Archives de catégorie : Newsletter Actu Sociale N°68

SANTÉ SÉCURITÉ CONDITIONS DE TRAVAIL

Covid-19 : les nouveaux critères permettant d’identifier les personnes vulnérables sont inchangés

Un décret du 27 octobre 2022 définit les critères permettant de reconnaitre les personnes vulnérables à la Covid-19 pouvant être placées en activité partielle. Ces critères restent inchangés pour la poursuite du dispositif du 1er septembre 2022 jusqu’au 31 janvier 2023 au plus tard.

La loi du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a prévu de prolonger la possibilité de placement en activité partielle des salariés de droit privé se trouvant dans l’impossibilité de continuer à travailler à distance et considérés comme vulnérables, à compter du 1er septembre 2022 et, au plus tard, jusqu’au 31 janvier 2023. Le dispositif avait pris fin le 31 juillet 2022 mais le questions-réponses du ministère du travail avait permis de faire la jonction entre ces deux périodes.

La loi prévoyait un décret d’application qui vient d’être publié au Journal officiel du 28 octobre 2022. Ce décret du 27 octobre 2022 définit les critères – inchangés – permettant de reconnaitre les personnes vulnérables présentant un risque avéré de développer une forme grave d’infection au virus de la Covid-19. 

Les critères permettant de recourir à l’activité partielle

Les salariés considérés comme vulnérables et pouvant être placés en activité partielle sont ceux répondant aux trois critères cumulatifs suivants : 

Respecter un critère lié à l’âge ou à l’état de santé

1° Etre dans l’une des situations suivantes :
a) Etre âgé de 65 ans et plus ;
b) Avoir des antécédents (ATCD) cardiovasculaires : hypertension artérielle compliquée (avec complications cardiaques, rénales et vasculo-cérébrales), ATCD d’accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV ;
c) Avoir un diabète non équilibré ou présentant des complications ;
d) Présenter une pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d’une infection virale (broncho pneumopathie obstructive, asthme sévère, fibrose pulmonaire, syndrome d’apnées du sommeil, mucoviscidose notamment) ;
e) Présenter une insuffisance rénale chronique sévère ;
f) Etre atteint de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;
g) Présenter une obésité (indice de masse corporelle (IMC) > 30 kgm2) ;
h) Etre atteint d’une immunodépression congénitale ou acquise, non sévère :

– médicamenteuse : chimiothérapie anticancéreuse, traitement immunosuppresseur, biothérapie et/ou corticothérapie à dose immunosuppressive ;
– infection à VIH non contrôlée ou avec des CD4 < 200/mm3 ;
– consécutive à une greffe d’organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques ;
– liée à une hémopathie maligne en cours de traitement ;

i) Etre atteint de cirrhose au stade B du score de Child Pugh au moins ;
j) Présenter un syndrome drépanocytaire majeur ou ayant un antécédent de splénectomie ;
k) Etre au troisième trimestre de la grossesse ;
l) Etre atteint d’une maladie du motoneurone, d’une myasthénie grave, de sclérose en plaques, de la maladie de Parkinson, de paralysie cérébrale, de quadriplégie ou hémiplégie, d’une tumeur maligne primitive cérébrale, d’une maladie cérébelleuse progressive ou d’une maladie rare ;
m) Etre atteint de trisomie 21 ;
2° Etre affecté à un poste de travail susceptible de les exposer à de fortes densités virales ;
3° Ne pas pouvoir ni recourir totalement au télétravail, ni bénéficier des mesures de protection renforcées
 telles que décrites dans le décret (cf. ci-dessous).

Salariés sévèrement immunodéprimés

Sont également placés en activité partielle, les salariés sévèrement immunodéprimés répondant aux deux critères cumulatifs suivants : 
1° Etre dans l’une des situations suivantes :

– avoir reçu une transplantation d’organe ou de cellules souches hématopoïétiques ;
– être sous chimiothérapie lymphopéniante ;
– être traités par des médicaments immunosuppresseurs forts, comme les antimétabolites (cellcept, myfortic, mycophénolate mofétil, imurel, azathioprine) et les AntiCD20 (rituximab : Mabthera, Rixathon, Truxima) ;
– être dialysés chroniques ;
– au cas par cas, être sous immunosuppresseurs sans relever des catégories susmentionnées ou être porteur d’un déficit immunitaire primitif ;

2° Ne pas pouvoir recourir totalement au télétravail.

 Dans ce cas, il n’est pas nécessaire d’attester être affecté à un poste de travail susceptible d’exposer à de fortes densités virales ou ne pas bénéficier des mesures de protection renforcées. 

Salariés pour lesquels la vaccination est contre indiquée

Sont également placés en position d’activité partielle, sous réserve de ne pas pouvoir recourir totalement au télétravail, au cas par cas, les salariés qui répondent aux critères d’âge et de santé précités et qui justifient, par la présentation d’un certificat médical, d’une contre-indication à la vaccination.

Dans cette situation encore, il n’est pas nécessaire d’attester être affecté à un poste de travail susceptible d’exposer à de fortes densités virales ou ne pas bénéficier des mesures de protection renforcées. 

Mesures de protection renforcées

Les mesures de protection renforcées mises en place par l’employeur sont les suivantes :

a) L’isolement du poste de travail, notamment par la mise à disposition d’un bureau individuel ou, à défaut, son aménagement, pour limiter au maximum le risque d’exposition, en particulier par l’adaptation des horaires ou la mise en place de protections matérielles ;
b) Le respect, sur le lieu de travail et en tout lieu fréquenté par la personne à l’occasion de son activité professionnelle, de gestes barrières renforcés : hygiène des mains renforcée, port systématique d’un masque de type chirurgical lorsque la distanciation physique ne peut être respectée ou en milieu clos, avec changement de ce masque au moins toutes les quatre heures et avant ce délai s’il est mouillé ou humide ;
c) L’absence ou la limitation du partage du poste de travail ;
d) Le nettoyage et la désinfection du poste de travail et des surfaces touchées par la personne au moins en début et en fin de poste, en particulier lorsque ce poste est partagé ;
e) Une adaptation des horaires d’arrivée et de départ et des éventuels autres déplacements professionnels, compte tenu des moyens de transport utilisés par la personne, afin d’y éviter les heures d’affluence ;
f) La mise à disposition par l’employeur de masques de type chirurgical en nombre suffisant pour couvrir les trajets entre le domicile et le lieu de travail lorsque la personne recourt à des moyens de transport collectifs.

En l’absence de mise en place de ces mesures, le salarié vulnérable tel que défini ci-dessus, peut saisir le médecin du travail qui se prononce, en recourant le cas échéant à l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail, sur la possibilité de poursuite ou de reprise du travail en présentiel. Le salarié doit être placé en position d’activité partielle dans l’attente de l’avis du médecin du travail.

Modalités de placement en activité partielle

Le placement en position d’activité partielle est effectué à la demande du salarié et sur présentation à l’employeur d’un certificat établi par un médecin.

Lorsque l’employeur estime que le poste de travail du salarié qui demande un placement en activité partielle n’est pas un poste de travail susceptible d’exposer le salarié à de fortes densités virales, il peut saisir le médecin du travail, qui se prononce, en recourant le cas échéant à l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail, sur le respect de ce critère et vérifie la mise en œuvre des mesures de protection renforcées dont bénéficie ce salarié. Le salarié doit être placé en position d’activité partielle dans l’attente de l’avis du médecin du travail.

Rappel des règles d’indemnisation pour les salariés vulnérables placés en activité partielle
Un décret du 30 août 2022 a fixé le taux de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle. Les salariés vulnérables placés en position d’activité partielle perçoivent, depuis le 1er septembre 2022, une indemnité d’activité partielle fixée, pour toute heure chômée, à 70 % de la rémunération brute servant d’assiette de l’indemnité de congés payés telle que calculée à l’article R. 5122-18 du code du travail, limitée à 4,5 fois le taux horaire du Smic.  L’employeur, lui, perçoit une allocation d’activité partielle dont le taux horaire est fixé, depuis le 1er septembre 2022, à 60 % de la rémunération brute servant d’assiette de l’indemnité de congés payés telle que calculée à l’article R.5122-12 du code du travail, limitée à 4,5 fois le taux horaire du Smic.  Ce taux horaire ne peut être inférieur à 8,76 euros. Comme auparavant, ce minimum n’est pas applicable aux salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation lorsque la rémunération du salarié est inférieure au Smic. 

Florence Mehrez

Accidents du travail : les jeunes, les ouvriers et les intérimaires sont les plus touchés

La direction statistique du ministère du travail a publié hier ses chiffres sur les salariés les plus touchés par les accidents du travail en 2019. Si au global les chiffres sont stables, cette étude montre que les jeunes les ouvriers et les intérimaires sont particulièrement accidentés.

En 2019, on dénombre 783 600 accidents du travail avec au moins d’un jour d’arrêt, selon la Dares (étude en pièce jointe). Ce chiffre est plutôt stable par rapport aux études précédentes : en août 2021, l’enquête de la direction des statistiques et des études du ministère du travail décomptait 660 300 accidents du travail pour les seuls régimes général et agricole. L’analyse publiée par la Dares hier inclut les fonctions publiques territoriales et hospitalières, ce qui peut expliquer l’écart entre les deux chiffres.

Le nombre d’accidents du travail reste cependant (trop) élevé en France, sans compter que les 783 600 accidents recensés ne tiennent pas compte des travailleurs indépendants ni des micro-entrepreneurs. La Dares fait état de 790 accidents mortels en 2019, soit un peu plus de deux personnes par jour. Près de 40 000 accidents donnent lieu à la reconnaissance d’une incapacité permanente.

Les secteurs accidentogènes : industrie, construction, intérim

Sur les 783 600 accidents du travail répertoriés en 2019, 97 185 se sont produits dans l’industrie, notamment dans la métallurgie qui recense à elle seule 15 967 accidents, et dans la fabrication de denrées alimentaires, boissons et produits à base de tabac (24 075 accidents).

Le secteur de la construction reste un traditionnel fournisseur d’accidents du travail : 82 293 s’y sont produits en 2019. Mais la Dares pointe le poids de l’intérim, où le risque d’accident avec arrêt de travail est deux fois plus élevé que la moyenne. Selon l’étude, “les intérimaires exercent fréquemment dans des secteurs à risque. Pour un secteur donné, le risque d’accident est supérieur pour les intérimaires par rapport aux autres salariés”.

Autre secteur dans le rouge : l’hébergement médico-social et social, de même que l’actions sociale sans hébergement, notamment dans les activités concernant les adultes âgés ou handicapés, avec ses 91 889 accidents du travail en 2019.

Des ouvriers, des hommes, des jeunes

La Dares constate également qu’au sein d’un même secteur d’activité, “les hommes enregistrent en général une fréquence d’accident du travail plus élevée que celle des femmes”. Chez les ouvriers, catégorie qui enregistre le plus d’accidents graves (1 813 accidents par milliard d’heures rémunérées, contre 259 chez les cadres) et mortels (46 chez les ouvriers, 10 chez les cadres), la prédominance d’accidents chez les hommes s’explique selon la Dares par “un effet de structure”. Les ouvriers sont simplement plus nombreux que les ouvrières. Les hommes sont aussi plus exposés aux accidents mortels que les femmes. Rappelons par ailleurs que l’Anact (agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail) a analysé les évolutions des accidents du travail, de trajet et des maladies professionnelles pour les femmes et les hommes du secteur privé. Cette étude a montré que les femmes sont davantage exposées à des risques d’AT/MP, particulièrement dans les secteurs à prédominance féminine, comme les secteurs de la santé et du social, du nettoyage et de l’intérim, du commerce et industries de l’alimentation.

Cette tendance à l’accident du travail grave voire mortel chez les ouvriers n’est pas nouvelle. En 2016, la Dares pointait déjà qu’ils sont particulièrement exposés à l’accident du travail.

Enfin, la fréquence des accidents du travail décroît avec l’âge : plus les salariés sont jeunes, plus ils en sont victimes. La Dares dénombre 40,1 accidents chez des jeunes de moins de 20 ans en 2019, contre 18,7 chez les salariés de 50 à 59 ans. Elle explique le phénomène par la présence plus fréquente des jeunes salariés dans les secteurs accidentogènes comme l’intérim, la construction ou l’hébergement-restauration. En revanche, la durée des arrêts de travail tend à augmenter avec l’âge, de même que la fréquence des accidents mortels.

Accidents du travail en Europe : l’impossible comparaison ?

Selon la Dares, les données sur les accidents du travail sont difficilement comparables entre les pays européens en raison des différences de régimes. Certains pays présentent des systèmes de couverture des risques professionnels assurantiels, d’autres universels. La Dares soupçonne aussi certains pays de sous-déclaration des accidents du travail. Diffèrent également les conditions de reconnaissance des accidents du travail.

En France, on les définit comme “tout accident provoquant une lésion corporelle ou psychique, quelle qu’en soit la cause, survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d ‘entreprise”. Ainsi, tout décès sur le lieu de travail ou lié à l’activité professionnelle est présumé être un accident du travail. D’autres pays ont renversé la charge de la preuve : le lien entre le décès et l’activité professionnelle doit être prouvé pour entrer dans la catégorie des accidents du travail (Allemagne par exemple).

Certes, ces éléments sont factuels, et il faut en tenir compte. Mais la lecture des chiffres Eurostat sur les accidents du travail révèle que la France présente un taux d’incidence de 3,5 accidents mortels pour 100 000 salariés, la moyenne européenne se situant à 1,7. On peut donc s’interroger : Eurostat parvient à comparer les chiffres des accidents du travail en Europe, la Dares, elle, s’y refuse et le dit clairement dans son étude : “L’ensemble de ces éléments conduisent la Dares à ne pas entreprendre de comparaisons européennes”.

Dans ce contexte d’une forte récurrence des accidents du travail en France depuis plusieurs années, on peut déplorer la suppression des CHSCT, disparus dans les ordonnances Macron au profit du seul CSE, alors que les élus craignent que les questions de santé sécurité passent à la trappe du dialogue social. De son côté, la confédération européenne des syndicats a lancé en 2022 sa campagne “Zéro Death at work” (manifeste en pièce jointe). Elle a calculé qu’au rythme actuel, cet objectif de zéro mort au travail en France ne serait… jamais atteint.

Marie-Aude Grimont

La DGT dresse le bilan de l’inspection du travail pour 2021 et ses priorités pour 2023

La lutte contre le travail illégal, la prévention des chutes et la crise sanitaire ont mobilisé les services de l’inspection du travail en 2021, selon le bilan de la Direction générale du travail (DGT). L’inspection a infligé 11 millions d’euros d’amendes administratives pour des manquements sur la durée du travail, la carte BTP, le travail détaché.

Compétente pour veiller aux conditions de travail de 20 millions de salariés travaillant dans 1,8 million d’entreprises, l’inspection du travail compte, pour toute la France, 4 070 agents, dont 1 772 agents de contrôle et 416 agents de renseignements, répartis au sein des pôles travail des Dreets (direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) et des Ddets (direction départementale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), soit les anciennes Direccte et Dieccte (1). En 2021, ces agents, qui doivent inscrire leurs actions dans le cadre d’objectifs prioritaires (2), ont effectué 255 000 interventions dans les entreprises.

“C’est un retour au volume d’activité d’avant la crise sanitaire”, se félicite Pierre Ramain, le Directeur général du travail. “L’inspection du travail s’est adaptée, elle a continué à porter les priorités nationales en dépit de la Covid et de la réorganisation administrative”, renchérit Annick Laurent, la directrice ajointe.

Ces 255 00 interventions ont majoritairement porté, comme on le voit sur le tableau ci-dessous, sur la lutte contre le travail illégal, la prévention des chutes de hauteur, et la crise sanitaire liée à la Covid-19 : 

Plus de la moitié des interventions (69%) ont concerné en 2021 des entreprises de moins de 50 salariés, appartenant aux secteurs de la construction (27%), de l’industrie (13%) et du commerce (12%). Sur les 55 106 enquêtes réalisées (59% des interventions ayant lieu sur site),13 200 concernent des accidents du travail et 28 000 des interventions liées à la demande de licenciement de salariés protégés.

Pour le premier semestre 2022, les chiffres montrent une décroissance des interventions liées à la crise sanitaire et une montée en puissance de la nouvelle politique “précarité”. Il s’agit de contrôler le respect des droits fondamentaux des travailleurs en CDD et à temps partiel, afin de combattre le recours abusif aux contrats précaires, notamment les contrats de moins de 30 jours. Une politique menée parallèlement, souligne Pierre Ramain, au nouveau bonus malus des cotisations patronales d’assurance chômage.

157 000 lettres d’observation, 5 700 mises en demeure

Quelles suites ont été données aux interventions en entreprise ? Comme on le voit ci-dessous, l’inspection a délivré en 2021 davantage de lettres d’observation, de procès-verbaux, de décisions, mais aussi de mises en demeure et de d’arrêts de chantier.  

Certains manquements ont été réprimés sous la forme d’amendes administratives, avec 2 160 décisions en 2021 contre 1 811 en 2020, ce qui représente 11 millions d’euros d’amendes, soit 1 047€ par décision en moyenne. Les sanctions ont visé la durée du travail, les prestations internationales et la carte BTP.

A titre d’exemple, la DGT cite le cas d’une pénalité financière de 16 858€ infligée à une société de 403 salariés pour défaut d’accord ou de décision unilatérale sur des mesures correctrices suite à une note inférieure à 75 points pour l’index de l’égalité femmes-hommes.

Au sujet de l’index F/H, l’administration indique avoir procédé à 681 mises en demeure en 2021, suivies dans 79% des cas d’une régularisation. Néanmoins, au premier semestre 2022, il reste toujours 11% d’entreprises qui ne respectent pas la règle d’augmentation salariale des femmes de retour de congé maternité. Et l’administration ne communique pas le montant total des pénalités imposées aux entreprises en raison de l’inégalité F/H.

Les demandes de renseignements

Par ailleurs, l’inspection a traité en 2021 plus de 575 000 demandes de renseignements en droit du travail, dont 72% par téléphone (3), le code du travail numérique, lancé en janvier 2020, totalisant 14 millions de consultation. La consultation physique des agents est en nette baisse par rapport à 2019, comme on le voit sur le tableau ci-dessous. L’inspection serait-elle difficilement disponible aux demandes de rendez-vous ? Avec la crise sanitaire, les salariés se sont habitués à utiliser téléphone et courriel pour saisir l’inspection, analyse-t-on à la DGT.

Les priorités de 2023

Pierre Ramain insiste sur la volonté de la DGT d’assurer une forte présence physique des agents de contrôle sur les lieux de travail, “avec un objectif de deux jours de contrôle par semaine et par agent”.

Pour 2023, les nouvelles priorités de l’inspection du travail seront :

  • la prévention des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles (risques liés à l’amiante, risques chimiques, équipements de travail, engins de levage, travaux en hauteur, troubles musculo-squelettiques, etc.),
  • la lutte contre les fraudes (dissimulation d’heures de travail, prêt illicite de main d’œuvre, faux statuts, fraude au détachement);
  • la réduction des inégalités femmes-hommes (notamment respect des augmentations de retour de congé maternité, conditions de travail des femmes dans les secteurs très féminisés, harcèlement moral et sexuel, etc.);
  • la protection des salariés vulnérables (contrats précaires, jeunes travailleurs, etc.);
  • le dialogue social (mise en place et bon fonctionnement des institutions représentatives du personnel, respect des obligations liées au dialogue social). 

Signalons aussi, à l’appproche des Jeux olympiques de Paris de 2024, qu’une unité de contrôle spécifique a été créée en Ile-de-France pour suivre les grands chantiers et ces JO. Elle compte actuellement 8 inspecteurs et un responsable d’unité. 

Ajoutons pour finir que la DGT n’entend pas commenter la décision de la justice administrative annulant la sanction visant l’inspecteur du travail Anthony Smith. “Il va pouvoir retourner travailler dans la Marne en janvier”, se borne-t-on à dire quai Javel…

(1) Il s’agit ici des chiffres de fin 2021. L’effectif des agents a depuis baissé, pour passer à 1 772 agents en août 2022. La DGT a du mal à recruter pour remplacer les départs, admet Pierre Ramain, qui évoque le manque d’attractivité des concours de la fonction publique mais aussi l’absence de concours en 2020 du fait de la crise sanitaire. L’administration incite les fonctionnaires à devenir inspecteurs via une voie spécifique qui comprend une formation moins longue : une cinquantaine de postes devraient ainsi être pourvus en 2022.

(2) Les objectifs prioritaires définies dans le plan national d’action (PNA) de 2020 à 2022 concernent le contrôle des règles encadrant le détachement des travailleurs, la lutte contre le travail illégal, l’égalité professionnelle femmes-hommes, la santé au travail avec, entre autres, le risque amiante, les chutes, les établissements type Seveso, des priorités auxquelles se sont ajoutées la prévention du risque de Covid-19 et la lutte contre la fraude à l’activité partielle. 

(3) Le numéro d’appel unique est le 0 806 000 126

674 accidents du travail mortels par an
Selon la DGT, la France enregistre, sur les 3 dernières années, une moyenne de 674 décès liés au travail par an, provoqués par des accidents de la route, des équipements de travail, des engins dangereux, des chutes de hauteur. Au premier semestre 2022, ces chutes ont provoqué 213 accidents du travail, dont 23 mortels et 130 ayant entraîné des blessures graves. ► Accidents du travail : les jeunes, les ouvriers et les intérimaires sont les plus touchés ► Voir aussi le bilan 2020 de l’inspection du travail

Bernard Domergue

L’inscription au “compte AT/MP” doit se faire avant le 12 décembre

La notification dématérialisée du taux de cotisation accidents du travail et maladies professionnelles (AT/MP) est obligatoire depuis le 1er janvier 2022 pour toutes les entreprises qui relèvent du régime général, quel que soit leur effectif, sous peine de pénalités.

Pour remplir cette obligation légale, il suffit pour chaque entreprise de s’inscrire au compte AT/MP sur net-entreprises.fr avant le 12 décembre 2022 (information de net-entreprises.fr du 7 novembre 2022).

Les entreprises doivent ainsi effectuer l’une des deux démarches suivantes :

  • si l’entreprise a déjà créé un compte sur net-entreprises.fr avec son propre numéro de Siret, il suffit de se connecter au compte, et d’ajouter le compte AT/MP aux téléservices à partir du menu personnalisé ;
  • si l’entreprise n’est pas encore inscrite sur net-entreprises.fr, il convient de suivre le processus d’inscription à partir de la page d’accueil du portail, puis de sélectionnez “L’Assurance Maladie” dans les services présentés. Le compte AT/MP sera alors proposé parmi les déclarations, et l’entreprise n’aura plus qu’à valider.

Dans les deux cas, l’entreprise aura accès au compte AT/MP sous 24 heures

 A noter : seul le chef d’entreprise ou l’un de ses salariés autorisés peut juridiquement être destinataire de la notification dématérialisée du taux de cotisation AT/MP. Le tiers déclarant ne peut donc pas remplir cette obligation à la place de l’entreprise, même s’il a déjà un compte AT/MP propre qui lui permet de connaître le taux de cotisation de l’entreprise et de traiter les démarches qui lui ont été déléguées.

En l’absence d’inscription au compte AT/MP sur net-entreprises.fr, la dématérialisation de la notification du taux est impossible. Le courrier de notification est alors adressé par voie postale. Dans ce cas, la caisse régionale (Carsat, Cramif, CGSS, CSS) dont dépend l’entreprise est autorisée réglementairement à lui notifier une pénalité.

actuEL CE

PROTECTION SOCIALE

Un décret proroge les règles actuelles d’indemnisation du chômage

Comme annoncé par le ministère du travail, un décret du 29 octobre 2022 prolonge les règles d’indemnisation du chômage et les dispositions relatives au bonus-malus au-delà du 1er novembre 2022 et jusqu’au 31 janvier 2023, afin de permettre la poursuite du versement des allocations d’assurance chômage et du recouvrement des contributions afférentes.

Rappelons qu’un second décret est attendu à l’issue des concertations qui ont lieu actuellement avec les partenaires sociaux, et après publication de la loi sur le marché du travail, pour mettre en œuvre la contracyclicité du régime d’indemnisation chômage voulue par le gouvernement.

actuEL CE

Suppression de l’allocation chômage : députés et sénateurs s’accordent sur le refus de deux CDI à la suite d’un CDD ou d’un contrat de mission

Les députés et sénateurs réunis hier matin en commission mixte paritaire sont parvenus à un accord sur le projet de loi sur le marché du travail. Le texte reprend certains des apports du Sénat. Tel est le cas de l’ouverture d’une négociation interprofessionnelle sur la gouvernance de l’assurance chômage, qui portera notamment sur l’équilibre financier du régime et l’opportunité de maintenir le document de cadrage et du principe de l’ouverture de la VAE (validation des acquis de l’expérience) à toute personne dont l’expérience est en lien avec la certification visée.

S’agissant de la suppression de l’allocation chômage après des refus de CDI à l’issue de contrats à durée déterminée ou de missions d’intérim, la CMP a entériné cette modification apportée par les sénateurs mais en la modifiant. Le texte de la CMP aligne ainsi le régime du CDD et du contrat de mission. Le refus d’un CDI entraînera la suppression de l’allocation chômage après deux refus (et non plus d’un pour l’intérim et de trois pour les CDD).  

La lecture des conclusions de la commission mixte paritaire est prévue le 15 novembre à l’Assemblée nationale et le 17 novembre au Sénat.

actuEL CE

Réforme des retraites : les pistes évoquées pour améliorer l’emploi des seniors

Le ministère du travail a dressé un premier bilan du premier cycle de discussion sur la réforme des retraites qui porte sur l’emploi des seniors et la prévention de l’usure professionnelle. Les discussions se poursuivent encore cette semaine. 

Parmi les pistes qui ont été évoquées lors de ces discussions entre le ministère du travail et les partenaires sociaux : 

  • Mobiliser davantage le dispositif de retraite progressive. Les partenaires sociaux ont insisté sur un point : que le passage en retraite progressive ne se traduise pas par une réduction de l’assiette de cotisations. “Le droit le permettant déjà, des dispositions conventionnelles pourront être travaillées pour y répondre”, indique le ministère du travail. Le document vise également le cumul emploi-retraite qui “doit permettre d’améliorer le niveau de retraite à partir des cotisations versées, afin de valoriser le travail et le principe de contributivité” ; 
  • Création du compte-épargne temps universel (CETU). A cet égard, une négociation sera proposée aux partenaires sociaux à l’issue de la mission actuellement menée par l’IGF et l’Igas sur le sujet ; 
  • Renforcer les incitations financières à l’emploi des seniors. Plusieurs pistes ont été avancées, faisant plus ou moins consensus comme des exonérations de cotisations sociales ou de soutien à l’embauche, conditionnées ou non. Le gouvernement souhaite, lui, approfondir la possibilité de mutualiser entre entreprises le coût de prise en charge d’une maladie professionnelle à effet différé ou d’inaptitude qui ne résulte pas de l’employeur. L’un des partenaires sociaux a évoqué la possibilité d’abaisser l’âge de mise en retraite d’office, de 70 à 67 ans ;
  • Renforcer le retour en activité des demandeurs d’emploi seniors. Ont ainsi été évoqués : des incitations financières, par exemple via la hausse de la surcote dans le système de retraite, ou la révision des barèmes d’assurance chômage des seniors ou bien encore la couverture de la perte de revenu résultant de la reprise d’un emploi moins rémunéré ; 
  • Améliorer l’accès des seniors à la formation et mieux préparer les secondes parties de carrière. Parmi les propositions : mieux orienter vers le conseil en évolution professionnelle à mi-carrière, adapter le plan de développement des compétences aux besoins des seniors, remettre à plat les entretiens professionnels, assurer l’accès à un bilan de compétences à mi-carrière ;
  • Lutter contre les discriminations et les stéréotypes liés à l’âge. L’Index seniors est l’une des solutions mais il ne fait pas l’unanimité au sein des partenaires sociaux ; 
  • Relancer la négociation collective sur l’emploi des seniors. Avec un bémol de la part de certains des partenaires sociaux qui ne souhaitent pas que l’on rétablisse des obligations de négocier sur le sujet ; 
  • Prévenir l’usure professionnelle. Au cœur de cette problématique, le compte professionnel de prévention (l’ex compte pénibilité qui a été allégé). Le gouvernement propose de le déplafonnement des points pouvant être acquis dans une carrière, une meilleure valorisation de la poly-exposition et la possibilité de bénéficier d’une reconversion après une certaine période d’exposition. Le rôle des branches professionnelles est réinterrogé (rappelons toutefois que certains secteurs ont déjà élaboré des référentiels pénibilité) ; 
  • Adapter les dispositifs de départs anticipés à la retraite. L’objectif est de simplifier la retraite anticipée pour incapacité permanente et de renforcer l’information sur ce dispositif. Il s’agirait également de mieux cibler le dispositif de carrières longues.

Interrogé sur l’issue des concertations, le secrétaire général de Force Ouvrière, Frédéric Souillot, considère quant à lui que ce document ne reprend pas les propositions syndicales.

actuEL CE

NÉGOCIATION COLLECTIVE

Gilles Gateau, membre du Haut conseil du dialogue social, en qualité de personnalité qualifiée

Gilles Gateau vient d’être nommé membre du Haut conseil du dialogue social, en qualité de personnalité qualifiée, par arrêté du 3 novembre 2022. Il assure également la présidence des séances.

Économiste de formation, rompu aux problématiques sociales, Gilles Gateau a exercé différentes responsabilités en entreprise, dans la sphère de l’Etat et au sein du service public de l’emploi.

Titulaire d’un DEA économie du travail et ressources humaines (Paris I/ CNRS), il a démarré sa carrière dans la recherche, avant de rejoindre la direction des études et statistiques de l’ANPE (actuel Pôle emploi) puis le ministère du travail (Délégation à l’emploi) et le cabinet de la ministre du travail Martine Aubry en 1991. Il devient directeur général adjoint de l’ANPE de 1993 à 1997, puis conseiller du Premier ministre Lionel Jospin en charge du travail et de l’emploi. Il rejoint le groupe EDF en 2001 où il exerce plusieurs responsabilités RH, puis revient vers les politiques publiques en 2012 comme directeur de cabinet du ministre du Travail Michel Sapin puis directeur de cabinet adjoint du premier ministre Manuel Valls. Fin 2015, il rejoint le groupe Air France comme directeur général ressources humaines, avant d’être nommé directeur de mission chez EDF Renouvelables.

Il est depuis juillet 2020 directeur général de l’Apec (association pour l’emploi des cadres). Il succède à Jean-Denis Combrexelle au sein du Haut conseil du dialogue social.

actuEL CE

Difficultés de recrutement : les branches à la rescousse !

L’inspecteur général des affaires sociales honoraire, Philippe Dole, a remis le 8 novembre au ministre du travail un rapport sur le rôle des branches professionnelles dans la résorption des difficultés de recrutement. Un rôle clef lorsque l’on sait que les obstacles à l’embauche diffèrent d’un secteur à l’autre.

C’est un chantier qu’avait lancé Jean Castex en 2021, alors Premier ministre, dans le cadre de l’agenda social de Matignon. Après 12 mois de travaux, Philippe Dole, inspecteur général des affaires sociales honoraire, a remis, le mardi 8 novembre, son rapport sur les difficultés de recrutement au ministre du travail, Olivier Dussopt. Au cœur de ces travaux : le rôle des branches professionnelles et ce, d’autant plus que les raisons qui expliquent les difficultés de recrutement diffèrent de l’une à l’autre.

Les facteurs conjoncturels

Les difficultés de recrutement ont été exacerbées par les deux années de crise sanitaire liées à la Covid-19. “Dans le contexte de reprise de l’emploi qui caractérise la sortie de crise sanitaire, avec un taux de chômage au 1er trimestre 2022 de 7,3 %, toutes les entreprises recherchent simultanément les mêmes profils : des jeunes ou adultes intéressés à rejoindre leur secteur, disposant des aptitudes relationnelles et de motivation pour apprendre, se former, s’adapter”, note le rapport. 

Ainsi, “tous les secteurs d’activité ont cherché à recruter simultanément, ceux connaissant de longue date des tensions de recrutement, comme ceux qui n’éprouvaient pas par le passé de telles difficultés”. 

Par ailleurs, la crise sanitaire a été l’occasion pour de nombreuses personnes d’envisager une évolution ou une reconversion professionnelle.

Difficultés de recrutement et travailleurs étrangers
Alors que le gouvernement s’apprête à débattre d’un nouveau projet de loi sur l’immigration début 2023 dans l’objectif, notamment, de pallier les difficultés de recrutement, le rapport se veut plus circonspect. “Répondre de façon plus massive aux besoins de recrutement par l’accueil de main d’œuvre étrangère soulève des questions d’organisation logistique, que seul le secteur agricole a su au cours des dernières décennies organiser : notamment la mise à disposition de logements, la fourniture de nourriture, alors que la question de l’intégration sociale ne se pose pas vraiment pour des travailleurs saisonniers et itinérants”.

Les facteurs structurels de branche

D’autres facteurs tiennent à des problématiques spécifiques à chacun des secteurs. “Les motifs de tension sont de plusieurs natures : filières dévalorisées, décalage entre les besoins des entreprises et contenu des formations, besoins différenciés selon les territoires, mauvaises images des métiers, vieillissement des salariés, évolution des métiers, etc.”, énumère le rapport.

Le bâtiment se caractérise ainsi par de jeunes travailleurs très mobiles. Dans les métiers de bouche, on constate une évaporation importante des apprentis ayant obtenu leur CAP avant même leur première prise de poste (dans la boulangerie-pâtisserie artisanale par exemple).

Dans le secteur du conseil, “la profession déplore des difficultés de recrutement de profils opérationnels et expérimentés, capables d’accompagner des projets SI et de répondre aux attentes en matière d’expertise. Ces mêmes profils sont recherchés par les clients, et le vivier en sortie d’école est faible”.

Le secteur des transports connaît aussi une forte mobilité, notamment des jeunes en raison de contraintes de temps de travail et d’éloignement du domicile qu’ils acceptent moins volontiers. L’industrie, quant à elle, “souffre parfois d’une image territoriale négative associée aux restructurations et disparitions de sites de production, ou bien de représentations des conditions de travail et de rémunération éloignées de la réalité d’aujourd’hui”. 

Quel rôle pour les branches ?

Face à l’hétérocisme de ces difficultés de recrutement, Philippe Dole recommande aux branches d’activer les leviers dont elles disposent. Le premier est de diffuser les travaux de leurs observatoires sur le contenu des métiers et leurs perspectives d’évolution en direction des acteurs en charge de l’orientation et de l’accompagnement des publics et des décideurs financeurs ou autorités organisatrices de formation initiale et continue (régions, rectorats, Pôle emploi, présidents d’universités…). Toujours dans cette optique d’un meilleur échange entre les acteurs, le rapport recommande de consolider le dialogue entre les branches professionnelles, les régions, les rectorats, et Pôle emploi, pour la définition concertée de la politique d’orientation scolaire et professionnelle, de formation initiale et continue. Les branches doivent s’assurer de leur représentation territoriale.

Parmi les recommandations, on trouve aussi la nécessité “d’assurer par la négociation collective au sein de chaque branche, la prise en compte de l’attractivité des métiers et des rémunérations, de la promotion professionnelle et de la qualité de vie au travail. Elles doivent également veiller à promouvoir et développer l’apprentissage et la professionnalisation, améliorer les dispositifs d’intégration et de suivi en entreprises, à “s’assurer de la réduction des abandons de formation en CFA et organismes de formation conformément au référentiel national qualité (RNQ Qualiopi)”.

L’exemple de la métallurgie
Parmi les branches professionnelles étudiées dans le cadre de cette mission : la métallurgie. Cette dernière, représentée par l’UIMM, la CFDT métallurgie, la fédération de la métallurgie CFE-CGC et FO métaux, a signé avec l’Etat un pacte pour la réduction des tensions de recrutement, le 11 mars 2022. “L’Etat s’est engagé à agir pour amplifier l’offre de formation conçue avec les entreprises pour répondre aux besoins en compétences du secteur et mobiliser les opérateurs du service public de l’emploi afin de proposer des approches ciblées et territorialisées de promotion des offres d’emploi d’entreprises du secteur à l’attention des demandeurs d’emploi”, indique le rapport. De son coté, la métallurgie “va mobiliser les entreprises de son secteur, pour notamment intégrer les demandeurs d’emploi de longue durée dans leurs recherches de candidats et mobiliser les outils du plan dans leurs processus de recrutement ; accueillir davantage de jeunes et de demandeurs d’emploi pour la réalisation de temps d’immersion, de stages professionnels et d’alternance, via des périodes de mise en situation professionnelle ; accueillir des demandeurs d’emploi et notamment des demandeurs d’emploi de longue durée, en POE individuelle, en AFPR ou en contrat de professionnalisation”, précise le rapport. La branche de la métallurgie a par ailleurs entièrement refondu son architecture conventionnelle avec pour objectif de “créer le modèle social de l’industrie de demain pour répondre aux nouvelles attentes des entreprises et des salariés en matière de qualité de vie et des conditions de travail, en substituant, à l’ensemble des conventions collectives territoriales et à l’ensemble des accords nationaux, une seule convention collective nationale, incluant un système de protection sociale et une grille de classification unique totalement inédite, applicable à tous les salariés”. Avec la nouvelle CCN signée le 7 février 2022, la branche espère que la question de l’attractivité des métiers pourra être mieux prise en compte (classifications, rémunérations, conditions de travail, organisation du travail, temps de travail, conciliation vie professionnelle et personnelle, mise en perspective des capacités à évoluer professionnellement selon les métiers).

Florence Mehrez

Négociation partage de la valeur : les partenaires sociaux définissent leur calendrier et leur méthode

Les partenaires sociaux ont décidé, le mardi 8 novembre, de consacrer 10 séances à la négociation sur le partage de la valeur, la prochaine discussion ayant lieu le 21 novembre (1). Les deux à trois prochaines séances seront consacrées au diagnostic et à l’audition d’experts sur le sujet.

C’est le gouvernement qui a demandé aux organisations syndicales et patronales, dans une lettre datée du16 septembre, d’ouvrir une négociation sur ce thème, Emmanuel Macron ayant promis pendant la campagne présidentielle de mettre en œuvre un “dividende salarié”.

La lettre de l’exécutif évoque la généralisation de dispositifs de partage de la valeur pour les petites entreprises, la simplification et le renforcement de ces dispositifs “ainsi que l’articulation de la nouvelle prime de partage de la valeur avec les dispositifs d’épargne salariale existants”, ou encore l’orientation de l’épargne salariale vers “les grandes priorités d’intérêt commun”. Mais les organisations syndicales entendent bien aller au-delà de ce champ pour aborder la question des salaires. Ainsi, la CGT revendique un retour de l’échelle mobile des salaires qui permet une évolution automatique des salaires selon l’inflation, la CFDT évoque le problème de tassement des grilles conventionnelles avec des minimas inférieurs au Smic et souhaite reparler de la gouvernance des entreprises, la CFE-CGC prône une révision de la formule légale du calcul de la participation… 

Nous reviendrons dans un prochain article sur ces différentes positions.

  • Les séances de négociation sont programmées les 21 et 29 novembre, les 2, 15 et 20 décembre, le 6,13, 20, 26 et 30 janvier. 

actuEL CE

IRP

Nicolas Fourmont : “La sobriété énergétique crée un écosystème favorable à l’environnement dans les CSE”

Le 6 octobre dernier, le gouvernement a présenté son plan de sobriété énergétique qui ambitionne une baisse de 10 % de la consommation d’énergie l’hiver prochain. Ce plan incite les employeurs à transmettre au CSE la trajectoire de baisse de la consommation de l’entreprise. Comment les élus peuvent-ils tirer parti de cette nouvelle communication ? Nous avons interrogé à ce sujet Nicolas Fourmont, associé au cabinet gate17 spécialiste de l’environnement auprès des CSE.

Le gouvernement incite les employeurs à fournir au CSE ou aux délégués syndicaux une trajectoire de baisse de consommation d’énergie de l’entreprise. Qu’en pensez-vous ? 

C’est une très bonne chose et j’invite les élus de CSE à se saisir de leurs prérogatives environnementales, même en dehors de tout conflit avec la direction. Cette transmission d’une trajectoire de consommation constitue un élément aujourd’hui conjoncturel, mais qui a vocation à structurer les organisations dans les années à venir. C’est donc une nouvelle flèche dans l’établissement d’un dialogue social sur les questions environnementales. Il existe désormais un cadre réglementaire assez net, qui ne cesse de se préciser et de se renforcer, comme par exemple sur l’audit énergétique des entreprises de plus de 250 salariés (lire notre encadré ci-dessous, NDLR). Les employeurs sont tenus de le faire tous les quatre ans, il faut donc le demander et en faire un objet de dialogue social.

Cette obligation d’audit énergétique est-elle respectée par les entreprises concernées ?

A ma connaissance, oui, car elle est sanctionnée d’une pénalité de 2 % du chiffre d’affaires, voire 4 % en cas de récidive. En revanche, la vraie question porte sur les préconisations issues de cet audit : si l’entreprise est obligée de réaliser l’audit, elle n’est pas tenue de suivre les recommandations de l’auditeur. Tout dépendra donc du niveau de sensibilité de la direction, du rapport entre le coût de l’audit et des économies énergétiques espérées.

Le diagnostic issu de l’audit est-il transmis au CSE ?

Non car ce n’est pas formellement exigé. Du côté de la déclaration de performance extra financière (DPEF) et de la BDESE, le décret du 26 avril 2022 (texte qui a fixé la liste des indicateurs environnementaux de la BDESE, NDLR) est très clair. 

Nous demandons que l’audit soit versé dans la BDESE 

La DPEF doit être versée à la base de données. Sur l’audit, les textes ne sont pas aussi nets. Dans notre pratique professionnelle, nous demandons que les audits soient versés dans la BDESE.

Revenons à la transmission au CSE de la trajectoire énergétique de l’entreprise. Est-ce un nouveau moyen de pression pour la représentation du personnel ?

Disons que cela fait partie d’un écosystème. Quand la direction est attentive à ces enjeux, qu’elle suit l’actualité, qu’elle voit le gouvernement prendre position, qu’elle écoute ce qui se passe sur l’électricité et le gaz, qu’elle voit le montant des factures s’envoler, cela crée un écosystème favorable à la prise en compte de l’environnement dans les CSE, il ne faut pas le négliger.

Dans quelles négociations le CSE et les syndicats peuvent-il en tirer avantage ?

Le CSE peut tout d’abord demander à mettre ces sujets à l’ordre du jour. Mais il peut réinjecter de l’environnement dans toutes les consultations, qu’elles soient économiques, stratégiques ou sociales.

 S’appuyer sur le comité intersyndical de l’épargne salariale

Côté négociations, l’épargne salariale constitue un excellent levier. Les délégués syndicaux peuvent identifier des fonds verts de placement, préoccupés par les questions climatiques et énergétiques, et les proposer à la direction. Ils peuvent s’appuyer sur le comité intersyndical de l’épargne salariale, le CIES. Ce dernier a été fondé par la CFDT, la CGT, la CFE-CGC et la CFTC. Il a labellisé 79 fonds d’épargne à fortes exigences sociales et environnementales. 

Et au niveau de l’intéressement ?

Sur l’intéressement, on peut faire beaucoup de choses, l’imagination est au pouvoir. Les négociateurs peuvent se saisir de l’audit énergétique, identifier les actions et proposer qu’en 2023, on se met en ordre de bataille pour réduire la consommation énergétique de 5 à 20 %, et une part des gains seront reversés via l’intéressement en partage de la valeur.

Mais comment motiver toute une entreprise sur ces sujets ?

L’alignement des rémunérations entre le top management, le management intermédiaire et les salariés peut être une bonne méthode. Si les plus hauts cadres de l’entreprise décrètent la consommation d’énergie comme enjeu stratégique, et qu’une partie de leur rémunération variable dépend de cet objectif, de même que l’intéressement des salariés, alors les objectifs sont alignés tout le long de la chaîne du personnel.

Comment les élus du CSE peuvent-ils se préparer à la communication de la trajectoire énergétique ?

A court terme, je leur conseille de recourir à l’expertise et à la formation. Ceux qui en ont les moyens doivent absolument investir ce champ. Il faut regretter que la commission environnement ne soit que facultative. Si on avait pris le sujet au sérieux dans les années 80, on n’en serait pas là. Ces questions ont longtemps été mises de côté. Il en résulte que la maturité du dialogue social sur les enjeux énergétiques est généralement en inadéquation par rapport à l’urgence des situations. La fusion des instances a entraîné une baisse d’environ 30 % des effectifs dans les CSE. Avec cet effet ciseau, les instances CSE saturent, ils sont devenus un goulet d’étranglement. Mais au moins, l’expertise et la formation peuvent rattraper un peu les retards. L’avantage pour les élus est d’avoir le dossier travaillé en amont, de ne pas partir de zéro et de gagner du temps. Les experts et les formateurs leur apportent une vision à plusieurs dimensions. Les élus du CSE arrivent donc devant la direction avec les idées claires.

Par ailleurs, je recommande la mise en place par accord d’une commission environnement. Les dossiers énergétiques ayant été étudiés, des positions communes entre la commission environnement et la direction peuvent alors se dégager. Pour penser collectivement des trajectoires énergétiques ambitieuses, l’idéal est de traiter ce sujet en commission environnement.

Que peut-on prévoir dans cet accord pour que la commission soit efficace ?

Cette commission est à négocier, quel que soit l’effectif. Il faut y mettre des moyens, du budget d’étude, des heures de délégation. 

 Trouver des jeunes salariés sensibles à l’environnement

Prévoir également par accord que l’on pourra y inviter des personnes qualifiées, des représentants d’ONG, des experts pour alimenter les réflexions. On peut aussi y inclure des salariés déjà très motivés sur ces sujets. La commission aura besoin de gens pointus en interne, je pense notamment à des jeunes, très sensibles sur les sujets environnement et climat. Il faut d’ailleurs leur montrer que les syndicats se mettent aussi sur ces enjeux. Si la commission est bien faite, elle devient l’antichambre du dialogue social environnemental.

Un autre conseil ?

Oui, si le CSE tourne à vide, qu’il ne produit pas suffisamment, qu’il ne porte pas les fruits attendus, qu’il piétine, qu’il devient une instance de chicanement, les élus doivent se tourner vers l’extérieur. Si les avis du CSE ne sont pas pris en compte, c’est qu’il n’est pas considéré comme un acteur légitime. Il faut alors retourner au terrain pour y retravailler les stratégies environnementales. Cela peut valoir le coup de délaisser provisoirement l’instance pour se tourner vers les salariés sur les problèmes environnementaux dans l’entreprise. Les salariés sont de plus leur première source de légitimité. Une fois équipés, les élus pourront alors réinvestir le CSE avec des éléments de fond qui leur manquaient. Ils retournent à l’instance avec un autre rapport de force et un meilleur niveau d’analyse. Sinon, ils s’épuisent.

Et se tourner vers les organisations syndicales ?

En effet, les syndicats et les associations ne restent pas les deux pieds dans le même sabot. Ils produisent des outils et permettent aux élus de ne pas rester isolés dans leur instance, ils peuvent leur mettre le pied à l’étrier. En 2021, nous avions organisé un webinaire sur l’expérience de la papeterie de Chapelle Darblay qui montrait bien comment le CSE et les délégués syndicaux avaient démarché autour d’eux les élus locaux et toutes les organisations possibles qui pouvaient les soutenir. Cette vision était intelligente : les problèmes environnementaux sont territorialisés, il faut donc sortir de l’entreprise pour créer de la concertation.

L’audit énergétique, une obligation contrôlée par le préfet de région
L’audit énergétique est issu d’une directive européenne du 25 octobre 2012. Celle-ci a été incorporée au droit français par la loi du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière de développement durable. Seules y sont soumises les entreprises employant plus de 250 salariés, et qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros et un bilan supérieur à 43 millions d’euros. Cet audit doit être effectué tous les quatre ans. Il porte du 80 % des factures énergétiques de l’entreprise, qu’il s’agisse de gaz, de carburant ou d’électricité. Concrètement, un diagnostiqueur agréé par un organisme de qualification recueille les factures, en calcule la somme et préconise des réductions de consommation poste par poste. Il dégage ainsi des sources d’économies pour l’entreprise. L’entreprise n’est en revanche pas juridiquement tenue de suivre les recommandations issues de l’audit. Cependant, les potentielles baisses de factures sont fortement incitatives. En 2017, l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) a constaté que 4955 des 5000 entreprises concernées se sont déclarées sur la plateforme obligatoire dédiée à l’audit énergétique. Alors que peut faire le CSE d’une grande entreprise si l’audit n’est pas réalisé ? Se tourner vers les DREAL (Directions régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement). Celles-ci dépendent du préfet de région. Les DREAL sont chargées du contrôle de la réalisation de l’audit, de leur transmission à la plateforme de l’ADEME, du contrôle des justificatifs déposés sur cette plateforme et de la sanction des contrevenants.

Marie-Aude Grimont

La CGT prépare la mobilisation du 10 novembre

Dans la continuité des manifestations des 29 septembre et 18 octobre (voir notre interview de Philippe Martinez), la CGT appelle de nouveau à la mobilisation le 10 novembre prochain (communiqué en pièce jointe). Si les grèves dans les raffineries sont désormais réduites, le syndicat poursuit son mouvement à la conquête d’une hausse des salaires et du partage de la valeur. La CGT a d’ailleurs adressé un courrier à la Première ministre, Élisabeth Borne, pour exiger l’ouverture d’une négociation nationale interprofessionnelle sur les salaires. La réforme des retraites, jugée “régressive” est également dans son viseur. En réaction à la prestation télévisuelle d’Emmanuel Macron sur France2, la CGT exprime son mécontentement : “Le Président se moque du monde du travail en cantonnant la discussion au choix entre le recul de l’âge à 64 ou 65 ans. Il propose même une double peine puisqu’un recul de l’âge à 64 ans serait conditionné à une nouvelle accélération du nombre de trimestres nécessaires pour une pension complète”.

actuEL CE

Recours aux cabinets de conseil par le gouvernement : trois fédérations CGT portent plainte

Les fédérations CGT de la fonction publique d’État, de la fonction publique territoriale et de la santé et action sociale ont porté plainte contre X auprès du Parquet national financier. L’objectif est de tenter de faire reconnaître comme illégal par la justice le recours du gouvernement aux cabinets de conseil pendant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron. En mars 2022, un rapport du Sénat “au nom de la commission d’enquête sur l’influence croissance des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques” avait créé la polémique. Dans son communiqué de presse, la CGT de la fonction publique dénonce une “utilisation de fonds publics disproportionnée”, des “collusions entre acteurs publics et privés, [des] procédures opaques à haut risque de conflits d’intérêts”.

actuEL CE

Information et consultation du CSE, quelle différence ?

Information et consultation semblent si proches que l’on parle souvent d’info-consulte”, une expression qui tend à fusionner deux phénomènes distincts. Pourtant, ils recouvrent des réalités différentes que les élus du CSE doivent connaître afin de mieux mesurer l’impact de l’instance dans chacun des cas. Le point avec Ronan Darchen, expert en relations sociales chez Alinéa, lors d’une conférence qui s’est tenue en septembre au salon Solutions CSE à Paris.

“Pourquoi êtes-vous venus ici ?”, demande d’emblée Ronan Darchen aux élus de CSE venus assister à sa conférence. Un élu répond : “Parce qu’on n’arrive pas à faire la différence entre information et consultation”. Le constat est donc fait. Ronan Darchen pointe que le CE a depuis 1945 le droit de s’exprimer sur la gestion de l’entreprise. Et pour cela, le CSE doit être bien informé. La loi de 1946 a ensuite attribué la prérogative de consultation pour permettre à l’instance de critiquer la gestion et de formuler des propositions. “C’est essentiel, il ne s’agit pas juste de dire qu’on a compris : on peut être critique et proposer des idées. On est donc actif, on a un rôle à jouer”, insiste l’expert en relations sociales.

La consultation, un processus qui se formalise par un avis

Tout résulte de l’article L.2312-8 du code du travail : le texte indique que la mission du CSE est d’assurer l’expression collective des salariés afin de prendre en compte leurs intérêts. Au deuxième alinéa, l’article indique aux élus comment faire pour assurer cette mission : ils sont informés et consultés sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise. “Cette formulation est large et générique. Ainsi, quand on fait l’ordre du jour, l’employeur devrait faire le premier pas et indiquer sur quels sujets le CSE est informé, et sur quels sujets il est consulté”, analyse Ronan Darchen. Par suite, le reste du texte liste les domaines qui relèvent de la consultation : l’emploi, les conditions de travail, la production, l’organisation économique et juridique, la santé sécurité, les accidents du travail. Cette liste n’est cependant pas limitative, selon Ronan Darchen, le “notamment sur” du texte signifiant “à plus forte raison”.

“En revanche, être seulement informé, c’est passif de la part du CSE”, poursuit l’expert. Cela peut concerner par exemple les jours contigus à des jours fériés pendant lesquels on fera “le pont”. En revanche, déterminer si ce jour devra être posé en RTT ou payé par l’entreprise devra faire l’objet d’une consultation. En un mot, l’information du CSE n’impose pas de débat à l’employeur. En revanche, pour être consulté, il faut une information préalable du CSE, précise et écrite. “Alors le préalable, c’est quand ?”, interroge le conférencier. Réponse : la date à retenir est celle de la remise des documents ou de leur versement dans la base de données économiques sociales et environnementales (BDESE).

La consultation est donc un processus, qui passe nécessairement par une information, celle-ci se traduisant par un échange avec la direction, et se formalisant par la remise d’un avis motivé. Selon Ronan Darchen, il est important pour les élus de “discipliner l’employeur” sur l’obtention d’une vraie consultation, qui débouche sur un avis qui peut être majoritaire, parfois unanime, mais qui en tout cas marque la position dégagée par la représentation du personnel”.

Consultations récurrentes et ponctuelles

 La loi prévoit trois consultations annuelles sur :

  • Les orientations stratégiques ;
  • La situation économique et financière de l’entreprise ;
  • La politique sociale et environnementale.

La loi permet dans certaines limites d’aménager cette périodicité.

Lorsque les projets sont susceptibles d’impacter les salariés ou de modifier la structure de l’entreprise ou son actionnariat dominant, ou ses règles internes, l’employeur doit également consulter le CSE. Selon Ronan Darchen, les élus doivent avoir une vision générique de ces domaines, et y inclure tout ce qui est susceptible d’affecter l’emploi : “Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de suppression de postes qu’il n’y a aucun sujet. Il faut accompagner le changement”. Le CSE est aussi consulté en cas de situation économique difficile (restructuration et compression des effectifs, de licenciement collectif pour motif économique, procédure de sauvegarde, redressement et de liquidation judiciaire).

La BDESE, alliée des élus dans l’information consultation

Le support informatif des trois consultations récurrentes est la BDESE, elle recèle le contenu minimal qui dépend de l’effectif de l’entreprise. Ce contenu est fixé par les articles R.2312-8 (moins de 300 salariés) et R.2312-9 (plus de 300 salariés) du code du travail. “J’entends trop souvent des élus lâcher l’affaire sur la BDESE car elle est mal faite, pas pratique, impossible à imprimer, impossible à consulter à plusieurs en même temps. On en a fait un outil de mise à distance de l’information, il faut au contraire la reconquérir”, conseille l’expert en relations sociales.

En revanche pour les consultations ponctuelles, la documentation d’un projet peut figurer dans la BDESE, sans qu’il s’agisse d’une obligation pour l’employeur. Les élus peuvent cependant demander à l’employeur un complément d’information pour être en mesure de formuler leur avis. Le contenu de la BDESE peut aussi être amélioré par accord.

La procédure de consultation

Une consultation peut se tenir sur une ou plusieurs réunions. La loi impose un délai préfix d’un mois entre la transmission des informations liées à la consultation, et la date à laquelle le CSE doit rendre son avis. Ce délai est de 2 mois en présence d’une expertise, et de trois mois si le CSE et le CSE central sont consultés, avec une ou plusieurs expertises.  Un accord peut cependant prolonger les délais. Si le CSE ne s’est pas prononcé à l’expiration du délai de consultation, il est réputé avoir émis un avis négatif.

“Mais que faire si on se rend compte qu’on est mal consulté ?”, demande un élu dans la salle. Ronan Darchen conseille dans un premier temps la voie amiable : “Si l’information est pauvre, que le formalisme des réunions n’est pas respecté, il faut demander à recommencer la consultation, la suspendre ou l’allonger. Si cela ne suffit pas, utilisez la voie judiciaire avec le délit d’entrave. Le juge pourra suspendre la consultation ou prolonger le délai le temps que l’information soit complétée”.

Enfin, l’avis du CSE clôt le processus de consultation. “‘On oublie souvent que l’employeur est censé répondre de manière motivée à l’avis du CSE. S’il ne le fait pas, il faut le relancer en remettant ce point à l’ordre du jour”.

L’avis du CSE n’est que consultatif, l’employeur n’est pas tenu d’en tenir compte mais Ronan Darchen pense qu’il peut quand même influencer la direction. “L’avis du CSE est également important vis-à-vis des salariés. Ils ne pourront pas vous dire que sur tel projet, vous n’avez rien fait. Les élus peuvent alors répondre, si, nous avons agi mais dans la limite de ce que la loi nous permet”, conseille-t-il. L’avis doit également être motivé. Les élus ne doivent pas se contenter de dire oui ou non mais justifier leur position.

Marie-Aude Grimont

Salaires : la CGT écrit à Élisabeth Borne

La CGT a adressé un courrier, hier, à la Première ministre Élisabeth Borne, lui demandant d’organiser une négociation sur la hausse des salaires (voir le document en pièce jointe). Parmi les revendications du syndicat, on retrouve le Smic à 2 000 € (déjà formulé en septembre et ocobre lors des manifestations organisées par la CGT), le retour de l’échelle mobile des salaires, l’ouverture de négociations de branches professionnelles dans les 3 mois maximum suivant le relèvement du SMIC “pour éviter un décalage de plusieurs mois dans le processus de revalorisation salariale”. La CGT constate par ailleurs qu'”à la date du 14 octobre, 126 des 166 branches professionnelles de plus de 5 000 salariés, soit plus de 75%, ont des niveaux inférieurs au SMIC”. Un problème que devait résoudre la loi pouvoir d’achat qui prévoit de fusionner les branches qui présentent des minimas inférieurs au Smic et n’ouvrent pas de négociations. 

actuEL CE

Le CSE signataire d’un accord de participation peut-il invoquer l’illégalité d’une clause de cet accord?

En signant l’accord de participation, le CSE a validé la notion de capitaux propres permettant de calculer le montant de la réserve spéciale de participation. Dès lors, il n’est pas recevable à invoquer, par voie d’exception, l’illégalité de cette clause.

Depuis le 23 septembre 2017, l’action en nullité de tout ou partie d’une convention ou d’un accord collectif doit, à peine d’irrecevabilité, être engagée dans un délai de deux mois courant (article L.2262-14 du code du travail) :

  • à compter de la notification de l’accord d’entreprise par la partie la plus diligente des organisations signataires de l’accord, pour les organisations disposant d’une section syndicale dans l’entreprise ;
  • à compter de la publication de l’accord dans la base de données nationale, dans les autres cas (la Cour de cassation a indiqué le 21 septembre dernier que le délai de deux mois pour demander la nullité d’un accord de branche court à compter de la publication au BOCC, le bulletin officiel des conventions collectives).

Si ce délai permet de garantir la sécurité juridique des accords collectifs en évitant qu’ils puissent être contestés longtemps après leur consultation, le Conseil constitutionnel a précisé en 2018 qu’il n’est pas applicable lorsque la légalité de l’accord est contestée par un salarié par la voie de l’exception d’illégalité dans le cadre d’un litige individuel (décision du Conseil constitutionnel du 21 mars 2018).

Dans un arrêt rendu le 2 mars 2022, la Cour de cassation reconnait au CSE la possibilité d’invoquer, par voie d’exception et sans condition de délai, l’illégalité d’une clause d’un accord collectif ou d’une convention collective (qu’il n’a pas signé), dès lors que la clause contestée viole ses droits propres, c’est-à -dire ceux résultant de ses prérogatives qui lui sont conférées par la loi (arrêt du 2 mars 2022).

Le CSE peut-il invoquer l’illégalité d’une clause d’un accord (en l’occurrence d’un accord de participation) qu’il a lui-même signé ?

C’est la question posée à la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 19 octobre dernier.

Dans cette affaire, une société indienne conclut le 24 juin 2013, pour l’une de ses succursales françaises, un accord de participation avec le comité d’entreprise de l’époque (devenu CSE par la suite). La formule de calcul de la réserve spéciale de participation retenue par l’accord est la formule de calcul légale.

Pour mémoire, un accord de participation peut être conclu avec un délégué syndical (accord collectif de droit commun), avec un salarié mandaté par une organisation syndicale représentative dans lentreprise ou avec le CSE. Il peut également sagir dune ratification par le personnel d’un projet d’accord proposé par l’employeur. Toutes ces modalités confèrent à l’accord de participation la qualité d’accord collectif de travail.

Constatant une baisse significative du montant global de la réserve spéciale de participation (RSP), le comité missionne un expert-comptable pour déterminer la ou les causes de cette baisse. Se fondant sur le Guide de l’épargne salariale, cet expert l’impute au mode de calcul des capitaux propres prévu dans l’accord de participation. Selon lui, la définition des capitaux propres donnée par l’article D. 3324-4 du code du travail n’est pas transposable aux succursales françaises des sociétés étrangères.

L’article D. 3324-4 du code du travail tire les conséquences du caractère non imposable en France des résultats des établissements étrangers et leur exclusion corrélative de la participation obligatoire. Il prescrit à cet effet de retrancher des capitaux propres ceux qui sont investis à l’étranger. L’expression “établissements situés à l’étranger” recouvre, selon le Guide de l’épargne salariale, les succursales, comptoirs, bureaux d’achats, de ventes, d’études ou de renseignements et d’une façon plus générale toutes exploitations ne disposant pas d’une personnalité juridique distincte. Sont également assimilés à ces établissements, pour l’application de ce texte, les intérêts détenus dans les sociétés de personnes ou dans des associations en participation à l’étranger.

Il en conclut que le montant de la RSP aboutit à un montant inférieur à celui résultant de la formule légale de la participation. Or, l’accord de participation peut établir un régime de participation comportant une base de calcul et des modalités différentes de la formule de calcul légale seulement si elles sont au moins équivalentes aux règles légales (article L.3324-2 du code du travail).

Fort du rapport de l’expert, le comité assigne la société en justice (référé) pour ordonner l’application de la formule de calcul légale de la participation pour l’exercice 2017/2018 et les exercices ultérieurs et obtenir la remise en état au titre des exercices 2014/2015 et 2016/2017.

La cour d’appel de Versailles le déboute de ses droits. Pour les juges du fond, le silence de la loi et de la réglementation sur la détermination des capitaux propres des succursales en France des sociétés étrangères faisait obstacle à la caractérisation d’un trouble manifestement illicite.

Le comité se pourvoit alors en cassation.

Rejet de la demande du CSE

La chambre sociale ne se prononce pas sur la lacune légale et réglementaire relative à la détermination des capitaux propres.

Mais elle rejette la demande du comité, la jugeant irrecevable pour un motif de pur droit : le comité d’entreprise, aux droits duquel vient le CSE, était signataire de l’accord de participation du 24 juin 2013 et a, en son temps, validé la notion de capitaux propres retenu par la société à l’article 4-1 C de l’accord en le signant. Pour la Cour, le comité, signataire de l’accord de participation, n’est donc pas recevable à invoquer, par voie d’exception, l’illégalité d’une clause de cet accord.

Géraldine Anstett

Le protocole prévu au cas où l’électricité viendrait à manquer cet hiver

Le réseau électrique français pourrait connaître ses premiers délestages programmées cet automne ou cet hiver. Des coupures ponctuelles et tournantes, encadrées par les opérateurs de réseaux et préservant les sites jugés prioritaires. Leur procédure a été présentée jeudi 27 octobre.

“En aucun cas la France ne court un risque de black-out, c’est-à-dire de perte de contrôle totale du système électrique”, martèle Jean-Paul Roubin, directeur exécutif chez RTE (► sur ce sujet, lire notre interview d’un expert de l’énergie). Y compris en cas d’hiver rigoureux ou si EDF met plus de temps que prévu à redémarrer ses réacteurs aujourd’hui à l’arrêt. Comme promis mi-septembre, l’opérateur du réseau de transport de l’électricité n’en a pas moins présenté, jeudi 27 octobre, la stratégie qui sera suivie s’il est nécessaire de prendre des mesures de délestage. En cas d’extrême tension sur le réseau électrique, l’alimentation sera coupée ponctuellement, de manière tournante, et pour un volume d’abonnés qui dépendra des besoins d’effacement de la consommation.

En ville, comme à la campagne

S’il est mis en œuvre, le délestage programmé sera une première en France. S’il n’existe pas, à ce jour, de plan pré-établi, il n’y aura pas de jaloux. Le facteur géographique n’est pas très important pour équilibrer le réseau à l’échelle nationale. Ce qui veut dire que tous les territoires pourront être touchés… avec une égalité de traitement. “On ne protégera pas les zones urbaines, prévient Thierry Sudret, directeur de l’exploitation chez Enedis, le gestionnaire du réseau de distribution chargé de la mise en musique du délestage. Et on fera en sorte que personne ne soit coupé deux fois sans que tout le monde l’ait été auparavant”.

Échappatoire

Un garde-fou toutefois. Dans chaque département, les établissements médicalisés ne seront pas concernés par les arrêts. Pas plus que les sites sensibles d’un point de vue de la défense nationale et autres industries dont l’arrêt soudain générerait un risque. La liste de ces installations prioritaires a été établie par les préfets, chargés entre autres de faire en sorte que la consommation “protégée” ne dépasse pas 38 % de la demande totale. “Si tous les sites étaient considérés comme prioritaires, là, on aurait un risque de black-out”, justifie Thierry Sudret.

Ces listes ne sont pas publiques, mais “rien n’interdit aux entreprises de se renseigner auprès de leur préfecture pour savoir si elles sont dessus”, poursuit-il.

Un poste électrique de moyenne tension fonctionnant comme un aiguillage, des abonnés pourront d’ailleurs « profiter » de l’activité d’un voisin. Quand un site est protégé ou quand il produit de l’électricité et n’a donc aucun intérêt à être coupé, c’est toute la maille qu’Enedis est obligé de conserver en tension, soit l’équivalent de 1000 à 1500 abonnés (même si tout dépend de la densité et de la puissance des abonnements).

Une procédure bien établie

Les deux opérateurs ont aussi détaillé la manière dont seront organisés d’éventuels délestages. En cas d’extrême tension sur le réseau, RTE enverra un signal Écowatt rouge trois jours en amont. Trois jours pour pousser les ménages et les acteurs économiques à baisser leur consommation, et pour engager les autres mesures de sauvegarde. Parmi elles, l’effacement des grands sites industriels qui ont répondu à l’appel à projet “interruptibilité” de RTE, ou la baisse de tension du réseau de 5 % (qui devrait passer inaperçue, sauf pour quelques équipements industriels qui perdraient alors en efficacité).

Si cela ne suffit pas, RTE confirmera l’ordre à Enedis la veille du délestage. À 21h30, chaque abonné sera en mesure de vérifier, à partir de son adresse, s’il est concerné et à quelle heure… En sachant que “si la consommation a baissé, nous n’envoyons pas l’ordre de délestage ou nous le faisons de manière partielle”, souligne Jean-Paul Roubin. Autrement dit, personne ne connaîtra de coupure sans avoir pu s’y préparer. Mais personne n’est à l’abri d’une bonne surprise jusqu’à la dernière seconde.

Condamner ses ascenseurs

Reste à s’organiser. La durée des coupures, deux heures, a été pensée pour préserver l’activité des acteurs qui ont recours à une chaîne du froid (des pharmacies à la grande distribution). Dans chaque entreprise, quelques gestes de prudence devront être définis : condamner les ascenseurs, limiter les déplacements inutiles puisque certains feux tricolores pourraient être coupés, anticiper les recharges d’appareils… et ne pas chercher à intervenir sur les appareils électriques en oubliant que le courant peut revenir à tout moment !

Attention enfin à ce que l’on appelle, en économie, le phénomène du passager clandestin. Cette tendance qui consiste à compter sur les efforts des autres sans en produire soi-même. Même quand on n’est pas concerné par le délestage, il est essentiel de jouer le jeu de la sobriété. Baisser sa consommation est une manière de donner des chances à d’autres de ne pas l’être non plus.

► Sur le thème des enjeux énergétiques pour les entreprises et le rôle que peut jouer le CSE dans ce domaine, lire nos articles : “La sobriété énergétique crée un écosystème favorable à l’environnement dans les CSE” (2/11/2022) “Sobriété énergétique : l’employeur incité à présenter au CSE une trajectoire de réduction de consommation” (7/10/2022)L’enjeu de la crise énergétique pour les entreprises (5/9/2022)

Olivier Descamps

Seuils d’effectif : les dernières précisions du Boss sur le décompte de l’effectif “sécurité sociale”

Le Bulletin officiel de sécurité sociale (Boss) a apporté quelques modifications sur le calcul de l’effectif de l’entreprise servant à déterminer les obligations de l’employeur.

L’assujettissement des employeurs à certaines obligations, l’application ou les modalités d’application de plusieurs champs de la législation sociale dépendent du nombre de salariés de l’entreprise. Cet effectif se détermine soit avec les règles prévues par le code du travail soit avec les règles du code de sécurité sociale selon la nature de l’obligation.

Les modalités de comptabilisation des effectifs prévues par les articles L.130-1, R.130-1 et R.130-2 du code de la sécurité sociale s’appliquent à l’ensemble des dispositifs prévus par le code de la sécurité sociale, ainsi qu’à certains dispositifs prévus par d’autres codes renvoyant aux articles du code de la sécurité sociale (par exemple, l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, le versement mobilité…).

Le Bulletin officiel de sécurité sociale (Boss) a précisé, dans sa rubrique “Effectif”, les modalités de décompte de l’effectif “sécurité sociale”. Son contenu devait être opposable depuis le 1er septembre 2022. Toutefois, le Boss vient d’apporter des modifications qui seront opposables au 1er novembre 2022. Il s’agit des points suivants :

► Effectif à prendre en compte l’année de la création du premier emploi dans l’entreprise : seule l’embauche d’un salarié non exclu de l’effectif constitue la création du premier emploi (n°130) ;

 Effectif à prendre en compte en cas de transfert de salariés en cours d’année :

  • la règle déterminant le calcul de l’effectif à prendre en compte l’année du transfert s’applique également en cas de transferts conventionnels ou d’applications volontaires de l’article L. 1224-1 du code du travail (n° 170) ;
  • une précision est faite sur le calcul de l’effectif pour l’année suivant l’année du transfert (n° 220).

Modalités particulières de prise en compte des salariés dans l’effectif :

  • les apprentis, les titulaires d’un contrat initiative-emploi (CIE), les titulaires d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi (CAE) et les titulaires d’un contrat de professionnalisation sont inclus dans l’effectif en ce qui concerne l’application des dispositions relatives à la tarification des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles (n° 280) ;
  • les salariés ayant conclu une convention de forfait en heures, correspondant à la durée légale sont bien considérés comme des salariés à temps plein. Ceux dont la durée est inférieure à la durée légale ne sont pas considérés comme des salariés à temps plein (n° 360 et 370) ;
  • la prise en compte des salariés placés en temps partiel thérapeutique dans l’effectif fait l’objet d’une proratisation à hauteur de leur durée de travail (n° 380) ;
  • le résultat de la formule de calcul de l’effectif pour les salariés dont le contrat de travail comprend à la fois des phases d’activité et des phases d’inactivité est systématiquement borné à 1 (n° 400) ;
  • pour les salariés pris en compte en fonction de leur rémunération (artistes, techniciens du spectacle, VRP multicartes…), la rémunération à prendre en compte s’entend avant application de la déduction forfaitaire spécifique. Elle est rapportée à la valeur mensuelle du Smic sur la base de la durée légale. Les particularités liées aux salariés non mensualisés sont détaillées. Les entrepreneurs salariés titulaires d’un contrat d’entrepreneur salarié associé (Cesa) en coopérative d’activité et d’emploi (CAE) sont également éligibles à la proratisation décrite (n° 420);

Neutralisation des effets du franchissement de seuil d’effectif :

  • elle ne s’applique pas aux entreprises dont l’effectif, issu de l’application des règles prévues à la section 3 du chapitre 2, était nul avant le franchissement de seuil (n° 490) ;
  • à l’inverse, en cas de franchissement du seuil du fait d’un transfert, la neutralisation des effets du franchissement du seuil s’applique (n° 510) ;
  • les règles s’appliquant à la neutralisation des effets du franchissement de seuil dans le cadre du dispositif du versement en lieu unique ont été clarifiées (n° 600) ;

 Articulation avec les règles d’atténuation des effets de seuils antérieures au 1er janvier 2020 : le seuil évoqué pour l’exonération Lodeom (exonérations sociales dans les DOM) s’entend à la fois du seuil de 11 salariés, mais aussi de celui de 250 salariés (n° 700) ;

Décompte de l’effectif en matière de versement mobilité :

  • pour la détermination de l’assujettissement au versement mobilité, il est précisé que le délai de trois mois est remis à zéro si le salarié est de nouveau amené à travailler dans les zones décrites, les mois écoulés avant et lors de l’interruption n’étant pas repris (n° 890) ;
  • des précisions ont été apportées au sujet des salariés d’un groupement d’employeur en attente d’être mis à disposition (n° 950) ;
  • les règles visant à déterminer l’activité à titre principal au sein ou hors d’une zone de versement mobilité d’un chauffeur de véhicule des entreprises de transport routier ne s’appliquent que si l’établissement tenant le RUP se situe au sein d’une zone de mobilité (n° 1040) ;

 Obligation d’emploi des travailleurs handicapés :

  • une entreprise créée une année N avec un effectif nul et qui accueille ses premiers salariés (liés à une embauche ou un transfert) postérieurement à cette année N, la conduisant à avoir un effectif moyen annuel d’assujettissement à l’OETH de 20 salariés et plus, bénéficie également du délai de mise en conformité (n° 1250) ;
  • l’effectif des BOETH externes ou mis à disposition des associations intermédiaires, des agences de mannequins, des entreprises de travail à temps partagé ou des groupements d’employeurs est également transmis par le biais d’une attestation annuelle (n° 1280).

Nathalie Lebreton

L’impact de la transition écologique sur les métiers de l’industrie

L’Observatoire de la branche “Compétences industries” (Opco 2i) a réalisé une étude de 167 pages sur l’évolution de l’activité des entreprises industrielles et de ses conséquences sur les compétences, au regard de l’impact de la transition écologique. Cofinancée par le ministère du Travail, l’étude estime que les métiers les plus impactés seront les achats et l’ingénierie recherche et développement : “Pour les achats, le besoin de profils maîtrisant les filières alternatives d’approvisionnement et capables d’intégrer des critères environnementaux et de maîtriser les évolutions réglementaires se dégage. La mutation peut conduire à des spécialisations de métiers tels que celui d’Acheteur en énergie verte. En matière d’Ingénierie/R&D, le besoin de compétences se concentre en particulier sur l’analyse du cycle de vie et l’éco-conception. Il s’agit de métiers qui devront avoir la capacité de raisonner à partir d’une vision systémique des enjeux sachant que la mutation peut conduire à des spécialisations du type Ingénieur éco-concepteur”.

Trois autres familles sont citées : les métiers de la logistique, des déchets, de la sécurité, de la qualité et de l’environnement, avec “un fort besoin d’expertise”, et les métiers d’ingénierie d’affaires et technico-commercial “avec le besoin d’intégrer des connaissances nouvelles d’éco-conception”. 

Par ailleurs, la gestion des déchets est le premier enjeu cité par les entreprises industrielles interrogées pour l’étude, devant les consommations de matière première et d’énergie. 

actuEL CE

RSE : la délégation aux entreprises du Sénat présente ses recommandations

Les sénateurs formulent 12 propositions en matière de RSE, dans un rapport daté du 27 octobre. « La Délégation aux entreprises présente plusieurs recommandations afin de mettre la RSE à la portée de toutes les entreprises, en adaptant ses exigences selon leur taille et leurs moyens, d’assurer un traitement identique entre entreprises européennes et non européennes, de défendre l’autonomie européenne et les valeurs européennes de l’entreprise, en poursuivant les efforts d’harmonisation des standards sans renoncer au concept de double matérialité, financière et extra-financière, de faire progresser la culture RSE dans les conseils d’administration comme dans la formation et de mieux utiliser le levier de la commande publique pour diffuser plus largement les critères ESG (environnement, social, gouvernance), qui sont au cœur de la mutation du modèle d’affaires des entreprises », décrit le rapport. 

La délégation aux entreprises commence par dresser des constats : « La RSE est la matrice de la transformation profonde de l’entreprise. Au-delà de la compliance, qui s’assure du respect formel des normes, c’est un vecteur de durabilité de l’entreprise, qui garantit sa résilience. La fourniture d’une information financière et extra-financière qui indique comment l’entreprise conjugue performance économique et performance sociale, sociétale et écologique, conditionne désormais son accès au financement ».

Elle estime ensuite que l’UE doit « gagner » la bataille des normes extra-financières qui constitue un sujet de souveraineté économique. « L’harmonisation de l’information extra-financière représente une opportunité pour l’Europe de reprendre la maîtrise de sa vision de l’entreprise et de la société, à condition qu’elle garde le contrôle de ses normes voire les impose afin de donner au capitalisme européen un cadre de normes conformes aux valeurs européennes ». 

La délégation aux entreprises note également qu’« un choc de complexité des obligations RSE est attendu dans un contexte économique plus compliqué pour les entreprises. Or, même pour les grandes entreprises, la marche est haute ». Elle fait référence à la taxonomie, à la future directive CSRD, au devoir de vigilance, au bilan des émissions de GES, etc.

Dans ce contexte, elle formule plusieurs recommandations. Parmi celles-ci, on notera les suivantes :

  • « Face au choc de complexité annoncé en matière de reporting, il convient de poser un principe de proportionnalité du contenu des informations extra-financières demandées, en fonction de la taille et des moyens de l’entreprise, en respectant la confidentialité de sa stratégie (recommandation n°2) ».
  • « Afin d’éviter une mainmise des agences de notation sous contrôle étranger, confier à l’Autorité européenne des marchés financiers l’évaluation publique de l’information ESG (recommandation n°6) ».
  • « Renforcer la formation RSE des membres des conseils d’administration ou du comité de direction et évoquer les questions RSE à chaque réunion du conseil d’administration ou du comité de direction (recommandation n°8) ».
  • « Afin de protéger les entreprises qui s’engagent dans une démarche RSE de l’activisme actionnarial, le niveau de déclaration d’intentions et de franchissement de seuil de participation au capital doit être abaissé de 5 à 3 % du capital ou des droits de vote, et de 10 à 5 % pour les déclarations d’intentions (recommandation n°11) ».
  • « Afin de mieux valoriser les démarches RSE des entreprises, il faut introduire dans le Code de la commande publique (recommandation n°12) : un principe général faisant référence à la « performance sociale et environnementale des biens, des produits et des services » ; la notion d’« offre économiquement, écologiquement et socialement la plus avantageuse » afin de mieux appréhender les considérations environnementales ; un droit de préférence pour les offres des entreprises présentant des atouts en matière de RSE, à égalité de prix ou à équivalence d’offre ».

actuEL CE

Après les lois Auroux et les ordonnances Macron, quel CSE pour demain ?

La Fondation Jean Jaurès et l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle ont célébré, hier, les 40 ans des lois Auroux, quatre textes fondateurs pour l’ancien régime de représentation du personnel mais aussi les droits syndicaux et la négociation collective. Un système largement détricoté par les ordonnances Macron de 2017 qui ont fusionné les instances. Ce colloque fut donc aussi l’occasion de s’interroger sur les nouvelles mesures à prendre pour soulager les élus et leur redonner les moyens de leurs missions.

Le 10 mai 1981, François Mitterrand devient le premier Président socialiste de la cinquième République. Jean Auroux, ancien professeur d’histoire géographie, maire de Roanne et conseiller général du canton sous l’étiquette du PS, membre de l’équipe de campagne, rejoint alors le gouvernement Mauroy au poste de ministre du Travail. “Je vous soutiendrai”, lui aurait dit Mitterrand, alors que Jean Auroux envisage de réformer environ un tiers du code du travail.

Publiées au Journal officiel entre août et décembre 1982, les lois Auroux instaurent le CHSCT, la négociation annuelle obligatoire et des droits fondamentaux des travailleurs comme l’interdiction de toute discrimination et le droit d’expression des salariés. Ces textes attribuent également au comité d’entreprise de l’époque son budget de fonctionnement de 0,2 % de la masse salariale.  Enfin, ils instaurent la négociation annuelle obligatoire et le CHSCT. Le quarantième anniversaire de ces lois a donc été célébré dans un parfum de nostalgie, non sans l’idée d’un certain “c’était mieux avant”. En présence de Jean Auroux, plusieurs tables rondes ont restitué le contexte historique des lois qui portent son nom. Les invités ont également examiné la réception de cette réforme par les inspecteurs du travail de l’époque. Enfin, un dernier tour d’horizon a été consacré à l’avenir du CSE et aux mesures correctives des ordonnances Macron qu’il conviendrait d’adopter. Y ont participé Pascal Lokiec, professeur de droit et président de l’association française de droit du travail, Florence Dodin, secrétaire nationale de l’Unsa et Pierre-Olivier Ruchenstain, directeur de la fédération des particuliers employeurs de France.

Les ordonnances Macron, une occasion manquée

“Les lois Auroux ont posé les bases de la culture du dialogue social”, affirme Florence Dodin, de l’Unsa. En revanche, les ordonnances de 2017 ont manqué l’occasion d’améliorer cette base”, poursuit-elle. La réforme était pourtant “vendue” sous cette étiquette prometteuse de meilleur dialogue social. Aujourd’hui, avec un mandat de recul, les récriminations sont nombreuses. Les élus se plaignent notamment d’être surchargés et d’avoir perdu le contact avec les salariés

Or, un dialogue social efficace nécessite respect et confiance, estime Florence Dodin, “mais surtout, ne pas considérer le dialogue social comme un coût mais comme une opportunité”. La secrétaire nationale de l’Unsa pointe d’ailleurs le faible nombre d’accords d’entreprise aménageant la mise en place du CSE (seulement 5 647 en 2018), de même que la faible qualité des accords signés.

A L’heure où environ 90 000 CSE vont entrer en période de renouvellement, la question de l’amélioration du CSE va donc se poser avec une particulière acuité. “Les élus nous disent qu’ils sont inquiets à ce sujet”, regrette Florence Dodin. Selon elle, la présence de l’élu suppléant uniquement en l’absence de l’élu titulaire le pénalise, ce serait donc un point à revoir. Elle pointe également le faible nombre de représentants de proximité.

Redistribuer le pouvoir dans l’entreprise

Pour Pascal Lokiec, les prochaines réformes d’ampleur devront étudier la question de la répartition du pouvoir dans l’entreprise : “On ne peut pas donner un tel poids à l’accord si on ne redistribue pas le pouvoir”, affirme-t-il. Le professeur de droit se positionne à l’opposée dans la vision bancale de l’entreprise aujourd’hui, où les salariés n’ont pas leur mot à dire. Revenir sur ce constat suppose à son avis deux actions : renforcer le pouvoir du CSE et admettre les salariés dans les instances de direction.

Renforcer le pouvoir du CSE ne saurait selon lui s’envisager sans moyens supplémentaires. Il pense notamment aux récentes attributions environnementales : “C’est bien beau l’environnement, mais si les élus n’ont pas de moyens pour traiter de ces sujets, cela devient compliqué”. Par ailleurs, il déplore la diminution progressive mais permanente du poids de l’avis du CSE : “Aujourd’hui, si le CSE dépasse le délai pour rendre son avis, celui-ci est réputé négatif. Il faudrait au contraire instaurer l’inverse de cette règle, renforcer le poids de l’avis au lieu de l’appauvrir”.

Certes, la présence de salariés dans les instances de direction a quelque peu progressé : depuis la loi Pacte, deux administrateurs salariés doivent siéger au conseil d’administration si celui-ci comprend huit membres. “Mais cela avance tellement lentement, on est loin des 50% d’administrateurs salariés mis en place en Allemagne”, s’agace le professeur de droit.

Pascal Lokiec aimerait voir se développer dans l’entreprise ce qu’il nomme “le pluralisme des valeurs” : “Les événements récents montrent qu’on ne peut plus donner à l’entreprise un but de rentabilité purement financière, ni de se contenter de distribuer des dividendes aux actionnaires”. Le pluralisme des valeurs devrait au contraire permettre de tenir compte de l’exigence de sens au travail de la part des salariés, de même que le respect de l’environnement et l’égalité hommes femmes. “Or, le pluralisme des valeurs, où est-il dans l’entreprise ? Il est au CSE !”, clame Pascal Lokiec. Donner du pouvoir au pluralisme passerait donc par un renforcement des pouvoirs du CSE.

Jean Auroux réagit à ces propos : “J’ai essayé d’augmenter à 30 %la présence des salariés aux conseils d’administration. J’avais une préférence pour le conseil de surveillance qui me semble d’ailleurs plus adapté car c’est lui qui donne les grandes orientations. Mais je n’ai pas été suivi”. Une piste à suivre pour l’actuel ministre du Travail qui reçoit les partenaires sociaux sur le partage de la valeur…

Marie-Aude Grimont

Reconnaissance non définitive d’une UES : quel impact sur la mise en œuvre d’un PSE ?

Lorsque le jugement reconnaissant l’UES (unité économique et sociale) n’est pas assorti de l’exécution provisoire et fait l’objet d’un appel toujours en cours lors de l’engagement de la procédure de licenciement, c’est au seul niveau de la société employeur que s’apprécient les conditions de mise en oeuvre du PSE.

En principe, c’est au niveau de l’entreprise ou de l’établissement concerné par les mesures de compression d’effectif que s’apprécient les conditions d’effectif et de nombre de licenciements imposant la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

Il en va autrement lorsque le projet de licenciement est décidé au niveau d’une unité économique et sociale (UES), puisque c’est à ce niveau qu’il faut se placer pour vérifier si ces conditions sont remplies (arrêt du 9 mars 2011 et arrêt du 16 novembre 2010).

Mais qu’en est-il lorsque la décision qui reconnaît l’existence d’une UES, avant l’engagement de la procédure de licenciement, est frappée d’un appel en cours au jour du licenciement ? Est-ce au niveau de la société employeur qui licencie qu’il faut apprécier ces conditions ou bien au niveau de l’UES même si sa reconnaissance n’est pas définitive ?

Réponse de la Cour de cassation dans un arrêt du 28 septembre dernier.

Lorsque la reconnaissance d’une UES n’est pas définitive…

En janvier 2017, un tribunal d’instance (devenu tribunal judiciaire) déclare que huit sociétés d’un groupe forment une unité économique et sociale (UES) au sein de laquelle des élections du personnel doivent être organisées. Deux de ces sociétés font appel de cette reconnaissance.

En septembre de la même année, une de ces sociétés est placée en liquidation judiciaire et une procédure de licenciement pour motif économique est engagée. Après avoir adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle (CSP), un des salariés concernés par cette procédure saisit le conseil de prud’hommes de diverses demandes indemnitaires au titre de l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.

Il fait valoir que cette décision, même frappée d’appel et non assortie de l’exécution provisoire, a autorité de la chose jugée. Dès lors, il soutient que la décision de licencier a été prise au niveau de l’UES, et que c’est à ce niveau, et non au niveau de l’entreprise, qu’il faut se placer pour vérifier si les conditions d’effectif et de nombre de licenciements imposant la mise en œuvre d’un PSE sont remplies. Ce qui, selon lui, est le cas en l’espèce.

… c’est au niveau de l’entreprise que s’apprécient les conditions de mise en œuvre du PSE

Argumentation écartée par les juges d’appel. Ils considèrent que la décision emportant reconnaissance de l’UES est privée d’effet dans la mesure où il est établi qu’au jour du licenciement du salarié le jugement reconnaissant l’existence de l’UES n’est pas définitif puisque la procédure d’appel est toujours en cours, et qu’au demeurant le jugement n’est pas assorti de l’exécution provisoire.

Dès lors, la décision de licencier ne pouvant être prise au niveau de l’UES, c’est bien au seul niveau de l’entreprise que s’apprécient les conditions de mise en œuvre d’un PSE.

Raisonnement validé par la Cour de cassation. Elle précise qu’aux termes de l’article 539 du code de procédure civile, “le délai de recours par une voie ordinaire suspend l’exécution du juge” et “le recours exercé dans ce délai est également suspensif”. Selon elle, “il en résulte qu’une décision frappée d’appel ne peut servir de base à une demande en justice tendant à la réalisation d’effets qu’elle comporte”.

En l’espèce, dès lors que le jugement ayant reconnu l’existence de l’UES fait l’objet d’un appel toujours en cours lors de l’engagement de la procédure de licenciement, il ne peut servir de base à la demande du salarié de juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il en résulte que les conditions dont dépend l’obligation d’établir un PSE s’apprécient non pas au niveau de l’UES mais au niveau de l’entreprise employeur en liquidation judiciaire.

Karima Demri

Frédéric Souillot (FO) : “On va faire bouger les lignes”

Le secrétaire général de Force Ouvrière est bien décidé à mener les prochaines batailles. S’il ne se joint pas à la manifestation CGT, il soutient les salariés en grève devant le siège de la RATP. Frédéric Souillot entend bien marquer son opposition aux projets de réforme des retraites et de l’assurance chômage.

Frédéric Souillot a échangé pendant une heure trente, hier, avec l’association des journalistes de l’information sociale (AJIS). L’occasion de dresser un bilan de ses cinq premiers mois à la tête de FO. Son objectif principal des prochains mois est de contrer la réforme des retraites. Il déplore à cet égard que malgré les concertations avec le ministre du Travail, le gouvernement ne tienne pas compte des propositions syndicales.

Objectif : contrer la réforme des retraites

Dès l’élection du Président de la République, Frédéric Souillot avait prévenu : “Si pour Emmanuel Macron, les retraites sont la mère des réformes, pour nous, ce sera la mère des batailles”. Le sujet ne fait d’ailleurs pas débat en interne selon lui. Il se réjouit également du travail en intersyndicale : “Sur le pouvoir d’achat, nous avons fait un communiqué commun, avec tous les logos, pour la première fois. Ça fait toute la différence. C’est le moyen de montrer à l’exécutif et au Président de la République que les organisations syndicales sont capables de s’entendre”.

En revanche, il regrette que le gouvernement ne tienne pas compte des propositions syndicales sur l’emploi des seniors, premier thème de la concertation sur les retraites. Le ministère du Travail a en effet envoyé, lundi soir, aux syndicats et à la presse un “relevé de discussion” actant l’avancement de la concertation (lire notre brève dans cette même édition). Réaction de Frédéric Souillot : “Le gouvernement n’a pas entendu grand-chose de ce que nous lui avons dit. On va lui répondre”.

FO a en effet transmis un document écrit de propositions et participé à toutes les réunions de concertation. Frédéric Souillot espère même décrocher l’organisation d’une nouvelle réunion multilatérale à l’issue de cette première phase de concertation. “Je dois en discuter avec la Première ministre”, indique-t-il. Pour FO, le sujet de l’emploi des seniors patine. Et pour Frédéric Souillot, le taux d’emploi en France des 55-64 ans étant le plus bas d’Europe, “si on doit discuter, c’est de l’emploi des seniors”. Il est donc toujours hors de question de gloser sur le report de l’âge légal de départ en retraite ou un allongement de la durée de cotisation, comme il l’avait précisé dès sa prise de mandat.

Mais tout espoir n’est pas perdu. Tant que les concertations avec le ministère du travail sont en cours, Frédéric Souillot considère qu’il dispose encore de marges de manœuvres : “On va faire bouger les lignes. Et si au bout, le gouvernement décide quand même de repousser l’âge de départ ou d’allonger la durée de cotisation, il y aura mobilisation”. Il juge même pouvoir avancer sur une conditionnalité des aides publiques aux entreprises qui se séparent de salariés âgés de plus de 55 ans : “Certes, ce n’est pas retenu dans le document du ministère, mais on va y retourner”.

Contracyclicité de l’assurance chômage : “C’est la plus mauvaise idée du moment”

Frédéric Souillot n’a pas manqué de rappeler qu'”à FO, l’assurance chômage fait partie du squelette”. Une allusion au rôle d’André Bergeron, secrétaire général de Force ouvrière de novembre 1963 à février 1989, qui avait en son temps mené les concertations sur l’assurance chômage, aboutissant à la création de l’Unedic en 1958. André Bergeron en avait d’ailleurs présidé le premier conseil d’administration.

Aujourd’hui, FO est autant opposé à la réforme de l’assurance chômage qu’à celle des retraites : “Sur la contracyclicité, on ne sera jamais d’accord. C’est la plus mauvaise idée du moment”. Frédéric Souillot s’interroge notamment sur la désignation des périodes où le marché du travail sera favorable ou non et agira sur les droits à indemnisation. “En plus, c’est quasiment impossible à mettre en place”, précise-t-il au sujet de la territorialisation. Et quand on lui signale que le gouvernement est en train d’y renoncer, il ajoute, triomphant : “Vous voyez bien qu’on sert à quelque chose !”.

Il déplore enfin la posture d’Emmanuel Macron : “Il continue de croire qu’il est suffisant de traverser la rue. (…) Sa seule vision du travail, ce n’est pas le lien de subordination, c’est Uber”. Frédéric Souillot préférerait parler du droit au logement, des gardes d’enfant et de tous les freins qui empêchent le retour à l’emploi, des sujets prometteurs car au contraire, “on n’arrivera pas à se mettre d’accord sur la contracyclicité et la réduction des droits des chômeurs”.

Marie-Aude Grimont

FORMATION

Instauration d’un système de régulation de l’utilisation du CPF : fin de la prise en charge à 100 % ?

Adopté en première lecture par les députés après l’utilisation par le gouvernement de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une nouvelle mesure visant à instaurer un mécanisme de régulation du compte personnel de formation (CPF), qui se traduirait par la mise en œuvre d’un reste à charge pour le bénéficiaire de la formation.

Depuis 2019, les titulaires d’un compte personnel de formation (CPF) peuvent mobiliser leurs droits à formation sur le portail MonCompteFormation accessible depuis le site internet www.moncompteformation.gouv.fr ou via une application mobile. En pratique, le bénéficiaire a ainsi la possibilité de choisir sa formation parmi celles qui y sont éligibles et de la payer directement en ligne en utilisant son crédit de formation. Si celui-ci est suffisant, le coût de la formation visée est par conséquent pris en charge intégralement par le dispositif.

Mais cette réforme a un coût : plus de 7 milliards d’euros engagés par la Caisse des dépôts et consignations, organisme gestionnaire du CPF, pour financer les 5 millions d’actions de formation réalisées depuis 3 ans.

Un amendement au PLF pour 2023

Un amendement au projet de loi de finances pour 2023, présenté par le gouvernement, propose donc de mettre en place un système de régulation de l’utilisation du CPF. L’objet affiché de la mesure serait de s’assurer que les actions de formation mobilisées par les titulaires du compte présentent un objectif réel pour l’insertion ou le maintien dans l’emploi.

Ce dispositif permettrait surtout, comme le précise l’exposé des motifs, d’éviter une augmentation de la subvention du budget de l’État à l’établissement public France Compétences, qui finance le CPF.

Les modalités d’application de ce nouveau mécanisme, inséré à l’article L.6323-4 du code du travail, seraient précisées par un décret en Conseil d’Etat.

► À noter. Le système de régulation de l’utilisation du CPF pourrait prendre la forme d’un ticket modérateur forfaitaire ou en pourcentage du coût de la formation. Selon Les Echos, cette dernière solution tiendrait la corde et le taux pourrait être fixé à hauteur de 20 ou 30 %. Ce serait donc la fin de la prise en charge à 100 % du financement des actions de formations réalisées dans le cadre du CPF.

Guilhem Possamai