Comment les salariés doivent-ils être informés du déroulement du vote électronique ?
09/10/2025
En cas d’organisation d’un vote électronique dans l’entreprise pour l’élection des membres de la délégation du personnel du CSE, chaque salarié doit disposer d’une notice d’information détaillée sur le déroulement du vote. Comme vient de le préciser la Cour de cassation dans un arrêt du 17 septembre 2025, cette notice, qui doit être communiquée à chaque salarié en amont du scrutin, peut l’être par tout moyen.
Pour l’élection des membres de la délégation du personnel du comité social et économique (CSE), il est possible de recourir au vote électronique sur la base d’un accord de groupe ou d’entreprise ou, à défaut, d’une décision unilatérale de l’employeur (articles L.2314-26 et R.2314-5 du code du travail) lorsque, à l’issue d’une tentative loyale de négociation avec les délégués syndicaux, aucun accord collectif n’a pu être conclu (arrêt du 13 janvier 2021).
Dans ce cadre, l’article R.2314-12 du code du travail prévoit que chaque salarié doit disposer d’une notice d’information détaillée sur le déroulement des opérations électorales, sans toutefois préciser les modalités de mise à disposition de cette notice.
► Cette notice explicative ne se substitue ni à l’information des salariés sur le contenu du cahier des charges établi dans le cadre de l’accord autorisant le vote électronique ou, à défaut, par l’employeur (art. R.2314-5), ni à celle des électeurs sur l’utilisation de leurs données personnelles. Elle a pour objet de détailler clairement les opérations de vote ainsi que le fonctionnement général du système de vote électronique (délibération de la Commission nationale informatique et libertés, Cnil, n° 2019-053, 25 avril 2019). Elle peut aussi, comme en l’espèce, comprendre les professions de foi des différentes listes présentées par les organisations syndicales.
Une information en amont du scrutin
S’en tenant à la lettre du texte, la chambre sociale de la Cour de cassation en déduit, dans l’arrêt du 17 septembre 2025, que chaque salarié doit disposer en amont du scrutin d’une notice d’information, qui peut lui être communiquée par tout moyen.
► En l’espèce, le tribunal judiciaire de Nanterre a jugé qu’un délai minimum de 15 jours entre la remise de la notice à l’ensemble des salariés inscrits sur les listes électorales et le premier tour des élections s’imposait. Ce point n’était pas discuté devant la Cour de cassation. La Cnil estime, pour sa part, que cette communication doit intervenir en temps utile (délibération Cnil, n° 2019-053, 25 avril 2019).
Le seul affichage de la notice à l’attention des salariés présents peut être jugé insuffisant
Pour autant, cette liberté de choix dans le mode de communication de la notice d’information aux salariés inclut-elle la possibilité pour l’employeur de porter ladite notice à la connaissance des salariés par simple affichage sur le lieu de travail ? Autrement dit, l’employeur peut-il s’abstenir de procéder à une remise individuelle de la notice d’information ?
Une réponse négative s’imposait, en l’espèce, pour le tribunal judiciaire de Nanterre.
Après avoir constaté que seuls certains salariés s’étaient individuellement vus remettre des documents d’information sur le déroulement du vote et que, pour les autres, l’employeur avait affiché une note d’organisation sur le lieu de travail, il en avait déduit que chaque salarié n’avait pas pu disposer d’une notice d’information sur le déroulement des opérations électorales. Il avait, par conséquent, enjoint à l’employeur de remettre cette notice à l’ensemble des salariés inscrits sur les listes électorales.
Opérant un contrôle léger sur la mise à disposition d’une information détaillée à chaque salarié, la Haute Juridiction approuve le tribunal judiciaire d’avoir tiré les conséquences légales de ses constatations de fait.
Par ce contrôle léger, marqué par l’utilisation de la formule “le tribunal judiciaire a pu en déduire”, la Haute Juridiction a laissé au juge du fond une marge d’appréciation entre plusieurs conséquences juridiques possibles de ses constatations de fait, qu’il apprécie souverainement (*). La portée de la solution répondant à la question de savoir si un simple affichage suffit doit donc être relativisée, d’autant que l’arrêt a été rendu en formation restreinte et n’a pas vocation à être publié au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation.
Une information préalable à donner par tout moyen
Pour autant, l’arrêt a le mérite de préciser que l’information du salarié sur les modalités du vote électronique peut intervenir par tout moyen en amont du scrutin.
À la question de savoir si l’information des salariés par voie d’affichage uniquement est possible, il convient, selon nous, de respecter tant la lettre que l’esprit du texte, en permettant à chaque salarié de recevoir une information complète sur le déroulement du vote électronique avant de voter.
Compte tenu du risque de divergences des juges du fond sur cette question et du contrôle léger exercé en la matière par la Cour de cassation, il nous semble plus prudent que l’employeur complète l’affichage par une information individualisée et soit en mesure de le prouver (e-mail avec accusé de réception, courrier recommandé avec AR, ou remise en mains propres contre décharge).
En l’espèce, l’employeur soutenait avoir communiqué la notice d’information par e-mail et par courrier à chaque salarié un mois après l’avoir affichée sur le lieu de travail. Le tribunal judiciaire, dont la Cour de cassation rappelle qu’il est souverain pour apprécier les éléments de faits qui lui sont soumis, n’en a pas tenu compte sans que l’on en connaisse les raisons (le délai était peut-être trop court par rapport à la date du premier tour du scrutin ou l’employeur n’était pas en mesure de produire l’accusé de réception).
(*) En ce sens, voir J.-F. Weber : “Comprendre un arrêt de la Cour de cassation rendu en matière civile” (Bull. n° 702 du 15 mai 2009).
Elodie Expert