même si cela demande du temps et des étapes. Le premier droit de ces personnes, c’est l’accompagnement, leur devoir c’est de s’inscrire dans cette démarche d’insertion”, argumente Anne de Bayser.
Pierre Bouillon ajoute que cette réforme du RSA comprendra un versement à la source du revenu social : “C’est un très grand chantier, ça peut réduire le taux de non-recours aux aides, qui est de 30% pour le RSA”.
France Travail
Que recouvrera France Travail, un des projets importants du président sortant ? “France Travail rassemblera l’ensemble des opérateurs qui agissent en matière d’emploi et de formation, avec une déclinaison territoriale. Cela suppose donc des discussions approfondies avec les collectivités territoriales pour trouver le bon niveau d’échelle. L’idée est de mieux accompagner les demandeurs d’emplois”, avance prudemment la représentante du candidat. Pour autant, même si le candidat LREM envisage de faire varier les conditions d’indemnisation en fonction de la conjoncture (durcissement du régime en cas de croissance, assouplissement en cas de difficultés), il ne semble pas envisager de déposséder totalement les partenaires sociaux de la gestion de l’assurance chômage : “Je ne suis pas sûre qu’on gagnerait en efficacité avec un système totalement centralisé”.
Avec le véhicule électrique, le “plein” coûtera 4 à 5 fois moins cher !
Au sujet du pouvoir d’achat, les représentants d’Emmanuel Macron ont d’abord vanté la politique du gouvernement : “La lutte contre la vie chère, ce sont des mots anciens qui reviennent, mais c’est aussi l’action quotidienne du gouvernement. Certes nous avons une inflation, mais elle est en France deux fois moins forte que dans d’autres pays européens”. Ils ont ensuite souligné la promesse de triplement (jusqu’à 6 000€) de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, une prime défiscalisée que les entreprises peuvent décider ou pas de mettre en œuvre, promesse qui s’accompagne d’un projet de renforcement des dispositifs de partage de la valeur et d’un coup de pouce pour la transition climatique. “Le vrai levier face à l’augmentation des prix de l’essence, c’est la transition vers le véhicule électrique avec un prix de location inférieur à 100€ par mois. Un « plein d’électricité », c’est 4 à 5 fois moins cher qu’un plein de carburant”, assure Pierre Bouillon.
Enfin, il semble que le président sortant, s’il est réélu, soit décidé à prolonger les aides à l’apprentissage et à poursuivre l’effort de formation sur les métiers en tension.
Bernard Domergue
Le rôle du CSE dans l’accueil de la petite enfance
Le CSE peut-il soutenir les salariés qui viennent de devenir parents ? La question se pose dans un contexte tendu sur l’accueil de la petite enfance : selon Pascale Coton, qui vient de publier un avis du CESE sur le sujet, quatre enfants sur dix ne trouvent pas de place en crèche…
L’avis du CESE (conseil économique, social et environnemental) a été commandé par le Premier ministre Jean Castex (avis et synthèse en pièces jointes). Ses préconisations risquent de ne pas se concrétiser avant la mise en place du prochain gouvernement, mais les chiffres qu’il évoque sont inquiétants. Les structures d’accueil de la petite enfance proposent actuellement 59,8 places pour 100 enfants. Un manque de disponibilité chronique, installé au fil du temps et que les différents plans n’ont pas enrayé.
Pire encore selon la note de synthèse, “de véritables inégalités sociales sont observées aujourd’hui entre les parents dans l’accès à l’offre d’accueil. Elles sont renforcées par un système insuffisamment transparent et lisible”. Selon Pascale Coton, vice-présidente de la CFTC et co-rapporteure de cet avis (1), les comités sociaux et économiques, les CSE, ont aussi un rôle à jouer. Derrière chaque enfant se trouvent des parents parfois salariés qui ont besoin de sérénité.
Horaires, congés, intégration des femmes au travail
Outre les bons d’achats et cadeaux de Noël, le CSE peut jouer un rôle dans l’accueil des nouveau-nés. “Les élus peuvent faire remonter les besoins des parents de décaler leurs horaires”, explique Pascale Coton. Arriver plus tard au travail pour déposer son enfant à la crèche ou chez l’assistante maternelle peut en effet permettre aux salariés jeunes parents de commencer plus facilement la journée de travail. C’est plus de sérénité à son poste et donc, des salariés plus impliqués au travail à la clé.
Autre action des élus du CSE qui concerne les grandes entreprises : peser pour la réservation de places en crèche directement par l’employeur pour les salariés. Grâce aux crèches interentreprises, les salariés sont ainsi soulagés de la gestion du mode de garde de leur enfant. Avantage pour l’employeur : il peut ainsi bénéficier d’abattements fiscaux.
Les élus ont également leur rôle à jouer sur l’intégration de la salariée enceinte et la réintégration de la salariée de retour de congé maternité. Pascale Coton recommande une articulation des congés maternité, paternité et parental afin de couvrir (sans perte de salaire ni de cotisation) la première année de vie de l’enfant, une période cruciale pour son développement. Des points à aborder par exemple lors de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise. Au-delà de ces conseils, l’avis du CESE formule 15 préconisations pour améliorer l’accueil des nouveau-nés en France.
Garantir le droit de l’enfant à être accueilli
Le CESE constate que le service public d’accueil de la petite enfance n’est tout simplement pas assuré en France. Y remédier passerait par la formation des professionnels de la petite enfance atteinte de handicaps ou de maladies, l’instauration de contrôles de qualité de l’accueil des enfants dans les structures ou encore le soutien des familles précaires. Donner leur place aux communes comme “chefs de file” de l’accueil des enfants, planifier et coordonner les instruments déjà existants, valoriser les métiers de la petite enfance semblent tout aussi indispensables que le financement de nouvelles structures d’accueil. Se pose également la question du reste à charge du mode de garde. L’avis du CESE préconise de revoir le calcul de la PAJE (prestation d’accueil du jeune enfant) et notamment sa composante “complément de libre choix”, une prise en charge partielle du financement d’une assistance maternelle. En résumé, le chantier est vaste mais fondamental pour des raisons d’égalité territoriale et sociale.
Avec marie-Andrée Blanc, présidente de l’UNAF (Union nationale des associations familiales)
Marie-Aude Grimont
Emploi : 3 millions d’embauches anticipés en 2022 par les employeurs
Après deux années de crise sanitaire, l’optimisme regagne les entreprises. Elles anticipent plus de 3 millions d’embauche cette année, soit une augmentation de 12 % par rapport à 2021, selon l’enquête “Besoins de main-d’œuvre” réalisée par Pôle emploi et le Crédoc, publiée hier. Au total, ce sont 323 000 projets supplémentaires par rapport à 2021. “Un niveau inédit” indique l’opérateur public qui publie chaque année ce baromètre. Cette année, 420 000 établissements ont répondu.
Pôle emploi précise toutefois que ce sondage a été effectué fin 2021 ; “les conséquences encore inconnues de la guerre en Ukraine n’apparaissent donc pas dans ces projets de recrutement”.
Dans le détail, la dynamique est portée par les services aux particuliers (+ 11,3 %) et l’industrie (+23,8 %) notamment en raison de la hausse des projets dans la métallurgie et l’équipement électrique, électronique et informatique. La construction retrouve des couleurs avec 265 000 projets de recrutement, contre 218 000 en 2021.
Corollaire de cette hausse, les difficultés de recrutement s’envolent : en 2022, 57,9 % des projets d’embauche sont jugés difficiles par les employeurs, soit une augmentation de 13 points par rapport à 2021.