Un employeur qui fait travailler un salarié pendant un arrêt de travail manque à son obligation de sécurité
Selon l’article L.323-6 du code de sécurité sociale, le salarié en arrêt de travail doit s’abstenir d’exercer toute activité non autorisée. La première est, logiquement, le travail. Pendant un arrêt de travail pour maladie ou accident, l’employeur ne peut pas demander au salarié de travailler, ni à son poste, ni à distance. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 6 juillet dernier.
Dans cette affaire, une salariée assistante de cabinet d’audit conseil est placée en arrêt de travail pendant plusieurs mois et est sur le point de reprendre le travail en mi-temps thérapeutique à domicile. Cependant, deux semaines avant sa reprise, son employeur lui propose de travailler sur deux dossiers depuis son domicile, ce qu’elle fait. Or, l’employeur n’a pas le droit de faire travailler un salarié pendant un arrêt.
Par conséquent, un employeur qui demande à son salarié de travailler pendant un arrêt engage sa responsabilité civile pour manquement à son obligation de sécurité. C’est le cas même si le travail n’est qu’une proposition et que le salarié n’est pas contraint par l’employeur de travailler.
► Al’inverse, ne sont pas considérées comme un travail, et sont donc autorisées, les demandes ponctuelles de renseignements adressés, pendant l’arrêt de travail, par l’employeur au salarié pour mettre en œuvre le mi-temps thérapeutique.
Transfert aux Urssaf du recouvrement cotisations Agirc Arrco : FO craint une “catastrophe industrielle”
Le gouvernement a confirmé, jeudi 29 septembre, que le transfert du recouvrement des cotisations Agirc Arrco (retraites complémentaires) vers les Urssaf aura bien lieu le 1er janvier 2023 pour les entreprises soumises au versement annuel unique (9 170 entreprises, soit 5,6 millions de salariés) et au 1er janvier 2024 pour les autres. La mesure avait été prévue dès la loi de financement de la sécurité sociale mais elle avait été décalée du fait des difficultés rencontrées sur le projet.
Dans un communiqué, Michel Beaugas, de FO, réitère l’opposition de son syndicat, mais aussi de l’ensemble des partenaires sociaux, à cette évolution. “Plusieurs courriers ont été envoyés en ce sens au gouvernement, par les institutions de retraite complémentaire d’une part, mais également par un courrier conjoint des organisations syndicales et patronales, adressé le 28 juillet 2022 au Ministère de l’économie. Ce courrier rappelait la persistance de sérieuses difficultés rendant improbable la réussite du transfert à la date prévue. Le Gouvernement a choisi de passer outre les mises en gardes des organismes concernés”, déplore le syndicaliste.
Pour FO, “les difficultés techniques de ce transfert font craindre une catastrophe industrielle, qui aurait pour conséquence pour les assurés une perte de contrôle sur leurs droits individuels”. Le syndicat s’inquiète aussi du sort des salariés chargés du recouvrement de l’Agirc Arrco, “laissés dans l’incertitude quant à l’avenir de leur emploi”. FO critique enfin une centralisation à haut risque qui serait motivée par la volonté de l’Etat “d’avoir un plus grand contrôle sur les cotisations des retraites complémentaires”, en vue de la création d’une “caisse de retraite unique”.
actuEL CE
Retraites : l’intersyndicale menace d’utiliser “tous les moyens d’action nécessaires”
Une réunion intersyndicale relative aux retraites s’est tenue lundi 3 octobre en fin de journée. A son issue, les treize syndicats participants (*) ont abouti à un communiqué de presse commun (en pièce jointe). Si l’intersyndicale “prend acte” de la volonté du gouvernement d’ouvrir des concertations, elle demeure fermement opposée à toute réforme paramétrique des retraites, qu’il s’agisse d’un report de l’âge légal ou d’un allongement de la durée de cotisation.
Tout comme le rapport du COR, Les syndicats pointent qu’un salarié sur deux arrivant à l’âge de la retraite n’est plus en activité. Il est en invalidité, au chômage ou perçoit les minimas sociaux en raison d’un épuisement de ses droits. En conséquence, les syndicats jugent qu’une mesure paramétrique serait sans effet sur les finances publiques, les dépenses se déplaçant du régime des retraites à celui de l’assurance chômage, de l’invalidité ou des minimas sociaux. Ils brandissent également la menace d’une action commune : “Nos organisations appellent les actuels et futurs travailleurs et les travailleuses à se réunir et débattre, et n’hésiteront pas à construire tous les moyens d’action nécessaires si le gouvernement demeurait arc-bouté sur son projet”.
En revanche, les syndicats souhaitent aborder les sujets de la pénibilité, des carrières longues, de l’usure au travail, de l’emploi des seniors, de l’égalité hommes femmes ou encore de la transition entre l’emploi et la retraite. A cette fin, ils se rendent aujourd’hui au ministère du travail pour une réunion d’une heure trente avec Olivier Dussopt. Sans grande conviction toutefois : selon Michel Beaugas, secrétaire confédéral de Force ouvrière que nous avons pu contacter, il ne s’agira que de méthode et de calendrier sans réelle discussion.
Projet de loi travail : l’Assemblée adopte l’article 1er sur l’assurance chômage
L’Assemblée nationale examinait hier en fin de journée les premiers amendements au projet de loi portant mesures d’urgence sur le marché du travail. Tous ont été rejetés à l’exception d’un amendement n° 265 relatif à des adaptations en Outre-mer. Onze d’entre eux proposaient la suppression de l’article 1er du projet, qui prévoit de prolonger le régime de l’assurance chômage jusqu’au 31 décembre 2023 au plus tard, après concertation avec les partenaires sociaux, et ce par décret en Conseil d’État.
Ces amendements de suppression ont fait l’objet de vifs débats. En tête, la députée Marie-Charlotte Garin (écologiste-Nupes, Rhône) a relevé que “le chômage est un droit, pas un levier pour le plein emploi”, introduisant la flexisécurité au détriment des chômeurs. Mathilde Panot (France Insoumise-Nupes, Val-de-Marne) a décrié “un mépris du Parlement et des partenaires sociaux”. François Ruffin (France Insoumise-Nupes, Somme) a rappelé les différentes études de la Dares selon lesquelles “un tiers des postes ne sont pas pourvus par manque de main d’œuvre, d’attractivité des aides à domicile, des postes de conducteurs ou des métiers de l’agro-alimentaire, car ils sont sous-payés ou maltraités (…). Il faudrait une amélioration des conditions de travail et une revalorisation des salaires. (…) Or une autre note de la Dares dit qu’il y a une éclaircie dans l’emploi. Donc dès que le pouvoir de négociation se modifie en faveur des salariés, vous intervenez pour que le plateau de la balance penche toujours du même côté”.
Face à ces arguments, le rapporteur de la commission des affaires sociales Pierre Ferracci a opposé qu’une suppression de l’article 1 “aurait pour conséquence de priver de base juridique l’indemnisation des demandeurs d’emplois. Le Conseil d’État l’a rappelé dans son avis : il faut une loi pour mettre en œuvre le programme du Président de la République à savoir la modulation de l’assurance chômage en fonction de la conjoncture”. Le ministre du Travail Olivier Dussopt a acté son total accord avec le rapporteur. Les onze premiers amendements de suppression ont été rejetés par 166 voix contre (156 voix pour).
actuEL CE
Réforme des retraites : le gouvernement donne le calendrier et la méthode aux syndicats
Hier s’est tenue la première réunion de concertation entre le ministre du Travail et les partenaires sociaux. Olivier Dussopt leur a fourni le calendrier autour de trois cycles thématiques de rencontres bilatérales. Une réunion multilatérale viendra clore les concertations. Le tout devra être formalisé mi-décembre.
“Tous les participants étaient présents et l’ambiance apaisée”, se sont réjouis les services du ministère du Travail hier à l’issue de la première réunion de concertation avec les syndicats sur les retraites. La réunion s’est tenue “de bout en bout” et les organisations syndicales “ont toutes pu prendre la parole” (voir notre encadré sur leurs réactions). Voilà pour la tonalité générale de cette première réunion. Dans le détail, trois cycles de concertation vont être ouverts à compter de la semaine prochaine.
Séniors, équité, financement : les trois cycles de concertation
Le ministre du Travail a exposé aux syndicats les trois thèmes des prochains cycles de concertation :
A compter du 10 octobre 2022 sur l’emploi des séniors ;
A compter du 7 novembre 2022 sur l’équité et la justice sociale ;
A compter du 28 novembre 2022 sur l’équilibre du système des retraites.
Selon le ministère, “les participants se sont retrouvés dans ces thèmes, il faudra figer les points d’accord, le consensus étant là sur ce programme”.
Le cycle sur l’emploi des séniors couvrira les thèmes des freins au maintien et au retour à l’emploi des séniors, l’usure professionnelle, l’index séniors, la transition entre l’activité et la retraite, les départs anticipés, la formation des séniors, le retour à l’emploi et la lutte contre les discriminations liées à l’âge.
Le cycle sur l’équité et la justice sociale verra entrer en scène les questions des petites pensions, des minimas, des dispositifs de solidarité, de l’égalité hommes/femmes, des régimes spéciaux et de l’application aux fonctionnaires (sachant que ce sujet fait lui-même l’objet de concertations parallèles sous l’égide du ministre de la Fonction publique, Stanislas Guérini).
Le cycle sur l’équilibre financier sera peut-être le plus sensible : il évoquera les sujets de financement et les leviers de rééquilibrage.
Chaque cycle prendra la forme d’au moins une série de réunions bilatérales avec les onze syndicats conviés : CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU, FNSEA, Medef, U2P, CPME. A l’issue de ces onze réunions par cycle, d’autres rencontres pourront être organisées si elles nécessitent des discussions complémentaires.
Une multilatérale viendra ensuite clore l’ensemble des concertations à l’horizon de mi-décembre 2022. Le projet de loi sera concrétisé “à la fin de l’hiver 2022/2023”, le cabinet d’Olivier Dussopt ne s’avançant pas plus sur la date exacte. Il n’a pas souhaité préciser non plus si la question de l’âge de départ pourrait évoluer en fonction des discussions. En revanche, les différents travaux (notamment parlementaires) issus de la mission et du rapport remis par Jean-Paul Delevoye en 2019 pourront servir de base aux discussions.
Les réactions des organisations syndicales
Comment les syndicats, qui venaient de faire connaître une position commune sur les retraites, ont-ils accueilli ces annonces ?
C’est bien de commencer par parler de l’emploi des séniors
Yvan Ricordeau, pour la CFDT, se montre relativement satisfait, ou du moins ouvert au dialogue : “Le cycle de concertation débute avec le thème que nous souhaitions, c’est-à-dire l’emploi des séniors, il nous faudra parler de l’usure au travail et de la pénibilité”. Le syndicaliste estime par ailleurs que le ministre a clarifié l’objet de la réforme, en assurant qu’il ne s’agit pas de combler les carences du budget de l’Etat. Cela étant, le nouveau chargé des retraites à la CFDT se montre prudent sur les délais : “S’il faut nous donner plus de temps pour une concertation de qualité, il faudra dépasser les dates évoquées”.
Ce calendrier serré ne paraît déjà pas tenable en l’état pour d’autres, tels Michel Beaugas, de FO (“Deux mois et demi pour aller au fond des choses ?! Pour élaborer un projet de loi qui renverra certaines choses à la négociation entre partenaires sociaux une fois qu’aura été acté le recul de l’âge de départ ?!”) et Pascale Coton, de la CFTC : “C’est trop court pour travailler correctement. Certes, une partie des chiffrages existe déjà, mais tous les problèmes liés aux retraites, comme la pénibilité et l’emploi des séniors, doivent être abordés”.
Sans multilatérales, seul le gouvernement pourra faire son marché
La syndicaliste réclame plus qu’une seule réunion multilatérale de clôture. “Des multilatérales pour chaque thème, c’est une question de loyauté et de transparence”, avertit Gérard Mardiné (CFE-CGC). Michel Beaugas (FO) abonde : “Les bilatérales, c’est bien pour donner nos positions, mais comment connaître celles des autres ? Le gouvernement sera le seul à pouvoir faire son marché ! “
Le monsieur retraites de FO craint “un débat et une concertation de dupes” et il affiche d’ores-et-déjà la couleur : “Si le ministre veut aborder les régimes spéciaux dans le bloc 2 traitant de l’équité, ce sera sans nous !”
Pour la CFE-CGC, Gérard Mardiné, très remonté contre le transfert aux Urssaf du recouvrement des cotisations des régimes de retraite complémentaires, s’interroge sur le périmètre de cette négociation : “On voit dans le projet de loi de finances que les acteurs sociaux comme Action logement sont mis à contribution pour financer l’Etat. Faut-il donc aller négocier à Matignon les arbitrages ?”
Une dramatisation des enjeux
Et le syndicaliste de pointer aussi la dramatisation des enjeux jouée selon lui par le gouvernement. “Même en matière démographique, les choses ne sont pas celles qui étaient annoncées. Par exemple, les prévisions de l’Insee de 2011 sur les gains d’espérance de vie utilisées pour la réforme Touraine se sont révélées optimistes. Depuis dix ans en France, l’espérance de vie en France ne progresse plus et nous savons déjà que la mortalité sera en 2022 supérieure à celle de 2019, l’année avant le Covid”.
La CGT a pour sa part réagi par un communiqué de presse rappelant que “les deux tiers des plus de 60 ans ne sont plus en emploi, cassés par leurs conditions de travail, licenciés par un patronat toujours avide de reculs sociaux”. La confédération, qui réclame un départ à 60 ans, entend mobiliser le 6 octobre “pour la revalorisation des retraites complémentaires” et programme des mobilisations “pour les salaires et les retraites tout au long de la semaine du 17 au 21 octobre”.
Marie-Aude Grimont et Bernard Domergue
61 % des cadres inquiets à l’idée d’un report de l’âge légal à la retraite
Selon un baromètre publié par l’Apec, le 4 octobre, la perspective d’un report de l’âge de départ à la retraite inquiète la majorité des cades (61 %). Les 35-44 ans sont les plus préoccupés (66 %) mais ils sont suivis de près par les 45-54 ans (65 %). Même si les cadres ne perçoivent pas réellement quelles sont leurs conditions actuelles de départ à la retraite : 56 % des 45 ans et plus affirment avoir une idée précise de l’âge à partir duquel ils pourront partir. Et seuls 35 % ont une idée précise du montant de leur future pension.
À noter également : près d’un cadre sur deux (45 ans et plus) envisage de conserver une activité professionnelle partielle en cumul de leur indemnité de retraite. 36 % d’entre eux pensent à conserver une activité bénévole en lien avec leur ancienne profession.
actuEL CE
Les retraites complémentaires revalorisées de 5,12 % à compter du 1er novembre
Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue hier, les instances paritaires de l’Agirc-Arrco ont annoncé une hausse de 5,12 % du montant des pensions de retraite complémentaire à compter du 1er novembre 2022.
[Bilan des ordonnances] Le CSE, une nouvelle instance déjà trop rigide [2/2]
Après un premier volet consacré à l’évolution des négociations de branche et d’entreprise, nous évoquons aujourd’hui le CSE dans notre deuxième compte-rendu des 4e rencontres de l’ISTT-Ires consacrées au bilan des ordonnances de 2017.
A l’heure où s’approche la grande vague de renouvellement des comités sociaux et économiques (CSE), quel bilan peut-on faire de cette nouvelle instance représentative du personnel créée par les ordonnances de 2017 ? Après bien d’autres, les intervenants de la journée de l’ISTT et de l’Ires dressent un panorama plutôt sombre de l’évolution entamée (1).
Certes, nous n’étions pas auparavant dans un monde idéal, il y avait des problèmes, notamment des redondances, expose en substance Christian Pellet, président du cabinet d’expertise Sextant. Mais ce que nous avons vu, décrit-il, c’est non seulement une dérégulation de la négociation avec les RCC (ruptures conventionnelles collectives) et les APC (accords de performance collective), mais aussi “une simplification et une rigidification des IRP (institutions représentatives du personnel) avec très peu d’accords sur les CSE, et encore moins d’accords innovants”.
Le CSE, un cadre pas assez souple
Alors que le pouvoir exécutif avait “vendu” en 2017 l’idée d’une simplification et d’une souplesse avec la création d’une IRP unique, Christian Pellet souligne au contraire la rigidité du cadre du CSE, qu’il juge inapproprié à certaines organisations : “On le voit ce moment avec le passage de la Poste au CSE, c’est un cadre inadapté. Comment garder un lien de proximité sans multiplier les CSE ? Les ordonnances ne permettent pas la création d’instances intermédiaires ad hoc”. Pour l’expert, il serait très dangereux de poursuivre dans la voie de la concentration et de la surcharge du CSE en lui confiant une mission de négociation, comme l’envisagent certains.
Les problèmes ont disparu avec les DP !
S’il juge pour sa part que la souplesse de l’instance n’a pas été assez explorée, Olivier Mériaux, directeur des études de Plein Sens, un cabinet qui aide les entreprises à établir un bilan paritaire de l’instance, pointe lui aussi l’affaiblissement du travail quotidien des élus et la perte de proximité. C’est parfois les désaccords syndicaux qui ont empêché la mise en place de représentants de proximité, ces RP étant vus comme l’antichambre de la représentativité, ironise au passage Rémi Bourguignon, de l’université Paris-Est-Créteil.
Alors que la littérature scientifique avait souvent fait peu de cas des délégués du personnel (DP), appuie Kevin Guillas-Cavan de l’Ires, la fin des DP a clairement entraîné un problème dans les entreprises. Ou plutôt, comme le dit Olivier Mériaux, les problèmes ont disparu car ils ne remontent plus : “Dans une grande entreprise, on est passé de 70 questions DP posées par mois à 50 questions par an via les représentants de proximité. Des sujets passent sous les radars”.
Un risque de baisse de la participation aux élections
Pour l’expert, la conséquence prévisible est une perte de visibilité et de l’utilité de la représentation des salariés pour le corps électoral : “Même si on sait que les salariés votent d’abord pour les activités sociales et culturelles du CSE, il y a un risque de baisse de la participation aux élections professionnelles”.
Plus grave, à ses yeux : la déshumanisation provoquée par la centralisation du dialogue social, la difficulté des missions à remplir (“élu CSE, c’est un job de cadre sup !”) et la perte de liens humains avec les salariés. “Si l’on s’engage comme représentant du personnel, ce n’est pas pour traiter les problèmes humains avec un ticket. Or il y a une forme de déshumanisation du fonctionnement du CSE”.
Le CSE, une simplification chronophage !
Les ordres du jour trop chargés entraînent aussi un ras-le-bol côté RH, ajoute Olivier Mériaux : “La présidence du CSE et sa tenue, ça relève aussi parfois de la pénibilité !” Un avis partagé par Rémi Bourguignon : “Le CSE, c’est une simplification chronophage avec trop de sujets à traiter, un ordre du jour impossible à tenir, pour les élus comme pour les RH. Il faut aller vite, alors on intervient moins, on va moins au fond des choses”.
C’est difficile d’opérer une division du travail dans un CSE
Alors que certaines directions redoutent l’absence de candidats, ou des listes incomplètes, pour les prochaines échéances, l’expert de Plein sens doute ouvertement quant à lui de la possibilité de régler les problèmes d’articulation entre CSE et commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) dans le cadre actuel. Et Olivier Mériaux d’ajouter que l’organisation du travail collectif dans un CSE pose un vrai problème : “C’est difficile d’opérer une division du travail au sein de l’instance, cela réclame quasiment des réflexes de conduite de projet” (2).
Les moyens, mais pas que…
Le problème n’est pas seulement celui des moyens, avance encore Olivier Mériaux qui cite le cas d’un gros CSE disposant de 18 000 heures de délégation annuelles mais qui n’en a consommé que 12 000. La remarque a le don d’agacer Christophe Clayette, de la CFDT : “Mais pourquoi ne prend-on pas ses heures dans certaines entreprises ? Parce que c’est mal vu des directions et même des collègues. Nous avons en France un manque de culture du dialogue social, ce sujet est absent des programmes scolaires. Je le vois quand je donne des cours dans un master, les étudiants découvrent tout ! Il faut que les branches s’emparent enfin du sujet de la reconnaissance des compétences acquises par les élus et délégués”.
Sur cette absence de culture, Olivier Mériaux ne peut qu’être d’accord. Il a bien noté que lors de la formation commune (managers, RH et représentants du personnel) animée par son cabinet dans un grand groupe industriel comptant 16 sites en France, il a fallu expliquer à certains cadres la différence entre un délégué syndical et un mandat d’élu !
Les demandes syndicales
Côté syndical, les demandes d’adaptation du CSE sont bien connues, ainsi que ses dérives.”Nos inquiétudes ont été confirmées, dit Patricia Devron, en charge de l’organisation juridique chez FO. On voit des employeurs qui redéfinissent des découpages d’établissement pour exclure certains syndicats ou réduire leur influence”. FO comme la CFDT réclame la levée de la limitation des 3 mandats successifs, la remise dans la boucle des suppléants (“nous voulons au moins qu’un suppléant puisse assister aux réunions”, revendique Patricia Devron), la CFDT plaidant aussi pour abaisser le seuil des CSSCT de 300 à 50 salariés.
La fin de la limite des 3 mandats successifs
Dans ce torrent de critiques, le chercheur Kevin Guillas-Cavan (Ires) a eu quelques paroles encourageantes. Dans les petites structures, le CSE a pu redonner de la visibilité et du sens au collectif d’élus, même si le paysage des IRP des PME est sans doute à investiguer, trop d’études ciblant les grandes entreprises.
La centralisation excessive des CSE ? “Elle a été engagée mais les entreprises ne sont pas allées au bout, les freins étant la nécessité d’avoir des CSSCT et de répondre aux besoins locaux en matière d’activités sociales et culturelles”. Mais Kevin Guillas-Cavan reconnaît avoir vu dans son enquête les dysfonctionnements des CSE souvent évoqués (encombrement de l’instance, difficultés à déléguer les missions entre élus, réunions décalées entre CSE et CSSCT et problème de travail en commun).
Les directions voudraient avoir un interlocuteur constamment disponible au CSE
De même, il souligne une attente des employeurs très chronophage voire bureaucratique pour le CSE : “La direction aimerait avoir un élu tout le temps disponible, mais cela va contre l’idée d’une représentation du personnel qui va voir les salariés pour comprendre ce qui se passe dans les collectifs de travail”. On peut conclure par cette réflexion de Rémi Bourguignon : “Il y a une forme de logique d’effacement syndical avec une instance comme le CSE, et la question du pluralisme syndical est posée. Certains responsables des relations sociales vantent ce pluralisme, mais il s’agit d’un pluralisme d’opinions individuelles, pas de positions syndicales”.
Ce compte-rendu d’une journée entière de présentation d’études et de débats, le vendredi 23 septembre à Bourg-la-Reine, près de Paris, ne saurait être exhaustif, d’autant que certaines thématiques ont déjà été traitées dans ces colonnes. Objectif de ces rencontres de l’ISTT et de l’Ires, selon les mots de Mathieu Saintoul, le président du conseil d’administration de l’ISTT : « Bénéficier de l’apport croisé de chercheurs de différentes disciplines (sociologues, économistes, juristes, etc.) et créer un dialogue avec les acteurs (syndicalistes, experts, négociateurs de branche, etc.) qui vivent dans leur quotidien et leurs mandats ces évolutions économiques et sociales ».
Rappelons que l’ISTT est l’institut des sciences sociales du travail. Outre une activité de recherche, l’ISST, qui est rattaché à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne, dispense des formations pour les conseillers prud’hommes et pour les salariés dans le cadre du congé de formation économique, sociale et syndicale.
L’Ires est l’institut de recherches économiques et sociales et travaille pour les organisations syndicales.
La déduction forfaitaire patronale sur les heures supplémentaires pour les entreprises entre 20 et 250 salariés sera de 0,5€ par heure supplémentaire
Dans un communiqué daté du 30 septembre 2022, le Bulletin officiel de la sécurité sociale (Boss) apporte des précisions sur la nouvelle déduction forfaitaire sur les cotisations patronales dues au titre des heures supplémentaires réalisées par les salariés des entreprises dont l’effectif est supérieur ou égal à 20 salariés et inférieur à 250 salariés (article 2 de la loi n° 1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat crée).
Son montant, qui doit faire l’objet d’un prochain décret, s’établit à 0,50 euro par heure supplémentaire (et à 3,5 euros par jour pour les salariés en convention de forfait en jours).
► Cette déduction est applicable sur les cotisations dues au titre des rémunérations dues au titre des heures réalisées à compter du 1er octobre 2022.
actuEL CE
Suivi DSN : un nouveau service pour fiabiliser les déclarations des entreprises
Sur son portail internet, le réseau des Urssaf informe les employeurs du secteur privé qu’ils peuvent désormais bénéficier de Suivi DSN (déclaration sociale nominative). Ce nouveau service permet d’être informé en cas d’anomalie détectée sur la déclaration sociale nominative (DSN), concernant les données individuelles et de cohérence avec les données agrégées. L’Urssaf indique alors l’origine et le détail de l’anomalie, les modalités de correction et les conseils pour ne pas les reproduire.
Ce nouveau service est accessible à partir du menu supérieur de l’espace en ligne de chaque entreprise. Si les droits d’accès ne sont pas ouverts, il convient de cocher la case “Tableau de bord Suivi DSN” depuis la rubrique “Mon profil”.
actuEL CE
Le CSE doit être consulté sur les projets qui déclinent les orientations stratégiques de l’entreprise
La consultation sur les orientations stratégiques ne dispense pas l’employeur de son obligation de consulter le CSE en cas de projet d’aménagement important résultant des nouvelles orientations stratégiques.
Récemment, une jurisprudence nous a appris que la consultation du comité social et économique sur un projet de réorganisation n’a pas à être précédée de l’information/consultation annuelle sur les orientations stratégiques de l’entreprise. En conséquence, il n’est pas possible pour un CSE, lorsqu’il est ponctuellement consulté sur un projet, de demander la suspension de cette consultation en faisant valoir que ce projet est une déclinaison concrète d’une orientation stratégique qui doit préalablement être soumise à la discussion du comité social et économique.
Mais attention, comme nous le montre une ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Créteil du 24 juin 2022 (lire en pièce jointe), en présence d’un projet qui constitue une déclinaison des nouvelles orientations stratégiques de l’entreprise, l’employeur doit bel et bien organiser une consultation propre à ce projet. Il ne peut pas se contenter d’annoncer les changements à venir au cours de la consultation sur les orientations stratégiques.
Le contexte
Dans le cadre de la consultation annuelle du CSE central sur les orientations stratégiques du groupe Fnac Darty, la direction de la société Relais Fnac annonce une nouvelle stratégie dénommée “Everyday”, comprenant notamment le déploiement d’un projet Click&Collect. Après plusieurs réunions entre avril et juillet 2021, au cours desquelles la direction a continué à fournir aux élus des informations sur le projet et a partagé les retours des expériences menées en région, le CSE central refuse de rendre son avis consultatif sur les orientations stratégiques du groupe Fnac Darty et leur déclinaison au sein de Fnac Relais.
Les demandes syndicales
Quelques mois plus tard, en février 2022, l’affaire est portée en justice. Le CSE central et plusieurs organisations syndicales demandent notamment au juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil :
d’ordonner la suspension immédiate du déploiement du projet Click&Collect dans l’ensemble des magasins de la société Fnac Relais ;
de juger que le projet Click&Collect constitue un projet important devant donner lieu à information/consultation du CSE central ;
de juger que les CSE régionaux doivent être consultés sur les mesures d’adaptation du projet à un ou plusieurs magasins de la région.
A l’appui de ces demandes, il est notamment avancé que le projet Click&Collect constitue “une nouvelle organisation dans laquelle le vendeur assurera le retrait des achats en ligne en lieu et place du logisticien actuellement en charge de cette mission”… et qu’il aura des “incidences en matière de santé et de sécurité en alourdissant la charge de travail des vendeurs et appauvrissant celle des logisticiens”. D’où l’obligation de consulter le CSE central au titre de l’article L. 2312-8 du code du travail, d’après lequel le CSE doit être informé et consulté sur “tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail”.
La réponse de l’employeur
Au contraire, pour la direction de Relais Fnac, un projet suffisamment abouti qui n’est que la déclinaison des orientations stratégiques doit nécessairement être présenté dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques. En conséquence, l’obliger à organiser “deux consultations distinctes sur un projet déjà abouti et présenté lors de la consultation sur les orientations stratégiques reviendrait à avoir deux fois les mêmes discussions”.
La décision du tribunal
Tout en reconnaissant que la société Relais Fnac “a fait preuve de transparence et de loyauté à l’égard des élus du CSEC”, le tribunal judiciaire décide que le projet Click&Collect constitue bien un aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et qu’il doit, à ce titre, faire l’objet d’une consultation du CSE central. D’après le juge, “la consultation du CSEC sur les orientations stratégiques ne saurait en l’espèce dispenser l’employeur de la consultation ponctuelle prévue par l’article L. 2312-8 du code du travail alors que l’objet de ces deux consultations sont distinctes”. Le CSE central ne pouvait donc pas être privé d’une consultation ponctuelle sur le projet Click&Collect qui lui permettra, avec l’éventuelle assistance d’un expert habilité, “un examen précis des impacts du projet sur les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail”.
Enfin, en ce qui concerne la consultation des CSE régionaux, il est jugé que les “nécessaires adaptations à opérer en fonction de la taille et de la configuration des magasins” rendent la seule consultation du CSE central insuffisante et justifient la consultation des CSER sur les mesures d’adaptation à un ou plusieurs magasins de la région.
Frédéric Aouate
Un nouveau convoi humanitaire intersyndical arrive en Ukraine
Selon un communiqué de presse de Solidaires (en pièce jointe), un convoi humanitaire a atteint la ville ukrainienne de Kryvyi Rih, dans le centre du pays. Cette aide a été organisée avec des syndicats étrangers, notamment la CSP Conlutas (Brésil), IP (Pologne), ADL Cobas (Italie), Cobas (Espagne), Émancipation (France) et TUC Liverpool (Royaume Uni). Il s’agit, selon Solidiaires, de “sa troisième action de solidarité sur place depuis le début de la guerre”. En avril 2022, un convoi intersyndical 100 % français avait été affrété par train.
actuEL CE
FO dénonce le rapport de la commission des comptes de la Sécurité sociale
“FO dénonce d’ores et déjà le discours qui s’installe : « Notre système de santé va bien, notre système de retraite va mal », alors que c’est tout l’inverse !”. Ainsi le syndicat Force ouvrière dénonce-t-il les derniers rapports de la commission des comptes de la Sécurité sociale. Chaque année depuis sa création en 1979, cette commission, rattachée au ministère de la santé, remet un rapport sur les comptes de la sécu (tous les rapports sont en ligne sur son site internet). Ses travaux servent aussi de base à l’élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Cette année, dans son rapport, la commission insiste sur une activité économique en berne, “des incertitudes accrues et un ralentissement prévisible en 2023”. Cette inflexion de la croissance aurait des conséquences sur les recettes de la sécu puisqu’elle réduit les rentrées de cotisations sociales. FO souligne à cet égard que “c’est aussi le dynamisme de la masse salariale (embauches et augmentations de salaires) qui a permis de faire rentrer beaucoup plus de cotisations sociales, et ce malgré toutes les exonérations de cotisation patronales”.
Il n’en reste pas moins que le syndicat est en désaccord avec le diagnostic de la commission, notamment sur les déficits de l’assurance maladie (en baisse) et du régime des retraites (en hausse) : “Ce serait le déficit de la branche vieillesse qui exploserait les prochaines années… Pratique pour justifier d’une énième réforme des retraites !”. Rappelons qu’à ce sujet, une réunion de concertation doit se tenir entre les partenaires sociaux et le ministre du travail mercredi 5 octobre. Enfin, FO dénonce “une instrumentalisation du rapport du COR pour présenter une situation alarmante du système de retraites et légitimer une réforme visant à limiter la hausse des dépenses publiques”.
actuEL CE
Election du CSE : on ne ferme pas à clé la salle de vote pour procéder au dépouillement du scrutin
Même si une baie vitrée permet d’assister au dépouillement des élections, le fait de fermer à clé la salle de vote pour dépouiller porte atteinte à la sincérité du scrutin et justifie l’annulation des élections.
Tout faire pour que l’élection du CSE se passe au mieux et sécuriser le plus possible le scrutin, l’intention est plus que louable. C’est même une nécessité juridique. Pour autant, sous peine d’annulation des élections, cela n’autorise pas à faire n’importe quoi. Ainsi fermer à clé la salle de vote au moment du dépouillement, même si une baie vitrée permet de voir ce qui s’y passe, pour éviter des débordements ou des fraudes, c’est n’importe quoi !
“Visualiser dans leur intégralité” les opérations de dépouillement
Bien évidemment, la Cour de cassation n’emploie pas ces termes pour condamner une telle façon de procéder et justifier l’annulation des élections. Dans cette affaire, il était notamment prévu que “les opérations de dépouillement, particulièrement houleuses lors du scrutin précédent, seraient opérées par un huissier dans des conditions permettant aux organisations syndicales et aux électeurs de les visualiser dans leur intégralité, et ce aux fins de prévenir toute manipulation des suffrages comme constatés lors des précédentes élections”.
A la demande de plusieurs organisations syndicales, le tribunal judiciaire annule les élections au motif “qu’il n’était pas possible pour les parties prenantes de circuler entre les tables de dépouillement pour s’assurer de la sincérité du scrutin”.
La sincérité des opérations est en jeu
Dans son arrêt du 21 septembre 2022, la Cour de cassation confirme cette annulation en rappelant que le fait de priver les électeurs de la possibilité d’accéder librement au lieu du dépouillement est de nature à affecter la sincérité des opérations électorales et constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections (articles L. 67 et R. 63 du code électoral).
Ici, il avait été constaté que “la porte d’accès à la salle de vote était fermée lors du dépouillement, ce qui interdisait aux candidats, à leurs représentants ainsi qu’à tout électeur d’y accéder librement”. En conséquence, “cette absence de publicité des opérations de dépouillement était de nature à affecter la sincérité du scrutin, peu important l’existence d’une baie vitrée offrant une vue sur la salle de vote”.
Retour à la case départ !
Frédéric Aouate
Sobriété énergétique : l’employeur incité à présenter au CSE une trajectoire de réduction de consommation
Le gouvernement a dévoilé hier les grands axes du plan de sobriété énergétique promis par Elisabeth Borne début septembre. Au-delà du référent sobriété dans chaque entreprise, les partenaires sociaux ont proposé un plan de 15 actions que les entreprises pourront reprendre à leur compte. Parmi elles, la présentation au CSE ou aux délégués syndicaux de la trajectoire de réduction de consommation d’énergie de l’entreprise.
Transports, bâtiments publics, restaurants, cinémas, stades, entreprises, ménages… Tout le monde ou presque devra faire des efforts. C’est le message qui résulte du plan de sobriété présenté hier par le gouvernement. Objectif : une baisse de 10 % de la consommation d’électricité et de gaz afin d’éviter les coupures l’hiver prochain. Les responsables de réseaux d’énergie alertent en effet depuis plusieurs semaines sur les risques qui pèsent sur les approvisionnements français. Sont en cause bien sûr la guerre en Ukraine et la baisse des approvisionnements de gaz qui en résultent. Mais Vladimir Poutine n’est pas responsable de tous les maux. La reprise économique post-Covid a entraîné un surplus de consommation d’énergie. Enfin, la France peine à entretenir son réseau de centrales nucléaires. Selon les journalistes de Reporterre, EDF aurait indiqué le 5 septembre “16 arrêts de réacteurs nucléaires pour maintenance ou maintenance courante, 14 pour des contrôles relatifs au problème de corrosion”.
En conséquence, l’énergie étant plus rare, son prix augmente. D’où les difficultés, réductions d’activités et remise de salariés en activité partielle. Le gouvernement veut donc préserver l’activité économique alors que des exemples d’entreprises françaises fermées pour cause de prix de l’énergie (comme la verrerie Duralex) ont résonné tout au long du mois de septembre. Les entreprises sont en effet exclues des tarifs réglementés qui protègent les ménages. Au même titre que les administrations publiques, elles sont donc visées elles aussi par le plan de sobriété énergétique élaboré par le gouvernement. Les partenaires sociaux ont à cette fin proposé un plan de 15 actions que les entreprises peuvent reprendre à leur compte. Parmi elles, la présentation au CSE ou aux délégués syndicaux de la trajectoire énergétique de l’entreprise.
Un plan de 15 actions proposé par les partenaires sociaux
Le 13 septembre dernier, les représentants des syndicats et du patronat ont abouti à un plan d’actions de sobriété à proposer aux entreprises. Selon Madeleine Gilbert qui a participé à l’élaboration du plan côté CFE-CGC, le travail a commencé en amont en juillet-août, “puis les syndicats se sont mis autour de la table et le Medef a compilé les différentes préconisations”. A noter que la CGT a refusé de valider le document final. Selon Véronique Martin, secrétaire en charge du dossier à la CGT, “on a fait part de nos revendications et propositions (baisser le temps de travail à 32 heures, enclencher un grand plan de rénovation énergétique…) mais elles n’ont pas été retenues” (lire en pièce jointe le communiqué de la CGT).
Le Medef a ensuite transmis les conclusions à Matignon qui les a inclues dans le plan de sobriété. Le gouvernement va désormais inciter les entreprises à adopter tout ou partie de ces actions, et à s’en faire l’écho sur un site internet où elles pourront déposer leur plan d’action complet.
Les actions sont organisées autour de 5 axes :
Lutter contre le gaspillage ;
Adapter et déployer un management de l’énergie ;
Soutenir la mobilité durable ;
Repenser l’organisation du travail ;
Prévoir le télétravail pour les situations d’urgence.
Des mesures qui concernent aussi les salariés
Ces axes regroupent des mesures comme la désignation du référent sobriété, annoncée en septembre par Elisabeth Borne et que les partenaires sociaux ont validé. On retrouve également les consignes qui concernent l’ensemble de la population comme la baisse du chauffage dans l’entreprise à 19 degrés, la réduction de l’éclairage lorsque les locaux sont inoccupés, la réalisation de diagnostics de performance énergétique. Mais les salariés auront aussi leur part à réaliser. Le plan inclut leur sensibilisation aux bons usages numériques. Les entreprises sont également encouragées à réduire les déplacements des salariés, les former à l’éco-conduite, ou encore privilégier le train plutôt que l’avion pour les trajets inférieurs à 4 heures.
Le plan d’action (page 20 du dossier de presse, ou dans la charte “Les entreprises s’engagent”, en pièces jointes) suggère aussi de les former aux écogestes, de leur faire éteindre leur ordinateur quand ils s’absentent, de privilégier la connexion wifi quand elle est disponible, de réduire la luminosité des écrans et éteindre ceux qui ne sont pas nécessaires. L’informatique constitue en effet un poste de dépense énergétique important. Le document encourage par exemple à éteindre les équipements réseaux quand ils ne sont pas utilisés. Les envois de mails sont par ailleurs plus énergivores que l’utilisation des logiciels de discussion car ils mobilisent de l’espace de stockage gourmand en données et en électricité.
Une occasion de dialogue social
Il y aura aussi du pain sur la planche en matière de dialogue social. Le plan propose la mise en œuvre d’un forfait de mobilités durables, ainsi qu’un crédit mobilité pour les salariés disposant d’un véhicule de fonctions. L’occasion pour les élus du CSE et/ou les délégués syndicaux de demander un point à l’employeur sur ces sujets dans le cadre de la négociation ou renégociation d’un accord.
Autre sujet et pas des moindres, les partenaires sociaux proposent la présentation aux CSE ou aux délégués syndicaux d’une trajectoire de réduction de la consommation d’énergie de l’entreprise ainsi que du plan d’action de sobriété. Une idée qui s’inscrit dans la droite ligne des nouvelles prérogatives environnementales du CSE issues de la loi climat de 2021, mais qui reste loin de l’instauration large d’une commission environnement au sein des CSE qui est pour l’instant mise en place uniquement par accord (article L.2315-45 du code du travail).
Enfin, le télétravail pourrait de nouveau s’inviter dans les négociations : selon le plan, “En cas de tension particulière sur le réseau prévoir avec les partenaires sociaux une organisation en télétravail adaptée. Le télétravail, associé à la fermeture des bâtiments concernés, pourrait être déclenché dans les situations d’urgence en cas de tension importante sur le réseau électrique, afin de maximiser les économies d’énergie liées à l’activité dans les bâtiments”. A noter que l’indemnité de télétravail des fonctionnaires va être revalorisée de 15 %, l’État comptant se montrer exemplaire. Il reste à voir ce que les négociateurs syndicaux parviendront à négocier avec les employeurs dans ce domaine.
Une campagne de communication lancée le 10 octobre
“Je baisse, j’éteins, je décale”. C’est le titre de la campagne qui sera diffusée sur l’ensemble des médias radio, presse et télévision, à compter du 10 octobre prochain jusqu’en février 2023. “Les Français se disent mal informés sur les écogestes, cette campagne vise à les aider car chaque geste compte”, a indiqué Matignon. 5 courts films de 5 secondes présenteront ainsi 5 gestes :
Régler le chauffage à 19 degrés ;
Installer un thermostat ;
Baisser le chauffe-eau à 55 degrés et rester moins longtemps sous la douche ;
Eteindre ou mettre en veille les appareils électriques ;
Décaler l’utilisation de ces appareils en dehors des périodes de pointe.
Enfin, une météo de l’énergie baptisée Écowatt sera diffusée. Directement empruntée au gestionnaire du réseau RTE, elle indiquera si la journée est à fort risque de surchauffe de consommation afin d’inciter citoyens et entreprises à baisser le courant.
Le plafond journalier des titres-restaurant passe à 25€ au 1er octobre
Un décret paru au Journal officiel du vendredi 30 septembre acte le relèvement au 1er octobre 2022 du montant journalier maximum utilisable pour les titres-restaurant, qui passe de 19 à 25€ par jour.
Rappelons que jusqu’au 31 décembre 2023, l’utilisation des titres-restaurant est autorisée pour régler tout produit alimentaire, directement consommable ou non.
actuEL CE
Déblocage exceptionnel de l’épargne salariale autorisé par la loi Pouvoir d’achat : il faut en informer les salariés avant le 16 octobre 2022
L’article 5 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a ouvert une possibilité de déblocage anticipé exceptionnel des droits issus de l’intéressement et de la participation, sur demande du bénéficiaire présentée d’ici au 31 décembre 2022.
► Le ministère du travail a publié le 13 septembre sur son site internet un questions-réponses détaillant les modalitésdu dispositif et répondant à certaines interrogations portant sur le texte de loi ou sa mise en œuvre.
Ce déblocage concerne non seulement les salariés mais aussi les anciens salariés et les dirigeants et leurs conjoints bénéficiaires d’un tel dispositif.
La mesure est entrée en vigueur le 18 août 2022.
D’ici le 16 octobre 2022, l’employeur doit informer les salariés de son existence.
Pour ce faire, certains employeurs ont pu obtenir un modèle de courrier d’information de la part de l’organisme gestionnaire de leur plan d’épargne salariale.
Pour accompagner au mieux ceux qui n’auraient pas bénéficier de ce service, nous vous proposons le modèle ci-joint.
actuEL CE
L’absence prolongée du salarié doit désorganiser l’entreprise, pas le seul service
Dans un arrêt du 6 juillet 2022, la Cour de cassation confirme qu’en cas d’absences prolongées ou répétées d’un salarié, l’employeur ne peut le licencier que si les absences perturbent le fonctionnement de l’entreprise, et non du seul service, obligeant l’employeur à remplacer définitivement le salarié.
Dans un arrêt du 6 juillet 2022, la Cour de cassation rappelle les règles de remplacement d’un salarié dont l’absence se prolonge.
Les absences du salarié doivent désorganiser l’entreprise et non le seul service
Un agent de piste engagé par la société Federal Express Corporation (Fedex Corporation) le 25 octobre 2000 est licencié pour cause réelle et sérieuse le 9 juillet 2008 en raison de ses absences. Le salarié conteste son licenciement. Il se pourvoit en cassation après que la cour d’appel a rejeté sa demande de dommages-intérêts et de licenciement sans cause réelle. Selon lui, ses absences n’avaient pas perturbé le fonctionnement de l’entreprise.
►Rappelons que si l’article L.1132-1du code du travail fait interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, ce texte ne s’oppose pas au licenciement motivé, non pas par l’état de santé du salarié, mais par la situation objective de l’entreprise qui se trouve dans la nécessité de pourvoir au remplacement définitif d’un salarié dont l’absence prolongée ou les absences répétées perturbent son fonctionnement.
S’appuyant sur ce principe, la Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel. En effet, les juges du fond avaient écarté la demande du salarié soulignant que l’employeur avait dû pallier l’absence du salarié par une organisation interne, et que cela justifiait bien le remplacement définitif de celui-ci. Toutefois, constate la Cour de cassation, la lettre de licenciement visait la désorganisation, non de l’entreprise, mais du service auquel appartenait le salarié.
Une solution constante de la Cour de cassation
La Cour de cassation confirme ici une solution constante. La perturbation doit être établie au niveau de l’entreprise et non du seul établissement ou service.
Lorsque l’entreprise comporte des établissements, le licenciement pour absence prolongée du salarié ne sera pas valable si l’employeur évoque des perturbations sur le fonctionnement du seul établissement (ou magasin) où travaille le salarié (arrêt du 23 janvier 2013 ; arrêt du 27 janvier 2016 ; arrêt du 19 mai 2016).
Elle a ainsi déjà eu l’occasion de préciser que le licenciement n’est pas valable si l’employeur invoque, dans la lettre de licenciement, une perturbation dans le fonctionnement du service dans lequel travaillait le salarié et non de l’entreprise (arrêt du 1er février 2017), sauf si les absences désorganisent l’entreprise (arrêt du 5 février 2020).
► A noter toutefois : la perturbation d’un service essentiel pour l’entreprise peut justifier le licenciement du salarié absent (arrêt du 23 mai 2017). .
Florence Mehrez
L’égalité salariale, un chantier prioritaire pour les salariés
Selon la douzième édition du baromètre sur l’égalité des chances présenté, hier, par le Medef et réalisé par TNS Kantar, l’égalité salariale en entreprise arrive en première position des chantiers prioritaires pour les salariés en matière d’égalité des chances. 53 % des 1 500 personnes interrogées en mai dernier considèrent l’égalité salariale comme un sujet prioritaire pour leur entreprise et 20% la citent en premier.
L’égalité entre les femmes et les hommes arrive en deuxième position (49 %) des préoccupations, suivie par l’âge (39 %) et le regard porté sur le handicap (35 %).
La crainte d’être victime de discrimination est en recul (-2 points par rapport à 2021). Mais 32 % des salariés pensent toutefois qu’ils pourraient un jour être victime de discrimination au sein de leur entreprise. Une peur partagée de la même façon par les femmes et les hommes.
Enfin, selon cette étude, de nouveaux sujets de tensions apparaissent en entreprise dont la politique, les théories complotistes mais aussi la protection de l’environnement et des animaux. Un nombre croissant de répondants (36 %, en hausse de huit points) estiment avoir été confrontés à au moins un comportement “extrême” sur un de ces sujets.
actuEL CE
Comment déclarer le rachat de RTT en DSN ?
Sur son portail internet, le réseau des Urssaf fait le point sur les exonérations attachées au paiement des jours de RTT, comme le permet désormais la loi de finances rectificative pour 2022.
L’Urssaf rappelle que les salariés, avec l’accord de leur employeur, peuvent convertir les jours de repos non pris depuis le 1er janvier 2022 et jusqu’au 31 décembre 2025 en salaire. Les journées ou demi-journées travaillées et rachetées par l’employeur à compter du 18 août 2022, sont majorées d’un montant au moins égal au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable dans l’entreprise (25 % en l’absence d’accord collectif).
Ces sommes bénéficient, selon les mêmes conditions que pour les heures supplémentaires :
pour le salarié : de la réduction de cotisations salariales quel que soit l’effectif de l’entreprise ;
pour l’employeur : de la déduction forfaitaire patronale uniquement pour les entreprises de moins de 20 salariés.
Il est précisé que les montants doivent être déclarés par l’employeur en DSN via les codes types de personnels suivants :
CTP 096 pour la réduction de cotisations salariales ;
CTP 097 pour la déduction forfaitaire de cotisations patronales pour les employeurs de moins de 20 salariés.
actuEL CE
Le délai de deux mois pour demander la nullité d’un accord de branche court à compter de la publication au BOCC
Dans un arrêt du 21 septembre 2022, la Cour de cassation indique que le délai de deux mois pour intenter une action nullité d’un accord collectif court à compter de la publication de l’accord dans le Bulletin officiel des conventions collectives. Une interprétation conforme à la position de l’administration du travail et permettant d’assurer une plus grande sécurité juridique.
L’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective a fixé un délai de deux mois pour demander la nullité d’un accord collectif. L’ordonnance prévoit que ce délai est décompté différemment selon la situation :
deux mois à compter de la notification de l’accord d’entreprise aux organisations représentatives pour les organisations disposant d’une section syndicale dans l’entreprise ;
ou deux mois à compter de la publication de l’accord dans la base de données publiques dans les autres cas.
Toutefois, le ministère du travail dans son questions-réponses sur la négociation collective à la suite de la publication des ordonnances du 22 septembre 2017 a apporté des précisions sur le décompte de ce délai de deux mois. Ainsi, il convient de distinguer les accords de branche des autres. Si, en principe, le délai de deux mois court à compter de la publication de l’accord sur le site légifrance.fr, il court dès publication de l’accord au Bulletin officiel des conventions collectives (BOCC) pour les accords de branche.
Le délai de deux mois court à compter de la publication au BOCC
La fédération des travailleurs de la métallurgie CGT a assigné, le 29 novembre 2018, la fédération patronale de la métallurgie, l’UIMM, la fédération des cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC, la fédération confédérée FO de la métallurgie et la fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT pour demander l’annulation de l’accord national du 29 juin 2018 relatif aux CDD et au contrat de travail temporaire.
Sa demande est toutefois rejetée, les juges du fond estimant qu’elle est irrecevable, le délai de deux mois étant échu. En effet, constatent les juges, l’accord a été publié dans le Bulletin officiel des conventions collectives (BOCC) le 15 septembre 2018.
Le syndicat conteste cette décision et soutient devant la Cour de cassation que la cour d’appel aurait du vérifier que la parution de l’accord de la métallurgie du 29 juin 2018 au Bulletin officiel des conventions collectives répondait bien à l’exigence légale d’une publication en ligne “dans un standard ouvert aisément réutilisable”. Il conteste la position des juges du fond selon laquelle cette formalité “n’est qu’une modalité complémentaire de publication qui n’est ni cumulative, ni alternative, ni exclusive. Le syndicat estime que la cour d’appel n’a pas respecté la lettre de l’article L.2262-14 du code du travail en faisant courir le délai de l’action en nullité à compter de la publication de l’accord de branche dans le BOCC et non de sa mise en ligne sur la base publique sur le site Légifrance. Or, les syndicats ne disposaient pas de la liste actualisée et complète des accords publiés sur ce site, soutiennent-ils.
Pourtant, la Cour de cassation approuve l’argumentation de la cour d’appel. Selon elle, “le délai de forclusion pour agir en nullité d’un accord de branche court à compter de la date à laquelle l’accord de branche a été rendu public par sa publication au Bulletin officiel des conventions collectives qui, en conférant date certaine, répond à l’objectif de sécurité juridique”.
Elle reprend l’argumentation selon laquelle “le versement dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable, n’est qu’une mesure complémentaire répondant à l’objectif d’accessibilité de la norme de droit”.
Une interprétation qui n’allait pas de soi à la lecture de l’article L.2262-14 du code du travail…
Florence Mehrez
58 % des DRH pensent négocier à l’avenir sur les salariés aidants
Une enquête publiée hier par l’Observatoire Orcip sur les salariés aidants en partenariat avec Viavoice livre le point de vue des DRH sur le sujet.
Ainsi, 78% des DRH estiment que le soutien aux salariés proches aidants constitue un levier de performance pour leur entreprise.
Les quatre premières motivations des DRH pour soutenir les salariés aidants sont les suivantes :
l’impact social, l’ambiance de travail ;
la responsabilité de l’employeur liée à la santé au travail ;
le capital humain de l’entreprise ;
la RSE
Selon les DRH, les actions les plus efficaces pour soutenir les salariés sont :
un aménagement horaire, une flexibilité horaire (44 %) ;
des informations sur leurs droits, les dispositifs proposés (40 %) ;
des solutions de répit pour qu’ils aient du temps pour eux (37 %) ;
des aides et services personnalisés en fonction de la situation personnelle du salarié aidant (36 %).
Les DRH se disent par ailleurs majoritairement favorables à la négociation collective sur les salariés aidants. 85 % approuvent l’obligation légale de négocier sur les aidants au niveau de la branche et 58 % jugent probable que leur entreprise négocie à l’avenir sur les salariés aidants.
S’agissant des aides, 56 % des DRH se déclarent favorables à un système d’aide dédié aux salariés proches aidants et 74 % à la mutualisation des coûts du soutien aux aidants dans un dispositif de prévoyance collective.
ActuEL CE
Lanceurs d’alerte : les entreprises d’au moins 50 salariés doivent actualiser leur procédure interne
Attendu pour le 1er septembre, le décret d’application de la loi du 21 mars 2022 relative à la protection des lanceurs d’alerte est paru le 4 octobre 2022. Il fixe le contenu de la procédure de recueil des alertes internes, obligatoire dans les entreprises de 50 salariés et plus, et s’applique dès le 5 octobre 2022. Ce changement nécessite la consultation du CSE.
La loi 2022-401 du 21 mars 2022 relative à la protection des lanceurs d’alerte a notamment modifié les dispositions de la loi « Sapin 2 » (loi 2016-1691 du 9 décembre 2016), élargi le champ des bénéficiaires du statut protecteur du lanceur d’alerte, et simplifié les modalités de signalement de faits illicite. La plupart de ses dispositions sont entrées en vigueur le 1er septembre 2022. Paru le 4 octobre au Journal officiel, le décret du 3 octobre 2022, applicable à partir du 5 octobre 2022, modifie le contenu des procédures internes de recueil et de traitement des alertes professionnelles devant être mises en place par les entreprises d’au moins 50 salariés. Ce texte abroge le précédent décret du 19 avril 2017.
Le décret fixe les modalités de recueil et de traitement des alertes externes et établit la liste des autorités compétentes pour recevoir un tel signalement externe. Nous ne détaillons pas ici cette procédure de signalement externe, mais rappelons que depuis le 1er septembre 2022, un lanceur d’alerte a la possibilité d’effectuer directement un signalement externe, même sans avoir préalablement effectué un signalement interne à l’entreprise (loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016, art. 8, II modifié).
Quelles sont les entreprises concernées ?
Les personnes morales de droit privé et celles de droit public employant des personnels dans les conditions du droit privé sont tenues d’établir une procédure interne de recueil et de traitement des alertes professionnelles dès lors qu’elles emploient au moins 50 salariés.
Ce seuil est apprécié à la clôture de deux exercices consécutifs et est déterminé selon les modalités prévues au I de l’article L 130-1 du code de la sécurité sociale (décret art. 2, I).
► A noter Ce seuil était auparavant apprécié en application des articles L 1111-2, L 111-3 et L 2322-2 du Code du travail. L’effectif annuel « sécurité sociale » correspond à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l’exercice de l’année civile précédente, sans comptabiliser les mois au cours desquels aucun salarié n’est employé. Il est calculé par l’Urssaf à partir des informations contenues dans les DSN (déclarations sociales nominatives) de chaque entreprise.
Comment mettre en place la procédure interne ?
Les entreprises ou organismes concernés sont tenus d’établir leur procédure interne de recueil et de traitement des signalements conformément aux règles qui régissent l’instrument juridique qu’ils adoptent, après consultation des instances de dialogue social (décret art. 3, I).
► A noter Selon la notice du décret, chaque entreprise concernée détermine l’instrument juridique le mieux à même de répondre à cette obligation. Par exemple, une entreprise pourrait l’établir par une note de service. Par ailleurs, notamment dans les groupes de sociétés, des entreprises peuvent adopter des procédures identiques à plusieurs d’entre elles, sous réserve d’une décision concordante des organes de compétents de chacune d’elles.
En tout état de cause, quel que soit l’instrument juridique choisi par l’entreprise, la consultation préalable du CSE, prévue par la loi, n’est pas une option, elle s’impose.
Que doit prévoir la procédure interne ?
Un canal de réception des signalements
La procédure instaure un canal de réception des signalements permettant aux personnes autorisées à adresser un signalement interne d’adresser celui-ci par écrit ou à l’oral, selon ce que prévoit la procédure. Ce canal de réception permet de transmettre tout élément, quel que soit sa forme ou son support, de nature à étayer le signalement de faits relevant du domaine de l’alerte professionnelle qui se sont produits ou sont très susceptibles de se produire dans l’entreprise concernée (décret art. 4, I). S’agissant des garanties accordées aux personnes ou services désignés pour recueillir et traiter ces signalements, voir ci-dessous.
Les personnes suivantes peuvent adresser un signalement en interne :
les salariés, anciens salariés et candidats à l’embauche ;
les actionnaires, les associés et les titulaires de droits de vote au sein de l’assemblée générale ;
les membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance ;
les collaborateurs extérieurs ou occasionnels ;
les cocontractants de l’entreprise concernée, leurs sous-traitants ou les membres du personnel et de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance de ces cocontractants et sous-traitants (Loi du 2016-1691 art. 8, I A modifié).
Les signalements de faits relevant du domaine de l’alerte concernent des informations, que le lanceur d’alerte a obtenu dans le cadre de ses activités professionnelles et qu’il signale sans contrepartie financière et de bonne foi, portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, du droit de l’Union européenne, de la loi ou du règlement (loi du 2016-1691 art. 6, I modifié).
Des garanties d’indépendance, d’impartialité et de confidentialité
La procédure interne de recueil et de traitement des alertes professionnelles doit (décret art. 5, I) :
indiquer la ou les personnes ou le ou les services désignés par l’entreprise pour recueillir et traiter les signalements. Ces personnes ou services disposent, par leur positionnement ou leur statut, de la compétence, de l’autorité et des moyens suffisants à l’exercice de leurs missions ;
prévoir les garanties permettant l’exercice impartial de leurs missions.
Elle doit également (décret art. 6, I):
garantir l’intégrité et la confidentialité des informations recueillies dans un signalement, notamment l’identité de l’auteur du signalement, des personnes visées par celui-ci et de tout tiers qui y est mentionné ;
interdir l’accès à ces informations aux membres du personnel qui ne sont pas autorisés à en connaître ;
prévoir la transmission sans délai aux personnes ou services compétents les signalements reçus par d’autres personnes ou services.
Les informations recueillies dans le cadre d’un signalement interne ne peuvent être communiquées à des tiers que si cette communication est nécessaire pour traiter le signalement et dans le respect des dispositions du I de l’article 9 de la loi du 9 décembre 2016 (décret art. 6, I al.3).
Les éléments de nature à identifier le lanceur d’alerte ne peuvent être divulgués qu’avec son consentement, sauf à l’autorité judiciaire lorsque les personnes chargées du recueil et du traitement des signalements sont tenues de dénoncer les faits auprès du juge. Dans ce cas, le lanceur d’alerte est informé de cette divulgation à l’autorité judiciaire, à moins que cette information risque de compromettre la procédure judiciaire (Loi 2016-1691 art. 9, I modifié).
Un signalement oral peut être prévu
Si la procédure prévoit la possibilité d’adresser un signalement par oral, elle précise que ce signalement peut s’effectuer par téléphone ou par tout autre système de messagerie vocale et, sur demande de l’auteur du signalement et selon son choix, lors d’une visioconférence ou d’une rencontre physique organisée au plus tard 20 jours ouvrés après réception de la demande (décret art. 4, I).
Le décret prévoit les modalités de consignation d’un signalement effectué oralement, en fonction de ce que prévoit la procédure interne :
lorsqu’il est recueilli, avec le consentement de son auteur, sur une ligne téléphonique enregistrée ou sur un autre système de messagerie vocale enregistré, le signalement est consigné soit en enregistrant la conversation sur un support durable et récupérable, soit en la transcrivant de manière intégrale ;
lorsqu’il est recueilli sur une ligne téléphonique non enregistrée ou sur un autre système de messagerie vocale non enregistré, un procès-verbal précis de la conversation est établi ;
lorsqu’il est recueilli dans le cadre d’une visioconférence ou d’une rencontre physique, il est établi, avec le consentement de son auteur, soit un enregistrement de la conversation sur un support durable et récupérable, soit un procès-verbal précis.
Dans tous les cas, l’auteur du signalement a la possibilité de vérifier, rectifier et approuver la transcription de la conversation ou le procès-verbal par l’apposition de sa signature.
Les enregistrements, transcriptions et procès-verbaux ne peuvent être conservés que le temps strictement nécessaire et proportionné au traitement du signalement et à la protection de leurs auteurs, des personnes qu’ils visent et des tiers qu’ils mentionnent (décret art. 6, II).
► A noter Ces précisions concernant la possibilité d’un signalement oral et ses modalité de réalisation et de conservation constituent une nouveauté.
Un accusé de réception du signalement
La procédure doit prévoir que l’auteur du signalement est informé par écrit de la réception de son signalement dans un délai de 7 jours ouvrés à compter de cette réception (décret art. 4, I al. 3).
Une vérification de la conformité du signalement au cadre de la protection des lanceurs d’alerte
A réception d’un signalement, l’entreprise vérifie, sauf si le signalement est anonyme, que ce signalement respecte les conditions prévues par l’article 6 et le A du I de l’article 8 de la loi du 9 décembre 2016 modifiée. Elle peut, à cette fin, demander tout complément d’information à l’auteur du signalement. A cet égard, la procédure peut prévoir (sauf si le signalement est anonyme), que l’auteur transmet en même temps que son alerte tout élément justifiant qu’il appartient à l’une des catégories de personnes autorisées à émettre un signalement (décret article 4, II al. 1 et II al. 1).
Par ailleurs, la procédure doit (décret art. 4, II al. 2 et 3) :
prévoir que l’auteur du signalement est informé des raisons pour lesquelles l’entreprise estime, le cas échéant, que son signalement ne respecte pas les conditions relatives à la protection des lanceurs d’alerte ;
préciser les suites données aux signalements qui ne respectent pas ces conditions, ainsi que les suites données aux signalements anonymes.
Dans le cadre d’un groupe de société, lorsque l’entreprise estime que le signalement qu’elle a reçu porte sur des faits qui se sont produits ou sont très susceptibles de se produire dans une entreprise appartenant au même périmètre de consolidation des comptes, au sens de l’article L 233-16 du Code de commerce, elle peut inviter l’auteur du signalement à l’adresser également à cette dernière, ou, si elle estime que le signalement serait traité de manière plus efficace par cette seule autre entreprise, inviter son auteur à retirer le signalement qu’elle a reçu (décret art. 4, II al. 4).
Les modalités de traitement des signalements
Lorsque le signalement relève du cadre de l’alerte internet, l’entreprise assure le traitement du signalement. Elle peut demander tout complément d’information à l’auteur du signalement afin d’évaluer l’exactitude de ses allégations (décret art. 4 III al. 1 et 2).
Lorsque les allégations lui paraissent avérées, l’entreprise met en œuvre les moyens à sa disposition pour remédier à l’objet du signalement. Si les allégations sont inexactes ou que le signalement est devenu sans objet, elle procède à la clôture du signalement (décret art. 4, III al 3 et 5).
La procédure doit prévoir que :
l’entreprise communique par écrit à l’auteur du signalement, dans un délai raisonnable n’excédant pas 3 mois à compter de l’accusé de réception du signalement (ou, à défaut d’accusé de réception, 3 mois à compter de l’expiration d’une période de 7 jours ouvrés suivant le signalement), des informations sur les mesures envisagées ou prises pour évaluer l’exactitude des allégations et, le cas échéant, remédier à l’objet du signalement ainsi que sur les motifs de ces dernières (décret art. 4, III, al. 4) ;
l’auteur du signalement est informé par écrit de la clôture du dossier (décret art. 4, III al. 5).
Quelle diffusion de la procédure ?
La procédure interne de recueil et de traitement des alertes internes doit être diffusée par tout moyen assurant une publicité suffisante, notamment par voie de notification, affichage ou publication, le cas échéant sur le site internet de l’entreprise ou par voie électronique, dans des conditions permettant de la rendre accessible de manière permanente aux personnes mentionnées susceptibles de l’utiliser.
L’entreprise doit également mettre à disposition des informations claires et facilement accessibles concernant les procédures de signalement externe ouvertes aux salariés (décret art. 8).
Des possibilités d’externalisation et de mutualisation
Les entreprises assujetties à l’obligation de mettre en place une procédure interne de recueil et de traitement des alertes professionnelles peuvent prévoir dans cette procédure que le canal de réception des signalements est géré pour son compte en externe par un tiers, qui peut être une personne physique ou une entité de droit privé ou publique dotée ou non de la personnalité morale, mais doit respecter les garanties d’impartialité et de confidentialité prévues par le présent décret (décret art. 7, I).
Les entreprises employant moins de 250 salariés peuvent prévoir, après décision concordante de leurs organes compétents, que le canal de réception des signalements et l’évaluation de l’exactitude des allégations formulées dans le signalement font l’objet de ressources partagées entre elles, sans préjudice des autres obligations qui leur incombent (décret, art. 7, II). Ce peut être notamment le cas lorsqu’elles appartiennent à un même groupe.
Aliya Benkhalifa
L’Assemblée nationale adopte les amendements sur l’abandon de poste
Hier en séance publique, l’Assemblée nationale a adopté les amendements au projet de loi portant mesures d’urgence sur le travail et qui portent sur l’abandon de poste. Ces amendements créent une présomption de démission lorsqu’un salarié abandonne son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure par son employeur (lire par exemple l’amendement n° 388 Rect.).
Même s’il s’agit à priori d’une présomption simple, qui peut être renversée par preuve contraire, plusieurs députés ont pointé qu’une telle mesure revient à insécuriser juridiquement le régime des démissions (qui, en l’état actuel de notre droit, ne peuvent pas être présumées) et des licenciements pour faute. D’autres ont relevé que le gouvernement ne dispose d’aucune documentation sur l’abandon de poste, ni d’aucune évaluation sur la portée de la mesure. D’autres enfin ont souligné que les abandons de postes servent souvent à ouvrir une négociation de rupture conventionnelle avec l’employeur, et que les cas sont très minoritaires. Considérer le salarié en abandon de poste revient également à le priver d’allocations chômage.
actuEL CE
Salariés aidants : les entreprises encore frileuses
Alors que la Journée nationale des aidants a eu lieu aujourd’hui, le 6 octobre, un sondage de l’ANDRH dévoilé deux jours plus tôt, montre que les entreprises sont encore frileuses sur ce sujet. 52 % des DRH interrogés indiquent ainsi ne mener aucune action particulière en direction de ces salariés aidants. 31 % mettent en place des actions de dons de RTT ou de congés et 11 % des campagnes de sensibilisation.
actuEL CE
Une prime de partage de la valeur de 750€ à 1 750€ chez Nexans
La direction de Nexans a versé fin septembre à 80% de ses salariés une prime de partage de la valeur d’un montant allant de 750€ à 1 750€. “Cette mesure d’urgence pour le pouvoir d’achat bénéficie à tous les salariés et sous-traitants dont le salaire est inférieur ou égal à trois SMIC. Néanmoins, cette prime reste une solution transitoire face à une inflation record”, réagit Stéphane Zidouh, délégué syndical central FO Nexans. Pour ce dernier, “une prime ne pourra jamais se substituer à une hausse des salaires” et il faudra d’autres avancées lors des NAO, qui ont été avancées à la fin de l’année.
actuEL CE
Les députés adoptent le projet de loi sur le marché du travail
Les députés ont adopté, le 6 octobre, le projet de loi sur le marché du travail. De nouvelles dispositions ont été ajoutées au texte par la voie d’amendements. Assurance chômage, abandon de poste, cumul de CDD, élections professionnelles, VAE : nous détaillons les mesures contenues dans le texte.
Les députés ont achevé hier l’examen du projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi. Le vote solennel sur le texte aura lieu ce mardi. Le projet de loi a été amendé en séance publique qu’il s’agisse des mesures sur l’assurance chômage ou de la validation des acquis de l’expérience.
Emploi
Assurance chômage
L’un des objectifs de ce projet de loi est de permettre au gouvernement de déterminer, par décret en Conseil d’Etat, les mesures d’application des dispositions législatives relatives à l’assurance chômage à compter du 1er novembre 2022. Ce décret sera pris après la concertation qui doit s’ouvrir avec les partenaires sociaux. Le gouvernement envisage de prolonger les mesures existantes, mais également de les compléter par des mesures contracycliques.
► Un amendement adopté en séance publique prévoit que la situation spécifique des collectivités ultramarines peut justifier d’éventuelles adaptations des règles d’indemnisation.
Ces mesures sont applicables jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023.
Parallèlement, le texte proroge jusqu’au 31 août 2024 le dispositif de bonus-malus, visant à moduler la contribution patronale d’assurance chômage, à compter du 1er septembre prochain. Le décret précité devra préciser, notamment, les périodes de mise en œuvre de la modulation du taux de contribution des employeurs concernés, ainsi que les périodes au cours desquelles est constaté le nombre de fins de contrat de travail et de contrats de mise à disposition pris en compte pour le calcul du taux modulé.
Le projet de loi prévoit également, s’agissant du bonus-malus, que “les données nécessaires à la détermination du nombre de fins de contrat, y compris celles relatives aux personnes concernées par les fins de contrat prises en compte qui sont inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi, peuvent être communiquées à l’employeur par les organismes chargés du recouvrement des contributions d’assurance chômage dans des conditions qui seront fixées par décret”. Cette mesure s’appliquera aux taux notifiés aux employeurs pour les périodes courant à compter du 1er septembre 2022.
Deux nouveaux rapports inscrits dans le projet de loi
Par deux amendements ajoutés au texte, les députés ont décidé : d’une part, de la remise d’un rapport, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, par Pôle emploi au Parlement portant sur l’application des dispositions relatives à l’offre raisonnable d’emploi et les évolutions constatées depuis l’entrée en vigueur de la loi du 5 septembre 2018 ; d’autre part, de la remise d’un rapport, dans le délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, portant sur le caractère conforme des offres d’emplois diffusées par Pôle emploi.
Assimiler l’abandon de poste à une présomption de démission
Les députés ont saisi l’occasion de ce projet de loi pour tenter de sécuriser la pratique de l’abandon de poste. Jusqu’à présent, face à abandon de poste, l’employeur n’avait pas d’autre choix que de licencier le salarié (bien souvent pour faute grave).
Le projet de loi crée un nouvel article L.1237-1-1 du code du travail selon lequel l’abandon de poste constitue une présomption simple de démission. Il est ainsi prévu : “Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure à cette fin, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, est présumé démissionnaire. Le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption peut saisir le conseil de prud’hommes. L’affaire est directement portée devant le bureau de jugement qui se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associées. Il statue au fond dans un délai d’un mois suivant sa saisine. Un décret en Conseil d’Etat détermine les modalités d’exécution du présent article”.
L’un des objectifs de cette disposition est que le salarié qui abandonne son poste ne puisse plus percevoir d’allocation chômage. L’autre but est de limiter le recours des salariés à la pratique de l’abandon de poste lorsqu’ils souhaitent que leur relation de travail cesse.
“Cette disposition ne s’appliquerait pas aux salariés qui quittent leur poste pour des raisons de santé ou sécurité conformément à la jurisprudence constante de la Cour de cassation sur les abandons de poste”, est-il précisé dans l’exposé des motifs des amendements ayant introduit cette mesure dans le texte.
Réactivation de l’expérimentation sur la succession de CDD ou de contrats de mission
La loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018 avait introduit, à titre expérimental, entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2020, la possibilité pour les entreprises de conclure un seul contrat court (CDD ou contrat de mission) pour remplacer plusieurs salariés absents, soit simultanément, soit successivement. L’expérimentation a concerné 11 secteurs définis par le décret du 18 décembre 2019 (1). Depuis l’expérimentation n’avait pas été prolongée.
Le projet de loi réactive l’expérimentation avant – éventuellement – de la pérenniser. La conclusion de ces contrats pourra intervenir de la date d’entrée en vigueur du présent article au 31 décembre 2024. “A titre expérimental et par dérogation respectivement au 1° de l’article L.1242-2 du code du travail et au 1° de l’article L.1251-6 du même code, un seul contrat à durée déterminée ou un seul contrat de mission peut être conclu pour remplacer plusieurs salariés dans les secteurs définis par décret. L’expérimentation ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise”.
En effet, constatent les auteurs des amendements à l’origine de cette relance, “il ressort du bilan de cette expérimentation que les branches et les entreprises éligibles au dispositif ne s’en sont pas pleinement saisies, ou très tardivement, notamment en raison du contexte de crise sanitaire. Les retours sont néanmoins positifs s’agissant du secteur sanitaire et social, caractérisé par la nécessité d’assurer une continuité des soins”.
Le gouvernement devra remettre au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 1er juin 2025, évaluant en particulier, dans les secteurs mentionnés au premier alinéa du présent article, les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion à durée déterminée et des contrats de mission ainsi que sur l’allongement de leur durée, et les conséquences des négociations de branche portant sur les thèmes mentionnés au 7° de l’article L.2253-1 du code du travail (les mesures relatives aux CDD et aux contrats de travail temporaire).
Elections professionnelles
Le projet de loi vise à sécuriser les élections professionnelles après la censure du Conseil constitutionnel, en novembre 2021, des dispositions du code du travail définissant le corps électoral dans les entreprises à compter du 1er novembre 2022. Les Hauts magistrats, saisis d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par un syndicat CFE-CGC, avaient en effet, estimé que les salariés disposant d’une délégation ou d’un pouvoir de représentation de l’employeur ne pouvaient pas être privés de toute possibilité de participer en tant qu’électeur à l’élection du CSE.
S’agissant de l’électorat, il est désormais prévu à l’article L.2314-18 du code du travail (modifié à la marge) que “sont électeurs l’ensemble des salariés âgés de 16 ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relatives à leurs droits civiques”.
S’agissant de l’éligibilité, l’article L.2314-19 du code du travail est ainsi modifié : “Sont éligibles les électeurs âgés de 18 ans révolus, et travaillant dans l’entreprise depuis un an au moins, à l’exception des conjoint, partenaire d’un pacte civil de solidarité, concubin, ascendants, descendants, frères, sœurs et alliés au même degré de l’employeur, ainsi que des salariés qui disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise ou qui le représentent effectivement devant le comité social et économique. Les salariés travaillant à temps partiel simultanément dans plusieurs entreprises ne sont éligibles que dans l’une de ces entreprises. Ils choisissent celle dans laquelle ils font acte de candidature”.
Ces dispositions entreront en vigueur le 1er novembre 2022.
Le régime juridique de la VAE est modifié
C’est quasiment à l’unanimité que les députés ont voté, le 5 octobre, dans la nuit, l’article 4 du projet de loi Marché du travail, consacré à la validation des acquis de l’expérience (VAE), avec 200 voix favorable au texte, et cinq contres. Comme prévu dans sa version initiale, il étend la VAE aux aidants familiaux pour leur permettre de faire valoir les compétences acquises auprès d’un membre de leur famille dépendant ou en fin de vie. Mais les débats, en commission des affaires sociales puis en séance publique, ont aussi permis de poser les premiers jalons d’une réforme plus globale, en simplifiant le parcours d’accès des candidats, considéré comme “un parcours du combattant”. C’est-à-dire “une démarche difficile et contraignante pour une issue incertaine”.
Prise en compte des périodes de mise en situation en milieu professionnel
L’une des mesures phares est d’ouvrir la durée minimale d’expérience requise pour prétendre à la VAE aux périodes de mise en situation en milieu professionnel qui ont permis d’acquérir ou de développer des compétences. Un changement de braquet important. Jusqu’ici, seules les compétences acquises dans le cadre professionnel ou extra-professionnel (bénévolat, expériences syndicale, associative, sportive) étaient valorisées. Les proches aidants ou aidants familiaux, qui n’avaient pas de statut, ne pouvaient donc pas apporter la preuve de leurs savoir-faire.
Un accompagnement en amont
Par ailleurs, l’accompagnement des postulants débutera, non plus en aval, une fois le dossier jugé “recevable”, comme le prévoit l’article L.6121-1 du code du travail, mais dès le début de la démarche : les postulants pourront être accompagnés dans la “préparation” et la “constitution” de leur dossier (récapitulatif complet des compétences, tant dans le domaine des tâches qu’ils maîtrisent que des imprévus qu’ils ont su gérer). Lequel est ensuite transmis à l’organisme certificateur (ministères, universités, établissements publics, chambres consulaires, branches professionnelles, certificateurs privés).
Un accord de branche pourra élargir l’accompagnement à l’ensemble des salariés concernés et non plus uniquement à “certains publics”.
La durée du congé VAE est doublé
Pour rendre la VAE plus attractive, la nouvelle version du projet de loi donne, via un amendement voté en commission des affaires sociales, la possibilité aux candidats d’obtenir une VAE partielle, via l’obtention de blocs de compétences enregistrés au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Par ailleurs, elle double la durée du congé de VAE de 24 heures à 48 heures pour permettre au candidat de disposer “d’un temps nécessaire à la préparation de son épreuve de validation”.
La composition des jurys définie par décret
D’autres assouplissements sont attendus. Le texte tente ainsi de “déverrouiller” les modalités de composition des jurys de VAE en abrogeant l’article L.613-4 du code de l’éducation qui prévoyait que les membres du jury étaient désignés “par le président de l’université ou le chef de l’établissement d’enseignement supérieur en fonction de la nature de la validation demandée”. Et que ce jury devait comprendre “outre les enseignants-chercheurs qui en constituent la majorité, des personnes compétentes pour apprécier la nature des acquis, notamment professionnels, dont la validation est sollicitée”. A la place, il prévoit qu’un décret du conseil d’Etat précisera les modalités d’organisation et de composition de ce jury.
Le projet de loi prévoit également la possibilité de déroger à l’accès des titres et diplômés par la VAE. Ces dérogations “à la nature des diplômes ou titres en cause aux conditions d’exercice des professions auxquelles ils permettent d’accéder” seront également déterminées par décret. L’objectif visé étant de “réduire les délais de certification à la suite des parcours de validation”.
Les associations Transitions Pro à la manœuvre
Côté financement, les associations transitions professionnelles (Transitions pro) sont de nouveau mises à contribution : elles pourront financer de manière forfaitaire, dans la limite de 3 000 euros, les parcours de validation des acquis de l’expérience (VAE) des candidats (frais d’inscription auprès de l’école ou de l’organisme certificateur, de constitution du dossier, de préparation au jury de validation).
Le projet de loi pérennise, en effet, les mesures ad hoc de l’ordonnance du 1er avril 2020 qui visaient notamment les salariés placés en activité partielle. Il prévoit ainsi que les associations Transitions pro pourront prendre en charge, dans des conditions fixées par décret, les dépenses liées à la VAE “sous réserve du caractère réel et sérieux du projet”.
Vers un guichet unique de la VAE
Enfin, pour éviter les disparités territoriales, le texte pose les bases d’un nouveau service public de la validation des acquis de l’expérience, sortie de “guichet unique” de la VAE, qui prendrait la forme d’une plateforme numérique, qui regrouperait l’ensemble des acteurs (Etat, régions, Pôle emploi, Opco, associations transitions professionnelles…). Objectif de ce groupement d’intérêt public ? Informer et orienter les candidats éventuels tout en contribuant à la promotion de la VAE ainsi qu’à l’animation et à la cohérence des pratiques.
Avec ce projet de loi, l’exécutif cherche à valoriser cette troisième voie d’accès à la certification, aux côtés de la formation initiale et continue. Et faire de la VAE une arme anti-chômage. Il s’est d’ailleurs donné pour objectif d’atteindre chaque année 100 000 diplômes ou titres professionnels acquis par la VAE d’ici à 2027, contre 55 000 en 2019, selon l’étude d’impact.
Ces secteurs sont le sanitaire, social et médico-social, la propreté et le nettoyage, l’économie sociale et solidaire, le tourisme en zone de montagne, le commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, la plasturgie, la restauration collective, le sport et les équipements de loisirs, les transports routiers et activités auxiliaires, les industries alimentaires, les services à la personne.
Florence Mehrez et Anne Bariet
[Veille JO] Les textes parus cette semaine : apprentissage, lanceurs d’alerte, titres-restaurants, transports
Nous vous proposons un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) cette semaine, c’est-à-dire du vendredi 30 septembre au jeudi 6 octobre inclus, susceptibles de vous intéresser, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous ne parlons pas ici des très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, ce domaine étant couvert par notre baromètre des branches que vous retrouvez une fois par mois dans nos colonnes.
Apprentissage
Un décret du 29 septembre 2022 modifie à titre dérogatoire et temporaire le délai de prise en compte des recommandations de France compétences relatives aux niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage
Fonction publique
Un décret du 29 septembre 2022 précise les modalités de création et d’organisation des commissions administratives paritaires et aux commissions consultatives paritaires de La Poste
Lanceurs d’alerte
Un décret du 3 octobre 2022 précise les procédures de recueil et de traitement des signalements émis par les lanceurs d’alerte et fixant la liste des autorités externes instituées par la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte
Nominations
Un arrêté du 21 septembre 2022 porte nomination à la Commission supérieure nationale du personnel des industries électriques et gazières (Mme Stéphanie Bechdolff, M. Jérôme Lespinasse)
Un arrêté du 30 septembre 2022 modifie la composition du cabinet de la Première ministre (M. Meziane Rezki est nommé conseiller)
Un arrêté du 30 septembre 2022 modifie la composition du cabinet de la Première ministre (Mme Nina Bourgier est nommée conseillère parlementaire)
Un arrêté du 26 septembre 2022 porte nomination au Conseil supérieur de la fonction publique de l’État (Mme Florence Dubonnet et M. Christophe Bonnet)
Un arrêté du 27 septembre 2022 porte nomination à la sous-commission de la protection sociale complémentaire de la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle (représentants du Medef : M. Florent Sarrazin et Mme Valérie Roulleau)
Rapport relatif à l’ordonnance n° 2022-1293 du 5 octobre 2022 relative au détachement de salariés roulants ou navigants dans le domaine des transports
Ordonnance n° 2022-1293 du 5 octobre 2022 relative au détachement de salariés roulants ou navigants dans le domaine des transports
actuEL CE
Le ministère du travail met à jour le questions-réponses sur le recours à l’activité partielle et à l’APLD lié au conflit en Ukraine
Le ministère du travail a apporté des modifications à son document questions-réponses sur le recours à l’activité partielle et à l’APLD dans le contexte du conflit en Ukraine.
D’une part, le questions-réponses intègre la revalorisation du taux horaire minimum de l’allocation d’activité partielle versée à l’employeur à 7,88 euros à compter du 1er août 2022.
D’autre part, le document tient compte des modifications aménageant le dispositif d’APLD adoptées depuis la version de mars du document (ces modifications devaient être soumises aux partenaires sociaux).
Il a ainsi été décidé :
de la possibilité de prolonger jusqu’à 12 mois supplémentaires le bénéfice de l’APLD (soit 36 mois maximum, consécutifs ou non, sur une période de référence de 48 mois consécutifs) : décret du 8 avril 2022 ;
la possibilité de négocier des accords APLD ou d’établir des documents unilatéraux jusqu’au 31 décembre 2022 au lieu du 30 juin 2022 (ordonnance du 13 avril 2022) ;
la possibilité d’adapter les termes d’un accord ou d’un document unilatéral APLD pendant toute sa durée afin de prendre en compte l’évolution de la situation économique de l’entreprise pendant la crise (ordonnance du 13 avril 2022).