PROTECTION SOCIALE

Indemnités journalières : les nouvelles règles reportées au 1er juin 2024

Le décret n° 2021-428 du 12 avril 2021 prévoit de nouvelles règles de calcul des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) lorsque le salarié n’a pas travaillé (maladie, accident, fermeture de l’établissement, congé non payé…) et n’a donc pas perçu de revenus d’activité pendant tout ou partie de la période de référence (par exemple, pendant les trois mois précédant l’arrêt de travail pour les salariés mensualisés), afin que ce calcul puisse prendre en compte le plus fidèlement possible le revenu qu’il aurait perçu s’il avait normalement exercé son activité. Ainsi, le texte prévoit la prise en compte de l’ensemble des revenus de la période de référence divisés par le nombre de jours de la période travaillée afin de neutraliser les interruptions de travail involontaires ou les débuts d’activité.

Ces dispositions devaient s’appliquer aux arrêts de travail prescrits à compter du 1er octobre 2022. Mais selon le site net-entreprise.fr, cette entrée en vigueur est reportée au 1er juin 2024 dans le but de permettre à l’assurance maladie de mener à bien l’adaptation de son système d’information et de clarifier les données demandées aux employeurs pour le calcul de ces indemnités journalières. Ce décalage de date sera mis en œuvre par un décret devant être publié prochainement.

Les mesures transitoires restent applicables

Le décret de 2021 prévoyait des mesures transitoires pour les arrêts de travail prescrits à compter du 15 avril 2021 et jusqu’au 30 septembre 2022. Selon le site précité, ces mesures continuent à s’appliquer jusqu’au 31 mai 2024 en raison du report de la date d’entrée en vigueur des nouvelles règles.

Pour mémoire, il en résulte que, jusqu’à cette dernière date, les revenus antérieurs servant de base au calcul de l’IJSS sont :

  • en cas de début d’activité au cours d’un mois de la période de référence ou de fin d’activité pendant la période de référence : pour tout le mois, le revenu d’activité journalier effectivement perçu ;
  • lorsque, au cours d’un ou de plusieurs mois de la période de référence, l’assuré n’a pas travaillé par suite de maladie, accident, maternité, chômage involontaire total ou partiel ou en raison de la fermeture de l’établissement employeur à la disposition duquel reste l’intéressé, ou encore en cas de congé non payé (sauf absences non autorisées), de service militaire ou d’appel sous les drapeaux : pour l’ensemble du ou des mois concernés, soit le revenu d’activité journalier effectivement perçu si l’assuré a perçu à une ou plusieurs reprises des revenus d’activité pendant la période de référence, soit le revenu d’activité journalier effectivement perçu au cours des jours travaillés depuis la fin de la période de référence dans le cas contraire.

actuEL CE

Le non-recours aux allocations chômage concerne surtout les jeunes en contrats courts

Une proportion non négligeable de salariés éligibles ne recourt pas à l’assurance chômage, selon une étude de la Dares publiée jeudi 6 octobre. Ces “non recourants” sont surtout des jeunes en contrats courts.

“Plus de la moitié des demandeurs d’emploi ne sont pas indemnisés”, indiquait Laurent Berger sur les ondes de FranceInfo le 3 octobre dernier. L’argument est confirmé par les travaux de la direction statistique du ministère du Travail qui a mené une étude sur les cas de non-recours aux allocations et le profil des individus concernés. La Dares s’est penchée sur les fins de contrats de travail survenues entre le 1er novembre 2018 et le 31 octobre 2019. Les analyses portent donc sur les règles antérieures au décret de carence du 26 juillet 2019*. L’étude de la Dares se concentre sur les règles d’indemnisation issues de la convention d’assurance chômage de 2017. Ainsi, les résultats de l’étude ne peuvent être mis en perspective par rapport à la dernière réforme de l’assurance chômage, entrée en vigueur en 2021. Par ailleurs, le choix de cette période permet de ne pas inclure dans les résultats les perturbations de la crise sanitaire.

25 à 42 % des salariés éligibles ne recourent pas à l’assurance chômage

L’étude contredit l’argument selon lequel les chômeurs abusent du système d’indemnisation : entre 25 et 42 % des salariés éligibles (soit 390 000 à 690 000 personnes remplissant toutes les conditions pour percevoir une indemnité chômage) ne recourent pas aux prestations auxquelles ils ont droit. Selon la Dares, ce chiffre est “un taux comparable à ceux observés pour d’autres prestations sociales”. Le taux de non-recours constaté est en effet de 34 % pour le RSA et 32 % pour les retraites. Jusqu’à présent, ce phénomène était moins observé sur l’assurance chômage car les droits y sont ouverts pendant un an, ce qui n’est pas le cas des autres prestations, souligne l’organisme du ministère du Travail. Dans le détail, environ 30 % des personnes âgées de 25 à 60 ans remplissant les critères d’éligibilité ne recourent pas à l’assurance chômage. Il grimpe à 53 % chez les 16-24 ans.

Des jeunes en intérim ou en CDD

Les jeunes en contrats courts (intérim et CDD) recourent moins à l’assurance chômage que ceux qui détiennent un contrat de travail à durée indéterminée, selon les constatations de la Dares. Les deux tableaux ci-dessous montrent le taux de non-recours en fonction de la nature du contrat rompu, et en fonction du motif de fin de contrat :

L’étude constate également que les non-recourants ont travaillé moins longtemps que les recourants : 55 % des éligibles ayant travaillé entre 4 et 6 mois ne recourent pas à l’assurance chômage, contre 19 % pour ceux ayant travaillé plus de deux ans. Le montant des droits de ceux qui ont renoncé à l’assurance chômage est donc potentiellement plus faible.

Cependant, les non-recourants retrouvent également un emploi plus rapidement : dans le mois suivant la fin de leur contrat pour presque 25 % d’entre eux, contre 15 % de ceux qui recourent à l’assurance chômage. 

Une méconnaissance de l’allocation et de l’éligibilité

Première cause du non-recours : l’ignorance des conditions d’éligibilité et du montant des droits. Selon la Dares, les chômeurs éligibles peuvent tout simplement manquer d’information sur la prestation et son mode d’accès. Il faut en effet commencer par s’inscrire à Pôle Emploi avant d’être informé de ses droits. Les potentiels bénéficiaires qui ignorent ce point risquent donc encore plus de ne pas s’inscrire sur les listes de Pôle Emploi. Leur manque d’information est alors renforcé par cette omission.

La Dares estime ensuite que ceux qui ne sollicitent pas l’assurance chômage peuvent se méprendre sur leur éligibilité au dispositif : “Le fait que les salariés proches de la durée minimale d’affiliation (4 mois) soient ceux qui recourent le moins à l’assurance chômage peut révéler une incertitude sur les règles d’éligibilité : les individus ayant peu travaillé avant de perdre leur emploi sont aussi les plus susceptibles de ne pas connaître ou de mal connaître leur éligibilité (…). Au contraire, plus la durée travaillée est importante, moins les individus ont de doute sur leur éligibilité”.

Par ailleurs, ceux qui ont déjà perçu l’assurance chômage y recourent plus facilement : ils ont progressé dans la connaissance de leurs droits et dans les démarches à accomplir. C’est ce que la Dares appelle “un effet d’apprentissage”. Elle explique aussi le non-recours comme le résultat d’un calcul entre les coûts et les bénéfices : “La prestation peut en effet paraître peu attractive eu égard aux coûts associés à sa demande (crainte de la stigmatisation, démarches administratives, contrôles, etc.), et ce d’autant plus si les personnes anticipent un retour rapide à l’emploi”.

Enfin, la Dares pointe la complexité et les modifications régulières des règles d’indemnisation qui nuisent à l’information des potentiels bénéficiaires de l’allocation.

*A l’automne 2018, les partenaires sociaux n’avaient pas abouti à un accord fixant les nouvelles règles de l’assurance chômage. L’État avait donc “repris la main” par décret. 

**Administration centrale du ministère du Travail chargée de la mise en œuvre des politiques d’emploi et de formation professionnelle

Le non-recours, un argument contre les projets de réforme de l’assurance chômage ?
  C’est peu de dire que ce rapport de la Dares était très attendu. Un amendement à la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel de 2018 prévoyait sa remise dans les deux ans. Il aurait donc dû sortir en 2020. Il n’en fut pourtant rien, et il faudra attendre le 19 janvier 2022 pour que le sujet refasse surface à l’occasion du dépôt d’un rapport parlementaire d’évaluation de la loi avenir professionnel. Les députés qui l’ont rédigé y indiquent que le fameux rapport “est en retard mais en voie d’être remis”. La Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP **) leur aurait expliqué que “produire ce rapport était rendu difficile jusqu’ici en raison de la complexification des règles d’éligibilité”.  Avec deux ans de retard, le document aurait pu être publié en mars 2022. Mais là encore, pas de rapport. A un mois du premier tour de l’élection présidentielle, des députés se sont émus de l’absence persistante du mystérieux document. Selon le journal Libération, Élisabeth Borne, alors ministre du Travail, interpellée par le député François Ruffin, aurait répondu que les résultats de l’étude nécessitaient d’être approfondis. Aurait-il dérangé la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron ? C’est à l’époque ce que pense l’opposition socialiste/communiste/France Insoumise. La CGT dénonça à son tour “une censure insupportable” du rapport par le gouvernement dans un communiqué de presse du 23 mars 2022 (en pièce jointe) : “Le président-candidat Macron vient d’annoncer une nouvelle réforme de l’assurance chômage s’il est élu. Avait-il peur de voir apparaître que des centaines de milliers d’allocataires sont lésés, alors qu’il envisage de nouvelles économies sur le dos des travailleuses et travailleurs précaires ?”. Le syndicat n’a donc pas manqué d’enfoncer le clou la semaine dernière, dénonçant dans un nouveau communiqué (en pièce jointe) “les mensonges du gouvernement, arguant que “le mythe des chômeurs grassement indemnisés et qui ne veulent pas travailler ne cesse de s’effondrer (…)”.   Il reste à voir si l’opposition va se saisir de ce document pour dénoncer le projet d’introduire une assurance chômage contracyclique par décret grâce à l’article 1er du projet de loi portant mesures d’urgence sur le marché du travail. Celui-ci doit arriver devant les sénateurs le 25 octobre prochain.

Marie-Aude Grimont

Le Conseil d’État rejette les derniers recours des syndicats contre l’assurance chômage

La précédente réforme de l’assurance chômage avait donné lieu à de multiples recours des syndicats. Si certains ont abouti, le Conseil d’État demandant au gouvernement de revoir sa copie, d’autres ont finalement été rejetés lundi 10 octobre. Plusieurs syndicats* avaient demandé au juge d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1251 fixant la date d’entrée en vigueur de certaines dispositions du régime d’assurance chômage. Ils faisaient notamment valoir que le décret était irrégulier, du fait que le gouvernement ne leur avait transmis aucun nouveau document de cadrage pour négocier l’assurance chômage. Le Conseil d’État ne retient ni cet argument ni celui d’un détournement de procédure lié au fait que le décret en cause reprenait la même décision que celle qui fût suspendue en référé le 22 juin 2021. Même rejet de principe sur la date d’entrée en vigueur des nouvelles modalités de calcul du salaire journalier de référence : le Conseil d’État considère qu’aucune erreur manifeste d’appréciation ne ressort des pièces du dossier. 

Réagissant par communiqué de presse, l’Unsa indique qu’elle “continuera de s’opposer à la rédaction des droits des demandeurs d ’emploi” et s’oppose déjà à l’idée d’une réduction de la durée d’indemnisation des seniors avancée par le ministre du Travail.

Les organisations patronales voient également rejetés leurs recours sur le bonus-malus (taux de séparation moyens de l’arrêté du 28 juin 2021 et critères d’affectation d’une entreprise à un secteur d’activité).

*L’Unsa, la CGT, la CFE-CGC, la CFDT, la CFTC, la FSU et divers syndicats d’interprètes et conférenciers 

actuEL CE

Modulation de l’assurance chômage, territorialisation : les questions qui restent en suspens

Le ministère du Travail a transmis hier aux syndicats une lettre et un support de concertation en vue de la première réunion qui se tiendra lundi 17 octobre à 9 heures. Le document confirme que le gouvernement exclut une modulation du montant de l’allocation chômage. Il met lui-même en doute la question de la territorialité des mesures. Explications.

Les partenaires sociaux vont pouvoir plancher tout le week-end sur les documents transmis hier par le ministère du Travail. Une lettre de concertation et un support de 25 pages leur détaillent le contenu de la réunion qui se tiendra lundi prochain, de 9 à 11 heures. Il y est question des paramètres d’indemnisation qui seront amenés à varier selon l’état de la conjoncture. Le ministère aborde aussi les critères économiques qui déclencheront la variation des paramètres d’indemnisation. Il évoque également l’épineuse question de la territorialisation : la situation économique et le marché du travail ne sont pas identiques en île-de-France et en province. Dès la présentation du projet de réforme, ce point avait suscité des commentaires sceptiques. La concertation doit en principe se terminer fin novembre, alors que du côté parlementaire, le projet de loi qui permet au gouvernement de porter cette réforme par décret a été adopté à l’Assemblée nationale. Il sera débattu au Sénat à partir du 25 octobre prochain.

Les thèmes abordés pendant la concertation

La lettre de concertation leur propose de tenter de répondre à trois grandes questions :

  • l’état des lieux du marché du travail et le diagnostic sur les difficultés de recrutement ;
  • le choix des paramètres du régime qui pourront faire l’objet d’une modulation en fonction de la conjoncture ;
  • les critères et modalités du déclenchement du passage aux règles plus favorables en cas d’embellie ou moins favorables en cas de tempête économique.

Le support de concertation explique la philosophie du projet et lance des pistes sur chacun des trois thèmes, sans toutefois répondre aux questions qui se posent sur la faisabilité et la viabilité juridique du futur régime.

Paramètres modulés : le montant de l’indemnisation est exclu d’emblé

Conformément aux déclarations publiques d’Olivier Dussopt, le montant de l’allocation chômage ne changera pas en fonction de la situation économique du pays. Le support de concertation est très clair sur ce sujet : “L’ensemble de ces paramètres sont soumis à la réflexion des partenaires sociaux, à l’exception de la modulation du montant de l’indemnisation et du taux de remplacement de l’allocation journalière en fonction du Salaire Journalier de Référence, que le gouvernement écarte d’emblée”. C’est un élément important qui sécurise les chômeurs au moins sur ce point.

En revanche, le futur régime pourra jouer sur la condition d’affiliation : il faut actuellement avoir travaillé 6 mois sur 24 mois (au lieu de 4 mois avant la réforme de l’assurance chômage de 2021. Ainsi, si la conjoncture s’améliore, cette durée pourrait devenir plus longue. A l’inverse, elle pourrait être raccourcie en cas de détérioration économique. C’est toute la philosophie de ce système “contracyclique”. La période de référence (à savoir les 24 mois) pourrait elle aussi changer selon les mêmes mécanismes. Autre paramètre évoqué dans le support, la durée d’indemnisation, c’est à dire la période pendant laquelle l’allocation est perçue. Elle est actuellement de 24 mois pour un chômeur de moins de 55 ans, et de 36 mois pour un chômeur plus âgé. Mais attention, Olivier Dussopt envisage aussi de réduire la durée l’indemnisation de ces séniors afin de les inciter à conserver leur emploi.

Les modulations devront remplir certains objectifs : avoir un effet réel et rapide sur l’emploi, et se prêter aux comparaisons internationales “en fonction de l’écart constaté avec les autres pays”.

Des questions demeurent au-delà de ces vœux pieux : les modulations interviendront-elles en début ou en fin de droits ? S’appliqueront-elles sur toute la durée d’indemnisation ? Le ministère n’y répond pas : il les soumet aux partenaires sociaux.

Les indicateurs d’évolution des paramètres

Autre sujet et pas des moindres : selon quels indicateurs la modulation des paramètres sera-t-elle déclenchée ? Le taux de chômage ? Le taux de croissance ? Le PIB ? Sur ce point, le support de concertation ne rentre pas dans le détail. Il évoque des indicateurs sur les tensions de recrutement et des indicateurs “renseignant sur l’activité (par exemple rythme de la croissance ou indicateurs de climat des affaires)”.

Vers un comité d’experts consultatifs sur la territorialisation ?

Le ministère aborde enfin l’épineuse question de la territorialisation. Dans la mesure où le marché du travail et l’environnement économique ne sont pas similaires aux quatre coins du pays, il faudra bien en tenir compte avant de moduler les paramètres d’assurance chômage. Mais un tel dispositif ne risque-t-il pas de ressembler à “une usine à gaz” ? Le système canadien, dont semble s’inspirer la réforme, prévoit 62 régions économiques, chacune connaissant une modulation différente en fonction de sa santé…

Le ministère relève aussi le risque juridique : si les conditions d’indemnisation diffèrent selon le lieu de résidence ou de travail, comment assurer l’égalité des citoyens devant la loi protégée par la Constitution ? Le document ne répond pas à cette question mais propose de créer un comité d’experts consultatif, “chargé, en cas de passage de seuil des indicateurs, de donner son appréciation de la situation du marché du travail et ses recommandations sur l’opportunité d’appliquer les nouveaux paramètres prévus”.

Le reste du document (en pièce jointe) contient plusieurs annexes émaillées de chiffres que les syndicats vont devoir éplucher…

Marie-Aude Grimont

La rubrique “Effectif” du Boss sera opposable à compter du 1er novembre

Dans une actualité datée du 12 octobre 2022, le Bulletin officiel de la sécurité sociale (Boss) annonce que la rubrique “Effectif” est désormais consolidée sur la base des remarques issues de la consultation. Elle sera opposable à compter du 1er novembre 2022 (et non à partir du 1er août 2022 comme cela était un temps prévu). 

Sur son site, le Boss liste les modifications apportées.

actuEL CE