L’autonomie du salarié en forfait-jours ne lui permet pas de réduire unilatéralement son temps de travail
06/03/2023
Dans un arrêt du 11 janvier 2023, la cour d’appel de Reims estime justifié le licenciement d’un salarié en forfait-jours qui avait utilisé deux demi-journées de travail pour effectuer des déplacements entre son domicile et son lieu de travail après avoir déménagé à plusieurs centaines de kilomètres. Pour les juges, l’autonomie du salarié en forfait-jours ne permet pas de justifier cette violation de son obligation de loyauté.
L’autonomie inhérente au salarié en forfait-jours ne suppose pas une liberté totale dans son organisation du travail. C’est ce qu’affirme la cour d’appel de Reims dans une affaire en date du 11 janvier 2023.
Dans cette affaire, un responsable des travaux est licencié pour faute grave, huit ans après son embauche pour un ensemble de faits que l’employeur considère comme fautifs. Ce dernier lui reproche un manque de loyauté dans l’organisation de son temps de travail, une utilisation abusive de la carte carburant et du badge télépéage et une utilisation personnelle d’un bungalow de chantier. Si les deux derniers motifs, jugés comme recevables par le conseil de prud’hommes sont retoqués par la cour d’appel, tel n’est pas le cas du premier grief.
De longs déplacements domicile-travail sur son temps de travail
L’employeur reprochait au salarié une “réduction unilatérale significative du volume de travail par une dissimulation de son activité réelle, et ce sans avertir sa hiérarchie”. En effet, le salarié avait déménagé et s’était éloigné de son lieu de travail de quelques centaines de kilomètres. Pour effectuer les déplacements nécessaires entre son domicile et son lieu de travail, le salarié utilisait deux demi-journées de travail de la semaine.
Si le salarié reconnait qu’il s’est éloigné géographiquement de son lieu de travail à la suite de son déménagement, “ce qui est un choix personnel n’ayant pas impacté son activité”, il rétorque à l’employeur que, “tenu par une convention annuelle de forfait en jours, cela lui laissait une liberté dans l’organisation de l’exécution de ses missions sans contrainte sur une plage horaire de présence”. Il mettait en avant le fait qu’il respectait bien sa convention de 218 jours quand bien même il aurait réduit son volume de travail de deux demi-journées.
L’autonomie du salarié en forfait-jours ne justifie pas cette déloyauté
Mais le conseil de prud’hommes, puis la cour d’appel, rejettent l’argumentation du salarié. Le juges estiment justifié ce motif mis en avant par l’employeur. S’ils rappellent que le salarié est en droit d’établir sa résidence familiale “où bon lui semble, dès lors que son contrat de travail ne contient aucune clause spécifique sur la question”, cela ne l’exempt pas de faire preuve de loyauté dans l’exécution de son contrat de travail.
Il n’est dès lors pas reproché au salarié de s’être éloigné de son lieu de travail. La cour d’appel relève à cet effet que “de manière pertinente le conseil de prud’hommes a fait remarquer que la lettre de licenciement ne reprochait pas au salarié son déménagement mais ses trajets domicile-travail pendant son temps de travail”.
Ce qui lui est reproché est d’avoir outrepassé ce que l’autonomie dans l’organisation de son temps de travail suppose dans le cadre d’une convention de forfait en jours, et d’avoir ainsi fait preuve de déloyauté. “Cette autonomie ne doit pas méconnaître les amplitudes légales obligatoires que l’employeur est d’ailleurs tenu de contrôler, ni l’obligation contractuelle de réaliser le temps de travail convenu en jours”.
Dès lors, estime la cour d’appel, “en mettant en place une organisation de son temps de travail qui ne permet pas de respecter ses obligations, et fait courir des risques juridiques à l’employeur, sans lui en référer, et en mentant sur sa présence sur un chantier, le salarié a effectivement fait preuve de déloyauté”.
Florence Mehrez
Les députés allongent le congé en cas de décès d’un enfant
06/03/2023
L’Assemblée nationale a adopté jeudi 2 mars une proposition de loi qui fixe à 12 jours le congé en cas de décès d’un enfant, contre 7 actuellement. Le texte vise également à mieux protéger les salariés qui accompagnent un enfant malade en instituant protection contre le licenciement et un recours au télétravail facilité.
Les députés ont adopté jeudi 2 mars, à l’unanimité, la proposition de loi du groupe parlementaire Horizons (le partir d’Edouard Philippe) visant à renforcer la protection des familles d’enfants atteints d’une maladie ou d’un handicap ou victimes d’un accident d’une particulière gravité. Plusieurs de ses dispositions intéressent directement les entreprises et les salariés.
► Attention : cette proposition doit désormais être examinée au Sénat pour pouvoir être considérée comme adoptée définitivement. La procédure d’urgence a été déclarée par le gouvernement sur ce texte.
Allongement du congé en cas de décès de l’enfant
L’article L.3142-4 du code du travail prévoit actuellement un congé de 5 jours pour le décès d’un enfant ou de 7 jours ouvrés lorsque l’enfant est âgé de moins de 25 ans et, quel que soit son âge, si l’enfant décédé était lui-même parent ou en cas de décès d’une personne âgée de moins de 25 à sa charge effective et permanente.
La proposition de loi vise à allonger le congé de 5 à 12 jours.
Par ailleurs, lors de l’annonce de la survenue d’un handicap, d’une pathologie chronique nécessitant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer chez un enfant, le salarié peut bénéficier d’un congé de 2 jours. Il passerait à 5 jours si la proposition de loi est adoptée définitivement par les deux chambres.
► Rappelons que ces délais peuvent être améliorés par accord de branche ou accord d’entreprise.
A ce délai de 12 jours s’ajoute le congé pour deuil de 8 jours créé en 2020.
Interdiction de licencier le salarié en congé de présence parentale
La proposition de loi vise par ailleurs à instaurer une protection contre le licenciement du salarié qui se trouve en congé de présence parentale. Un nouvel article L.1225-4-3 prévoit ainsi : “Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’un salarié pendant un congé de présence parentale prévu à l’article L.1225-62. Toutefois, l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’état de santé de l’enfant de l’intéressé”.
Rappelons que le congé de présence parentale permet au salarié de s’occuper d’un enfant à charge dont l’état de santé nécessite une présence soutenue et des soins contraignants.
Intégrer dans l’accord ou la charte le télétravail d’un salarié aidant
L’article L.1222-9 du code du travail prévoit actuellement que lorsque la demande de recours au télétravail est formulée par un travailleur handicapé ou un proche aidant, l’employeur doit motiver sa décision de refus. La proposition de loi précise que le salarié aidant est celui d’une personne aidant un enfant, un parent ou un proche.
Par ailleurs, la proposition de loi vise à enrichir l’accord collectif ou la charte sur le télétravail en y insérant les modalités d’accès des salariés aidants d’un enfant, d’un parent ou d’un proche à une organisation en télétravail.
Permettre une avance sur l’allocation journalière de présence parentale
Une autre disposition vise à permettre aux caisses d’allocations familiales ou aux mutualités sociales agricoles de verser le droit à l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) dans l’attente de l’avis du service du contrôle médical des caisses primaires d’assurance maladie. Ces avances contribueront à réduire les délais de traitement et permettront aux parents d’enfants malades de voir leurs arrêts d’activités compensés plus rapidement.
A noter que le texte facilite les démarches administratives pour le renouvellement de l’AJPP en supprimant la condition d’un accord explicite du service du contrôle médical nécessaire à ce renouvellement.
Florence Mehrez
La loi sur le plein emploi aura un volet sur le droit syndical
06/03/2023
Dans une interview au Parisien, samedi 4 mars, le ministre du Travail évoque le projet de loi sur les retraites en expliquant préférer, au contrat de travail réservé aux plus de 60 ans voulu par les sénateurs, “d’autres mesures pour les seniors” telles qu’un “encouragement financier pour les demandeurs d’emploi qui acceptent un emploi moins rémunéré que leur travail”.
Par ailleurs, Olivier Dussopt livre quelques éléments du contenu de la future loi sur le plein emploi qu’il prépare pour cet été. Outre France travail, un organisme qui remplacera Pôle emploi, ce texte comprendra :
la transposition de l’accord récent des partenaires sociaux sur le partage de la valeur;
le compte épargne temps universel, “qui permettra à chaque travailleur de gérer son temps à l’échelle d’une carrière grâce aux jours de congé accumulés mais non pris”;
un volet sur le droit syndical dans les entreprises avec un droit pour les syndicats à un espace sur l’intranet de l’entreprise. “On souhaite mieux utiliser le numérique dans le dialogue social, avec, par exemple, la création d’un espace dédié aux organisations syndicales dans les entreprises qui disposent d’un intranet, explique le ministre. L’équivalent du panneau d’affichage syndical que l’on connaît tous dans les couloirs mais qui serait consultable à distance”;
des dispositions sur la prévention des accidents du travail : “Nous souhaiterions mieux lutter contre les chutes de hauteurs ou encore clarifier le rôle de chacun lorsque plusieurs entreprises interviennent en même temps sur un site. Nous allons par ailleurs obliger les employeurs à déclarer les accidents mortels à l’inspection du travail”.
Source : actuel CSE
Inaptitude au travail : panorama de la jurisprudence des deux derniers mois
07/03/2023
Plusieurs décisions de la Cour de cassation ont précisé la procédure de l’inaptitude du salarié concernant le formalisme de la consultation du CSE, l’étendue de l’obligation de reclassement, l’application des cas de dispense de reclassement notamment. Nous vous présentons la synthèse des solutions de la Cour de cassation rendues en janvier et février 2023 sur plusieurs points de la procédure applicable en cas d’inaptitude du salarié.
Consultation du CSE sur les postes de reclassement
L’employeur est tenu de consulter le CSE dès lors qu’un salarié est déclaré inapte (sauf dans les deux cas de dispense légale mentionnée dans l’avis d’inaptitude) sur les possibilités de reclassement avant de mettre en œuvre la procédure de licenciement (articles L.1226-2 et L.1226-10 du code du travail).
La Cour de cassation indique qu’aucun formalisme particulier ne s’impose à l’employeur pour consulter le CSE (délégation unique du personnel en l’espèce). Ainsi, le CSE est régulièrement consulté dès lors que ses membres ont pu, lors d’une réunion, exprimer leur avis sur les recherches de reclassement. Il n’est pas nécessaire que l’avis du CSE prenne la forme d’un vote (arrêt du 25 janvier 2023)
Obligation de reclassement : preuve
Lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre le poste qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre poste approprié à ses capacités (articles L.1226-2 et L.1226-12 du code du travail). Pour que l’employeur soit considéré avoir rempli son obligation de reclassement, il doit formuler des offres sérieuses et précises de reclassement. Faut-il pour autant que l’employeur propose tous les postes vacants ?
La Cour de cassation estime que l’employeur a satisfait à son obligation de reclassement dès lors que les juges du fond relèvent que l’employeur avait soumis au salarié plusieurs offres de reclassement correspondant aux recommandations de la médecine du travail, dont plusieurs postes administratifs ne présentant aucune contrainte physique et des postes d’assistant ou de responsable de magasin comparables à celui précédemment occupé par le salarié et situés à 23 kilomètres de son domicile, et, d’autre part, que le salarié avait refusé de se rendre à l’entretien qui lui avait été proposé pour discuter de ces possibilités. Il ne peut être reproché aux juges du fond de ne pas avoir recherché si d’autres postes vacants existaient (arrêt du 25 janvier 2023)
Obligation de reclassement dans le cadre d’un groupe
L’employeur doit rechercher un autre emploi au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel (articles L.1226-2 et L.1226-10 du code du travail). Que faut-il entendre par groupe ?
Dès lors que les juges du fond relèvent qu’une permutation du personnel était possible avec des entreprises participant au même réseau de distribution, ils peuvent estimer que l’employeur ne justifiait pas d’une recherche loyale et sérieuse de reclassement au sein du groupe auquel il appartenait (arrêt du 18 janvier 2023).
Impossibilité de reclassement : sanction de l’absence d’écrit
Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un emploi de reclassement au salarié déclaré inapte, il doit lui faire connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement. Cette obligation est prévue en cas d’inaptitude d’origine professionnelle ou non professionnelle (articles L.1226-2-1 et L.1226-12 du code du travail). Selon une jurisprudence constante, lorsque l’inaptitude est professionnelle, il n’est pas exigé que le salarié demande expressément des dommages-intérêts pour absence d’écrit pour que ce point soit examiné par les juges (arrêt du 22 juin 2016). C est-ce que confirme une solution récente.
La demande de dommages-intérêts en application de l’article L.1226-15 du code du travail inclut nécessairement la demande de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de notifier par écrit les motifs s’opposant au reclassement (arrêt du 25 janvier 2023)
Dispense de reclassement
L’avis d’inaptitude qui porte l’une des deux mentions expresses “tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé” ou “l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi” autorise à licencier le salarié pour inaptitude (articles L.1226-2-1 et L.1226-12 du code du travail). Quelle est la portée de cette mention lorsque l’entreprise appartient à un groupe ? Quelle est la portée de l’avis d’inaptitude portant la mention “l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans cette entreprise” ?
Dès lors que l’avis d’inaptitude mentionne expressément que “l’état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans l’emploi”, l’employeur est dispensé de rechercher et de proposer des postes de reclassement et peut licencier pour inaptitude (arrêt du 8 février 2023). En l’espèce, l’entreprise appartenait à un groupe ; il semble donc que la dispense de reclassement s’étend au groupe. Mais il s’agit d’une interprétation implicite de la solution ; la Cour de cassation ne se prononce pas explicitement sur ce point.
En revanche, l’employeur n’est pas dispensé de l’obligation de reclassement lorsque l’avis d’inaptitude mentionne que “l’état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans cette entreprise” et relève l’existence d’un groupe de reclassement. L’employeur aurait dû chercher un reclassement au niveau du groupe pour respecter son obligation (arrêt du 8 février 2023). On peut penser qu’il en aurait différemment si l’avis avait porté la mention “l’état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans l’emploi”. En revanche, il y a une incertitude sur la solution si l’entreprise n’avait pas appartenu à un groupe.
Inaptitude résultant de faits de harcèlement
Selon une jurisprudence constante, le licenciement pour inaptitude d’un salarié peut être annulé lorsqu’il est démontré que le harcèlement sexuel ou moral subi par le salarié est à l’origine de l’inaptitude (arrêt du 18 mars 2014). Cette jurisprudence est confirmée dans une solution récente de la Cour de cassation.
Lorsque le harcèlement moral est établi et qu’il est constaté que la salariée avait fait l’objet d’arrêts de travail au terme desquels, elle a été déclarée définitivement inapte à tout poste de l’entreprise, les juges du fond peuvent en déduire que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement était la conséquence des agissements de harcèlement moral. Le licenciement est alors frappé de nullité (arrêt du 1er février 2023).
Articulation de la procédure d’inaptitude avec une procédure disciplinaire
Lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, la procédure liée à l’inaptitude doit s’appliquer jusqu’à son terme ; le salarié ne peut être licencié que pour inaptitude et non pour un autre motif (arrêt du 5 décembre 2012) notamment pour motif disciplinaire (arrêt du 20 décembre 2017). Mais est ce le cas lorsque la procédure disciplinaire a été déclenchée avant le constat d’inaptitude ?
Les dispositions des articles L.1226-2 et L.1226-2-1 du code du travail relatives à la procédure d’inaptitude sont d’ordre public et font obstacle à ce que l’employeur prononce un licenciement pour un motif autre que l’inaptitude, peu important que l’employeur ait engagé antérieurement une procédure de licenciement pour une autre cause. En l’espèce, l’employeur avait licencié pour faute lourde un salarié qui a été déclaré inapte le 6 février alors que la procédure disciplinaire avait été engagée le 24 janvier précédent. Le licenciement disciplinaire est sans cause réelle et sérieuse (arrêt du 8 février 2023).
Nathalie Lebreton
Les chercheurs pointent les failles de l’index d’égalité professionnelle
07/03/2023
La CFDT a organisé, hier, une conférence de presse de présentation de l’étude commandée par ses soins à l’Ires (Institut de recherche économiques et sociales). Si l’étude ne sera publiée que dans le courant de cette semaine, le travail des chercheurs de l’Ires et de l’IPP (Institut des politiques publiques) est déjà éclairant :
30 % des entreprises ne respectent pas leur obligation de publier l’index ;
25 % des entreprises déclarent ne pas pouvoir calculer l’écart de salaires (1) ;
44 % des salariés sont exclus des calculs de l’index car travaillent dans des entreprises de moins de 50 salariés.
Par ailleurs, selon Thomas Breda, économiste du travail (PSE, CNRS) et responsable du pôle Travail et emploi de l’IPP, les modalités de calcul invisibilisent les inégalités réelles. Le système semble d’ailleurs, selon lui, conçu pour permettre aux entreprises d’obtenir de bonnes notes, d’une part en réduisant le champ des entreprises concernées, et d’autre part en prévoyant des modalités de calcul réduisant les écarts de salaires. L’index aurait par ailleurs très peu d’effet à court terme sur les inégalités elles-mêmes : les tendances calculées par les équipes de recherche ne montrent pas d’infléchissement des inégalités depuis la mise en place de l’index.
Pour autant, le chercheur ne constate pas d’optimisation stratégique des entreprises qui ne semblent pas manipuler l’index à leur profit dans le but d’obtenir la note requise de 75 points sur 100. La conception de l’index permettant de réduire les écarts et la faible proportion d’entreprises sanctionnées montre cependant un problème de respect des obligations légales en matière d’égalités hommes/femmes.
Béatrice Lestic, secrétaire nationale de la CFDT, a relevé avoir demandé au ministère du travail des évaluations des effets de l’index. Elle déplore qu’en l’état, il n’est pas un outil opérant pour permettre aux élus de CSE et délégués syndicaux de l’utiliser dans le cadre du dialogue social. Le travail des chercheurs rend en tout cas la syndicaliste perplexe quant à la déclinaison d’un index seniors basé sur le même modèle.
La législation leur permet de le faire si le calcul repose sur moins de 40 % de l’effectif salarié. Les entreprises dans ce cas n’ont pas à calculer leur note globale. Le chercheur Thomas Breda a cependant constaté que ces entreprises ont souvent de moins bonnes notes que les autres aux autres indicateurs (femmes dans les 10 plus hautes rémunérations, augmentation des femmes de retour de congé maternité etc.).
Source : actuel CSE
Accord d’entreprise, BDESE, DUERP : les entreprises doivent se servir de ces outils pour améliorer la situation des femmes en télétravail
08/03/2023
Le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes identifie, dans un rapport publié le 23 février, les risques que représente le télétravail pour les femmes. Afin de lutter contre des conditions de travail dégradées, les atteintes à leur santé physique et mentale, l’éventualité de violences sexistes ou conjugales, le HCE recommande aux entreprises d’encadrer et de suivre plus strictement le télétravail.
Dans un rapport publié le 23 février, le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) pointe de nouvelles inégalités que subissent les femmes en raison d’une mise en œuvre plus importante du télétravail ces derniers années à la suite de la crise sanitaire. “Le télétravail, tel que pratiqué pendant la crise sanitaire, a mis en évidence le fait que ce mode d’organisation du travail était porteur d’enjeux spécifiques pour les femmes tant au niveau de leurs conditions de travail que de leur santé et qu’il pouvait avoir des conséquences négatives en termes d’égalité professionnelle”.
Le HCE délivre des recommandations pour rééquilibrer la situation.
► A noter : le rapport traite du télétravail et du travail hybride qui inclut une partie de l’activité salariée en télétravail.
Les conséquences néfastes du télétravail sur les femmes
1. Un espace de travail et un équipement de travail moins adaptés
D’une part, les femmes bénéficient moins souvent d’un espace de travail et d’un équipement adaptés à leur domicile, comme l’a révélé l’étude Coconel de l’Ined. Ainsi, pendant le premier confinement les hommes étaient 39 % à disposer d’une pièce dédiée au travail contre 25 % de femmes. Par ailleurs, les femmes sont plus nombreuses à partager leur pièce avec d’autres personnes (39 % contre 24 % d’hommes).
D’autre part, toujours lors du premier confinement, les femmes étaient moins bien équipées en outils informatiques et avaient moins souvent accès à un matériel adapté lorsqu’elles étaient en télétravail (l’enquête Ugict-CGT de 2020 a ainsi révélé que 52 % des femmes étaient privées d’un matériel et d’un équipement adéquats contre 42 % des hommes), même si l’Anact fait état d’une amélioration de la situation lors d’une consultation menée en 2021.
2. Des conditions de travail empêchées ou dégradées
Selon l’enquête BCGIpsos, les femmes ont 1,5 fois plus de risques d’être fréquemment interrompues dans leur travail (dû notamment aux enfants présents au domicile). Par ailleurs, elles subissent plus fréquemment des “processus de dématérialisation inaboutis” car elles “travaillent généralement dans des secteurs moins préparés au télétravail dans lesquels le processus de digitalisation du travail est moins abouti”.
Le télétravail n’est pas non plus sans impact sur le temps de travail des femmes. Ainsi, le télétravail engendre un risque d’augmentation du temps de travail, qui est particulièrement accru pour les femmes, 23 % d’entre elles déclarent avoir vu leur temps de travail augmenter contre 15 % pour les hommes selon l’Insee (Institut national de la statistiques) et la Drees (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques). Par ailleurs, l’enquête Ugict-CGT a révélé qu’en 2020, 78 % des employeurs n’avaient pas défini les plages de disponibilités de leurs salariés, et en 2021 c’était encore le cas pour 60 %.
3. La porosité des temps de vie professionnelle et personnelle
“Les femmes sont touchées dans des proportions plus importantes par ce risque, leur temps de travail dans la journée étant souvent interrompu pour la gestion de tâches domestiques et familiales, observe le rapport. Elles compensent généralement ce temps de travail perdu sur des horaires de travail atypiques : tôt le matin, tard le soir ou encore les week-end. A titre d’exemple, les heures de pause en télétravail sont utilisées afin de pouvoir gérer des tâches domestiques ou familiales et moins l’occasion de créer du lien”. L’une des conséquences est la diminution du temps de loisirs pour les femmes en télétravail comparativement aux femmes qui restent en présentiel.
Autre danger, celui pour les femmes d’être “réassignées à domicile avec le risque que le télétravail soit perçu comme un mode de garde” avec le risque que “certaines entreprises [mettent] en œuvre des politiques de soutien à la parentalité moins disantes (exemple : remise en cause des journées enfants malades négociées sous prétexte que le télétravail permettrait de gérer une telle situation ou encore fermeture de crèche d’entreprise)”.
4. Les effets sur la santé des femmes et le risque d’exposition aux violences sexistes et sexuelles
Le télétravail implique des conséquences directes et indirectes sur la santé des télétravailleurs, notamment des TMS (troubles musculo-squelettiques), des risques psychosociaux, l’augmentation de la sédentarité, des équipements inadaptés… La santé mentale des salariés est également impactée par le télétravail : symptômes dépressifs, augmentation de l’anxiété et du stress, risque d’épuisement professionnel, isolement social.
Le rapport pointe en outre un risque de cyber harcèlement des femmes, “rendu d’autant plus aisé dans un contexte de télétravail et de visioconférence où le lieu de vie et l’intimité de la salariée peuvent être donnés à voir”. Par ailleurs, souligne le HCE, “le passage à de nouveaux modes d’organisation et de communication induit par le télétravail, a vu se multiplier les comportements sexistes (exemples : remarques sur le physique via Zoom, phénomène de mansrupting (*) majoré par le fait qu’il est apparu que les femmes avaient davantage de difficulté à prendre la parole en visioconférence, mise à l’écart de manière intentionnelle de boucles d’emails ou ne pas envoyer d’invitations…)”.
L’autre risque accru concerne les violences domestiques. En effet, explique le rapport, “la pratique du télétravail est susceptible de représenter un risque de surexposition aux violences domestiques pour les personnes victimes de telles violences, lesquelles sont majoritairement des femmes (…). Le risque est que le télétravail assigne les salariées victimes de violence domestique à domicile, avec leur agresseur (…). En outre, le fait de télétravailler réduit les opportunités de détection des violences par l’employeur et les autres salariés”.
5. Les risques pour leurs opportunités de carrière
Le rapport identifie également le risque de réduction des opportunités de carrières avec un retour en présentiel moins marqué pour les femmes comparé à celui des hommes. Il existe également l’éventualité d’une déconnexion avec les réseaux professionnels, “dont on sait qu’ils jouent un rôle important dans les opportunités d’évolution de carrière”. Enfin la représentation négative du télétravail et une pénalisation des carrières. “Le risque pour les télétravailleurs est que leur travail soit invisibilisé comparativement aux personnes revenues en présentiel. Ce phénomène se trouve potentiellement accentué pour les femmes dans la mesure où il a été constaté qu’en situation de télétravail, lors des réunions en visioconférence, les femmes avaient tendance à moins prendre la parole”.
Les recommandations pour améliorer les conditions de travail des femmes en télétravail
1. Par la négociation collective
La négociation collective, en encadrant le télétravail, peut permettre d’améliorer les conditions de travail des femmes en télétravail (**). Le HCE recommande d’intégrer le sujet de l’égalité professionnelle dans toutes ses dimensions dans les accords collectifs (de branche ou d’entreprise) sur le télétravail ou à défaut, dans les chartes, et inversement, d’introduire dans la négociation sur l’égalité professionnelle/ QVCT un thème dédié au télétravail.
Cela suppose de sensibiliser les négociateurs aux enjeux d’égalité, d’établir un diagnostic des inégalités femmes/hommes préalable, de faire un pronostic d’impacts du travail sur les situations de travail des femmes et des hommes ou encore de mettre en place des indicateurs de suivi des inégalités et du télétravail genrés.
Le HCE recommande également aux partenaires sociaux de limiter, dans le cadre des accords collectifs ou des chartes, le nombre de jours pouvant être télétravaillés par semaine et de réserver le télétravail à 100 % à des situations exceptionnelles (femmes enceintes, salariés en situation de handicap).
► Il est également préconisé de mettre en place au niveau des branches professionnelles des actions de sensibilisation des employeurs et des salariés (particulièrement pour les TPE/PME) afin de donner à voir les impacts genrés du télétravail.
Les accords de branche ou d’entreprise doivent également veiller à établir des critères d’éligibilité au télétravail basés sur les activités et non sur les métiers, en ayant une vigilance vis-à-vis des potentielles discriminations directes ou indirectes, y compris dans la définition des tâches télétravaillables. L’usage d’une telle méthode a ainsi pour effet direct d’élargir le champ des métiers éligibles au télétravail.
2. Par l’accompagnement des salariés
Afin d’éviter les inégalités de situation, le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes préconise de garantir aux salariés les équipements et outils nécessaires à un télétravail de qualité et les former à leur usage, de réintroduire dans le code du travail le principe selon lequel l’employeur doit prendre à sa charge tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, de garantir l’effectivité du droit à la déconnexion, de former les managers au management des salarié en télétravail /travail hybride en incluant un volet égalité professionnelle”, de garantir à chaque salarié un espace de travail adapté sur le site de l’entreprise et développer les tiers lieux comme alternative au domicile.
3. En prévenant les risques sur la santé physique et mentale des salariées
Le HCE recommande de développer des mesures de prévention des violences sexistes et sexuelles en situation de télétravail en y intégrant un volet sur les violences domestiques afin d’en faire un levier à sa mise en œuvre égalitaire.
Le DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels) a également son rôle à jouer en intégrant les risques liés au télétravail en tenant compte de l’impact différencié de l’exposition aux risques en fonction du sexe et mettre en place un plan d’action adapté. Il faut également veiller à associer les services de prévention et de santé au travail à la mise en place et au suivi du télétravail.
4. Mettre en place un suivi de la carrière des femmes en télétravail
Le HCE recommande enfin aux employeurs de mettre en place un suivi de l’évolution de carrière des salariés en télétravail et/ou travail hybride. Ce suivi pourra porter notamment sur l’évolution de la rémunération, les promotions ou encore sur l’accès à la formation. Il pourra s’effectuer en lien avec l’entretien annuel prévu à l’article L.1222-10 du code du travail.
Il est également suggéré d’intégrer des indicateurs “télétravail” dans la partie “égalité professionnelle” de la BDESE (base de données économiques, sociales et environnementales) – ce qui nécessite d’enrichir le contenu du diagnostic et analyse de la situation comparée des femmes et des hommes – afin de pouvoir appréhender l’impact dans le temps du télétravail sur les évolutions de carrière, la rémunération ou encore l’employabilité des femmes et des hommes. Ces indicateurs qui doivent être genrés, pourront notamment préciser le nombre de jours de télétravail demandés avec une répartition par poste et niveau hiérarchique ainsi que le nombre de refus (avec de même une répartition par poste et niveau hiérarchique).
(*) Comportement consistant, pour un homme, à couper la parole à une femme lors de discussions ou de débats en raison du genre de son interlocutrice.
(**) On sait que la crise sanitaire a dopé le nombre d’accords sur le télétravail, mais peu d’entre eux sont innovants.
Florence Mehrez
La demande d’indemnité carburant peut se faire jusqu’au 31 mars
08/03/2023
Un décret paru hier au Journal officiel repousse du 28 février au 31 mars 2023 la demande d’indemnité carburant pour les ménages qui utilisent leur véhicule pour se rendre au travail et/ou pour travailler. D’un montant de 100€, cette indemnité s’adresse aux ménages modestes.
► Pour voir les conditions de versement et pour effectuer une demande
Source : actuel CSE
L’indemnisation des congés maternité et paternité sera améliorée dès cet été
08/03/2023
Le gouvernement présente aujourd’hui en Conseil des ministres son plan 2023-2027 en faveur de l’égalité femmes-hommes. Il comporte des mesures qui intéressent directement les entreprises et les salariés.
Index égalité professionnelle
Seules pourront accéder aux marchés publics les entreprises qui respectent leurs obligations en matière de publication de l’Index égalité professionnelle ou qui ont obtenu une note suffisante à cet Index ;
Il sera adressé un rappel nominatif aux entreprises qui ont obtenu 0 à l’un des indicateurs de l’Index plus de deux années de suite et, le cas échéant, leur nom sera publié sur le site de consultation.
Il sera également question de mobiliser les outils de l’Anact (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail) pour augmenter le nombre d’accords d’entreprises relatifs à l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail et le taux de réponses à l’Index ;
Afin de booster les petites et moyennes entreprises, le gouvernement engagera une campagne de communication préalable à la publication obligatoire de l’Index en ciblant particulièrement les PME dans les branches les moins performantes.
► Du côté de Matignon, on relativise les enseignements de l’étude de l’Institut des politiques publiques (IPP) sur l’Index égalité professionnelle dévoilée en partie hier. “On ne partage pas toutes les conclusions” [du rapport de l’IPP sur l’Index égalité professionnelle]. Au gouvernement, on dit plutôt observer “une dynamique autour de cet Index”, tout en convenant “qu’il faut lui donner toute sa place et l’améliorer progressivement”.
L’Index égalité femmes-hommes sera progressivement étendu à toute la fonction publique. Dès cet été à la fonction publique d’Etat, puis, en 2024 aux deux autres fonctions publiques (territoriales et hospitalières).
► Le gouvernement réfléchit également à engager un travail avec les éditeurs de logiciels de paie pour intégrer une règle permettant d’inclure automatiquement – lorsqu’elle doit être versée – la revalorisation des femmes à leur retour de congé maternité.
Absences pour raisons familales
L’une des mesures envisagées pour améliorer les congés maternité et paternité sera de diminuer de 10 mois à 6 mois, la durée d’affiliation nécessaire avant de pouvoir percevoir une indemnisation. Un décret, présenté en Conseil d’Etat en avril, devrait acter ce changement dès cet été. Le gouvernement souhaite également mener une réflexion sur les minima versés ;
Olivier Dussopt entamera une concertation avec les partenaires sociaux visant à augmenter le nombre d’autorisations d’absence pour le coparent qui souhaite assister aux rendez-vous médicaux prénataux avec comme objectif une entrée en vigueur à la fin de l’année ;
Comme annoncé précédemment, le délai de carence en cas d’arrêt de travail lié à une fausse couche sera supprimé début 2024.
Source : actuel CSE
Index de l’égalité entre femmes et hommes : les entreprises obtiennent en moyenne 88 points sur 100
09/03/2023
Selon les chiffres livrés hier par le ministre du travail, les entreprises obtiennent en moyenne 2 points de mieux que l’an dernier à l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Rappelons l’essentiel sur cet index, souvent critiqué, dont les résultats doivent être communiqués au CSE.
Les entreprises avaient jusqu’au 1er mars pour mettre à jour leur index sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, mais aussi pour publier cette note sur le site internet de la société (ou le faire connaître par tous moyens aux salariés si la société n’a pas de site internet) et la communiquer, avec le détail des différents indicateurs, au comité social et économique (CSE) ainsi qu’à l’inspection du travail.
Ces informations doivent donc figurer dans la BDESE (base de données économiques, sociales et environnementale) avant la réunion du CSE qui suit la publication de l’index. Ajoutons aussi que, dans les entreprises d’au moins 300 salariés, le CSE doit obligatoirement constituer une commission de l’égalité professionnelle, chargée de préparer les délibérations sur la consultation annuelle sur l’égalité professionnelle.
A noter encore : l’ensemble des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes doivent, depuis le 1er mars 2023, être aussi publiés sur le site internet du ministère du travail (► voir ici pour rechercher l’index d’une entreprise)
Le calcul des points
Rappelons que cet index, très critiqué par les organisations syndicales et certains experts des IRP qui l’accusent d’invisibiliser les inégalités liées au sexe (lire notre encadré), consiste pour l’entreprise à renseigner 4 ou 5 indicateurs, chacun d’eux donnant lieu à un certain nombre de points.
Les entreprises de plus de 250 salariés doivent renseigner 5 indicateurs :
- l’écart de rémunération entre les deux sexes, calculé à partir de la moyenne de la rémunération des femmes comparée à celle des hommes, par tranche d’âge et par catégorie de postes équivalents ► selon l’écart observé, l’entreprise se voit attribué de 0 point (écart supérieur à 20%) à 40 points (aucun écart)
- l’écart de taux d’augmentations individuelles de salaires entre les femmes et les hommes ► de 0 point (écart supérieur à 10%) à 20 points (écart égal ou inférieur à 2%)
- l’écart de taux de promotions entre les femmes et les hommes ► de 0 point (écart supérieur à 10%) à 15 points (écart égal ou inférieur à 2%).
- le pourcentage de salariées augmentées l’année suivant leur retour d’un congé maternité ► de 0 point (au moins une femme non augmentée) à 15 points (toutes les femmes augmentées)
- le nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les 10 salariés ayant reçu les plus hautes rémunérations, en chiffres ►de 0 point (aucune ou 1 femme sur 10) à 10 points (4 ou 5 femmes sur 10).
Dans les entreprises de 50 à 250 salariés, un seul indicateur regroupe les taux d’augmentation et le taux de promotion.
En outre, les entreprises qui emploient au moins 1 000 salariés pour la 3ème année consécutive doivent calculer et publier les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes parmi leurs cadres dirigeants et les membres de leurs instances dirigeantes, chaque année au plus tard le 1er mars. En effet, la loi dite Rixain de décembre 2021 a fixé comme objectif de porter la proportion de femmes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes d’au moins 30 % à compter du 1er mars 2026 et de 40 %, à compter du 1er mars 2029.
La note finale
La somme des points obtenus par l’entreprise constitue son index. Le maximum est de 100 points.
Lorsque l’index est inférieur à 85 points, l’employeur doit fixer les objectifs de progression de chacun des indicateurs dont la note maximale n’a pas été atteinte, dans le cadre de la négociation obligatoire ou, à défaut, dans un plan d’action soumis à consultation préalable du CSE. L’entreprise publie ensuite ces objectifs avant le 1er mars de chaque année sur le site internet de l’entreprise.
Une entreprise dont la note n’atteint pas 75 points au bout de 3 ans s’expose à une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 1% de la masse salariale, cette sanction pouvant aussi être infligée à l’entreprise qui ne publie pas sa note. Une invitation à procéder sans délai à des mesures de rattrapage unilatéral, par accord ou décision unilatérale mais après consultation du CSE.
Les derniers résultats
Selon les derniers résultats communiqués hier par le ministère du travail, les entreprises obtiennent une note moyenne de 88 points sur 100, soit 2 points de mieux que l’an dernier et 4 points de plus depuis 2020. La note moyenne des entreprises de plus de 1 000 salariés a augmenté d’environ 7 points entre 2019 (82,9) et 2023 (89,7), se félicite également le ministère. Ce dernier reconnaît cependant “des efforts à poursuivre” : seulement 2% des entreprises ont une note de 100 alors que 77 entreprises conservent depuis 2020 une note inférieure à 75 points, ce qui les expose cette année à une sanction financière.
Sur l’indicateur mesurant le respect de l’obligation légale d’augmentation salariale de retour de maternité, les entreprises obtiennent en 2023, en moyenne, 13 points sur 15, contre 12 points en 2022. Mais 1 434 entreprises (soit 6 % du total) écopent d’un zéro. Pire : 143 sociétés n’ont pas progressé sur cet indicateur depuis 2020, affichant toujours un zéro pointé.
Les contrôles et sanctions : 49 pénalités notifiées
L’inspection du travail contrôle les entreprises au sujet de l’index F/H. Depuis 2019, l’inspection a conduit 42 017 interventions et prononcé 695 mises en demeure. Au final, 49 pénalités ont été notifiées aux entreprises, pour absence de publication de l’index, absence de définition de mesures correctrices ou du fait d’un index inférieur à 75 points pendant plus de trois exercices consécutifs. “Dans la très grande majorité des cas, souligne le ministère, les échanges avec l’inspection aboutissent à des régularisations”.
Autre bonne nouvelle selon le ministère : en 2023, 72% des entreprises concernées ont publié leur note au 1er mars, contre 61% en 2022 et 2021 et 54% en 2020. Concernant l’obligation faite aux entreprises de plus de 1 000 salariés de publier, sur leur site internet, les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes parmi, d’une part, les cadres dirigeants et d’autre part, les membres des instances dirigeantes, seulement 49% des entreprises ont déclaré, au 1er mars 2023, leurs résultats. Et les chiffres publiés montrent qu’il reste du chemin à faire : 60% des entreprises comptent moins de 30% de femmes parmi leurs cadres dirigeants et 44% ont moins de 30% de femmes dans les instances dirigeantes.
Un index très critiqué |
Hier, le ministre du travail, qui souhaite créer un index seniors à l’occasion du projet de loi sur les retraites, a qualifié l’index de l’égalité professionnelle F/H “d’outil puissant” pour permettre dans les faits d’arriver à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, inscrite dans la loi depuis 1972″. Un avis loin d’être partagé, notamment par les organisations syndicales et associations mais aussi par les chercheurs (*). Outre son caractère complexe et les biais qu’il peut engendrer (l’entreprise doit classer les salariés par groupe de catégories professionnelles pour pouvoir comparer femmes et hommes de métiers équivalents, ce qui peut entraîner la création de groupes trop importants ou au contraire l’impossibilité de créer des groupes trop faiblement représentés dans l’effectif), le mode de calcul de l’index F/H n’est pas neutre. A l’exception de l’indicateur 4, qui sanctionne tout manquement à la règle de l’augmentation des femmes de retour de congé maternité et dont a d’ailleurs vu qu’il posait problème dans de nombreuses entreprises, les autres critères peuvent apparaître comme une atténuation des obligations légales, puisqu’aucune entreprise n’est censé rémunérer moins une femme qu’un homme à conditions équivalentes. Quant aux critères n°2 et n°3, une étude du Céreq soulignait également les risques d’instrumentalisation des résultats : “Seul le pourcentage des personnes concernées par une augmentation est évalué, alors que le montant des augmentations n’est pas pris en compte”. La même note du Cereq pointait aussi le risque d’une “invisibilisation” des facteurs d’inégalités entre les sexes comme la surreprésentation des femmes dans les emplois à temps partiels et les bas salaires. Une critique reprise récemment par les chercheurs de l’IPP selon lesquels les modalités de calcul invisibilisent les inégalités réelles, le système pouvant paraître conçu pour permettre aux entreprises d’obtenir de bonnes notes, d’une part en réduisant le champ des entreprises concernées, et d’autre part en prévoyant des modalités de calcul réduisant les écarts de salaires. ► Nous reviendrons dans un prochain article sur l’évaluation de cet index par les chercheurs de l’IPP. |
Bernard Domergue
L’apprentissage transfrontalier en bonne voie
09/03/2023
Un projet de loi ratifiant l’ordonnance du 22 décembre 2022 relative à l’apprentissage transfrontalier a été présenté, hier, en conseil des ministres. Ce dernier texte définit les modalités d’organisation, de mise en œuvre et de financement de l’apprentissage transfrontalier. Pour rappel, les modalités sont définies dans le cadre d’une convention conclue entre la France et le pays frontalier dans lequel est réalisée la partie pratique ou la partie théorique de la formation par apprentissage.
Par ailleurs, la gestion de l’ensemble des contrats d’apprentissage transfrontaliers est confiée à titre dérogatoire à un seul opérateur de compétences (Opco), agréé par arrêté du ministre en charge de la formation professionnelle.
Enfin, l’ordonnance procède aux adaptations nécessaires pour développer l’apprentissage transfrontalier dans les territoires ultra marins.
Source : actuel CSE
Le lanceur d’alerte n’a pas à suivre la procédure d’alerte graduée s’il dénonce un délit ou crime
10/03/2023
Nouvelle précision sur les canaux de signalement d’une alerte prévus par la loi Sapin 2 : le salarié qui relate ou témoigne, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions n’est pas tenu de respecter la procédure d’alerte graduée. La Cour de cassation fixe par la même occasion les contours de cette notion de bonne foi.
La loi du 9 décembre 2016, dite loi Sapin 2, a défini la procédure d’alerte à suivre pour bénéficier du statut protecteur associé. Trois étapes étaient nécessaires jusqu’au 1er septembre dernier :
le lanceur d’alerte devait adresser son signalement “en interne”, au sein de son entreprise ou de son administration ;
ensuite, en l’absence de diligences appropriées, il pouvait s’adresser «”en externe” à l’autorité judiciaire ou administrative ;
uniquement en dernier ressort, il était autorisé à rendre publiques les informations dont il disposait.
C’est sur cette procédure que s’est prononcée la Cour de cassation le 15 février dernier. Une salariée, employée comme surveillante de nuit au sein d’une maison d’enfants à caractère social, avait signalé à l’inspection du travail de possibles agressions sexuelles commises par certains enfants accueillis sur d’autres. Le procureur de la République avait ouvert une première enquête sur ces faits, puis une seconde visant la salariée pour dénonciation mensongère, toutes deux classées sans suite. La salariée avait tout de même été licenciée, mais la cour d’appel avait déclaré la nullité du licenciement et ordonné une réintégration immédiate.
Une interprétation littérale du code du travail, limitant le champ de la procédure graduée
Pour l’employeur, il ressort de l’article L.1132-3-3 du code du travail (dans sa version antérieure à la loi du 21 mars 2022) que le salarié qui entend dénoncer des actes illicites doit respecter la procédure graduée, et ce quelle que soit la nature des actes concernés. Or la salariée avait communiqué à l’inspectrice du travail un courrier d’alerte évoquant des incidents de nature sexuelle et lui avait laissé croire qu’il était resté sans réponse, alors qu’elle était informée que l’alerte était traitée par la direction, qui avait pris des mesures pour renforcer la surveillance des enfants et prévenir toute dérive. En refusant de rechercher si la salariée avait respecté la procédure d’alerte graduée au motif qu’elle n’est pas applicable en cas de dénonciation de faits constitutifs d’un crime ou d’un délit, la cour d’appel aurait donc violé cet article.
C’est une fin de non-recevoir pour la Cour de cassation qui, comme la cour d’appel, opère une distinction entre les deux premiers alinéas de l’article. En effet, si l’alinéa 2 interdit les mesures de représailles contre les personnes ayant signalé une alerte “dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016”, l’article 8 étant celui qui pose le principe de la procédure d’alerte graduée, l’alinéa 1 énonce seulement qu’aucune personne ne peut être sanctionnée “pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions”. Elle en déduit que puisqu’il n’est dans ce cas pas fait référence à l’article 8 de la loi Sapin 2, le salarié qui alerte sur des faits constitutifs d’un délit ou d’un crime n’est pas tenu de respecter la procédure d’alerte graduée. Ainsi, la cour d’appel a exactement déduit de l’article L.1132-3-3 que la protection de la salariée licenciée pour avoir dénoncé des faits susceptibles de constituer des agressions sexuelles n’était conditionnée qu’à sa bonne foi.
► La loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte du 21 mars 2022, entrée en vigueur le 1er septembre, a supprimé la hiérarchie entre le canal de signalement interne et externe. Le lanceur d’alerte peut donc désormais appliquer la procédure externe sans avoir au préalable recouru à la procédure interne de signalement. Ainsi, la question d’espèce sur la procédure d’alerte graduée ne se poserait plus aujourd’hui.
La mauvaise foi “ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits dénoncés”
Une autre question se posait alors : la salariée était-elle de bonne foi ? Non pour l’employeur puisque l’enquête interne qui avait été menée et dont la salariée était informée avait certes révélé la pratique de jeux à connotation sexuelle par les enfants, mais sans abus ni agression sexuels. De plus, la salariée n’avait pas elle-même constaté les faits dénoncés, elle s’appuyait uniquement sur des documents internes à l’entreprise, et l’enquête de police avait été clôturée par un classement sans suite, en raison de l’absence de toute infraction. Il en déduit donc la mauvaise foi de la salariée, ce que le rejette encore la chambre sociale. Pour elle, la mauvaise foi du lanceur d’alerte “ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis”. Et puisque l’alinéa 1 de l’article L.1132-3-3 ne pose comme condition que la bonne foi et que les critères supplémentaires posés par les articles 6 à 8 de la loi Sapin 2 ne lui sont pas applicables, l’exigence d’avoir eu personnellement connaissance des faits visée à cet article 6 n’est pas non plus impérative lors de la dénonciation de crimes et délits.
La Cour de cassation fait donc apparaitre deux régimes de protection véritablement distincts, selon la nature des faits dénoncés.
Elise Drutinus
[Veille JO] Les textes parus cette semaine : aides carburant, fonction publique, nominations
10/03/2023
Nous vous proposons un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) cette semaine, c’est-à-dire du vendredi 3 mars au jeudi 9 mars inclus, susceptibles de vous intéresser, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous ne parlons pas ici des très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, ce domaine étant couvert par notre baromètre des branches que vous retrouvez une fois par mois dans nos colonnes.
Aides carburant
Un décret du 6 mars 2023 modifie le décret n° 2023-2 du 2 janvier 2023 relatif à la création, aux conditions et aux modalités de versement d’une indemnité carburant pour les travailleurs (report du 28 février au 31 mars de la date limite de demande de versement)
Fonction publique
Un arrêté du 1er mars 2023 autorise au titre de l’année 2023 l’ouverture des concours externe et interne pour le recrutement de secrétaires administratifs de classe supérieure relevant des ministères chargés des affaires sociales
Nominations
Un arrêté du 14 février 2023 porte nomination au conseil d’administration de la Caisse nationale des industries électriques et gazières
Un arrêté du 28 février 2023 porte nomination au conseil d’administration de l’Agence nationale pour les chèques-vacances
Un arrêté du 6 mars 2023 porte nomination des commissaires du Gouvernement aux conseils d’administration des opérateurs de compétences
Un arrêté du 3 mars 2023 porte nomination au cabinet de la ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels
Un arrêté du 22 février 2023 porte nomination au conseil supérieur de la prud’homie
Un arrêté du 9 février 2023 modifie l’arrêté du 18 juin 2021 portant nomination à la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle et des sous-commissions constituées en son sein
Un arrêté du 27 février 2023 porte nomination à la commission professionnelle consultative “commerce”
Un arrêté du 10 février 2023 porte nomination au conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites
Source : actuel CSE
France Stratégie poursuivra cette année ses travaux sur le barème Macron
10/03/2023
France Stratégie a publié son programme de travail 2023. De nombreux sujets concernent l’emploi et le travail.
Même si le comité d’évaluation des ordonnances Travail a achevé ses travaux en 2022, des travaux de recherche complémentaires seront publiés en 2023, notamment sur l’impact de la réforme de la prime d’activité de 2019 et sur l’impact de l’instauration du barème des indemnités prud’homales ;
Le gouvernement a confié à France Stratégie et à la Dares l’évaluation de l’extension à 60 territoires de l’expérimentation “Territoires zéro chômeur de longue durée” (TZCLD). La loi prévoit en effet qu’un rapport sera rendu au plus tard en 2025, portant en particulier sur le coût du dispositif pour les finances publiques, sur les externalités positives constatées et sur les résultats comparés à ceux des structures d’insertion par l’activité économique ;
Mi-2023, sera organisée par France Stratégie la seconde édition de la Conférence annuelle des métiers centrée sur les enjeux de la transition écologique en matière d’emploi. “Cette conférence sera notamment l’occasion de partager les anticipations des besoins en emplois et en compétences liés à la rénovation énergétique des bâtiments, précise France Stratégie. Il s’agira d’estimer les modalités de transformation des métiers concernés, les besoins en compétences métier par métier, en volume et en qualité, ainsi que l’ensemble des leviers susceptibles de réduire les tensions de recrutement” ;
Autre thème de réflexion : “Quelles politiques publiques pour adapter le travail au changement climatique ? Comment travaillerons-nous dans le futur avec des températures moyennes en hausse sensible ?”. “Un travail publié au premier trimestre posera un premier diagnostic sur l’impact du changement climatique sur les risques professionnels et sur la productivité du travail, et identifiera les limites des dispositifs actuels visant à protéger les travailleurs. Sur la base de ces enseignements, un nouveau projet se concentrera sur l’identification des leviers à l’échelle nationale et régionale, afin de formuler des recommandations concrètes de politiques publiques” ;
France Stratégie conduira également des travaux visant à développer les innovations vertes en France et leur industrialisation ;
La déclinaison régionale de l’exercice de prospective des Métiers en 2030 publiée en janvier 2023 sera suivie d’autres déclinaisons en 2023 : par compétences, en s’appuyant sur la cartographie publiée en 2021 avec Pôle emploi ; par sexe, en analysant l’évolution de la segmentation de genre par métiers ; et par statut d’emploi, en distinguant plus précisément l’évolution des métiers de la fonction publique ;
Au 2ème semestre 2023, sera publié un rapport autour de l’accompagnement institutionnel des transitions professionnelles ;
Un travail de cartographie de la qualité des emplois en France à l’échelle des métiers, en statique et en prospective, est en cours. Il sera suivi d’une analyse plus qualitative sur les composantes de cette qualité de l’emploi – conditions de travail, rémunération, etc. – à améliorer pour réduire les difficultés de recrutement des métiers en tension à l’horizon 2030 ;
Les réflexions engagées depuis 2019 sur la qualité du dialogue sociale, en marge de l’évaluation des ordonnances Travail, sur la façon de mesurer – donc de définir – cette qualité du dialogue social se poursuivront. “L’objectif est d’équiper tant les pouvoirs publics que les praticiens du dialogue social d’un cadre d’analyse partagé sur ce que recouvre cette notion et d’un panorama des usages dans les entreprises” ;
Sur l’emploi des seniors, des travaux seront réalisés sur les modes de rupture des contrats de travail des seniors et sur leur régime sociofiscal ;
Un rapport de synthèse sera publié au 2ème trimestre dans le cadre du groupe de travail du REC (Réseau Emplois Compétences) qui visera à identifier les points de vigilance et les leviers d’action pour les petites structures.
Source : actuel CSE