Pénal : la mise à disposition des décisions judiciaires est reportée
10/12/2024
Un arrêté publié dimanche 8 décembre reporte la mise à la disposition du public (en open data, voir ici) des décisions des juridictions judiciaires et administratives, selon le calendrier suivant :
- 31 décembre 2025 pour les décisions rendues par les cours d’appel en matière contraventionnelle et délictuelle ;
- 31 décembre 2025 pour les décisions rendues en matière criminelle ;
- 31 décembre 2026 pour les décisions rendues par les juridictions de premier degré en matière délictuelle ;
- 31 décembre 2027 pour les décisions rendues par les juridictions de premier degré en matière contraventionnelle.
Rappel : les décisions de la Cour de cassation sont déjà en open data depuis le 1er octobre 2021.
Source : actuel CSE
La loi spéciale ne permettra pas de revaloriser le barème de l’impôt mais autorisera les régimes de sécurité sociale à emprunter
11/12/2024
Le gouvernement devrait adopter aujourd’hui en conseil des ministres un projet de “loi spéciale” visant à autoriser le gouvernement à lever l’impôt afin d’assurer la continuité des services publics, les projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et le projet de loi de finances (PLF) ne pouvant pas être adoptés dans les temps impartis après la censure du gouvernement Barnier.
Il devrait donc s’agir d’un texte a minima. Le Conseil d’Etat l’a confirmé hier dans un avis rendu public en répondant à ces trois questions que lui posaient le Premier ministre :
1. Un Gouvernement démissionnaire est-il compétent pour déposer et présenter au Parlement une loi spéciale ?
Réponse positive du Conseil d’État : “Le Gouvernement est fondé à constater que les circonstances (..) sont susceptibles de faire obstacle à la promulgation d’un projet de loi de finances pour 2025 avant le 31 décembre 2024. Il observe que ni la Constitution ni la loi organique relative aux lois de finances n’ont expressément prévu la procédure à suivre dans un tel cas. Il estime, au regard de la jurisprudence constitutionnelle (..) qu’il appartient au Gouvernement de s’inspirer des règles prévues par l’article 45 de la LOLF, aux fins d’aboutir à la promulgation, avant le 1er janvier 2025, d’une loi spéciale l’autorisant à continuer à percevoir les impôts existants jusqu’au vote de la loi de finances de l’année 2025, prévue par le 2° de cet article 45, dès lors qu’il n’envisagerait pas de proposer l’adoption de la première partie du projet de loi de finances pour 2025″.
2. Quelle est la portée de l’autorisation de “continuer à percevoir les impôts existants” prévue à l’article 45 de la LOLF, à savoir les dispositions que la loi spéciale peut contenir à ce titre et celles qui ne relèvent pas de son champ ? (..) Par exemple, l’indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu ou encore la prolongation de la durée de vie de crédits d’impôts dont une loi de finances précédente a prévu l’extinction au 31 décembre 2024 sont-elles au nombre des mesures qui peuvent avoir leur place en loi spéciale ?
Réponse négative : “La finalité de la loi spéciale est exclusivement d’assurer la continuité de la vie nationale dans l’attente de l’adoption d’une loi de finances initiale. Les mesures nouvelles d’ordre fiscal ne sauraient, en tout état de cause, être regardées comme des mesures nécessaires pour assurer la continuité de la vie nationale”.
3. La loi spéciale permet-elle, tant à l’État qu’aux organismes des différents régimes de sécurité sociale, de recourir à l’emprunt ?
Réponse positive du Conseil d’Etat : “La loi spéciale peut comporter une disposition permettant aux organismes concernés de recourir à des ressources non permanentes et ce, conformément à sa finalité qui est de permettre de garantir la continuité de la vie nationale, sans méconnaître ni les dispositions de l’article 47 de la Constitution, ni celles de l’article 45 de la loi organique relative aux lois de finances”.
Source : actuel CSE
Salarié protégé : plus d’obligation de reclassement en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle !
12/12/2024
En cas de licenciement d’un salarié protégé pour insuffisance professionnelle, l’employeur doit avoir pris les mesures propres à satisfaire à son obligation d’assurer l’adaptation à son poste de travail. Il n’a pas d’obligation de reclassement de ce salarié. Il s’agit d’un revirement de jurisprudence du Conseil d’État, et d’une uniformisation avec les règles applicables aux salariés “ordinaires”.
L’insuffisance professionnelle consiste en l’incapacité du salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante. Cette insuffisance est caractérisée par des échecs, des erreurs ou autres négligences imputables au salarié, sans pour autant revêtir un caractère fautif.
Les carences doivent revêtir une certaine importance et être persistantes. Le licenciement pour insuffisance professionnelle n’est pas disciplinaire.
Lorsqu’il s’agit d’un salarié protégé, l’employeur doit demander à l’inspecteur du travail l’autorisation de le licencier. Une jurisprudence constante du Conseil d’État a précisé les points que l’autorité administrative doit contrôler.
Ainsi, doit être recherché, “si ladite insuffisance est telle qu’elle justifie le licenciement, compte tenu de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé, des caractéristiques de l’emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, des exigences propres à l’exécution normale du mandat dont le salarié est investi”.
Outre la recherche de l’absence de discrimination (licenciement en rapport avec les fonctions représentatives ou l’appartenance syndicale), l’inspecteur doit vérifier que l’employeur a procédé à une réelle recherche de “reclassement” du salarié (CE, 27 sept. 1989, n° 91613 ; CE, 7 déc. 2009, n° 315599 ; CE, 25 nov. 2019, n° 418025).
Cette obligation ne résulte pas du code du travail, mais a été imposée par la jurisprudence, et confirmée par l’administration (Guide DGT des salariés protégés, 20 sept. 2019, voir fiche 8).
Le Conseil d’État revient sur cette solution, et opère un revirement de jurisprudence dans cet arrêt du 2 décembre 2024 mentionné aux tables du recueil Lebon.
Au départ, la résistance de la cour administrative d’appel…
Dans cette affaire, une entreprise demande l’autorisation de licencier un salarié protégé pour insuffisance professionnelle. Cette autorisation lui est refusée.
La cour administrative d’appel de Versailles annule cependant le jugement du tribunal administratif et les décisions de refus de l’inspecteur du travail et du ministre du travail (CAA Versailles, 4 juill. 2023, 21VE00328). La cour considère que l’insuffisance professionnelle est suffisamment caractérisée “au vu de la multiplicité des manquements professionnels caractérisés à l’encontre du salarié, lesquels ont tous trait à la mission pouvant lui incomber (…). Cette insuffisance étant révélée sur une période d’une année, et appréciée au regard de la promotion professionnelle importante et extrêmement rapide (…) dont l’intéressé a bénéficié”.
Puis la cour considère que l’employeur a bien rempli son obligation “d’adaptation et de formation”.
Elle souligne à cet égard qu’”aucun texte législatif ou réglementaire ni aucun principe n’impose une obligation de reclassement à un employeur qui souhaite licencier un salarié auquel il reproche une insuffisance professionnelle, les dispositions du code du travail ne prévoyant une telle obligation que dans les hypothèses où le licenciement est justifié soit par un motif économique soit par l’inaptitude physique du salarié”.
► Remarque : la même cour d’appel de Versailles avait déjà résisté, dans les mêmes termes, à la jurisprudence du Conseil d’État dans une décision datée de 2022 (CAA Versailles, 17 juin 2022, n° 20VE02541).
…finalement suivie par le revirement de jurisprudence du Conseil d’État
Le Conseil d’État suit la cour administrative d’appel et opère un revirement de jurisprudence.
Il donne ainsi une nouvelle formulation au contrôle à opérer dans le cadre du licenciement pour insuffisance professionnelle d’un salarié protégé.
Dans ce cas, “il appartient à l’inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si cette insuffisance est telle qu’elle justifie le licenciement. À ce titre, il appartient à l’administration de prendre en considération, outre les exigences propres à l’exécution normale du mandat dont le salarié est investi, l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé et de s’assurer que l’employeur a pris les mesures propres à satisfaire à son obligation d’assurer l’adaptation du salarié à son poste de travail et envisagé, le cas échéant, de lui confier d’autres tâches susceptibles d’être mieux adaptées à ses capacités professionnelles”.
► Remarque : il est à noter que le Conseil d’État avait déjà mis fin, par un revirement, à l’obligation de reclassement, résultant de la seule jurisprudence, pour le salarié protégé licencié en raison de ses absences répétées ou prolongées (CE, 9 mars 2016, n° 378129).
Une obligation d’adaptation contrôlée par l’autorité administrative
L’obligation de reclassement imposée par le juge administratif à l’employeur ne résulte effectivement d’aucun texte, et cette obligation n’est pas reconnue par le juge judiciaire concernant un salarié ne bénéficiant pas d’une protection contre le licenciement.
La jurisprudence judiciaire prévoit toutefois une obligation d’adaptation, celle-ci résultant du principe général posé par l’article L. 6321-1 du code du travail.
Ainsi, “l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations”. L’employeur ne peut donc invoquer l’insuffisance professionnelle que si tous les moyens, en temps et en formation, ont été donnés au salarié pour qu’il puisse faire ses preuves.
Et c’est là où le bât blesse dans l’arrêt du Conseil d’État du 2 décembre 2024 : la haute juridiction considère que la cour administrative d’appel n’a pas recherché si l’employeur avait pris les “mesures propres à satisfaire à son obligation d’assurer l’adaptation du salarié à son poste de travail et envisagé, le cas échéant, de lui confier d’autres tâches susceptibles d’être mieux adaptées à ses capacités professionnelles”.
Il n’y a donc plus d’obligation de reclassement, mais seulement d’adaptation, laquelle doit être respectée et dûment contrôlée par l’autorité administrative. À défaut, l’autorisation de licenciement doit être refusée (ou annulée).
► Remarque : dans cette affaire, la cour administrative d’appel se contente de relever que l’employeur avait octroyé au salarié les formations syndicales qu’il avait demandées. Le Conseil d’État considère donc que le juge administratif n’a pas contrôlé l’obligation d’adaptation dont l’employeur est redevable au salarié.
La jurisprudence judiciaire applicable au respect de cette obligation pour les salariés « ordinaires » devrait donc poser les jalons du contenu de ce contrôle par l’administration pour les salariés protégés. A cet égard, par exemple, l’obligation d’adaptation n’est pas respectée :
- lorsque l’employeur n’a pas mis en place la formation spécifique et l’accompagnement suffisants qu’exigeait l’exécution de tâches nouvelles sur un nouveau logiciel (Cass. soc., 20 mai 2009, n° 07-42.945) ;
- lorsque l’employeur, qui ne pouvait pas ignorer les difficultés du salarié, n’avait pas cherché à lui fournir un poste compatible avec les recommandations du médecin du travail (Cass. soc., 19 déc. 2007, n° 06-43.918).
En revanche, par exemple, le licenciement pour insuffisance professionnelle est justifié si le salarié a bénéficié d’un stage de formation et d’une période d’adaptation suffisante (Cass. soc., 9 juill. 1997, n° 94-43.709).
Tel est le cas du licenciement pour insuffisance professionnelle d’un analyste financier devenu manageur des opérations de crédit après avoir suivi un stage informatique et un “accompagnement” de 3 mois (Cass. soc., 9 juill. 2008, n° 07-41.623).
Séverine Baudouin
Le contenu du projet de “loi spéciale” soumis au Parlement
12/12/2024
Le projet de loi spéciale a été présenté hier en conseil des ministres et devant les commissions des finances de l’Assemblée et du Sénat. C’est un court texte, exceptionnel et provisoire, permettant à l’Etat de percevoir taxes et impôts et d’engager des dépenses limitées dans l’attente de véritables lois budgétaires, mais qui a soulevé de nombreuses interrogations de la part des parlementaires. Explication.
Le projet de “loi spéciale” a été présenté hier en conseil des ministres. Ce texte a été élaboré suite à la censure du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). En effet, la chute du gouvernement Barnier a rendu impossible l’adoption avant la fin de l’année des projets de lois budgétaires, le gouvernement démissionnaire devant se contenter d’expédier les affaires courantes. Il fallait donc parer au plus pressé.
Prévu par l’article 47 de la Constitution et par l‘article 45 de la loi organique sur les lois de finances, ce texte permet à l’Etat de continuer à percevoir l’impôt début 2025, et jusqu’au vote des lois de finances 2025, afin d’assurer l’activité des services publics et donc “la continuité de la vie nationale” selon l’expression du Conseil constitutionnel.
Un texte de secours pour assurer la continuité de l’Etat et de la sécurité sociale
C’est donc un texte a minima, comportant seulement trois articles. Conformément à l’avis rendu par le Conseil d’État que Michel Barnier avait interrogé, ce projet peut être mis en œuvre par un gouvernement démissionnaire. Mais il ne peut pas comporter d’éléments fiscaux nouveaux et il ne peut pas prévoir une révision du barème de l’impôt sur le revenu afin d’éviter que des ménages connaissent une hausse d’impôts du fait de la hausse des prix.
Ces dispositions devront être prises ultérieurement dans le projet de loi de finances.
En l’état, et de façon exceptionnelle et transitoire, le contenu de ce texte autorise :
- dans son article 1er : l’Etat à percevoir impôts et taxes “existants”, sur la base des textes ayant été appliqués en 2024 (le texte “ne permet pas de reconduire les mesures fiscales qui arrivent à échéance fin 2024”, a précisé hier Laurent Saint-Martin, le ministre des comptes publics) ;
- dans son article 2 : l’Etat à recourir à l’emprunt pour assurer son fonctionnement ;
- dans son article 3 : plusieurs régimes de sécurité sociale à recourir à l’emprunt pour assurer leur fonctionnement. Sont visés l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) qui gère la trésorerie des 4 branches de la sécurité sociale (maladie, famille, vieillesse, accidents du travail et maladies professionnelles), la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire (CPRPF), la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines (CANSSM) et la Caisse de prévoyance et de retraite personnel ferroviaire et du régime d’assurance vieillesse des fonctionnaires locaux et hospitaliers (CNRACL).
Le projet de loi ne mentionne pas les autorisations de dépenses, qui feront l’objet de décrets.
Le projet de loi spéciale a été présenté dès hier par les ministres démissionnaires des comptes et de l’économie devant les commissions des finances de l’Assemblée et du Sénat. Le texte devrait être débattu dès le 16 décembre dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale puis le 18 décembre au Sénat. S’agissant d’un texte assurant l’avenir à très court terme de la Nation, et sur lequel la possibilité d’amendements ne paraît pas du tout acquise, les groupes politiques devraient l’adopter, d’autant que certains parlementaires semblaient découvrir hier les effets réels d’une absence de lois budgétaires en bonne et due forme.
Des décrets seront pris pour autoriser les dépenses
“C’est la première fois qu’un tel projet est présenté par des ministres démissionnaires. C’est inédit mais nécessaire (..) Tôt ou tard, il faudra donner à la France un projet de finances dont la loi spéciale ne saurait tenir lieu”, a précisé devant les députés Laurent Saint-Martin. “C’est un texte technique, transitoire (..) La réduction des déficits devra être décidée par le futur gouvernement et nos engagements européens devront être tenus”, a averti Antoine Armand, le ministre de l’Economie et des finances.
Des décrets seront pris ensuite pour autoriser l’Etat à engager des dépenses, dans le cadre dit “des services votés” mentionnés dans l’article 47 de la Constitution, mais a minima par rapport aux crédits votés pour le budget 2024.
Laurent Saint-Martin a précisé que la revalorisation de certains crédits prévus par le projet de loi de finances 2025 ne pourra pas être mise en œuvre : “Ces décrets sont en cours de préparation. Ils ne pourront pas excéder le montant des crédits ouverts au titre de la loi de finances de 2024, mais ils pourront se situer en deçà de ce montant, ce sera au gouvernement de le décider. Le fonctionnement de l’Etat sera assuré mais les investissements nouveaux, sauf cas d’urgence manifeste, doivent être exclus”.
L’avenir des lois de finances est incertain
Précisons que l’avenir des projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et de loi des finances (PLF) reste très incertain.
Une fois que le nouveau gouvernement sera nommé, rien n’empêche celui-ci de déposer des projets de lois de finances complètement nouveaux. Mais rien ne l’empêche non plus de demander une nouvelle lecture du PLFSS et la reprise de l’examen parlementaire du projet de loi des finances, déjà adopté par le Sénat. Mais avec quelles modifications et quel soutien politique ? C’est toute la question, ces projets prévoyant des éléments ayant suscité de vifs débats parlementaires comme la moindre indexation des pensions de retraite (argument du RN pour justifier sa censure), la remise en cause d’une partie des allègements de cotisations sociales patronales, sans même parler ici du projet de décret actant la baisse des allocations journalières, etc.
Au rapporteur Charles de Courson (Liot) qui demandait aux ministres de se prononcer sur cette alternative, Laurent Saint Martin a botté en touche : “Les deux solutions sont possibles. Le prochain gouvernement pourra tout à fait repartir des textes existants (PLFSS et PLF) qui sont suspendus et non supprimés, comme il pourra choisir de réécrire deux textes à partir de zéro. Cela ne peut pas être tranché par ce gouvernement”.
La question de la non rétroactivité des mesures pour 2025 |
À la commission des finances de l’Assemblée, le député Philippe Brun (PS, NFP) a posé cette question hier : “La discussion tardive du budget 2025 en 2025 soulève des difficultés, avec notamment l’impossibilité de procéder à des mesures rétroactives en matière de fiscalité, par exemple pour imposer une hausse d’impôts aux grandes entreprises (Ndlr : une mesure prévue par le gouvernement Barnier). N’avons-nous pas encore le temps d’avoir un accord sur des dispositions a minima sur le projet de loi de finances ?” Réponse du ministre Laurent Saint-Martin : “Avec ce gouvernement, c’est impossible !” “Pensez-vous qu’invoquer le motif d’intérêt général pourrait convaincre le Conseil constitutionnel d’autoriser cette rétroactivité pour un PLF 2025 par exemple pour une imposition des plus hauts revenus ?” a également demandé la sénatrice Blatrix Contat (PS, NFP). Réponse, en substance, de Laurent Saint-Martin : tout dépend de la date d’adoption du PLF… “En l’absence de PLFSS, sera-t-on déjà à plus de 30 milliards de déficit de la sécurité sociale ?” a demandé la rapporteure au Sénat, Elisabeth Doineau (Union centriste). Réponse du ministre Antoine Armand : “Ce n’est pas un budget ni un projet de loi de finances, mais une loi de transition, donc nous ne décrivons pas d’objectifs ni ne prévoyons de plafond”. Le ministre a néanmoins rappelé que la France s’est engagée auprès de la commission européenne à réduire à 5% le montant de son déficit public en 2025. |
Bernard Domergue
Menaces de grève ou grève, la protection contre le licenciement s’applique
13/12/2024
L’annonce de l’intention de faire grève d’un salarié lors d’une revendication collective doit être assimilée à l’exercice du droit de grève, peu important le déclenchement du mouvement. Dès lors, le licenciement prononcé pour ce motif encourt la nullité au titre de la protection légale accordée aux salariés grévistes.
Droit fondamental à valeur constitutionnelle reconnu à tout salarié, le droit de grève est particulièrement protégé par le code du travail. Lorsqu’un mouvement collectif se déclenche, l’employeur ne peut licencier un salarié gréviste qu’en cas de faute lourde. À défaut, le licenciement prononcé encourt la nullité, conformément à l’article L. 2511-1 du code du travail. Soucieuse de préserver ce droit, la jurisprudence entend largement la protection du salarié gréviste.
Ainsi la nullité du licenciement prévue s’étend à tout licenciement prononcé à raison d’un fait commis au cours ou à l’occasion de l’exercice d’un droit de grève et qui ne peut être qualifié de faute lourde. L’arrêt du 14 novembre 2024 rendu par la Cour de cassation apporte une nouvelle illustration.
► Pour rappel, tenter d’inciter les membres de son équipe à mener une action de grève correspond à l’exercice du droit de grève et ne peut être assimilé à une faute lourde pouvant justifier un licenciement (arrêt du 23 novembre 2022 ; arrêt du 1er juin 2023).
Des menaces de grève proférées lors d’un conflit collectif
Dans le cadre d’un conflit opposant les salariés d’un atelier à leur direction, relatif à la mise à leur disposition d’un véhicule de service, un des salariés est licencié pour faute grave. En cause, il avait annoncé à son employeur l’intention des salariés de faire grève et de mettre à l’arrêt l’atelier si un véhicule n’était pas présent sur le site le lendemain. Il saisit la juridiction prud’homale pour contester son licenciement en invoquant la nullité et obtient la condamnation de l’employeur. Ce dernier se pourvoit en cassation.
Selon l’employeur, le licenciement prononcé n’est pas intervenu à l’occasion de l’exercice du droit de grève et ne peut être sanctionné par la nullité. Les dispositions protectrices accordées aux salariés grévistes ne peuvent s’appliquer en l’espèce dès lors que les menaces du salarié de faire grève ne se sont jamais concrétisées.
La protection de l’exercice du droit de grève ne se limite pas à une participation du salarié à la grève ni à une réalisation de celle-ci
Une argumentation rejetée par la Cour de cassation qui valide la solution dégagée par la cour d’appel. En s’appuyant sur l’article L. 2511-1 du code du travail, elle réitère sa position et rappelle que la nullité du licenciement d’un salarié ne se limite pas au cas où le licenciement est prononcé à l’occasion d’une participation effective du salarié à une grève. Cette nullité “s’étend à tout licenciement prononcé à raison d’un fait commis au cours ou à l’occasion de l’exercice d’un droit de grève et qui ne peut être qualifié de faute lourde”.
Autrement dit, il importe peu que le salarié soit gréviste ou que le mouvement social se déclenche. En s’appuyant sur les constatations des juges du fond, dont il ressort que le licenciement était motivé par la menace du salarié de faire grève dans un contexte de revendication collective, elle considère que les faits reprochés au salarié avaient bien été commis à l’occasion de l’exercice du droit de grève. C’est donc à bon droit que le licenciement prononcé pour faute grave doit être annulé.
Jean-David Favre
[Veille JO] Les textes parus cette semaine : budget, emploi, formation, justice, nominations
13/12/2024
Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du vendredi 6 décembre au jeudi 12 décembre inclus.
► Nous ne traitons pas ici les textes liés aux conventions collectives, car nous vous proposons tous les mois un baromètre des branches sur ces nouveautés.
Budget
- Loi n° 2024-1167 du 6 décembre 2024 de finances de fin de gestion pour 2024
Emploi
- Un arrêté du 21 novembre 2024 porte approbation de la délibération du Comité national pour l’emploi relative à la liste des informations relatives aux décisions d’orientation et à la mise en œuvre des critères
- Un arrêté du 4 décembre 2024 fixe les montants des aides financières aux structures de l’insertion par l’activité économique, aux dispositifs d’insertion implantés en milieu pénitentiaire et à Mayotte et fixant le montant de l’aide financière versée au titre du contrat passerelle conclu par une entreprise d’insertion ou un atelier et chantier d’insertion
- Un arrêté du 21 novembre 2024 porte approbation de la délibération du Comité national pour l’emploi relative au référentiel de diagnostic global
Fonction publique
- Un décret du 5 décembre 2023 précise les modalités de calcul des indicateurs définis à l’article 1er du décret n° 2023-1136 du 5 décembre 2023 relatif à la mesure et à la réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans la fonction publique de l’État
- Un décret du 5 décembre 2023 précise la mesure et à la réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans la fonction publique de l’État
Formation
- Un arrêté du 9 décembre 2024 révise le titre professionnel de conducteur livreur sur véhicule utilitaire léger
- Un arrêté du 5 décembre 2024 modifie l’arrêté du 23 mai 2023 portant commissionnement pour effectuer des contrôles au titre de la formation professionnelle
- Un arrêté du 5 décembre 2024 modifie l’arrêté du 23 mai 2023 portant commissionnement pour effectuer des contrôles au titre de la formation professionnelle
- Un arrêté du 29 novembre 2024 révise le titre professionnel d’agent magasinier
Justice
- Un décret du 10 décembre 2024 précise la composition des conseils de juridiction des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel
- Une décision du Conseil national des barreaux du 11 octobre 2024 porte modification du règlement intérieur national de la profession d’avocat
- Un arrêté du 6 décembre 2024 modifie l’arrêté du 28 avril 2021 pris en application de l’article 9 du décret n° 2020-797 du 29 juin 2020 relatif à la mise à la disposition du public des décisions des juridictions judiciaires et administratives
Nominations
- Un arrêté du 4 décembre 2024 porte nomination d’une directrice régionale déléguée aux droits des femmes et à l’égalité
Source : actuel CSE
Le dispositif de démission pour projet professionnel a “trouvé son public”
13/12/2024
Selon une étude de l’Unedic publié le 10 décembre, le dispositif de démission pour projet professionnel (appelé également démission-reconversion), entré en vigueur en novembre 2019, a “trouvé son public” : fin 2023, 25 500 allocataires du régime bénéficient de ce dispositif pour un coût de 475 millions d’euros en 2023. Dans sept cas sur 10, le dispositif est utilisé dans l’optique d’une création entreprise. Il ne concerne cependant qu’une part négligeable de l’ensemble des démissions (1 %).
Pour rappel, ce dispositif permet, sous certaines conditions, aux démissionnaires de bénéficier de l’assurance chômage lorsqu’ils poursuivent un projet de reconversion professionnelle.
Source : actuel CSE
Près d’un tiers des salariés à temps partiel travaille moins de 24 heures
13/12/2024
En 2023, plus d’un salarié sur six travaille à temps partiel, d’après une étude de la Dares publiée hier. Sans surprise, les femmes optent plus souvent pour ce temps de travail en raison des contraintes familiales. Mais selon l’âge, les durées de temps partiel sont très variables : les femmes travaillent plus fréquemment à 80 % de leur temps de travail tandis qu’un jeune sur deux exerce moins d’un mi-temps ; une modalité plus adaptée à la poursuite d’études. De même, un senior sur trois à temps partiel travaille également moins d’un mi-temps.
À noter : plus d’un salarié sur deux travaille au moins cinq jours distincts par semaine et près d’un jeune sur deux à temps partiel travaille trois jours ou moins par semaine. Surtout, 31,2 % des salariés sont à temps partiel “court”, c’est-à-dire qu’ils ont une durée hebdomadaire de moins de 24 heures repartie sur moins de cinq jours. Une pratique plus fréquente dans le tertiaire notamment dans l’hébergement-restauration (34,9 %) et le commerce (32,2 %).
Source : actuel CSE
CSP : vers une prolongation du dispositif jusqu’à fin 2025
13/12/2024
Deux avis du ministère du travail publiés au Journal officiel du 6 décembre 2024 annoncent la parution prochaine de deux arrêtés portant agrément de :
- l’avenant n° 9 du 22 novembre 2024 à la convention du 26 janvier 2015 relative au Contrat de sécurisation professionnelle (CSP), signé à l’unanimité ;
- l’avenant n° 6 du 22 novembre 2024 à la convention du 17 juillet 2018 relative à la mise en œuvre du dispositif à Mayotte, signé par les organisations patronales, la CFDT, la CFE-CGC et la CFTC.
Ces deux avenants visent à prolonger d’une année, l’application du CSP et ajoutent, au nombre des cas permettant l’allongement de la durée du CSP, le bénéfice du congé de présence parentale.
► D’une durée de 12 mois, le CSP permet au salarié dont le licenciement économique est envisagé, de bénéficier, après la rupture du contrat de travail, d’un ensemble de mesures lui permettant un reclassement accéléré proposé par France Travail (anciennement Pôle emploi). La durée du CSP peut déjà être prolongée en raison : de la réalisation de périodes d’activités professionnelles, de périodes d’arrêts maladie (dans la limite de quatre mois) et de congé de maternité (dans la limite de la durée légale de ce congé), d’un congé paternité et d’accueil de l’enfant (dans la limite de la durée légale du congé qui est de 25 jours), d’un congé d’adoption (dans la limite de la durée légale qui est de 16 semaines, 22 semaines en cas d’adoptions multiples) et d’un congé de proche aidant (dans la limite de la durée légale du congé qui est de un an pour l’ensemble de la carrière).
Source : actuel CSE