Quand les élus de CSE partagent leurs astuces pour tenir bon
09/04/2021
Les élus de CSE au bord de la crise de nerf ont pu vider leur sac lors de l’atelier organisé en ligne par le réseau inter-CSE Cezam fin mars. Surcharge de travail, difficultés relationnelles avec les salariés, tensions avec la direction… les raisons ne manquent pas de se sentir débordés. Encadrés par une psychothérapeute et psychologue du travail, ils ont ainsi échangé leurs trucs, astuces et actions concrètes pour améliorer leur sort. Ou simplement se sentir moins seuls.
Existe-t-il une exposition spécifique des représentants du personnel aux RPS, les risques psychosociaux ? “Epuisement professionnel, violences internes, harcèlement moral, le champ des RPS est large et en matière de CSE, il y en a pour tous les goûts”, répond avec humour la psychologue du travail et psychothérapeute Audrey Bonheur-Payet. Selon ses sondages auprès des élus de CSE, 41 % des répondants se disent stressés. La psy analyse le phénomène : “Le stress se manifeste en présence d’un décalage entre les objectifs fixés et les moyens pour les atteindre, tant sur l’activité du CSE que les fonctions opérationnelles de l’élu en tant que salarié”. Quand elle demande aux élus de quoi ils manquent, la majorité répond : de temps et de formation. Viennent ensuite le manque d’informations fiables, puis le manque de coopération avec les collègues et avec la direction. Les répondants avancent également 4 facteurs de risque dans la souffrance des élus de CSE.
Exigence émotionnelle, temps de travail, marges de manœuvre et rapports sociaux : les 4 facteurs de souffrance des élus de CSE
Noël, élu de CSE participant à l’atelier Cezam, est le premier à témoigner : “Il est difficile de faire passer des messages en y mettant le moins d’affect possible. D’autant que les salariés émettent de fortes attentes, ils me relancent, parfois me submergent d’appels”. Fabrice, autre élu participant, enchaîne : “Il existe un fantasme sur le rôle du CSE, elle est là l’exigence émotionnelle des salariés. Et nous, on sait parfois qu’on ne pourra rien changer”.
Emmanuelle met quant à elle l’accent sur l’intensité du temps de travail : “Mes missions d’élu débordent sur ma vie personnelle, j’y pense tout le temps, c’est devenu omniprésent”. Stéphane, élu de CSE dans l’industrie pharmaceutique, souligne qu’il faut souvent tout faire en même temps : “Sauver des postes, donner des avis motivés et tout le reste, cela crée de l’usure”.
Pour la direction, nous sommes des empêcheurs de tourner en rond
Pour Stéphanie, ce sont l’autonomie et les marges de manœuvre qui risquent le plus de créer de la souffrance : “Notre direction ne prend pas nos travaux comme une véritable coconstruction, nous sommes juste des empêcheurs de tourner en rond”. Un facteur de risque qui rejoint celui des rapports sociaux non seulement dans l’entreprise avec les salariés et la direction mais aussi dans le CSE lui-même : la répartition de la charge de travail entre élus et les degrés d’investissement hétérogènes génèrent des tensions. Face à cette parole libérée des participants, un second temps de l’atelier a consisté à partager des pistes de solution et des astuces pour tenter d’améliorer leur situation.
Les trucs et astuces des élus pour ne pas craquer
“Récemment, j’ai craqué à cause de l’intensité de travail car je prends tout à ma charge”, confie Isabelle aux autres élus participants. Pour remédier à la mauvaise répartition de la charge au sein du CSE, elle a mis sur pied un tableau indiquant les tâches récurrentes d’un côté et les tâches ponctuelles de l’autre. Aux élus de remplir les cases. Ce fut hélas un échec : “Ceux qui ne faisaient rien à la base n’ont pas plus participé une fois le tableau partagé”. En revanche, l’astuce a fonctionné dans le CSE de Véronika : “Nous avons également produit des tableaux ‘d’envies d’agir’, c’est-à-dire que chaque élu pouvait formuler ce qu’il avait envie de faire, au-delà de ses compétences et missions de base sur lesquelles il était mandaté. Ce fut très motivant de pouvoir sortir de son champ de spécialisation”. Ensuite, des groupes de travail internes au CSE ont donné lieu à de courtes présentation des résultats obtenus. Un moyen d’émulation qui a permis aux élus d’avancer.
Stéphanie a été élue pendant 15 ans puis a fait un burn-out. “Je suis revenue doucement au mandat, d’abord comme suppléante. J’ai retiré de cette expérience qu’il faut apprendre à dire non à la direction quand on n’a pas les moyens de faire ce qu’elle nous demande, mais aussi à nos chefs quand la conciliation entre notre poste de salarié et nos mandats est impossible”.
Il faut clarifier les choses en début de mandat. Après, c’est trop tard
Pour faire prendre conscience aux hiérarchies de l’investissement qu’exige un mandat, le CSE de Thomas a mis en place des formations des managers sur le CSE, ses missions et les heures de délégation. “Cela a bien fonctionné car il faut vraiment clarifier les choses en début de mandat, idéalement pendant l’entretien. Après, c’est trop tard. Désormais, les anciens élus vont systématiquement voir les chefs des nouveaux élus pour les sensibiliser aux missions du CSE”, raconte-t-il. Le CSE de Thomas négocie aussi un accord pour systématiser la prise des heures de délégation et leur compensation en horaires de service.
Dans la vie d’élu, il arrive aussi que les salariés ne connaissent rien au CSE ou se montrent ingrats : “Ils viennent demander de l’aide, puis on apprend qu’ils ont dit que le CSE ne faisait rien”, se plaint Matthieu, pour qui le manque de reconnaissance des salariés est une source de souffrance. Son CSE a alors organisé des workshops, des webinaires et des master classes avec les salariés, “pour leur expliquer ce que le CSE peut faire, et ce qu’il ne peut pas faire, comme réaliser des miracles”. L’élu soulève aussi le problème de la réclamation d’un salarié qui va à l’encontre de l’intérêt de l’ensemble du personnel. Comment gérer ces demandes ? Emmanuelle, une autre élue, réagit : “Il faut parfois filtrer la réclamation si elle va à l’encontre de l’intérêt collectif”.
En conclusion, Audrey Bonheur-Payet conseille de ne pas “basculer en mode sauveur car on risque de tomber en souffrance à force d’absorber celle des autres”. Mais c’est Emmanuelle, une élue rassérénée par cet atelier, qui a eu le mot de la fin : “Je me sens moins seule…”.
ActuEL CSE – Marie-Aude Grimont
Conditionnalité des aides aux entreprises : un rapport suggère de muscler le rôle du CSE
07/04/2021
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Peut-on conditionner les aides publiques versées aux entreprises ? Pas si simple, dit un rapport parlementaire qui propose toutefois de recourir au contrat pour obliger les entreprises à s’engager sur des objectifs transparents, que ce soit en termes d’emploi, de salaire ou d’environnement. Les députés suggèrent aussi d’imposer aux entreprises de plus de 500 salariés un dialogue avec le CSE “sur la stratégie bas-carbone”.
Les aides aux entreprises, combien de divisions ? En l’espèce, un certain flou règle. Le rapport parlementaire évoque lui-même une fourchette allant entre 65 à 110 milliards d’euros par an pour totaliser le montant des aides publiques aux entreprises. Ce chiffre, qu’il faudrait revoir à la hausse du fait du fort soutien à l’activité et à l’emploi déclenché par l’Etat pour faire face aux effets de l’épidémie de Covid-19, explique sans doute la montée dans le débat public d’une conditionnalité des aides aux entreprises. La conditionnalité, c’est cette idée que les aides doivent être assorties d’engagements vérifiables dont le non-respect serait sanctionnable. Largement partagée par les organisations syndicales (lire l’encadré en fin de papier), cette idée est maniée avec prudence par les parlementaires qui ont rédigé un rapport sur cette question (1).
La récupération des aides : vers un abaissement du seuil de la loi Florange ?
“Les conditionnalités des aides publiques aux entreprises sont un instrument de politique économique, sociale et environnementale utile et nécessaire, mais non suffisant et encore peu aisé à mettre en œuvre”, disent-ils en conclusion de leur rapport daté du 31 mars 2021. Cette prudence se retrouve encore plus fortement dans les propositions émises à la fin du document : au sujet de la récupération des aides “pour l’installation ou l’extension d’entreprises au cas où elles cessent leur activité”, c’est -écrivent carrément les députés- “un problème à éviter tant il est complexe”.
Un remboursement à la charge de la société mère en cas de faillite d’une filiale
Plusieurs suggestions sont néanmoins formulées sur ce point : les collectivités territoriales pourraient “formaliser les conditionnalités et de fixer des clauses de remboursement en cas de non-respect des objectifs de l’aide”. Autre idée : prévoir que le contrat par lequel est versée l’aide indique qu’en cas de faillite d’une filiale, “le remboursement de l’aide est à la charge de la société mère s’il est constaté que les conditionnalités n’ont pas été respectées”. Enfin, le rapport suggère d’abaisser à 500 salariés le seuil de la loi Florange du 29 mars 2014 “afin d’élargir les possibilités de récupération des aides publiques”. Selon l’article L.773-2 du code du commerce, les personnes publiques ayant attribué une aide à l’installation, au développement économique ou à l’emploi peuvent obtenir la restitution de tout ou partie des sommes versées à une entreprise les 2 années précédant le jugement du tribunal de commerce “s’il est constaté que l’entreprise n’a pas pas accompli tous le efforts nécessaires en vue d’une reprise du site”. Cette disposition ne vise pour l’heure que les entreprises de plus de 1 000 salariés.
L’outil du contrat entre les pouvoirs publics et les entreprises
C’est cependant sur la définition des conditions posées à l’octroi d’aides publiques aux entreprises que le rapport est le plus intéressant. Les députés estiment que la conditionnalité des aides devrait être autorisée par la loi sous forme de contrat, le type de conditionnalité à poser dépendant de la taille de l’entreprise (2). “Le contrat apparaît comme un support juridique plus souple que l’acte administratif unilatéral pour la fixation de conditionnalités et comprend l’avantage de s’adapter à la taille de l’entreprise”, juge le rapport. Cela supposerait donc une négociation, préalable au versement des aides, entre les pouvoirs publics et les entreprises.
Ainsi, toute aide publique visant à maintenir l’existence d’une entreprise devrait être conditionnée “à l’interdiction par voie contractuelle d’augmenter la part fixe et la part variable de salaires de ses dirigeants”. Un contrat, qui serait transmis au CSE, passé entre celui qui octroie l’aide et celui qui la reçoit devrait fixer les critères permettant de lever ce blocage salarial. Ce type de dispositions évoque certains accords de performance collective (APC) lorsque les négociateurs syndicaux parviennent à formaliser ces engagements, notamment pour le maintien de l’emploi ou un montant d’investissement.
Une consultation des CSE sur la détermination des conditions posées lors d’aides publiques
Le CSE est à nouveau évoqué dans le rapport au sujet de l’idée, pour les entreprises de plus de 500 salariés, de conditionner une aide publique à l’ouverture “d’un dialogue avec le comité social et économique sur la stratégie bas-carbone et les impacts sur les milieux naturels”. De façon générale, le rapport propose de compléter l’article L. 2312-17 du code du travail “pour que les comités sociaux et économiques soient consultés sur la détermination des conditionnalités extrinsèques associées à une aide publique”. Le rapport fait ici référence à l’initiative de la région Bourgogne-Franche-Comté qui a fait s’engager, dans une charte, non seulement la Région et l’Etat mais aussi les organisations de salariés et d’employeurs (3). Selon cette charte, toute entreprise sollicitant une idée doit respecter des engagements sociétaux (emploi, conditions de travail, transition écologique, etc.), le but étant “la sécurisation professionnelle des salariés”.
Un office parlementaire d’évaluation
Pour l’octroi d’aides publiques, les députés suggèrent par ailleurs que soit vérifié au préalable le respect par l’entreprise de la loi Copé-Zimmermann sur la place des femmes dans les instances de gouvernance. Enfin, les députés, qui ont bien noté les critiques de France Stratégie sur le Crédit d’impôt compétitivité emploi (“Le CICE n’aurait permis de créer que 100 000 emplois pour un coût de 18 milliards, sans effet réel sur l’investissement”, résument-ils), suggèrent de créer un Office parlementaire commun d’évaluation des aides publiques nationales aux entreprises, office qui serait chargé de “l’évaluation et du suivi des aides aides publiques et de leurs conditionnalités”, notamment environnementales. Et ils conseillent à l’Etat d’assortir toute aide publique d’un minimum de règles, à commencer par le fait de répondre “à un objectif politique clair, rendu public, idéalement dans une étude d’impact”.
1) Cette mission d’information à l’origine du rapport était présidée par Stéphane Viry (LR), les rapporteurs étant Saïd Ahamada (LREM), Barbara Bessot-Ballot (LREM), Dominique Da Silva (LREM) et Laurianne Rossi (LREM). Pour lire le rapport complet, voir notre pièce jointe.
(2) Selon les députés, la conditionnalité peut se faire plutôt, pour les petites entreprises, via la commande publique. En revanche, dès 500 salariés, les entreprises se verraient contraintes de définir un plan de transition écologique et des indicateurs à l’échelle de la branche, l’Etat pouvant alors privilégier les aides publiques assorties d””éco-conditionnalité” à l’échelle des filières.
(3) Cette charte prévoit notamment que l’entreprise demandant une aide régionale informe le CSE de sa demande et de la destination de celle-ci. L’entreprise devra consulter le CSE sur “les aides financières accordées et recueillera son avis motivé”.
Les positions des syndicats auditionnés sur les conditionnalités
Syndicat | Position |
Confédération française démocratique du travail (CFDT) | Favorable à des conditionnalités juridiquement contraignantes, en particulier dans le domaine de l’emploi, des salaires et de l’environnement ; Demande d’une consultation en amont, d’un droit d’alerte et d’un avis conforme du CSE sur les aides proposées ; Renforcer les procédures de suivi plutôt que de faire le pari exclusif du contrôle des aides ; Opposé au versement de dividendes en cas de versement d’une aide publique en cas de soutien à une entreprise ou de réponse à une crise. |
Confédération générale du travail (CGT) | Favorable à des conditionnalités juridiquement contraignantes et demande de contrôle de l’utilisation des aides publiques. Demande d’intégration, dans les contreparties, de la question des salaires et de l’emploi, ainsi que de critères environnementaux, cette conditionnalité et ces critères devant être quantitatifs et qualitatifs. Demande d’une consultation en amont, d’un droit d’alerte et d’un avis conforme du CSE sur les aides proposées. Contrôle par le CSE de l’utilisation des aides par l’entreprise. Favorable à l’interdiction de licenciement au sein d’une entreprise qui verrait son chiffre d’affaires baisser si elle bénéficie d’aides publiques. Établir un suivi et une évaluation en territoire (région) et au niveau national. |
Force ouvrière (FO) | Favorable à des conditionnalités juridiquement contraignantes, en particulier dans les domaines de l’emploi et des salaires. Interdiction des licenciements et des départs contraints lorsque des entreprises reçoivent des aides publiques. Refus du versement de dividendes par les entreprises bénéficiant d’aides publiques. Favorable à une information régulière des salariés au sein du CSE. Position plus réservée sur l’association des salariés à la gouvernance des aides publiques aux entreprises. |
Confédération française de l’encadrement – confédération générale des cadres (CFE-CGC) | Favorable à des conditionnalités dans une logique de sécurisation des aides accordées au service de l’investissement (transition écologique et numérique), de l’emploi et d’un meilleur partage de la valeur ajoutée. Fixation d’un cahier des charges avec l’État avec possibilité de négociations au sein des branches, pour une adaptation par secteur. Demande d’association du CSE (même si son avis n’est que consultatif) ainsi que des organisations syndicales au suivi et au contrôle des aides avec la reconstitution de l’ex commission nationale des aides publiques aux entreprises (confiée alors à l’ancien Commissariat général au plan). Demande d’engagement par les entreprises à fournir des contreparties économiques, sociales et environnementales sur la durée, transposant le système appliqué aux associations bénéficiant d’aides publiques (engagement libre sur la base d’un cahier des charges). |
Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) | Favorable à des conditionnalités ex ante ; Information-consultation des membres du CSE sur l’aide publique accordée à une entreprise, avec un suivi post-négociation avec les organisations syndicales dans l’entreprise. Demande de clauses de revoyure sur les aides publiques aux entreprises, en fonction de l’évolution de la situation des entreprises en difficulté. Promotion de la pratique du reporting régulier ; Les entreprises qui ne respectent pas leur obligation de mettre en place un index de l’égalité entre femmes et hommes ne doivent pas être éligibles aux aides publiques. Conditionner les aides publiques au respect d’engagements environnementaux, dans le cadre du dialogue social. |
Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) | Favorable à un « tronc commun » de contreparties s’appliquant aux entreprises percevant des aides publiques. Valorisation de conditions relatives à la transparence (information du CSE), au processus de gestion prévisionnelle des emplois et des carrières (GPEC), au maintien dans l’emploi (jusqu’à l’interdiction de licenciement, dans certains secteurs, pour une période donnée), à la limitation des écarts de salaires et à la transition écologique (y compris pour les PME, mais proportionnellement à leurs capacités). Favorable au gel du versement de dividendes au moins durant la première année de versement de l’aide publique. |
Bernard Domergue
Institutions représentatives du personnel : panorama des décisions récentes (mars 2021)
09/04/2021
Plusieurs arrêts rendus au mois de mars 2021 apportent des précisions ou rappellent des règles relatives aux élections professionnelles, au CSE ou encore à la protection des représentants du personnel.
► La représentation du personnel est un sujet qui donne lieu à de nombreuses décisions de jurisprudence. Certaines de ces décisions ne tranchent pas une incertitude ni n’élaborent une règle, mais rappellent le droit applicable, précisent certains cas particuliers ou encore fournissent des illustrations intéressantes. Nous vous présentons sous forme de tableau une sélection de ces arrêts du mois de mars 2021 dans le domaine des élections professionnelles, du CSE et du statut protecteur.
Tableau
Thème | Contexte | Solution |
Élections professionnelles | ||
Unité économique et sociale (UES) | Une UES peut être reconnue par convention ou décision de justice entre les entités juridiquement distinctes qu’elles soient ou non dotées de la personnalité morale, dès lorsqu’est caractérisée entre ces structures, d’une part, une concentration des pouvoirs de direction à l’intérieur du périmètre considéré ainsi qu’une similarité ou une complémentarité des activités déployées par ces différentes entités, d’autre part, une communauté de travailleurs résultant de leur statut social et conditions de travail similaires pouvant se traduire en pratique par une certaine mutabilité des salariés | L’UES est reconnue en raison : – d’une part, de l’existence d’une complémentarité d’activités des entités résultant tant de leur objet social que de ce qu’en fait, la société holding détient le capital social d’une clinique et d’un centre d’hémodialyse, ceux-ci ayant eux-mêmes constitué un groupement qui centralise les achats, les fournitures médicales et paramédicales qui leur sont destinés ainsi que les prestations de maintenance du matériel qu’ils utilisent et que la spécialisation des activités médicales de la clinique et du centre d’hémodialyse n’exclut pas leur unité économique puisqu’elles visent toutes deux à administrer des soins aux patients; – d’autre part, de l’existence d’une unité de direction entre les sociétés dont les parts sont détenues par tout ou partie de la même famille de M. D., lequel est président du conseil de surveillance de la société holding et également dirigeant des trois autres entités, ce qui caractérise cette concentration des pouvoirs de direction – et enfin, de l’existence d’une identité des conditions de travail du personnel de la clinique et du centre d’hémodialyse, mis à disposition par la société holding ou géré contre rémunération par le directeur des ressources humaines de la clinique transféré à la société holding. À noter que la Cour de cassation reconnaît également qu’un groupement de coopération sanitaire pouvait faire partie d’une UES. ► Illustration Cass. soc., 3 mars 2021, n° 19-20.245 |
Parité des listes de candidats | Les listes sont composées alternativement d’un candidat de chaque sexe jusqu’à épuisement des candidats d’un des sexes (C. trav., art. L.2314-30). | La règle de l’alternance posée par l’article L. 2314-30 du code du travail n’impose pas que le premier candidat de la liste soit du sexe majoritaire, hors le cas visé au 6e alinéa dudit article (c’est l’exception du cas particulier du “sexe ultraminoritaire” qui est visée ici). Remarque : rappelons à cet égard que lorsque l’application des règles de représentation équilibrée conduit à exclure totalement l’un ou l’autre sexe,les listes de candidats pourront comporter un candidat du sexe qui, à défaut ne serait pas représenté, mais dans ce cas, ce candidat ne peut être en première position sur la liste. ► Confirmation de jurisprudence Cass. soc., 17 mars 2021, n° 19-23.344 |
Exception du “sexe ultraminoritaire” à la règle de principe imposant la présence d’un candidat du sexe sous représenté sur chaque liste.Dans ce cas précis, une liste peut ne comporter aucun candidat du sexe ultra-minoritaire. | Lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l’article L. 2314-30 du code du travail, c’est-à-dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté. Lorsque l’application des règles de proportionnalité conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l’un ou l’autre sexe, les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues. Les dispositions de l’article L.2314-30 du code du travail étant d’ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger. ► Confirmation de jurisprudence Cass. soc., 17mars 2021, n° 19-23.742 | |
S’il y a plus de 2 sièges à pourvoir, le syndicat qui présente une liste incomplète doit calculer le nombre de candidats femmes et hommes en ramenant au nombre de candidats présentés le pourcentage de salariés femmes et hommes représentés dans le collège électoral. | Lorsque la liste incomplète ne respecte pas la proportion respective des femmes et des hommes dans le collège considéré et rappelée dans le protocole préélectoral, cette irrégularité constatée entraîne l’annulation de l’élection du nombre d’élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidat du sexe surreprésenté en surnombre, et ce même si la candidate dont l’élection est annulée est la seule élue de la liste ► Cass.soc., 3 mars 2021, n° 20-10.470. | |
Clôture du scrutin | Le président du bureau de vote doit constater publiquement et mentionner au procès-verbal les heures d’ouverture et de clôture du scrutin, conformément aux prescriptions de l’article R. 57 du code électoral. Le manquement à cette règle justifie à lui seul l’annulation des élections, dès lors que cette mention a pour finalité d’assurer la sincérité du scrutin. | Si l’absence de mention des heures d’ouverture et de clôture du scrutin contrairement, aux prescriptions de l’article R.57 du code électoral, est effectivement de nature à affecter la sincérité des opérations électorales et, s’agissant des principes généraux du droit électoral, constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections, il peut être suppléé par un constat d’huissier (ayant assisté aux opérations) à la mention, par le président du bureau de vote, des heures d’ouverture et de clôture du scrutin sur le procès-verbal établi immédiatement après la fin du dépouillement. ► Confirmation de jurisprudence Cass. soc.,17 mars 2021, n° 19-23.918 |
Procès-verbal (PV) des élections | Le procès-verbal des élections fait foi jusqu’à preuve du contraire. | Il n’est pas démontré que les opérations de dépouillement ont été entachées d’irrégularités car aucune mention n’a été relevée au procès-verbal, et l’huissier de justice, présent lors du dépouillement, n’a procédé à aucune observation ► Cass. soc.,17 mars 2021, n° 19-21.069 |
Protection des représentants du personnel | ||
Résiliation judiciaire | Coexistence entre une annulation d’une autorisation de licenciement et une demande de résiliation judiciaire (séparation des pouvoirs). | Lorsque le salarié protégé est licencié sur le fondement d’une autorisation administrative ensuite annulée, et qu’il ne demande pas sa réintégration, son contrat est rompu par l’effet du licenciement. Il a droit aux indemnités propres à un licenciement dont l’autorisation a été annulée. Il en résulte que la juridiction prud’homale ne peut pas se prononcer sur la demande de résiliation judiciaire formée par le salarié protégé, même si sa saisine est antérieure à la rupture. ► Confirmation de jurisprudence Cass. soc., 3mars 2021, n° 19-16.644 |
Illustration d’une cause de résiliation judiciaire. | Lorsque le licenciement du salarié est nul en raison de l’annulation de l’autorisation administrative, ce dernier doit être réintégré dans son emploi ou un emploi équivalent. Lorsque l’employeur n’a pas satisfait à cette obligation, sans justifier une impossibilité de réintégration, la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur pour ce motif produit les effets d’un licenciement nul pour violation du statut protecteur. ► Cass. soc., 17 mars 2021, n° 19-19.446 | |
Droit d’alerte | Le membre du CSE qui constate lui-même ou qui est saisi par un salarié victime ou simple témoin d’une atteinte au droit des personnes peut saisir immédiatement l’employeur. Les étapes de la procédure d’alerte sont détaillées par l’article L.2312-59. | Lorsque les conditions de la procédure d’alerte étaient réunies en raison de la discrimination subie par le salarié, et que l’employeur n’avait pas procédé à l’enquête légalement prévue, privant ainsi d’effet l’alerte mise en oeuvre et empêchant toute discussion dans l’entreprise, la carence de l’employeur justifie l’octroie de 500 euros de dommages et intérêts au délégué du personnel (transposable à un membre du CSE, la procédure étant restée identique). ► Cass.soc., 3 mars 2021, no 19-23.305 |
Séverine Baudouin, Dictionnaire permanent social