À l’approche des élections, un employeur doit s’abstenir de critiquer le CSE

14/05/2024

Dans ses comptes-rendus des réunions CSE rédigés par lui et envoyés à tout le personnel, un employeur multipliait les critiques contre le syndicat majoritaire et ses élus, à la veille des élections professionnelles. Cela caractérise une violation de son obligation de neutralité syndicale, décide le tribunal judiciaire de Beauvais.

Alors que les élections professionnelles approchaient, un employeur n’a pas hésité à s’en prendre, en réunion mais aussi par écrit, à un syndicat et à ses élus CSE. Jugeant ce syndicat (en l’occurrence Sud) “peu constructif, problématique et racontant des mensonges”, l’employeur a diffusé aux salariés plusieurs comptes-rendus, suite aux réunions CSE, dans lesquels il critiquait la position des élus, “l’opacité” de la gestion du CSE (le trésorier appartenant également à Sud), “l’inutilité” de certaines demandes d’expertise ou encore la “mauvaise utilisation” par les élus de leurs heures de délégation.

Cette attitude s’est répétée à plusieurs reprises début 2024, alors qu’un seul compte-rendu avait été diffusé en 2023, ce qui montre bien, selon Sud, la dégradation du dialogue social dans l’établissement.

L’employeur peut agir en justice

Le tribunal judiciaire de Beauvais (OIse), qui constate ces faits dans une ordonnance du 2 mai (lire en pièce jointe), rappelle à l’employeur, qui relevait les nombreuses critiques portées contre lui par l’organisation syndicale, d’une part que l’action syndicale “peut amener à la critique de l’employeur”, et, d’autre part, que si l’employeur estime que ces expressions syndicales excèdent ce que la loi autorise, il peut “user des voies de droit” pour les faire condamner, au lieu d’y répondre directement auprès des salariés, a fortiori à l’approche d’une élection CSE. 

Une astreinte de 1 000€

Le tribunal estime donc que ces propos et ces textes caractérisent la violation de la neutralité syndicale exigée de l’employeur (art. L. 2141-7 du code du travail), et qu’ils constituent donc un trouble manifestement illicite (art. 835 du code de la procédure civile) qu’il convient de faire cesser.

Le juge enjoint à l’employeur et à ses représentants de “s’abstenir de diffuser des communications ou de tenir des propos aux salariés ayant pour objet, ou pour effet, de porter une appréciation qualitative favorable ou défavorable, sur les membres du CSE élus sous l’étiquette Sud”, avec une astreinte de 1 000€ par manquement constaté, et ce “jusqu’à l’élection des nouveaux membres élus du CSE”.

Bernard Domergue