Archives de catégorie : Newsletter Actu Sociale N°50

NÉGOCIATION COLLECTIVE

Salaires conventionnnels : les syndicats de l’industrie pharmaceutique réclament à l’Etat de faire pression sur les employeurs

Les syndicats de la branche de l’industrie pharmaceutique, dans un communiqué publié vendredi 13 mai, sollicitent des pouvoirs publics qu’ils fassent pression sur les entreprises du secteur en vue d’une revalorisation de l’ensemble des salaires de la grille conventionnelle. Les organisations CFDT, CFE-CGC, UNSA, CGT, FO, CFTC disent avoir sollicité cette revalorisation en début d’année, dans le cadre de la clause de revoyure de l’accord de novembre 2021 sur les minimas conventionnels. Mais ils déporent n’avoir obtenu en retour de la part des entreprises du médicament que des propositions minimales : seul le premier des 11 groupes de la grille, soit 0,5 % des salariés de la branche, se verrait accorder 2,6% d’augmentation, les deux groupes suivants (représentant 13% des salariés de la branche) recevant une prime temporaire de 20 € brut par mois. “L’indécence de ces propositions non-négociables orchestre la paupérisation inéluctable des salariés mobilisés sans répit pour la santé de tous”, dénoncent les syndicats qui ont décidé de cesser les discussions et d’en appeler aux pouvoirs publics afin qu’ils rappellent “aux entreprises du médicament leur responsabilité sociale et sociétale”.

Le baromètre des branches d’avril 2022

Quelles ont été en avril 2022 les nouvelles dispositions applicables dans les branches professionnelles ? Notre tableau fait le point.

Grâce au travail de veille de l’équipe du Dictionnaire Permanent Conventions collectives des Éditions Législatives (Lefebvre Dalloz), société éditrice d’actuEL-CSE.fr, nous vous proposons chaque mois un rendez-vous thématique consacré aux branches professionnelles. Il n’est pas question pour nous d’être exhaustif sur ce sujet. Mais de vous signaler, au travers des arrêtés d’extension parus au Journal officiel qui rendent obligatoires des dispositions pour toutes les entreprises d’une branche, ainsi qu’au travers d’accords récents, quelques tendances dans l’activité conventionnelle.

Ce baromètre nous paraît d’autant plus intéressant que la loi Travail, puis les ordonnances Macron, ont redéfini les possibilités de négociation données aux branches par rapport aux niveaux de la loi et de la négociation d’entreprise. En outre, une vaste opération de fusion des branches existantes est en cours, le gouvernement souhaitant en réduire fortement le nombre.

  Baromètre des branches : avril 2022  
Volume des textes parus au Journal officiel relatifs aux branches professionnelles  57 accords élargis/étendus, dont 22 au moins partiellement relatifs aux salaires, sont parus en mars 2022. Une fois étendus ou élargis, les accords et avenants deviennent obligatoires pour tous les employeurs, généralement le lendemain de la date de la publication de l’arrêté au Journal officiel.  Exemples d’accords ou avenants étendus ou agréés : – un texte relatif aux congés exceptionnels pour événements familiaux et congé de solidarité familiale signé dans la branche des entreprises artistiques et culturelles (IDCC 1285, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux congés de proche aidant et congé de solidarité familiale signé dans la branche des autoroutes (IDCC 2583, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux congés en cas de décès d’un enfant et congé de deuil signé dans la branche des entreprises artisanales de boulangerie-pâtisserie (IDCC 843, voir l’arrêté) ; – un texte relatif au nouveau régime de travail à temps partiel signé dans la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires (IDCC 1517, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à l’amélioration des congés exceptionnels pour événements familiaux signé dans la branche de la désinfection, désinsectisation, dératisation (IDCC 1605, voir l’arrêté) ; – un texte relatif au contrat de chantier ou d’opération signé dans la branche des ouvriers, ETAM et cadres de la métallurgie (accords nationaux) (IDCC 20306, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à l’agrément du versement des indemnités mensuelles “Laforcade 1” et “Ségur 2” signé dans la branche de la mutualité (IDCC 2128, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux congés en cas de décès d’un enfant et congé de deuil signé dans la branche de la pharmacie d’officine (IDCC 1996, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux durées de la période d’essai et du préavis dans les entreprises de conception-fabrication d’articles de sport, dans la branche des commerces des articles de sport et équipements de loisirs (IDCC 1557, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à la suppression des dispositions relatives à la rémunération des titulaires d’un contrat de professionnalisation signé dans la branche des commerces des articles de sport et équipements de loisirs (IDCC 1557, voir l’arrêté) ;  – un texte relatif au congé de paternité et d’accueil de l’enfant signé dans la branche des agences de voyage et de tourisme (IDCC 1710, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux nouvelles contreparties financières au travail du dimanche et des jours fériés et au travail de nuit signé dans la branche du transport ferroviaire et activités associées (IDCC 3217, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux conditions de mise en place du télétravail signé dans la branche de la distribution et commerce de gros de papiers-cartons (IDCC 3224, voir l’arrêté).  
Accords liés à la crise sanitaire du Coronavirus et à l’épizootie d’influenza aviaire    Des mesures exceptionnelles ont été prises pour faire face à l’épidémie de Coronavirus, notamment l’activité partielle de longue durée (APLD). Elle permet, sous réserve notamment de la conclusion d’un accord d’entreprise, d’établissement ou de branche étendu, de diminuer l’horaire de travail des salariés. Ces derniers perçoivent une indemnité plafonnée à 4,5 SMIC et fixée en pourcentage de leur rémunération brute.    Branche du travail temporaire (salariés intérimaires) :  accord du 15 avril 2022 applicable pour une durée de 24 mois à compter du lendemain de la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les engagements de l’employeur en matière d’emploi doivent porter sur l’absence de rupture anticipée du contrat en raison de difficultés économiques de l’entreprise utilisatrice au sein de laquelle les salariés sont mis à disposition.   Branche des industries de transformation de volailles : accord du 28 mars 2022 applicable à compter du lendemain de la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension et jusqu’au 30 juin 2025. L’employeur doit s’engager à encadrer les conditions de détermination des éléments de rémunération des mandataires sociaux de l’entreprise et des actionnaires proportionnellement aux efforts consentis pendant la période d’application du dispositif. Les engagements de l’employeur en matière d’emploi doivent porter sur l’absence de recours au licenciement économique pendant l’application du dispositif dans l’entreprise ou l’établissement. Cependant, cette interdiction ne s’applique pas lorsque le seul volet du PSE est un plan de départs volontaires ou en cas de ruptures conventionnelles collectives.  
  Abrogation de conventions collectives régionales au profit d’une CCN unique     Branche de la métallurgie : les conventions collectives régionales de Côte-d’Or (avenant du 18 mars 2022), de Savoie (avenant du 9 février 2022) et de Haute-Savoie (avenant du 4 mars 2022) sont abrogées. Les dispositions de la nouvelle convention collective nationale du 7 février 2022 (non encore étendue) s’appliqueront à compter du 1er janvier 2024.  
Contrat de chantier ou d’opération  Branche de la métallurgie (accords nationaux des ouvriers, ETAM, ingénieurs et cadres) : par un accord du 11 janvier 2022 applicable pour une durée de 3 ans à compter du 14 avril 2022, les partenaires sociaux prolongent la possibilité de recourir à titre expérimental au contrat de chantier ou d’opération.  
  Durée du travail     Branche de l’industrie des ciments : par avenant du 9 décembre 2021, les partenaires sociaux fixent le contingent annuel d’heures supplémentaires et prévoient une majoration de salaire en cas de travail le 1er mai.  
  Congés exceptionnels     Branche du négoce d’ameublement : par un accord du 10 décembre 2021, les partenaires sociaux créent un congé exceptionnel pour le salarié qui réalise des démarches en vue d’obtenir ou renouveler son statut de salarié en situation de handicap. Branche de l’industrie des ciments : par un avenant du 9 décembre 2021, les partenaires sociaux prévoient un congé en cas de décès d’un enfant et un congé de deuil.  Branche des commerces de gros d’habillement, mercerie, chaussure et jouet : par un accord du 3 février 2022, les partenaires sociaux créent un congé exceptionnel pour hospitalisation d’un enfant et un congé de proche aidant.  
  Primes Ségur 2 et Laforcade 1    Branche de la mutualité : par un accord du 15 décembre 2021, les partenaires sociaux prévoient une revalorisation salariale sous la forme d’une indemnité “Ségur 2” (accord applicable depuis le 1er janvier 2022) et d’une indemnité “Laforcade 1” (accord applicable depuis le 1er novembre 2021) au bénéfice de certains professionnels de santé.  

Marie-Aude Grimont, avec l’équipe du Dictionnaire permanent Conventions collectives

Les syndicats mitigés sur la nomination d’Elisabeth Borne

Tous reconnaissent sa parfaite connaissance des dossiers. Elisabeth Borne fait donc l’unanimité auprès des syndicats sur ce point. Ceux qui ont côtoyé de près la nouvelle Première ministre déplorent en revanche l’absence de réelle négociation, notamment sur le dossier houleux de l’assurance chômage.

Ministre des transports, de l’écologie puis du travail, Elisabeth Borne a finalement tracé sa route jusqu’à Matignon (1). Si sa nomination lundi soir par Emmanuel Macron a mis fin à plusieurs jours de rumeurs, elle a aussi déclenché de nombreuses réactions politiques dans l’opposition. Mais côté syndicats, on retient surtout une personne ouverte au dialogue social et qui connaît parfaitement le fonctionnement de l’Etat et les sujets sociaux.

Une compétence indéniable 

Les syndicats le reconnaissent : en contact avec Elisabeth Borne sur le chômage ou les retraites, tous ont constaté ses compétences. “Quand on discute de certains sujets, la conversation peut devenir technique et politique. Donc c’est pratique d’avoir en face de soi quelqu’un qui s’y connaît”, avance Michel Beaugas, secrétaire confédéral de Force Ouvrière. Cyril Chabanier ajoute “qu’elle nous donnait toujours des réponses. C’était oui ou c’était non, et ce n’était pas forcément ce que nous souhaitions, mais elle ne laissait pas les sujets en suspens”. Le président de la CFTC a également apprécié la double compétence de la nouvelle Première ministre sur le travail et l’écologie : “Il va falloir s’occuper de la transition écologique et sociale, et nous disons depuis longtemps à la CFTC que ce sont les deux faces d’une même pièce”.

Laurent Berger (CFDT) est en revanche resté très discret sur la nomination d’Elisabeth Borne. Interrogée sur la station de radio FranceInfo, Marylise Léon a refusé de commenter sa personnalité ni son style. Elle attend surtout de connaître la méthode. Les syndicats se montrent en revanche moins satisfaits des négociations qui ont eu lieu sur l’assurance chômage.

Des concertations mais pas de réelle négociation

“Avec Elisabeth Borne, l’espace de négociation était nul !”, affirme François Hommeril. Mais pour le leader de la CFE-CGC, “ce n’était pas forcément la volonté personnelle d’Elisabeth Borne, elle n’avait aucune marge de manoeuvre”. Il reconnaît également que sur le sujet de la dégressivité des allocations chômage des cadres, l’ancienne ministre du travail a écouté, respecté et compris ses positions. Il souhaite désormais “un nouvel espace de discussion où l’on puisse s’engager et des signes d’ouverture du gouvernement, sinon ce sera un échec”.

Eric Chevée, vice-président chargé des affaires sociales de la CPME admet quant à lui “des discussions loyales et transparentes, mais on ne négocie pas, on a tout juste une concertation”. Un point de vue partagé par Roger Dillenseger, ancien secrétaire général de l’UNSA Ferroviaire qui a traité avec Elisabeth Borne la réforme de la SNCF en 2017-2018 : “C’est une personne très rigoureuse, intransigeante voire coriace à la négociation. Elle a su parfaitement s’entourer dans ce dossier et elle connaissait très bien les transports. Nous avons beaucoup dialogué, concerté, mais nous n’avons jamais négocié”. Même sentiment chez Denis Gravouil, négociateur CGT de l’assurance chômage : “Elle n’a pas écouté une ligne de nos propositions d’amendements”.

Dans l’attente du nouveau ministre du travail

Les syndicats attendent désormais la formation du gouvernement au complet. Ils sont particulièrement impatients de connaître le nom du futur(e) ministre du travail. Si François Hommeril (CFE-CGC) souhaite bonne chance à Elisabeth Borne pour son “casting”, il espère que “la raison revienne au sujet des retraites car il ne faut pas mentir aux gens”. Michel Beaugas (FO) assure : “On travaillera avec tout le monde sur la base de nos propres revendications qui ne changent pas d’une personne à l’autre”. Cyril Chabanier (CFTC) attend aussi les noms des ministres de l’Economie et de la santé, “ceux avec lesquels on travaille le plus”. Eric Chevée (CPME) espère quant à lui un ou une ministre du travail qui ne soit pas DRH “car les DRH abordent les relations avec les entreprises sous l’angle des grands groupes. En revanche, un(e) ministre avec du poids politique peut davantage peser dans les arbitrages”.

La composition du gouvernement devrait être connue dans les prochains jours.

  • Hier, Elisabeth Borne a nommé Aurélien Rousseau directeur de son cabinet. Ancien directeur général de l’Agence régionale de santé d’Île-de-France, il a travaillé sur la loi Travail sous le quinquennat de François Hollande et exercé des missions à la mairie de Paris.

Marie-Aude Grimont

Négociations salariales : la CFE-CGC demande des clauses de revoyure obligatoires

Le syndicat des cadres a mené une enquête interne auprès de ses délégués syndicaux, négociateurs d’accords salariaux dans toutes tailles d’entreprises. Résultat : 75% des NAO (négociations annuelles obligatoires) se sont conclues par un accord. La qualité des négociations est donc jugée “globalement positive”. 63% des négociateurs CFE-CGC ont obtenu plus de 2% d’augmentation générale. Ils sont 54 % à trouver les salariés “attentifs” aux résultats des négociations. Un point noir cependant : bien qu’obligatoire depuis la loi Rebsamen, le thème du partage de la valeur n’est abordé que dans 36% des NAO. La CFE-CGC relance donc sa proposition de mettre sur pied un index à ce sujet. Enfin, le dialogue social lui semble “de qualité mais fragile”. Elle appelle donc à des clauses de revoyure obligatoires et automatiques “lorsque le SMIC subit deux augmentations dans la même année, comme cela est déjà le cas en 2022”. 

actuEL CE

FORMATION

France compétences dresse la liste de 28 métiers “émergents” en 2022

D’acheteur-vendeur marée à végétaliseur urbain, en passant par data engineer, plombier chauffagiste et préparateur en déconstruction, France compétences publie un guide de présentation des métiers en “particulière évolution ou en émergence” pour 2022.

Cette liste a été établie par la Commission de la certification professionnelle, suite à l’appel à contributions lancé en juin 2021, par France compétences à destination des branches et syndicats professionnels. Objectif ? “Identifier des métiers ayant été significativement modifiés dans leurs activités et/ou leurs compétences, de manière récente et drastique à tel point qu’une nouvelle offre de certification doit être créée pour permettre leur exercice”. Que ce soit dans le domaine de la transition énergétique, écologique, environnementale, de la transformation numérique, de la modernisation des réseaux et infrastructures des services à la personne ou encore dans le domaine de la relocalisation d’activités productives en France.

Les certifications visant ces métiers bénéficient d’une procédure simplifiée d’enregistrement au RNCP et au Répertoire spécifique “afin de s’adapter au mieux aux évolutions du monde du travail”.

actuEL CE

DROIT

Le montant cumulé des amendes infligés par la CNIL est «historique»

Une hausse de 55 % de contrôles, pas moins de 214 millions d’euros d’amendes cumulées : en 2021, l’activité répressive de la CNIL (commission nationale informatique et libertés) a explosé. Quels ont été les manquements les plus fréquemment relevés ? A quoi doivent s’attendre les entreprises cette année ? Retour sur les principaux enseignements tirés du rapport annuel de la Commission publié hier sur son site internet.

Un montant des sanctions record, une hausse des violations de données significative et des actions de contrôles adaptées à la crise sanitaire… Tels sont les enseignements forts à retenir du dernier rapport annuel de la CNIL (commission informatique et libertés) publié la semaine dernière.

253 plaintes concernent la vidéosurveillance

Le rapport traduit par ailleurs une activité répressive « record » de la Commission par rapport aux années passées.

Le nombre de plaintes est resté quasi stable (+4 % comparé à 2020). Dans le détail, de nombreuses plaintes ont concerné le droit d’accès par les personnes à leurs données et plus de 253 d’entre elles ont visé la vidéosurveillance mise en œuvre par des particuliers.

L’activité de contrôle est restée soutenue : 384 contrôles ont été réalisés en 2021 (contrôles physiques et en ligne confondus) ce qui représente une hausse de 55 % par rapport à 2020 et de 28 % par rapport à 2019.

Forcément, la crise sanitaire a conduit la CNIL à adapter ses pratiques, notamment concernant les opérations de contrôle sur place, qui « ont été réduites au strict nécessaire ». Les contrôles sur place ont néanmoins augmenté durant les phases de recul de l’épidémie (+ 64 % par rapport à l’année 2020) et les auditions également (+ 47 %).

Les contrôles en ligne ont aussi augmenté très significativement (+ 110%), notamment en raison des vagues de contrôles « au périmètre limité (cookies et autres traceurs, cybersécurité des sites web) ».

Sanctions : tous les secteurs d’activités visés

Les ressources de la CNIL ont par ailleurs été « fortement mobilisées » par les contrôles des traitements liés à la vaccination ou au contrôle des passes sanitaires (29 contrôles en 2021).

Ces contrôles ont donné lieu à 135 mises en demeure, 45 rappels à l’ordre et 18 sanctions prononcées dont 15 amendes. Fait marquant de l’année : le montant cumulé des amendes prononcées, qui est « historique » en dépassant les 214 millions d’euros.

Les entreprises doivent donc être vigilantes : la CNIL n’hésite désormais plus à sanctionner les contrevenants de manière exemplaire. « Tous les secteurs d’activités et des catégories d’acteurs divers » ont été visés, souligne le rapport.

Manquements fréquents

Quels ont été les manquements les plus fréquemment sanctionnés ?

  • le défaut d’information des personnes,
  • des durées de conservation excessives,
  • un manquement en lien avec la sécurité des données personnelles,
  • une mauvaise gestion des cookies et autres traceurs.

« Les mesures de sécurité prises par les organismes restent souvent insuffisantes » alerte la CNIL, qui vérifie pourtant « systématiquement la sécurité des systèmes d’information lorsqu’elle effectue un contrôle ».

Concernant les notifications de violations de données, la Commission a relevé un véritable « boom » par rapport à 2020 : + 79 % (5 037 notifications de violations de données reçues en 2021). Elle estime que les moyens alloués à la cybersécurité sont « insuffisants au regard des enjeux de sécurité actuels ».

« Contraindre plus rapidement »

Et maintenant, à quoi doivent s’attendre les entreprises ? Dans son rapport, la CNIL annonce qu’elle souhaite « contraindre plus rapidement celles qui ne respectent pas les droits des personnes ».

Elle contrôlera également davantage les organisations qui utilisent des technologies impliquant « une utilisation massive de données », notamment via :

  • les caméras augmentées,
  • les transferts dans le cloud,
  • les applications des smartphones.

Enfin, « la CNIL s’attachera tout particulièrement au respect des droits des personnes qui constitue pour les responsables de traitement, un enjeu de responsabilité et d’image ».

Leslie Brassac

L’Aract d’Île-de-France ouvre sa semaine du télétravail

L’Agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail (Aract) d’Île-de-France a ouvert hier sa semaine du télétravail. Lors de la conférence de presse d’ouverture, la présidente de l’Aract, Corinne Lamarcq, en a rappelé les enjeux : “Le télétravail a très bien fonctionné pendant la crise sanitaire. Il faut désormais l’encadrer en réglant notament les questions de droit à la déconnexion, de conciliation entre vie privée et vie professionnelle, de risques psychosociaux et d’équipement du salarié”. Le directeur de l’Aract Christian Allies, a rappelé pour sa part que le télétravail hybride “prend le pouvoir sur le télétravail complet”. Mais pour Hédi Kouati, chargé de mission à la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Drieets), “le télétravail est devenu une demande sociale. En Île-de-France, les principales motivations des salariés sont de réduire le temps de transport et de travailler au calme”. Enfin, le vice-président (CPME) de l’Aract, David Robert, a relevé que “le télétravail augmente la productivité, mais il doit être accompagné à l’aide d’une bonne négociation collective”.

Retrouvez sur le site internet de l’Aract le programme de la semaine du télétravail.

actuEL CE

Travailleurs handicapés : le taux d’emploi passe au-dessus de la barre de 4 %

Selon une étude de la Dares, publiée hier, la part des personnes handicapées dans les effectifs du privé était de 4,1 % en 2020, contre 3,5 % en 2019 quand la loi impose 6 % au minimum.

Dans le détail, en 2020, 2,7 millions de personnes ont une reconnaissance administrative d’un handicap. Elles représentent 6,5 % de l’ensemble des personnes en âge de travailler (de 15 à 64 ans), 4,1 % des actifs et 3,6 % des personnes en emploi : 950 000 travailleurs handicapés sont en emploi dont 650 000 dans le secteur privé.

La réforme de l’obligation d’emploi, mise en œuvre au 1er janvier 2020, visait une cible de 4,6 % de travailleurs handicapés (110 000 travailleurs handicapés). L’obligation s’applique désormais à l’entreprise dans son ensemble et non plus aux établissements autonomes d’au moins 20 salariés. Les intérimaires ne sont plus intégrés à l’effectif d’assujettissement des entreprises utilisatrices et sont désormais exonérées.

Par ailleurs, le mode de calcul des effectifs a évolué pour se rapprocher de celui défini par la sécurité sociale. Cela met fin, par exemple, à l’intégration des personnes en CDI seulement si elles sont en contrat le 31 décembre de l’année.

actuEL CE

L’Espagne veut faire adopter un congé menstruel

Le gouvernement espagnol a approuvé un avant-projet de loi instaurant un congé menstruel. “La mesure permettra à celles qui souffrent de règles « invalidantes » (douleur intense, crampes, coliques, nausées…) de disposer d’un arrêt maladie rémunéré par la sécurité sociale, après une première consultation médicale”, explique Le Monde.

Ce serait une première en Europe, précise le site de francetvinfo qui rappelle qu’un tel congé n’existe actuellement qu’au Japon, à Taïwan, en Indonésie, en Corée du Sud et en Zambie. 

En France, la société coopérative de production La collective donne aux femmes la possibilité de prendre un jour de congé supplémentaire par mois pour leur permettre de surmonter les règles douloureuses.

actuEL CE

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : Covid-19, nominations, protection sociale

Nous vous proposons un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) cette semaine, c’est-à-dire du vendredi 13 mai au jeudi 19 mai inclus, susceptibles de vous intéresser, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous ne parlons pas ici des très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, ce domaine étant couvert par notre baromètre des branches que vous retrouvez une fois par mois dans nos colonnes.

Covid-19

  • Un décret du 13 mai 2022 modifie le décret n° 2021-75 du 27 janvier 2021 relatif à l’application des mesures concernant les cotisations et contributions sociales des entreprises, travailleurs indépendants et artistes-auteurs mentionnées à l’article 9 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021
  • Un décret du 13 mai 2022 modifie le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire
  • Un décret du 12 mai 2022 porte création d’une aide pour les entreprises de conchyliculture dans le cadre du plan de résilience économique et sociale

Fonction publique

  • Un arrêté du 9 mai 2022 met en place l’utilisation du téléservice « France Connect » pour la mise en œuvre du vote électronique par internet pour l’élection des représentants du personnel au sein des instances de dialogue social de la fonction publique
  • Un arrêté du 6 mai 2022 fixe les effectifs et la proportion des femmes et des hommes pour l’élection des représentants du personnel au comité social d’administration ministériel de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et aux comités sociaux d’administration des établissements publics administratifs
  • Un arrêté du 28 avril 2022 fixe pour la fonction publique hospitalière la liste des indicateurs contenus dans la base de données sociales

Nominations

  • Un arrêté du 14 mai 2022 porte nomination au Haut Conseil du financement de la protection sociale
  • Un décret du 16 mai 2022 porte nomination du Premier ministre : Elisabeth Borne succède à Jean Castex (lire nos articles ici et ici)
  • Un arrêté du 17 mai 2022 fixe la composition du cabinet de la Première ministre
  • Un décret du 16 mai 2022 porte nomination du président du conseil d’administration de l’établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes – M. Jean-Marie MARX 

Protection sociale

  • Un décret du 13 mai 2022 porte revalorisation du revenu de solidarité en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et dans les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon
  • Un décret du 12 mai 2022 précise l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2021-1554 du 1er décembre 2021 relative à la mise en œuvre de la création de la cinquième branche du régime général de la sécurité sociale relative à l’autonomie

actuEL CE

SANTÉ SÉCURITÉ CONDITION DE TRAVAIL

Procès France Télécom : mémo pour suivre l’affaire devant la cour d’appel

Contexte, faits en cause, accusés… Quelques points pour comprendre ce dont on parle en ce moment au procès dit “des suicides de France Télécom” devant la cour d’appel de Paris.

Le procès dit France Télécom en appel a débuté le 11 mai 2022 et se clôturera le 1er juillet. En première instance, devant le tribunal de Paris en 2019, plusieurs anciens dirigeants de l’entreprise avaient été condamnés pour harcèlement moral ou complicité de harcèlement moral. Une décision historique. Hormis l’entreprise Orange en tant que personne morale et l’ex-DRH Olivier Barberot, tous ont fait appel de cette décision. 

Le contexte pré-crise 

Historiquement, France Télécom, entreprise publique, employait des fonctionnaires. Le recrutement de contractuels de droit privé débute en 1990 puis celui de fonctionnaires cesse quelques années plus tard. La loi du 26 juillet 1996 transforme définitivement l’entreprise en société de droit privé. Au même moment, ses activités changent et ses métiers aussi. C’est la fin des renseignements téléphoniques et l’arrivée des box Internet, par exemple. Parallèlement, le secteur des télécommunications est ouvert à la concurrence. 

Les faits en cause

Dans ce contexte, il est décidé de supprimer 22 000 postes en trois ans (soit 20 % des effectifs), d’en ouvrir 6 000 autres et d’organiser des milliers de mutations, géographiques ou fonctionnelles. L’annonce est faite progressivement à cheval sur 2005 et 2006. Le plan social n’est pas vraiment envisagé (les salariés de droit privé ne représentent que 80 % des effectifs). À la place, la direction lance en juin 2005 le plan Next, avec son volet social appelé Act, dont le déploiement s’accélère à partir de février 2006. Ils comportent des dispositifs de mutation, en interne ou dans la fonction publique, des départs anticipés à la retraite… Tous les départs sont “volontaires”, selon les prévenus.

Mais pour les parties civiles et les magistrats de première instance, ces dispositifs ne pouvaient suffire à remplir les objectifs chiffrés fixés : ceux-ci ont été remplis au prix d’une dégradation des conditions de travail. Autrement dit, en poussant les salariés à bout, vers la sortie. On pense ici à la déclaration de l’ancien PDG devenue célèbre, prononcée en 2006 lors d’une convention devant des managers : “Je ferai les départs par la fenêtre ou par la porte”. D’où les poursuites pour harcèlement moral. Si des suicides et tentatives de suicide sont enregistrés dès les années 2000, leur nombre augmente à partir de 2007. Le procès porte uniquement sur la période 2007-2010. 

Qui sont les accusés ? 

Ils sont six sur le banc des accusés.

D’abord, Didier Lombard qui a remplacé Thierry Breton à la tête de France Télécom en 2005. Il y est resté jusqu’en 2011. 

Ensuite : Louis-Pierre Wenès. Il occupait depuis 2003 le poste de directeur achat et amélioration de la performance groupe. À partir de 2006, il détenait aussi la casquette de directeur des opérations France. Au cours de l’audience du 12 mai 2022, la présidente de la cour a rappelé les surnoms qui lui collent à la peau : le “cost killer” et la “brute”. 

En 2006, Nathalie Boulanger, également poursuivie, devient cheffe du projet de réorganisation des activités France nommé RAF, qui se termine quelques mois plus tard. Après un poste de directrice des actions territoriales, elle occupe à partir de 2008 celui de directrice marketing en charge du contrôle de gestion des ressources humaines et de l’open innovation. 

Autre accusé : Guy-Patrick Cherouvrier. Il a gravi les échelons de l’entreprise petit à petit pour en devenir le DRH France de 2005 à 2008, date de son départ en retraite. 

Ensuite, Brigitte Dumont a été directrice recrutement et gestion de carrières au sein de la DRH groupe à partir de 2005. Poste auquel s’est ajouté celui de responsable du management des compétences et de l’emploi fin 2006. Elle était également directrice du programme Act au niveau groupe. 

Dernier accusé : Jacques Moulin, directeur territorial de la région Est jusqu’en 2006, nommé chef du projet de la DRH opérations France en 2008. Il a été condamné de complicité pour les faits passés lorsqu’il était dans l’Est, mais relaxé pour la période suivante. 

Quelles sont les parties civiles ? 

Les parties civiles retenues lors de l’instruction sont 41 personnes physiques (19 familles endeuillées, les personnes qui ont tenté de se suicider ou qui ont souffert de dépression), dix syndicats, deux associations (ASD Pro et la Fnath) et un CHSCT. Au début du premier procès se sont ajoutées un peu plus de 100 parties civiles supplémentaires, des salariés ou anciens salariés de l’entreprise.  

Pauline Chambost

IRP

Féminisation des directions : loi Rixain, mode d’emploi

Quelles sont les entreprises concernées par la loi Rixain ? Quelles sont les instances dirigeantes visées ? Que se passe-t-il en cas de non atteinte des objectifs ? Que faut-il intégrer dans la BDESE et quelles informations doit recevoir le CSE ? Dans un questions-réponses, publié, le 6 mai, le ministre du Travail détaille les mesures permettant de féminiser les directions d’entreprises comptant au moins 1 000 salariés.

Dans la droite ligne de la loi Copé-Zimmerman qui a instauré des quotas dans les conseils d’administration de certaines entreprises en 2011, la loi Rixain du 24 décembre 2021 franchit une étape supplémentaire, en instaurant des quotas de 30 % puis de 40 % de femmes dans les instances dirigeantes des entreprises d’au moins 1 000 salariés. Le ministère du travail revient sur cette mesure emblématique, en détaillant dans un questions-réponses, publié le 6 mai, et intitulé “représentation équilibrée femmes/hommes dans les postes de direction des grandes entreprises”, les nouvelles obligations figurant à l’article 14 du texte. Tour d’horizon des questions pratiques que pose ce changement.

1- Pour qui ?

La loi Rixain s’applique à toutes les entreprises quelle que soit leur forme sociale (SA, SARL, SAS…). Seule condition : employer au moins 1 000 salariés, pour le troisième exercice consécutif ; cette notion d’exercice correspondant à l’exercice comptable.

A noter : en cas de fusion-réunion, l’effectif à retenir est celui de la nouvelle entité légale. Dans le cadre d’une fusion-absorption, l’effectif à prendre en compte est celui de la société absorbante.

2- Quelle est la date d’entrée en vigueur de ces obligations ?

Deux dates butoirs sont fixées : les entreprises devront atteindre un objectif de 30% de femmes et d’hommes cadres dirigeants et de 30% de femmes et d’hommes membres d’instances dirigeantes à partir du 1er mars 2026. Cet objectif sera de 40% à partir du 1er mars 2029.

Mais si ces quotas n’interviennent que dans quelques années, la publication des écarts éventuels de représentation entre les hommes et les femmes des cadres dirigeants et des membres de ces instances doit s’effectuer dès cette année. Pour cette première, le ministère du Travail a donné un peu répit aux entreprises : elles ont jusqu’au 1er septembre 2022 pour effectuer cette déclaration ; la dead line est ensuite fixée, chaque année, au 1er mars. Une fois publiés, ces écarts de représentation sont consultables jusqu’à la publication de l’année suivante.

A noter : à partir du 1er mars 2023, ces résultats seront également publiés sur les sites internet du ministère du travail.

3- Quelles sont les instances dirigeantes visées ?

Tous les niveaux de décisions stratégiques de l’entreprise sont concernés, quelle que soit leur dénomination, conformément à l’article L.23-12-1 du code du commerce : comité de direction, comité exécutif d’une société anonyme mais aussi comité de directeurs, conseil de direction, conseil stratégique ou encore conseil décisionnaire d’une société par actions simplifiée.

En revanche, les directoires, les conseils de surveillance et les conseils d’administration ne sont pas considérés comme des instances dirigeantes dans une société anonyme. Ces organes ayant des “rôles d’administration, de surveillance et de contrôle”. De même, les organes collégiaux de direction de sociétés par actions simplifiées sont exclus du dispositif.

A savoir : le questions-réponses retient la définition des cadres dirigeants prévue à l’article L. 311-2 du code du travail. Par conséquent, les salariés en forfait jour sont exclus du calcul.

En revanche, les cadres dirigeants cumulant contrat de travail et mandat social sont intégrés dans l’assiette de calcul des écarts de représentation. Lorsqu’une personne est membre de plusieurs instances dirigeantes, elle n’est comptabilisée qu’une seule fois. Par ailleurs, les salariés expatriés dans une société française doivent être pris en compte.

4- Comment calculer les écarts de représentation ?

L’écart reflète le pourcentage d’hommes et de femmes présents parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes. Pour calculer ce delta, la période de référence à prendre en compte est calculée sur 12 mois consécutifs ; elle correspond à l’année comptable.

La proportion de ces femmes et de ces hommes est appréciée en fonction du temps passé sur l’année comptable en tant que cadre dirigeant ou membre des instances dirigeantes.” Le ministère précise que cette notion de “temps passé” correspond “au temps passé, sur la période de référence annuelle, dans les fonctions de cadre dirigeant ou de membre d’une instance dirigeante”, et ce “indépendamment du temps passé dans l’exercice réel de ces fonctions”.

A noter : lorsqu’une entreprise est organisée en business units, c’est-à-dire qu’elle dispose de plusieurs instances dirigeantes, le calcul prend en compte la totalité de ces lieux de pouvoir ; il ne s’agit pas d’un calcul individualisé. De même, un comité exécutif dont le champ d’action porte sur le groupe et, qui est institué au sein d’une société employant plus de 1 000 salariés, entre dans le champ d’application de cette obligation.

Si l’entreprise n’a pas de cadre dirigeant mais qu’elle a une ou plusieurs instances dirigeantes, “elle devra calculer les écarts de représentation entre les femmes et les hommes parmi les membres de ces instances”.

Lorsque les écarts de représentation ne sont pas calculables, l’employeur n’est pas assujetti à cette obligation. Il doit toutefois “transmettre à l’administration et au CSE les précisions expliquant la raison pour laquelle ces écarts n’ont pas pu être calculés”.

5- Que se passe-t-il lorsqu’une entreprise n’atteint pas l’objectif de 30 % de femmes et d’hommes cadres dirigeants et de 30 % de femmes et d’hommes membres d’instances dirigeantes au 1er mars 2026 ?

Les mauvais élèves devront prévoir des mesures “adéquates et pertinentes” de correction dans le cadre de leur négociation sur l’égalité professionnelle. En l’absence d’accord prévoyant de telles mesures, celles-ci sont déterminées par décision unilatérale de l’employeur, après consultation du CSE. La décision est déposée auprès de l’autorité administrative qui peut présenter des observations sur les mesures prévues par l’accord ou la décision de l’employeur. Ces observations sont présentées à l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance de l’entreprise ainsi qu’à son CSE.

6- Que se passe-t-il en cas de non atteinte de cette obligation au 1er mars 2029?

Les entreprises qui n’auraient pas atteint la proportion requise de personnes de chaque sexe dans chaque ensemble, disposeront d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité avec cette obligation. Mais elles devront publier leurs objectifs de progression et leurs mesures de correction, au bout d’un an, sur le site internet de l’entreprise sur la même page que les écarts de représentation. A défaut, ils seront portés par “tout moyen” à la connaissance des salariés.

7- Quelle est la pénalité applicable en l’absence d’atteinte de l’objectif chiffré ?

À l’expiration de ce délai de deux ans, si les résultats obtenus sont toujours en deçà du taux de 40 %, l’employeur peut se voir appliquer une pénalité financière d’un montant maximum de 1 % des rémunérations et gains. Le montant, fixé par l’autorité administrative, prendra en compte “la situation initiale de l’entreprise, les efforts constatés dans l’entreprise en matière de représentation des femmes et des hommes ainsi que des motifs de sa défaillance”. Le produit de cette pénalité sera versé au budget général de l’Etat.

En pratique, les entreprises qui ne respecteront pas le quota minimum de 40 % de femmes (ou d’hommes) pourraient donc subir cette sanction à partir du 1er mars 2031.

8- Quelles informations transmettre au CSE ?

La loi prévoit une obligation de transmission à l’administration et au CSE, en trois temps. Primo, dès 2022, les entreprises doivent transmettre leurs écarts de représentation ainsi que les modalités de publication de ces écarts. Secundo, à compter du 1er mars 2026, elles devront communiquer, outre les données citées, les mesures de correction adoptées le cas échéant.

Tertio, à compter du 1er mars 2029, elles adresseront au CSE les objectifs de progression et les modalités de publication de ces objectifs et des mesures de correction adoptés le cas échéant.

A savoir : parallèlement, la BDESE s’enrichit d’une nouvelle rubrique sur les écarts de répartition entre les femmes et les hommes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes.

Anne Bariet

Normes imposées à l’employeur : le CSE doit quand même être consulté

Lorsque la mise en œuvre de règles s’imposant à l’employeur est de nature à affecter les conditions d’emploi au sein de l’entreprise, la consultation du CSE s’impose.

Lorsqu’on parle de droit à consultation ponctuelle du CSE, il est en général question de déterminer si l’importance du projet l’exige, ou encore, à quel moment le projet est suffisamment concret pour donner lieu à une consultation ayant un « effet utile », ou enfin si les « informations précises et écrites » remises au comité sont suffisantes. Ce sont les conséquences sur la marche générale de l’entreprise ou les conditions de travail, de santé et de sécurité d’un projet élaboré et mis en œuvre par l’employeur qui sont examinées par le CSE. Mais qu’en est-il de normes, règles, imposées à l’employeur, lequel se charge seulement de leur mise en œuvre dans l’entreprise ? La consultation du CSE se justifie-t-elle ? s’impose-t-elle ? C’est à cette question que répond un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 21 avril 2022.

Réglementation des travaux imposée à l’entreprise

Dans cette affaire, la société Enedis (ancienne société ERDF, filiale du groupe EDF) doit mettre en œuvre à compter du 1er avril 2015 ses travaux en basse tension dans les conditions réglementaires des « conditions d’exécution du travail » (CET). Ces règles sont élaborées par des commissions d’experts représentant les différentes entreprises françaises exploitant des ouvrages de transport et de distribution d’électricité ainsi que les centres de formation (le comité des travaux sous tension « CST »). Elles s’imposent donc aux opérateurs. Le CSE central demande en justice à être consulté sur toute nouvelle « CET », ainsi que sur toute nouvelle prescription du réseau de distribution d’électricité (PRDE) et, plus généralement sur tout « document prescriptif ».

Consultation du CSE obligatoire sur les règles imposées à l’employeur

Sur la demande de consultation du CSE sur les « conditions d’exécution du travail » (CET) imposées à l’entreprise, la cour d’appel donne raison au comité : il doit être informé et consulté.

L’employeur conteste au motif que toute consultation du CSE doit revêtir un « effet utile » qui ne peut, d’après lui, que concerner un « projet, une mesure envisagée ou une décision unilatérale de l’employeur ». La mise en oeuvre de normes à caractère réglementaires et non modifiables qui ne sont pas édictées par l’employeur et s’imposent à lui ne pourrait donc pas donner lieu à une procédure d’information et de consultation préalable. Mais la Cour de cassation est d’accord avec la cour d’appel et le CSE.

Ces règles, bien que s’imposant aux opérateurs, « correspondent aux conditions générales préalables aux travaux afférents, aux modalités suivant lesquelles le travail devait être préparé puis organisé, aux conditions d’emploi des outils et aux modalités à suivre pour la bonne exécution du travail ». Il en résulte que « leur mise en œuvre était de nature à affecter les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelles au sein de l’entreprise et devait par conséquent faire l’objet d’une information-consultation du comité », « peu important que leur mise en œuvre soit imposée à l’employeur et ne résulte pas d’une décision unilatérale de sa part ».

Ainsi, dès lors que la mise en œuvre de ces normes est susceptible d’avoir des conséquences sur les salariés, ici sur leurs conditions de travail et leur formation, le comité doit être consulté, peu importe leur source et leur caractère contraint.

Pas de consultation sur les notes à vocation documentaire 

En revanche, concernant les « prescriptions du réseau de distribution d’électricité » (PRDE), il n’y a pas lieu de consulter le CSE. En effet, ces documents sont des « notes établies par les diverses directions de la société, précisant et transposant en mode opératoire les règles à mettre en œuvre par les unités de réseaux ou les agents effectuant les travaux ». Ces notes « se référaient pour leur contenu à des « documents associés » de contenus plus larges dont, notamment, les carnets de prescription au personnel ayant fait l’objet d’information-consultation du comité».

La cour d’appel a donc estimé que « les PRDE avaient une vocation uniquement documentaire et déclinaient sur un mode opératoire des normes réglementaires dont la mise en œuvre avait d’ores et déjà donné lieu à information et consultation du comité central d’entreprise, de sorte que l’obligation d’information et de consultation concernant ces notes circulaires internes n’était pas justifiée ».

La Cour de cassation confirme cette décision. Elle explique que l’information-consultation du comité, dont la cour d’appel a ordonné la mise en œuvre s’agissant des CET (normes « conditions d’exécution du travail »), n’avait pas à être reconduite s’agissant des PRDE, notes à vocation uniquement documentaires.

► Remarque : il apparaît que ces notes ne sont qu’une simple transcription. Il est en effet question de « notes établies par les diverses directions de la société Enedis décrivant, précisant et transposant en mode opératoire les règles à mettre en œuvre par les unités réseaux ou les agents effectuant des travaux ». Il semble donc logique que le comité ne soit pas consulté à nouveau.

La marche générale de l’entreprise Bien que la Cour de cassation ne vise expressément aucun article du code du travail, il est fait référence à l’article L. 2312-8. Cet article prévoit que le comité est informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur les conditions d’emploi, de travail et la formation professionnelle. Ce sont bien les « questions intéressant » la marche générale de l’entreprise et les conditions de travail qui sont visées, pas les « projets » ou les « décisions unilatérales de l’employeur ». La solution est donc logique. D’autant que l’objet d’une consultation porte également sur les répercussions d’une mesure, l’avis du CSE pouvant émettre un avis sur ses conséquences sur l’organisation du travail ou la formation du personnel par exemple. La jurisprudence sur le sujet Si c’est la première fois à notre connaissance que la Cour de cassation se prononce sur une telle norme imposée, elle a déjà tranché en faveur de la consultation du CSE lorsque les modifications de l’organisation économique et juridique de l’entreprise résultent d’une loi qui s’impose à l’employeur (dans cette affaire, la loi portant réforme de l’audiovisuel public qui emportait des conséquences pour les salariés) : voir par exemple Cass. soc., 26 oct. 2010, n° 09-67.760. La Cour s’est aussi penchée sur le cas d’une nouvelle classification imposée par un accord collectif étendu, laquelle impliquait le regroupement de certains emplois et devenait le support des salaires minimaux (Cass. soc., 21 nov. 2012, n° 11-10.625). Enfin, la chambre criminelle de la Cour de cassation considère depuis longtemps que la transmission négociée du capital social d’une entreprise, utilisée comme moyen de placer une société sous la dépendance d’une autre, équivaut à une cession et à ce titre doit donc faire l’objet d’une consultation du CSE, et ce, même si cette transmission intervient entre des tiers à l’entreprise et que la décision n’appartient pas à ses dirigeants (Cass. crim., 29 oct. 1991, n° 90-84.302 ; Cass. crim., 22 mars1983, n° 82-91.562).

Séverine Baudouin

Sur un an, l’inflation fait baisser les salaires en euros constants

Si l’on en juge par les derniers chiffres de la Dares, l’inflation est en train de bousculer la donne de l’économie française et singulièrement celle sur les salaires et le pouvoir d’achat. Ainsi, en dépit de leur progression au 1er trimestre 2022 (+1,2% et +1,1%) et même sur un an (+2,5% et +2,3%), deux indices sur les salaires, le SHBOE (indice du salaire horaire de base des ouvriers et des employés) et le SMB (indice du salaire mensuel de base) accusent sur un an et en euros constants une baisse respective de 2,1% et de 2,3% du fait de l’inflation, dont la hausse atteint, hors tabac, 4,6% entre fin mars 2021 et fin mars 2022. 

Par catégorie socioprofessionnelle, cette baisse du SMB atteint sur un an :

  • 2,7% pour les cadres et professions intermédiaires ; 
  • 2,2% pour les ouvriers ;
  • 2% pour les employés.

Par secteur d’activité, et toujours sur un an en euros constants, la baisse du SMB touche la construction (-2,6%), l’industrie (-2,3%) et le tertiaire (-2,3%).

Le schéma ci-dessous donne à voir, en pourcentage, cette évolution en montrant le glissement annuel des salaires mensuels de base (en euros constants).

actuEL CE

L. Berger (CFDT) et P. Martinez (CGT) demandent l’annulation d’un accord mondial signé avec Orpea

Le 4 mai dernier, selon les Echos, les secrétaires généraux de la CFDT et de la CGT ont écrit ensemble à la Fédération syndicale internationale des services (Uni Global Union) pour lui demander d’annuler l’accord mondial qu’elle a signé le 8 avril avec le groupe Orpea, présent dans 23 pays avec 70 000 salariés. Cet accord porte sur l’emploi éthique, le dialogue social, la négociation collective et les droits syndicaux, alors même que le groupe a été violemment mis en cause pour les conditions de vie des personnes résidant dans ses Ephad, mais aussi pour des soupons de discrimination syndicale. Des organisations syndicales (CGT, FO, CFDT) ont d’ailleurs entrepris contre Orpea des actions en justice. “Il est évident qu’UNI Global Union a commis une faute grave”, estiment dans ce courrier les leaders syndicaux. Les dirigeants de l’Uni, selon les Echos, ont proposé aux numéros un de la CGT et de la CFDT une rencontre le 18 mai. A suivre…

actuEL CE

Réunions du CSE : pour les temps de trajet, l’employeur ne peut pas s’en sortir avec une contrepartie

Le temps de trajet, pris en dehors de l’horaire normal de travail et effectué en exécution des fonctions représentatives, doit être rémunéré comme du temps de travail effectif pour la part excédant le temps normal de déplacement domicile/lieu de travail.

Un salarié de la société Transgourmet opérations, membre du comité d’établissement (CE) et du CCE et délégué syndical central suppléant, saisit les prud’hommes afin d’obtenir “le paiement d’un rappel de salaire au titre de son temps de déplacement pour se rendre aux réunions du comité central d’entreprise en région parisienne … et de la part excédant le temps normal de déplacement entre son domicile et son lieu de travail habituel”. En appel, l’employeur est à nouveau condamné par la cour d’appel d’Aix-en-Provence à payer un rappel de plus de 11 000€ ! L’affaire arrive alors en cassation.

Temps de déplacement et contrepartie

Dans son pourvoi, l’employeur invoque une règle du code du travail (art. L. 3121-4) selon laquelle “le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du travail n’est pas un temps de travail effectif. Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière”.

En conséquence, pour la direction de Transgourmet opérations, les temps de trajet dont le salarié réclamait le paiement n’étaient pas du temps de travail effectif devant être payé comme tel, mais simplement du temps de temps de déplacement professionnel devant faire l’objet d’une compensation.

L’employeur fait également valoir que “le temps de trajet effectué en exécution de mandats de représentant du personnel ne doit être rémunéré comme du temps de travail effectif que s’il est pris en dehors de l’horaire normal de travail et pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail”.

Or, ici, le salarié réclamait le paiement de 7 heures de trajet, en plus de la rémunération de 7 heures de travail qui lui était versée pour les journées de réunion, alors qu’il n’avait pas été constaté que l’intégralité des temps de trajet correspondants avait été réalisés en dehors de l’horaire normal de travail. Les réunions durant habituellement bien moins de sept heures, l’employeur estimait que le salarié n’avait pas à partir systématiquement à 5 h 45 pour prendre l’avion à 7 heures ni à reprendre l’avion à 18 h, les liaisons aériennes étant très fréquentes.

Le RS ne doit subir aucune perte de rémunération

Dans son arrêt du 21 avril 2022, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi de la société Transgourmet opérations et confirme sa condamnation à payer les temps de trajet au salarié.

D’abord, les juges rappellent que “le représentant syndical au comité d’entreprise ne devant subir aucune perte de rémunération en raison de l’exercice de son mandat, le temps de trajet, pris en dehors de l’horaire normal de travail et effectué en exécution des fonctions représentatives, doit être rémunéré comme du temps de travail effectif pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail”. Il ne s’agit donc pas de temps de déplacement professionnel au sens de l’article L. 3121-4 du code du travail.

Ensuite, il avait bien été constaté que le salarié s’était rendu aux réunions du comité central d’entreprise dans la région parisienne, organisées à l’initiative de l’employeur, en exécution de ses fonctions de délégué syndical. Il était donc parfaitement en droit de “réclamer la rémunération de son temps de trajet effectué pendant et hors l’horaire normal de travail, pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail”.

Frédéric Aouate

Le taux d’emploi des 15-64 ans est le plus élevé depuis 1975

Selon les derniers chiffres de l’Insee publiés hier, le taux de chômage en France est stable au premier trimestre 2022, à 7,3% (-0,1 point par rapport au trimestre précédent, soit 18 000 demandeurs de moins, sur un total de 2,2 millions de demandeurs au sens du BIT). Sur un an, le chômage baisse de 0,8 point, et de 0,9 point par rapport à la période d’avant la crise sanitaire. En revanche, le taux de chômage des jeunes “rebondit légèrement” (+0,3 point) au premier trimestre. A noter également la stabilité du taux de chômage de longue durée, qui touche 700 000 personnes, alors que le taux d’emploi des 15-64 ans progresse à nouveau pour atteindre 68%, ce qui constitue le plus haut niveau depuis que l’Insee le mesure (1975). Par tranche d’âge, le taux d’emploi atteint 82,5% pour les 25-49 ans, 65,5% pour les 50-64 ans dont 56,1% pour les 55-64 ans.

ActuEL CE

Le salarié protégé peut saisir le juge judiciaire en cas de cession d’activité après un licenciement économique autorisé

Il appartient à la juridiction judiciaire d’apprécier si la cession d’éléments d’actifs autorisée par le juge-commissaire emporte application du transfert du contrat du travail du salarié protégé dont le licenciement économique avait été autorisé antérieurement dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire.

En cas de cession d’une entité économique autonome, le contrat de travail des salariés de cette entité est transféré de plein droit au cessionnaire, en application du fameux article L. 1224-1 du code du travail.

Cette règle s’applique aux salariés protégés. Mais que se passe-t-il lorsque, dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire, le licenciement d’un salarié protégé est autorisé par l’inspecteur du travail, et que, toujours dans le cadre de cette procédure, une entité économique autonome est ensuite transférée à un repreneur ? C’est à cette question, et en particulier au droit du salarié protégé de contester son licenciement sur ce fondement devant le juge judiciaire, que répond cet arrêt du 21 avril 2022 (en pièce jointe).

► L’arrêt commenté est publié au bulletin, et 4 autres arrêts adoptant l’exacte même solution dans la même affaire, sont également diffusés par la Cour de cassation (Cass. soc., 21 avr. 2022, n° 20-17.468n° 20-17.498n° 20-17.471 et n° 19-22.327). A noter aussi que dans cette même affaire, la Cour de cassation s’est déjà prononcée sur le sort des salariés non protégés il y a quelques mois (Cass. soc., 19 janv. 2022, n° 20-17.472).

Licenciement économique autorisé d’un salarié protégé

Dans cette affaire, le 1er juin 2015, le tribunal de commerce prononce un jugement de liquidation judiciaire d’une entreprise avec maintien de l’activité jusqu’au 5 juin. Dans ce cadre, le licenciement économique d’un salarié protégé est autorisé par l’inspecteur du travail le 15 juillet.

Un mois plus tard, le 19 août, une ordonnance du juge-commissaire autorise la reprise du site industriel exploité par la société liquidée (vente de gré à gré en application de l’article L. 642-19 du code de commerce incluant fonds de commerce, clientèle, stocks, équipements, parc machines, actifs intellectuels et bases de données), laquelle est réalisée par acte du 2 mai 2016.

► Rappelons qu’en cas de liquidation judiciaire, le juge-commissaire peut autoriser le maintien de l’activité pour une certaine durée (3 mois maximum, prolongeable de 3 mois) si la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable (C. com., art. L. 641-10 et R. 641-18).

Le salarié demande sa réembauche à la société repreneuse, demande s’avérant infructueuse. En conséquence, le 12 juin 2017, le salarié saisit le conseil de prud’hommes pour voir dire son licenciement dépourvu d’effet en vertu de l’article L. 1224-1 du code du travail. Il demande des dommages et intérêts pour rupture abusive au motif que son contrat de travail aurait dû être transféré.

La cour d’appel fait droit à cette demande.

► Rappelons que le juge judiciaire est le juge compétent pour se prononcer sur la question du transfert des contrats de travail dans le cadre de l’article L. 1224-1 du code du travail. La violation de cet article prive d’effet les licenciements économiques prononcés à l’occasion du transfert d’une entité économique autonome (Cass. soc., 20 janv. 1998, n° 95-40.812 ; Cass. soc., 18 déc. 2000, n° 98-41.178). Il peut être demandé la poursuite des contrats de travail illégalement rompus ou la réparation du préjudice en résultant (Cass. soc., 20 mars 2002, n° 00- 41.651 ; Cass. soc., 28 janv. 2004, n° 01-47.356). D’autre part, la cession d’actifs de l’entreprise en liquidation judiciaire autorisée par le juge judiciaire dans le cadre de l’article L. 642-19 du code de commerce emporte application de l’article L. 1224-1 du code du travail dès lors que cette cession concerne une entité économique autonome dont l’identité est maintenue et l’activité poursuivie. Dans ce cas, les licenciements antérieurement opérés par l’administrateur judiciaire ou le mandataire-liquidateur, sont sans effet, en dehors de ceux autorisés par le tribunal de commerce en application des dispositions de l’article L. 642-5 du code de commerce (Guide DGT (salariés protégés) 20 sept. 2019, fiche 15). Les salariés ont le choix de demander au nouvel employeur (le cessionnaire) la poursuite de leur contrat de travail, qui est censé n’avoir jamais été rompu, ou la réparation du préjudice qui découle de la rupture (Cass. soc., 15 févr. 2006, n° 04-43.923).

Le cessionnaire conteste cette décision au motif que le licenciement du salarié protégé est intervenu en vertu d’une autorisation administrative devenue définitive. Ce licenciement ne pourrait donc pas être remis en cause devant le juge judiciaire en application du principe de séparation des pouvoirs. D’autant, ajoute le repreneur, que le salarié avait eu connaissance du transfert dans le délai de recours contre l’autorisation de licenciement.

Pas d’atteinte au principe de séparation des pouvoirs dans ce cadre

La Cour de cassation donne raison à la cour d’appel et au salarié protégé.

Elle explique « qu’en l’absence de toute cession d’éléments d’actifs de la société en liquidation judiciaire à la date à laquelle l’inspecteur du travail a autorisé le licenciement d’un salarié protégé, il appartient à la juridiction judiciaire d’apprécier si la cession ultérieure d’éléments d’actifs autorisée par le juge-commissaire ne constitue pas la cession d’un ensemble d’éléments corporels et incorporels permettant l’exercice d’une activité qui poursuit un objectif propre, emportant de plein droit le transfert des contrats de travail des salariés affectés à cette entité économique autonome, conformément à l’article L. 1224-1 du code du travail, et rendant sans effet le licenciement prononcé, sans que cette contestation, qui ne concerne pas le bien-fondé de la décision administrative ayant autorisé le licenciement d’un salarié protégé, porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs ». Puis la Cour ajoute que « la contestation portait sur le non-respect du principe du transfert des contrats de travail par l’effet de la cession d’une entité économique autonome, intervenue après la notification du licenciement autorisé par l’inspecteur du travail ».

En d’autres termes, dès lors que la cession d’éléments d’actifs est postérieure à l’autorisation de licenciement, l’inspecteur du travail n’ayant pas pu la prendre en compte dans sa décision, le recours devant le juge judiciaire est possible. Cette action n’a pas la nature d’une contestation d’une autorisation de licenciement, laquelle est bien réservée à l’autorité administrative, mais d’une demande relative à l’application de l’article L. 1224-1, c’est-à-dire au transfert automatique du contrat de travail dans les nouvelles conditions suite à la cession.

► La Cour de cassation souligne que la contestation « ne portait pas sur la régularité de la procédure de licenciement, la recherche d’un repreneur et le bien-fondé de la décision rendue par l’inspecteur du travail devenue définitive », lesquels éléments relèvent du contrôle du licenciement économique dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire. D’autre part, dans le seul arrêt de la série pour lequel la cour d’appel avait rejeté la demande du salarié protégé (n° 19-22.327), la Cour de cassation précise bien que « la décision administrative qui avait autorisé le licenciement du salarié, n’avait pu s’être prononcée sur l’incidence de la cession ultérieure du fonds de commerce ».

Ainsi, conclut la Haute juridiction, « l’action engagée par les salariés protégés devant la juridiction prud’homale aux fins de condamnation du cessionnaire au paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive de leur contrat de travail » est recevable et ne porte pas atteinte au principe de séparation des pouvoirs.

► A noter que cette solution ne devrait pas s’appliquer en cas de reprise dans le cadre d’un « plan de cession » (C. com., art. L. 642-1 et s.) (il s’agit ici d’une reprise d’actifs, dans le cadre de l’article L. 642-19 du code de commerce, laquelle constitue une entité économique autonome). En effet, le transfert légal des contrats de travail au cessionnaire ne s’applique pas aux salariés dont le licenciement pour motif économique a été prononcé en application du plan de cession arrêté par le juge (Cass. soc., 26 juin 1991, n° 90-46.055). Attention, toutefois, l’autorisation de licenciement reste obligatoire. Ainsi, le salarié protégé qui n’est pas inclus dans le plan de cession tel qu’arrêté par le tribunal, mais dont l’autorisation de licenciement n’a pas été obtenue, doit être repris par le cessionnaire (Cass. soc., 7 oct. 1992, n° 89-41.179).

Séverine Baudouin

Affaire du CCE d’Air France : le tribunal de Bobigny annule l’enquête pénale

Après plusieurs années d’errements, l’enquête pénale ouverte en 2000 à la suite de la plainte du comité central d’entreprise (CCE) d’Air France pourrait s’arrêter sans que les prévenus ne soient jugés, révèle le quotidien Le Monde. Le tribunal de Bobigny souhaite en effet clore cette affaire qui implique notamment Robert Génovès, ex-patron de FO-Air France et secrétaire général du CCE de l’époque, accusé de malversations conduisant le CCE au dépôt de bilan. Le motif de ce coup d’arrêt ? La longueur excessive de l’enquête qui bafoue le droit des accusés à être jugés dans un délai raisonnable. L’action publique est d’ailleurs éteinte à l’égard de Robert Génovès qui est décédé en septembre 2018. Quant aux deux autres prévenus âgés aujourd’hui de plus de 72 ans (un ancien salarié du CCE et un ancien secrétaire général adjoint du CCE), leur état de santé laisse planer un doute sur leur capacité à se rappeler des faits et à témoigner à leur procès. Une nouvelle étape judiciaire pourrait cependant survenir : le parquet de Bobigny et le CSE central ont fait appel de la décision du tribunal de stopper l’affaire, considérant que les victimes des malversations ont droit à la réparation de leur préjudice.

ActuEL CE

Élections : la violation de l’obligation de neutralité de l’employeur doit être prouvée

Il appartient à celui qui invoque la violation par l’employeur de son obligation de neutralité d’en rapporter la preuve.

Dans le cadre des élections professionnelles, la question de l’obligation de neutralité de l’employeur est en général en cause dans le cadre de la campagne électorale :  propagande, déclarations, pressions… Mais cette obligation de neutralité, prévue à l’article L. 2141-7 du code du travail, est bien plus large. Elle interdit l’exercice de tout moyen de pression en faveur ou à l’encontre d’une organisation syndicale, et cela recouvre également l’adoption de mesures discriminatoires à l’égard d’un syndicat, ou le traitement différencié de certains syndicats vis-à-vis d’autres. Elle peut ainsi concerner d’autres étapes des élections professionnelles, comme dans cette affaire, le rejet d’une candidature tardive.

Mais qu’en est-il de la charge de la preuve de la violation de cette obligation de neutralité ? C’est à cette question que répond la Cour de cassation, pour la première fois à notre connaissance, dans un arrêt du 18 mai 2022 publié sur son site.

Candidature tardive rejetée par l’employeur

Dans cette affaire, la date limite de dépôt des candidatures pour les élections du CSE est fixée par le protocole préélectoral au 4 novembre à 12 heures. Un syndicat, la CFTC, adresse sa liste de candidats pour le premier collège par courriel le 4 novembre à..12h16. L’employeur refuse sa liste en raison de son envoi après l’heure limite de dépôt. Le syndicat demande l’annulation des élections du premier collège au motif de la violation de l’obligation de neutralité de l’employeur. Il allègue que la candidature tardive d’un autre syndicat a été acceptée. En effet, cette liste FO a été remise en mains propres le 4 novembre, sans précision de l’heure. La CFTC considère que c’est à l’employeur de prouver qu’il a bien respecté son obligation de neutralité, et donc concrètement de prouver que la candidature a bien été remise avant 12 heures.

Modalités d’organisation du scrutin : rappel Les modalités d’organisation du scrutin fixées par le protocole préélectoral dont la régularité n’est pas contestée s’imposent à l’employeur et aux organisations syndicales. L’employeur ne commet donc aucune irrégularité en refusant de tenir compte d’une liste déposée en retard (Cass. soc., 9 nov. 2011, n° 10-28.838 ; Cass. soc., 28 mars 2012, n° 11-19.657). Si une certaine souplesse sur le dépassement de l’heure de dépôt a été tolérée pendant des années (si le retard n’était pas de nature à troubler le déroulement du scrutin, l’employeur ne pouvait l’écarter : retard de 32 minutes (Cass. soc., 23 juin 2004, n° 02-60.848), et de 11 minutes (Cass. soc., 10 juill. 1997, n° 96-60.383)), la jurisprudence de 2011 semble la remettre en cause en posant un principe général de respect des modalités fixées par le protocole préélectoral non contesté. La jurisprudence ne s’est pas depuis prononcée clairement sur ce point. Un seul arrêt de 2020 juge abusif le refus de l’employeur d’une liste de candidats après l’expiration du délai prévu par le protocole préélectoral, cette liste ayant été remise dans les délais, puis à nouveau, avec deux minutes de retard, pour faire suite à l’exigence de l’employeur de justification du mandat du syndicat (Cass. soc., 27 mai 2020, n°18-60.038). Dans ce cadre, c’est d’ailleurs l’abus de l’employeur qui est soulevé, il n’est pas question de déterminer si le retard était de nature à troubler le déroulement du scrutin comme dans la jurisprudence antérieure. On peut penser que c’est pour cette raison que le syndicat a invoqué la violation de l’obligation de neutralité et non l’abus du rejet de la candidature, déposée seulement 16 minutes après l’heure limite.

Le tribunal constate qu’effectivement « il n’était pas en mesure d’apprécier si l’heure limite de dépôt avait été respectée par ce syndicat et si la société, en refusant la liste de candidature CFTC déposée à 12 heures 16, n’avait pas favorisé le syndicat FO au détriment du syndicat CFTC ». Le juge en déduit que la société ne justifie pas avoir respecté son obligation de neutralité et annule les élections.

Charge de la preuve de la violation de l’obligation de neutralité

Mais la Cour de cassation n’est pas d’accord.

Elle commence par rappeler qu’effectivement, « les irrégularités directement contraires aux principes généraux du droit électoral constituent une cause d’annulation des élections indépendamment de leur influence sur le résultat des élections. L’obligation de neutralité de l’employeur est un principe général du droit électoral ». Il s’agit d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation (Cass. soc., 10 mai 2012, n° 11-14.178 ; Cass. soc., 27 mai 2020, n° 19-15.105).
Puis la Cour ajoute immédiatement « qu’il appartient à celui qui invoque la violation par l’employeur de son obligation de neutralité d’en rapporter la preuve ». Ainsi, le tribunal a inversé la charge de la preuve et n’a pas caractérisé le manquement de l’employeur à son obligation de neutralité. En d’autres termes, c’est au syndicat de prouver la violation de l’obligation de neutralité, dans cette affaire de prouver que FO a remis sa liste après 12 heures.

Séverine Baudouin