Pour près d’un DRH sur deux, le télétravail a eu un impact négatif sur les salariés
25/05/2021
Selon un sondage Ifop pour Back Office Santé, réalisé auprès de 605 décisionnaires RH (dont 64 DRH) travaillant dans une entreprise de plus de 20 salariés, près d’un DRH sur deux estiment que le télétravail a été nocif pour la santé les salariés (45%). Parmi ceux qui ont observé une recrudescence des RPS et TMS, ils sont 67 % à souligner l’impact négatif du télétravail sur la santé des salariés.
Selon les responsables RH interrogés, la crise sanitaire a eu pour effet d’augmenter les risques psychosociaux dans de nombreuses entreprises. 52 % d’entre eux estiment que le stress ou les burn out ont connu une augmentation dans leur entreprise depuis un an.
On observe une hausse des RPS constatée encore plus prononcée dans les entreprises de 250 à 499 salariés (65%) et dans le secteur de l’administration (58%).
Plus des deux tiers des interviewés (67%) reconnaissent que les enjeux de santé sont devenus plus importants depuis la crise de la Covid-19. La majorité des décisionnaires RH (52%) affirme qu’à l’issue de cette crise, leur entreprise prévoit de mettre en place davantage d’actions de prévention. Si la majorité des entreprises considère avoir mis en place des actions de prévention adaptées aux enjeux actuels, 67 % reconnaissent que l’entreprise devrait consacrer plus de temps aux enjeux de santé au travail et 23 %, reconnaît ne pas l’avoir fait jusque-là.
L’organisation du travail, facteur n°1 du présentéisme des salariés malades
27/05/2021
En 2016, un peu plus de deux salariés sur cinq déclaraient être venus travailler alors qu’ils étaient malades. Ce chiffre, relevé par le Centre d’études de l’emploi et du travail (Cnam-CEET) dans son enquête “Connaissance de l’emploi” du 25 mai 2021, est en hausse. Il augmente de trois points entre 2013 et 2016, et le nombre de jours de présentéisme passe de 2,5 à 3,1 jours. Ce phénomène est à déplorer, indique l’étude, puisqu’il entraîne des pertes élevées en termes de rendement individuel, et qu’il influe aussi négativement sur les collectifs de travail. Il entraîne également un risque accru de contagion entre salariés.
Selon l’enquête, les caractéristiques de l’organisation du travail sont les premières en cause, plutôt que les caractéristiques individuelles des salariés (sexe, âge, emploi ou présence d’enfants dans le ménage). Les contraintes pesant sur le rythme de travail ainsi qu’une charge de travail élevée en sont les déterminants forts. Ainsi, la moitié des salariés déclarant ces contraintes ont aussi déclaré des épisodes de présentéisme d’en moyenne quatre jours. “Le risque social induit par le présentéisme, renforcé dans un contexte de crise sanitaire, ainsi que les coûts humains et financiers, directs comme indirects, engendrés en font un véritable enjeu de santé publique”, conclut le Cnam-CEET
Le protocole sanitaire invite les entreprises à discuter de l’évolution du télétravail
28/05/2021
Comment vont évoluer les recommandations du gouvernement s’agissant du travail dans les entreprises ? A partir du 9 juin, la consigne de télétravail autant que possible disparaît au profit d’une recommandation donnée aux employeurs de fixer “un nombre minimal de jours de télétravail par semaine”, et ce “dans un dialogue social de proximité”.
Ce n’est encore qu’un projet, qu’un document de travail (lire en pièce jointe). Mais le protocole sanitaire en entreprise devrait être actualisé sur ces bases en vue du 9 juin, date présentée par l’exécutif comme une nouvelle étape dans le retour à une vie normale après la crise sanitaire et ses restrictions. Le 9 juin verra en effet le passage du couvre-feu de 19h à 21h, la réouverture complète des cafés restaurants et la reprise, sous condition de pass sanitaire (certificat de vaccination ou test négatif à la Covid) des salons et foires. Ce sera, surtout, le début d’un “assouplissement” de la consigne donnée par le gouvernement aux entreprises de recourir autant que possible au télétravail.
Un nombre de jours minimal par semaine télétravaillés
Jusqu’à présent, les entreprises étaient en effet priées de faire travailler, dès que les postes et les tâches le permettent, les salariés en télétravail, un jour par semaine en présentiel étant toléré afin que les salariés gardent le contact avec le collectif de travail et l’entreprise. A partir du 9 juin, le gouvernement demande aux employeurs de fixer, “dans le cadre du dialogue social de proximité”, un “nombre minimal de jours de télétravail par semaine, pour les activités qui le permettent”. Les employeurs sont invités à utiliser comme cadre de référence l’accord national interprofessionnel du 26 novembre 2021 sur le télétravail (1). Bien que flous, ces mots de “dialogue social de proximité” semblent employés pour englober à la fois les CSE, les délégués syndicaux voire les référents Covid, afin de couvrir toutes les situations des entreprises : il s’agit donc d’une invitation au dialogue plus que d’une incitation formelle à négocier, ce que regrette d’ailleurs la CFDT (lire notre encadré).
Le protocole devrait donc ne plus comporter la phrase recommandant de porter à 100% le temps de travail effectué en télétravail pour les salariés qui peuvent travailler à distance. Devrait aussi disparaître la référence “au plan d’action” dont les entreprises devaient se doter pour réduire au maximum le temps de présence sur site. Toutefois, le gouvernement recommande toujours de privilégier les réunions en audio ou en visioconférence. A défaut, “lorsqu’elles se tiennent en présentiel, les réunions doivent respecter les gestes barrières, notamment le port du masque, les mesures d’aération/ventilation des locaux ainsi que les règles de distanciation”. *
Autre nouveauté qui avait été annoncée par Elisabeth Borne, la ministre du Travail : les moments de convivialité réunissant les salariés sur les lieux de travail ne sont plus suspendus mais “peuvent être organisés dans le strict respect des gestes barrières, notamment le port du masque dans les espaces clos, les mesures d’aération/ventilation et des règles de distanciation”.
Un nouvel équilibre à trouver
En dépit de ces assouplissements, le télétravail est toujours présenté, dans la nouvelle version du protocole, comme “un mode d’organisation de l’entreprise qui participe à la démarche de prévention du risque d’infection au SARS-Cov-2 et permet de limiter les interactions sociales aux abords des lieux de travail et sur les trajets domicile travail”, le travail à distance étant “une des mesures les plus efficaces pour prévenir le risque d’infection”.
C’est dans ce balancement entre les contraintes et exigences opérationnelles du travail et la nécessité de conserver ou retrouver une communauté de travail, d’un côté, et, de l’autre, la vigilance à l’égard de la pandémie mais aussi la nouvelle approche que peuvent avoir les salariés à l’égard du travail à distance et du travail présentiel, que les employeurs et les représentants du personnel devront trouver des équilibres.
(1) Cet accord indique que le télétravail peut être “mis en place par accord collectif ou, à défaut, par la voie d’une charte élaborée par l’employeur après avis du CSE”. Bien que dépourvu de force normative, cet accord national interprofessionnel présente l’intérêt, selon certains formateurs et experts, d’offrir une méthode aux employeurs et aux représentants du personnel pour la discussion d’un accord. Ainsi, pour Claire Baillet, juriste à Alinea, “ce texte fixe des repères à “checker” par les délégués syndicaux qui négocient sur le sujet et par les membres des CSE, pour s’assurer qu’on a balayé tous les sujets. Les représentants du personnel pourront piocher dedans pour alimenter les négociations”. A ses yeux, cet accord a le mérite d’aborder, ce qui est nouveau, “la question du télétravail en cas de force majeure en rappelant la responsabilité de l’employeur au regard de la protection de la santé du travail, un élément qui justifie le recours au télétravail” (lire notre article).
Catherine Pinchaut (CFDT) : “Il faut appréhender par la négociation les demandes de changement autour du télétravail” |
Les partenaires sociaux sont invités à faire part au ministère du Tarvail d’ici lundi de leurs osbervations sur la nouvelle formulation du protocole. Catherine Pinchaut, secrétaire nationale de la CFDT, en charge de la politique en matière d’organisation et de vie au travail, regrette la formulation imprécise du “dialogue social de proximité” dans la mesure où il ne s’agit pas à proprement parler d’une obligation formelle de négocier. A ses yeux, il faut voir plus loin que le 9 juin : “Il ne faudrait pas que les CSE soient mis dans la boucle au dernier moment sous prétexte qu’ils ont un avis à donner sur une charte. Nous demandons des négociations dans chaque entreprise afin d’appréhender les demandes de changements qui se font jour avec cette crise sanitaire car certains salariés voudront revenir dans l’entreprise mais d’autres non : quelle organisation faut-il adopter ? Cela mérite vraiment une co-construction”. |
Bernard Domergue