PROTECTION SOCIALE

Les retraites, une question de travail plus que de budget

Depuis les annonces d’Emmanuel Macron et la publication de différents rapports, le débat s’est focalisé sur les dépenses de retraites et leur financement. Ce qui n’est peut-être pas un hasard du point de vue politique. Pourtant, l’analyse du rapport du conseil d’orientation des retraites montre que le sujet est avant tout une question de travail. Explications.

Son rapport, plein à craquer de chiffres et de courbes, était attendu en juin. L’on s’est donc précipités sur le document lors de sa parution le 15 septembre. Il s’agit bien sûr du rapport du conseil d’orientation des retraites (COR, document en pièce jointe), organisme indépendant composé de parlementaires, de fonctionnaires, de syndicalistes et d’experts. Les personnalités politiques et syndicales s’en sont immédiatement saisis, avec, c’est le moins qu’on puisse dire, des interprétations divergentes. Un contexte d’autant plus explosif que le ministre du travail a ensuite convoqué les partenaires sociaux en réunion sur les retraites. Les syndicats ont alors grincé les dents mais depuis, le débat n’est pas tellement plus avancé. Est-ce pour le remettre dans le droit chemin que le Président du COR, Pierre-Louis Bras a proposé à la presse une séance de présentation du rapport, jeudi 22 septembre ? Nul ne saurait lui prêter d’autres intentions que pédagogiques, car cette conférence fût riche d’enseignements. Certes, des déficits sont prévus. Certes, la population vieillit, mais la trajectoire du financement des retraites ne dépend pas que de choix budgétaires : les calculs sont aussi le fruit de choix en matière de travail.

Les constats du COR : des déficits à relativiser

Premier constat incontestable : la France vieillit. Selon les hypothèses démographiques établies par l’Insee, l’indice de fécondité est de 1,83 enfants par femme en 2021. “On le projette à 1,80 en 2070 car il est en baisse”, précise Pierre-Louis Bras, président du COR. De plus, l’espérance de vie en 2070 serait à la hausse, soit 90 ans pour les femmes et 87,5 ans pour les hommes (4,6 points de plus pour les femmes et 8,2 points de plus pour les hommes par rapport à 2021).

Deuxième constat : la dynamique des dépenses de retraites est contenue. “Il n’existe pas d’explosion des dépenses de retraites”, martèle Pierre-Louis Bras, comme il l’avait déjà fait en avril lors d’une conférence. En effet, le schéma ci-dessous, extrait du rapport du COR, montre que même en retenant le pire scénario de productivité du travail (en hausse de seulement 0,7 %, courbe brune), la part des dépenses de retraites dans le produit intérieur brut (PIB) reste parfaitement stable à l’horizon 2070. Elle s’établirait alors à 14,7 % du PIB. Un scénario plus favorable en matière de productivité du travail, si on retient l’hypothèse d’une hausse de 1,3 %, établirait la part des dépenses de retraite à 12,8 % du PIB (courbe bleue). “Ainsi, dans la plupart des hypothèses, la charge des retraites diminuera sauf si on retient le scénario le plus défavorable d’une croissance de la productivité du travail de seulement 0,7 %”, analyse Pierre-Louis Bras.

D’autres schémas du COR sont éloquents. Malgré le vieillissement de la population, la diminution relative des pensions permet de stabiliser voire de fléchir la part des dépenses dans le PIB. Certes, le ratio du nombre de cotisants, c’est-à-dire d’actifs qui travaillent et financent donc le système par leurs cotisations, est en baisse. En un mot, il y a de moins en moins d’actifs pour financer les pensions des retraités. Le ratio établi à 1,7 actif pour un retraité est amené à baisser à 1,2. Ce ratio entre cotisants et cotisés tire les dépenses de retraites vers le haut.

Cependant, le phénomène reste borné par la baisse relative des pensions de retraite. Cette baisse ne signifie pas une réduction des revenus des retraités, car il s’agit d’une baisse relative, calculée par rapport aux revenus des actifs. D’une part, les retraites étant indexées sur les prix, la richesse augmente donc plus vite que les pensions. D’autre part, notamment en période d’inflation comme aujourd’hui, les salaires augmentent eux aussi plus vite que les pensions. Les revenus des retraités “décrochent” donc par rapport aux revenus des actifs, ce qui crée ce phénomène de baisse relative des pensions constatée par le COR.

Enfin, Pierre-Louis Bras propose de raisonner en équilibre patrimonial plutôt qu’en déficits purs : “En additionnant les réserves du régime par répartition (+ 180,4 milliards), plus le fonds de réserve des retraites (+ 26 milliards), et en retranchant la dette de la CADES* (- 42,3 milliards), on parvient à une situation patrimoniale de + 163,2 milliards. Il faut tenir les déficits mais le bilan patrimonial du système de retraites est aujourd’hui positif”.

Les retraites dépendent aussi du travail

Autre point à retenir du rapport du COR : la question de l’équilibre du solde, c’est-à-dire du rapport entre le volume des dépenses et celui des ressources. Comme dans le budget d’une personne physique, le budget des retraites est en déficit si le régime dépense plus qu’il ne gagne. A ce titre, les ressources sont fournies à 79 % par les cotisations des salariés et employeurs.

Le COR constate quant à lui que le taux de prélèvement des retraites est en baisse. Ce taux représente la part des ressources du système de retraites dans le PIB. Or, ce taux recule du fait des cotisations de la fonction publique hospitalière et territoriale. Selon Pierre-Louis Bras, “le taux de cotisation de ces régimes (CNRACL**) est supérieur aux autres (41 %). Or, la part des rémunérations des agents hospitaliers et territoriaux dans l’ensemble des rémunérations va baisser car les effectifs augmentent moins que dans le reste de l’économie”. On voit ici l’impact que certaines politiques publiques destinées à réaliser des économies dans le budget de l’État (gel du point d’indice, augmentation des primes par rapport au salaires, réduction des effectifs) peuvent avoir sur les retraites.

Enfin, comme on l’a vu, les scénarios du COR sont établis à la fois sur la base de prévisions de croissance et de scénarios de productivité du travail. Plus celle-ci augmente, et mieux se portent les finances des retraites puisque les salariés rapportent plus de cotisations au système. Dès lors, des politiques favorisant la période d’emploi des salariés (soit la durée entre leur première embauche et la rupture de leur dernier contrat de travail) amélioreraient les finances des retraites sans qu’il soit besoin de modifier les paramètres d’âge légal de départ et de durée de cotisation. D’où les questions de l’emploi des séniors et de l’accès des jeunes au travail qui pour l’instant ne sont pas abordée par le gouvernement.

La productivité est définie théoriquement comme la production réalisée par la main d’œuvre en rapport avec la quantité de travail utilisée. Elle a augmenté par exemple pendant les Trente Glorieuses du fait du progrès technique. Ainsi, tout ce qui améliore la productivité des salariés pourrait contribuer aux retraites. Cette boîte peut contenir une multitude de choses : la motivation des salariés par le partage de la valeur, une meilleure déconnexion du travail pendant les temps de repos y compris pour les managers, l’amélioration des rapports hiérarchiques et des outils informatiques (aussi bien logiciels que matériels), la suppression de tâches inutiles et chronophages comme certains “reportings”, en un mot, la qualité de vie au travail et la question du travail lui-même.

Les effets pervers des réformes des retraites

Le président du COR a enfin mis en lumière certains effets pervers des réformes. Une modification de l’âge de départ, de la durée de cotisation ou une réduction des pensions peut produire des effets au-delà du système des retraites. Si on repousse l’âge, il existe alors sur le marché du travail plus de personnes disponibles. Cette hausse de l’offre de travail devrait mécaniquement, comme sur tout marché, entraîner une baisse du prix. Mais le marché du travail ne s’ajuste pas en temps réel comme un marché financier dont les traders suivent les chiffres sur des écrans. La présence de travailleurs plus nombreux fait donc augmenter le chômage qui constitue donc indirectement un effet pervers d’un report de l’âge légal. Par suite, si les chômeurs sont plus nombreux, les dépenses d’assurance chômage sont plus élevées. L’État risque donc de perdre d’une main ce qu’il a gagné de l’autre…

*CADES : Caisse d’amortissement de la dette sociale

**CNRACL : Caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales

Marie-Aude Grimont

Les syndicats réclament une revalorisation des retraites complémentaires

Une revalorisation égale à celle des retraites complémentaires, c’est ce que réclament neuf syndicats de retraités (CGT, FO, CFTC, CFE-CGC, FSU, Solidaires, FO fonction publique, Loisirs et Solidarité des Retraités, Ensemble et solidaires). Dans un communiqué diffusé vendredi 23 septembre (en pièce jointe), ils expriment “l’inquiétude, l’incompréhension, voire de la colère des retraités du secteur privé et des retraités polypensionnés de la Fonction publique”. Les retraites du régime général ont en effet été revalorisées de 4 % avec effet rétroactif au 1er juillet 2022. Les syndicats “ne [peuvent] accepter que les retraites complémentaires ne soient pas également revalorisées au moins à hauteur de l’inflation (…), d’autant que le total des réserves du régime s’élevait à 68 981 millions d’euros (soit plus de 68 milliards, NDLR) au 31 décembre 2021, somme qui représente l’équivalent de près de 10 mois de prestations, ce qui est bien supérieur à l’objectif des 6 mois de réserves”. Ils demandent donc au conseil d’administration de l’AGIRC ARRCO d’aligner les retraites complémentaires sur les retraites de base lors de sa réunion du 6 octobre prochain.

actuEL CE

Retraites : “Une décision d’ici la fin de la semaine” selon Elisabeth Borne

Invitée lundi matin sur BFMTV, la Première ministre Élisabeth Borne a indiqué que la réforme des retraites est “prioritaire”. Si la France dispose “d’un modèle social unique au monde, (…) il faut travailler collectivement d’avantage pour le financer. La part des jeunes qui travaillent et des seniors en emploi est plus faible [en France] qu’ailleurs”, a déploré la Première ministre. Quant à la fixation de l’âge de départ à 64 à 65 ans et à la méthode utilisée (projet de loi indépendant cet hiver ou amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale), elle a annoncé une décision “d’ici la fin de la semaine”, après avoir rencontré les présidents des groupes parlementaires.

Sur l’usage de la procédure du 49.3, elle a précisé que sa méthode consistait dans la recherche d’un compromis, tout en corrigeant rapidement un lapsus : “Le dialogue ne viendra pas de moi” (au lieu de dire “le blocage”). 

En réponse à la question d’un auditeur, Élisabeth Borne a confirmé que l’usure professionnelle, les carrières longues et la pénibilité continueraient de bénéficier d’un départ en retraite “plus précoce”. La concertation avec les partenaires sociaux devrait permettre de couvrir toutes les causes de pénibilité. Par ailleurs, un décalage de l’âge du taux plein n’est pas envisagé. Enfin, Élisabeth Borne a annoncé “qu’on devrait aller dans le même esprit que l’index d’égalité hommes-femmes” afin de s’assurer que les entreprises ne discriminent pas les seniors à l’embauche”. Un index senior pourrait donc être à l’étude.

actuEL CE

Le PLFSS pour 2023 limite la prescription d’arrêts de travail par téléconsultation

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 a été adopté lundi 26 septembre en Conseil des ministres. Deux mesures intéressent directement les services RH : la limitation de la délivrance d’arrêts maladie par téléconsultation et l’indemnisation plus rapide des congés familiaux.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 a été adopté lundi en Conseil des ministres. Zoom sur deux dispositions que les services RH doivent avoir en tête dès à présent. 

Une indemnisation plus rapide des congés familiaux

Le PLFSS pour 2023 vise à simplifier la délivrance des indemnités journalières au moment de l’arrivée d’un enfant. Ainsi, son article 37 prévoit que l’employeur devra garantir, dès le premier cycle de paie suivant l’absence du salarié, au titre du congé maternité, du congé de paternité et du congé d’accueil de l’enfant, le versement d’une somme au moins égale au montant des indemnités journalières

Le gouvernement a en effet pu constater que “ces indemnités journalières peuvent néanmoins être versées avec retard en raison des délais de transmission des éléments de salaires nécessaires au calcul de l’indemnisation. Aujourd’hui, pour 30 % des assurés en congé maternité ou paternité, les employeurs versent directement au salarié un montant correspondant aux indemnités journalières, et perçoivent ensuite les indemnités versées par les caisses”.

Le gouvernement souhaite cette modification afin “d’accompagner la montée en charge de l’allongement du congé paternité entré en vigueur le 1er juillet 2021 et éviter la rupture de ressources lors du congé maternité”.

En contrepartie, le gouvernement garantit un délai de remboursement court de l’assurance maladie aux employeurs afin qu’ils ne subissent aucune perte de trésorerie. Un décret en Conseil d’Etat en fixera le délai. Ce mécanisme de subrogation couvrira une grande majorité des salariés, quel que soit leur statut et leur niveau de revenu, et sera mis en œuvre progressivement entre 2023 et 2025, en fonction de la taille des entreprises.

Un décret en Conseil d’Etat fixera également les catégories de salariés auxquels ces dispositions ne s’appliquent pas eu égard aux caractéristiques de leur contrat de travail, ainsi que les modalités d’application du présent article. 

Ces dispositions entreront en vigueur, selon la taille des effectifs des entreprises et dans les administrations publiques, à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2025.

Le PLFSS pour 2023 a également pour objectif de “transférer à la Cnaf une partie de la prise en charge financière des indemnités journalières au titre du congé maternité, pour un montant d’environ 2 Md€ en 2023, soit 60 % environ de leur coût total, cette part correspondant à la part observée ces dernières années des indemnités versées au titre de la période post-natale de ce congé. Le transfert prendra la forme d’un remboursement par la Cnaf à la branche maladie, sans incidence tant sur les conditions d’accès aux prestations que sur les modalités de gestion et de versement, qui demeurent inchangées”, précise le dossier de presse.

La limitation des arrêts de travail par téléconsultation

Lors de la crise sanitaire, il avait été décidé que même les assurés sans médecin traitant pouvaient bénéficier de la téléconsultation. Le gouvernement veut désormais faire machine arrière estimant qu’il y a des abus. Dans une interview accordée au Journal du dimanche (JDD) le 25 septembre, le ministre des comptes publics, Gabriel Attal, a annoncé que les arrêts de travail délivrés en téléconsultation par un médecin qui n’est pas le médecin traitant ne seront plus remboursés par la sécurité sociale. Il souhaite “éviter que certains enchaînent les consultations en ligne jusqu’à trouver celui qui voudra bien leur délivrer un arrêt maladie”. Selon lui, “on a constaté une explosion des arrêts maladie donnés, en téléconsultation, par un professionnel qui n’est pas le médecin traitant. Ce sont près de 100 millions d’euros l’an dernier”. 

Le PLFSS pour 2023 entérine bien cette annonce à son article 43. Les arrêts de travail prescrits à l’occasion d’une téléconsultation ne donneront lieu à indemnité journalière que si l’incapacité physique a été constatée par le médecin traitant ou par un médecin ayant déjà reçu l’intéressé en consultation depuis moins d’un an. 

Les dispositions du présent article sont applicables aux arrêts de travail prescrits à compter du 1er juin 2023.

Arrêts maladie liés à la Covid-19
Le PLFSS pour 2023 prolonge jusqu’au 31 décembre 2023 la délivrance d’arrêts maladie dérogatoires en cas de test PCR ou antigénique positif à la Covid-19. L’indemnisation sera alors versée sans vérification des conditions habituelles d’ouverture de droit, sans application d’un délai de carence et ne sera pas comprise dans les durées maximales de versement des indemnités journalières.

Florence Mehrez

“L’un des enjeux du plein emploi est de tenir compte des fortes difficultés de recrutement des entreprises”

Aides ciblées pour les bas niveaux de qualification en apprentissage, assouplissements fiscaux et sociaux pour les jeunes entreprises, aide compensatoire pour les seniors… Pour Marc Ferracci, député Renaissance et rapporteur du projet de loi Marché du travail, le plein-emploi passe par de multiples leviers. Le texte est examiné en commission cette semaine à l’Assemblée nationale.

Vous avez été désigné rapporteur du projet de loi Marché du travail. Comment se présente le texte examiné à partir d’aujourd’hui en commission des affaires sociales puis en séance publique à partir du 3 octobre ? Pourrez-vous éviter le recours au 49-3 ?

J’espère que nous n’aurons pas à utiliser le 49-3. La gauche ne soutient pas le projet de loi et le Rassemblement national a d’ores et exprimé une forte défiance à l’égard du texte. Mais il y aura des discussions avec d’autres groupes parlementaires, notamment Les Républicains, qui pourraient nous permettre de trouver un accord. À ce stade environ 210 amendements ont été déposés en commission.

La Première ministre, Elisabeth Borne, a indiqué, lors de son discours de politique générale, que “le plein emploi est à portée de main”. Quel est votre regard d’économiste ?

Pour atteindre cet objectif, il faut agir dans de multiples directions. L’un des enjeux est de tenir compte des fortes difficultés de recrutement des entreprises. La réforme de l’assurance chômage est un levier pour y faire face, mais ce n’est pas le seul.

 La réforme que prévoit le gouvernement doit être un élément d’une stratégie plus globale

La réforme que prévoit le gouvernement doit être un élément d’une stratégie plus globale qui repose sur différents piliers, comme la refonte des lycées professionnels, l’apprentissage, l’amélioration du service public de l’emploi avec France Travail qui doit permettre un meilleur accompagnement des personnes privées d’emploi (en mettant fin à la segmentation de leur suivi en fonction des statuts) mais aussi des entreprises dans leur démarche de recrutement. C’est une question centrale car elle peut générer des gains d’efficacité.

Comment aider les entreprises à recruter ?

Les entreprises et plus particulièrement les petites ont souvent du mal à proposer des offres qui soient en cohérence avec les attentes des salariés et des demandeurs d’emploi, en termes de salaires, de conditions de travail.

Nous prévoyons un assouplissement des contraintes fiscales, sociales et réglementaires pour les jeunes entreprises

Donc il faut aider les employeurs à rédiger les offres d’emploi et renforcer les moyens dédiés à cet accompagnement. Sans pour autant négliger les efforts nécessaires que doivent faire les entreprises et les branches professionnelles pour rendre les métiers plus attractifs.

Autre enjeu : l’accompagnement des jeunes entreprises (moins de cinq ans d’existence) créatrices d’emploi. Lequel peut passer par un assouplissement des contraintes fiscales, sociales et réglementaires qui pèsent sur ces structures.

Comment remettre en emploi les personnes les plus éloignées du marché du travail ?

Des marges de manœuvre existent là encore, notamment en ciblant l’emploi des jeunes et des seniors. Par exemple, toutes les études montrent que l’apprentissage a un rendement positif surtout pour les faibles niveaux de qualification.

Toutes les études montrent que l’apprentissage a un rendement positif surtout pour les faibles niveaux de qualification 

Ce sont eux qui en tirent le plus de bénéfices en termes d’insertion professionnelle. Dans ces conditions, je suis favorable à un système plus redistributif pour ces personnes les moins diplômées, en instaurant des prises en charge des formations (ou coûts contrat) plus élevées pour les plus bas niveaux de qualification (du CAP au BTS) ou des aides à l’embauche dégressives en fonction du niveau de diplôme pour les employeurs.

Et pour les seniors? Elisabeth Borne a évoqué lidée dun Index seniors, calqué sur le modèle de l’Index égalité professionnelle…

La réforme des retraites est importante pour financer l’ensemble de notre modèle social, et au-delà les investissements dans la santé, l’éducation, la transition écologique.

Pour compenser cette décote salariale, il faut donc leur octroyer une aide compensatoire financée par l’assurance chômage

Mais cela passe effectivement par un relèvement de l’emploi des seniors (55-64 ans), actuellement l’un des plus faibles des pays européens. L’idée de l’Index seniors est une bonne idée (que j’ai moi-même portée) mais elle ne réglera pas tout. L’une des principales difficultés des seniors au chômage étant d’accepter un emploi moins bien payé que le précédent.

Pour compenser cette décote salariale, il faut donc leur octroyer une aide compensatoire financée par l’assurance chômage. Autrement dit, leur permettre de bénéficier de leurs droits à l’assurance chômage, en puisant dans leur propre capital de droits.

Dans le projet de loi, le sujet de l’assurance chômage cristallise les plus fortes oppositions. Comment concrètement ce principe “contracyclique” pourrait-il se mettre en place ? Confirmez-vous les propos du ministre du travail qui a déclaré qu’il s’agirait de moduler la durée d’indemnisation ou les conditions d’éligibilité en fonction de la conjoncture mais qu’il ne s’agirait pas de toucher au montant des allocations ?

Il y a encore des discussions sur ce sujet. Mais de nombreuses études ont montré que le taux de retour à l’emploi augmente à proximité des fins de droits, il y a donc des marges de manœuvre. En tout état de cause la modulation ne touchera pas au montant de l’allocation.

Quid des chômeurs résidant dans les zones sinistrées ?

Des mesures d’accompagnement existent, dont le ciblage territorial peut-être amélioré. C’est un des enjeux de la mise en œuvre de France Travail.

Êtes-vous favorable à une modulation des règles en fonction des territoires ?

 Ce mécanisme conduirait à une rupture d’égalité des demandeurs d’emploi

C’est un sujet encore à l’étude. Mais à l’intérieur de chaque région, les taux de chômage ne sont pas homogènes. Si vous voulez aller au bout de la logique, il faut une maille plus fine. D’autant plus que ce mécanisme conduirait à une rupture d’égalité des demandeurs d’emploi. Je constate que les règles n’ont jamais été territorialisées, hormis à Mayotte.

Concernant la VAE (validation des acquis de l’expérience), les syndicats tirent la sonnette d’alarme sur le financement du dispositif, financé par les Associations transitions professionnelles qui prennent déjà en charge les CPF (comptes personnels de formation) de transition professionnelle…

Ce projet de loi n’est pas un texte budgétaire. Il faudra sans doute aller plus loin, en s’appuyant sur le rapport Rivoire, pour donner un nouvel élan à ce dispositif. Mais ce texte donne des clefs pour lever quelques-unes des difficultés identifiées, notamment en renforçant l’accompagnement des candidats à la VAE pour la constitution de leur dossier. Il s’agit d’une mesure importante car la démarche est très complexe. Il permettra ainsi aux proches aidants de s’engager dans un parcours de VAE sur la base de cette expérience familiale.

Ce projet de loi sera-t-il, au-delà de la clarification de la définition du corps électoral, l’occasion d’apporter des améliorations sur les ordonnances de 2017 comme le souhaitent les syndicats ? Notamment sur le nombre d’heures de délégation, le nombre d’élus, l’abaissement du seuil pour les commissions santé et sécurité (aujourd’hui de 300 salariés) ?

Ce projet de loi clarifie, à travers l’article 3, la définition du corps électoral et les règles d’éligibilité aux élections professionnelles. Il n’a pas vocation à traiter l’enjeu global des institutions représentatives du personnel.

Anne Bariet

Les retraites complémentaires bientôt revalorisées de 5,1 % ?

Mardi 27 septembre, la commission paritaire de l’Agirc-Arrco s’est réunie et a abouti à un consensus des partenaires sociaux sur une revalorisation des retraites complémentaires du secteur privé de 5,1 % au 1er novembre prochain. Cette décision doit encore être entérinée par le Conseil d’administration de l’organisme, le 6 octobre.

actuEL CE

Retraites : un projet de loi dédié “avant la fin de l’hiver”

A l’issue d’un dîner à l’Élysée, la première ministre Élisabeth Borne a annoncé, hier, à l’AFP, que le gouvernement avait fait le choix d’un projet de loi spécifique sur les retraites plutôt qu’un amendement au PLFSS dès octobre. La cheffe du gouvernement a demandé au ministre du travail, Olivier Dussopt, « d’engager dès la semaine prochaine » des négociations avec les organisations patronales et syndicales, et avec les « groupes parlementaires ». Au menu des discussions ? La pénibilité des métiers, les carrières longues, les aménagements de fins de carrière, la transition emploi-retraite mais aussi l’emploi des seniors, les régimes spéciaux ainsi que la revalorisation du minimum de pension pour les personnes qui ont eu une carrière complète. L’objectif du gouvernement est d’adopter d’un projet de loi « avant la fin de l’hiver », pour une application prévue à l’été 2023. 

La CFDT a réagi dans un communiqué de presse (en pièce jointe) en réclamant “loyauté et transparence” dans la concertation qui s’annonce : “Cela nécessite d’expliquer clairement les enjeux, y compris financiers, avant de focaliser le débat sur les remèdes. La CFDT exige donc que les objectifs de la réforme des retraites envisagée par le gouvernement soient clairement affichés”. Le syndicat demande également “une véritable concertation sur le minimum de pension, la pénibilité, les carrières longues, les fins de carrière, l’emploi des seniors tant dans le privé que dans le public”, tout en réaffirmant son opposition à un report de l’âge légal à 65 ans. La CFDT participera par ailleurs à la réunion intersyndicale du 3 octobre qui ne manquera pas d’aborder ces sujets.

actuEL CE