Partage de la valeur dans les TPE-PME réalisant des bénéfices réguliers : l’administration explicite ce dispositif expérimental
15/07/2024
Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2025, les entreprises d’au moins 11 salariés, non soumises à l’obligation de mettre en place la participation, devront instaurer un dispositif de partage de la valeur dès lors qu’elles réalisent un bénéfice net fiscal positif au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs. Le ministère du travail consacre un “questions-réponses” à cette nouvelle obligation expérimentale.
Pour faciliter la généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les TPE-PME, la loi du 29 novembre 2023 portant transposition de l’accord national interprofessionnel (Ani) relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise a créé un dispositif expérimental.
Ainsi, à titre expérimental et pour une durée de 5 ans, les entreprises d’au moins 11 salariés et non soumises à l’obligation de mettre en place un régime de participation (donc principalement les entreprises de 11 à moins de 50 salariés), constituées sous forme de société, qui ont réalisé un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % de leur chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs, doivent se doter d’au moins un des dispositifs légaux de partage de la valeur au cours de l’exercice suivant, si elles ne sont pas déjà couvertes par un tel dispositif au moment de la réalisation de la condition relative au bénéfice net fiscal.
Les entreprises de l’économie sociale et solidaire (exemples : associations, mutuelles, coopératives, fondations) occupant au moins 11 salariés et qui n’ont pas de bénéfice fiscal net mais un résultat excédentaire au moins égal à 1 % de leurs recettes pendant trois exercices consécutifs sont également soumises à cette obligation.
Cette obligation expérimentale s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2025. Les trois exercices précédents (soit 2024, 2023 et 2022 pour des exercices civils) sont pris en compte pour l’appréciation du respect de la condition relative à la réalisation du bénéfice net fiscal (ou du résultat excédentaire).
Dans un “questions-réponses” de 16 points mis en ligne le 8 juillet 2024, le ministère du travail détaille la mise en œuvre de ce dispositif.
► L’expérimentation a débuté le 29 novembre 2023 (date de promulgation de la loi), et non le 30 novembre 2024 comme l’indique le QR à la question n° 8. Elle prendra fin le 29 novembre 2028.
Entreprises concernées par ce dispositif expérimental
Les entreprises du secteur privé occupant de 11 à moins de 50 salariés
Est soumise à cette obligation expérimentale toute entreprise qui (QR n° 2) :
- occupe au moins 11 salariés : l’effectif est calculé selon les modalités de l’article L.130-1, I du code de la sécurité sociale (effectif salarié annuel correspondant à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l’année civile précédente) mais attention ! Le moratoire de 5 ans visé au II de cet article ne s’applique pas pour l’appréciation de ce seuil (QR n° 3) ;
- n’est pas soumise à l’obligation de mettre en place un dispositif de participation : une entreprise faisant partie d’une unité économique et sociale (UES) d’au moins 50 salariés n’est pas concernée par le dispositif dans la mesure où l’UES est assujettie à l’obligation de mettre en place un régime de participation (QR n° 6) ;
- a réalisé un bénéfice net fiscal supérieur ou égal à 1 % de son chiffre d’affaires pendant chacun des trois derniers exercices ;
- n’est pas couverte par un accord d’intéressement ou de participation volontaire : une entreprise déjà couverte par un accord d’intéressement ou de participation en cours de validité pour l’exercice au titre duquel elle est soumise à cette nouvelle obligation de partage de la valeur, n’a pas à mettre en place un nouveau dispositif en plus de celui existant (QR n° 5).
► Le ministère rappelle qu’une entreprise est assujettie à la participation à compter du premier exercice ouvert après une période de cinq années civiles pendant lesquelles le seuil de 50 salariés a été franchi sans discontinuité. Pendant la période de “gel” du franchissement de seuil prévue par l’article L.130-1, II du code de la sécurité sociale, l’entreprise est donc toujours considérée comme non assujettie à la participation et doit appliquer le nouveau dispositif de partage de la valeur, si son bénéfice net fiscal est suffisant.
Les entreprises individuelles ne sont pas soumises à cette obligation, tout comme les sociétés anonymes à participation ouvrière (Sapo) qui ont versées un dividende à leurs salariés et n’ont pas fait usage de la possibilité de verser un dividende prioritaire proportionnel au capital social aux actionnaires en capital (QR n° 4)
► Les Sapo visées ici sont celles versant un dividende à leurs salariés au titre de l’exercice écoulé et dont le taux d’intérêt sur la somme versée aux porteurs d’actions de capital (actions de travail) (article L.225-261 du code de commerce) est égal à 0 %. Les Sapo de 11 à moins de 50 salariés n’ont pas les moyens financiers suffisants pour verser aux salariés deux dispositifs de partage, celui correspondant aux dividendes des actions de travail et celui correspondant au nouveau dispositif de partage de la valeur.
Une entreprise de droit étranger disposant d’établissements permanents en France, qui y procède à des déclarations sociales et fiscales, est bien concernée par la nouvelle obligation si elle remplit les conditions exposées ci-avant, indique le ministère du travail, qui rappelle que le bénéfice net fiscal utilisé pour l’application du dispositif est celui retenu pour le calcul de la réserve spéciale de participation (RSP). Il s’agit du bénéfice réalisé en France métropolitaine et en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, tel qu’il est retenu pour être imposé à l’impôt sur le revenu (IR) ou à l’impôt sur les sociétés (IS) au taux de droit commun et diminué de l’impôt correspondant (QR n° 7).
Les entreprises du secteur de l’économie sociale et solidaire occupant au moins 11 salariés
Les entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) occupant au moins 11 salariés et qui n’ont pas de bénéfice fiscal net mais un résultat excédentaire au moins égal à 1 % de leurs recettes pendant trois exercices consécutifs sont également soumises à cette obligation, sous réserve qu’un accord de branche étendu le permette.
Les entreprises visées ici sont les personnes morales de droit privé constituées sous la forme de coopératives, de mutuelles ou d’unions relevant du code de la mutualité ou de sociétés d’assurance mutuelles relevant du code des assurances, de fondations ou d’associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou, le cas échéant, par le Code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle (loi du 31 juillet 2014, art. 1er, II, 1°).
Ne sont pas concernées les structures de l’ESS qui appliquent déjà un accord de participation pour l’exercice concerné, le QR précisant qu’il s’agit notamment des Scop qui mettent en place une participation dans les conditions spécifiques prévues par le Code du travail (QR n° 15).
Dispositifs de partage pouvant être mis en place
Parmi les dispositifs pouvant être mis en place figurent :
- la participation volontaire (sauf pour les entreprises de l’ESS, l’économie sociale et solidaire) : les entreprises de l’ESS ne générant pas de bénéfice net fiscal, elles ne peuvent pas verser de participation mais elles peuvent remplir leur obligation en mettant en place un régime d’intéressement, en abondant un plan d’épargne salariale ou en versant une PPV, prime de partage de la valeur (QR n° 15) ;
- l’intéressement ;
- l’abondement patronal à un PEE (plan d’épargne entreprise), un PEI (plan d’épargne interentreprises), un Perco (plan d’épargne retraite collectif) ou un PERECO (plan d’épargne retraite d’entreprise collectif) ;
- la distribution d’une prime de partage de la valeur (PPV).
Si l’entreprise choisit de mettre en place un accord d’intéressement ou de participation, le caractère aléatoire de ces dispositifs lui interdit de présumer des résultats futurs. Ces dispositifs ne généreront donc pas nécessairement le versement d’une prime (QR n° 12). Mais ils sont collectifs, tout comme les plans d’épargne salariale (PEE, PEI, Perco et PERECO). Dès lors, ils sont ouverts à tous les salariés de l’entreprise, sous réserve d’une éventuelle condition d’ancienneté ne pouvant excéder trois mois.
Aucun montant minimum n’est exigé pour le versement de l’abondement patronal à un plan d’épargne salariale ou d’une prime de partage de la valeur. Le versement d’un montant positif, même minime, suffit à remplir l’obligation (QR n° 12).
S’agissant plus particulièrement de la prime de partage de la valeur, contrairement aux autres dispositifs, elle peut être réservée aux salariés percevant une rémunération n’excédant pas un certain plafond fixé par l’accord ou la décision unilatérale de l’employeur (DUE) l’instituant. Par exemple, une entreprise peut décider de verser la PPV seulement aux salariés percevant une rémunération inférieure à trois Smic (QR n° 13).
► Rappelons que la PPV attribuée jusqu’au 31 décembre 2026 par une entreprise de moins de 50 salariés à un salarié percevant une rémunération annuelle inférieure à trois Smic est défiscalisée et non soumise à CSG/CRDS (loi n° 2022-1158, art. 1er, VI bis).
Modalités de mise en œuvre
Réalisation du bénéfice net fiscal : exercices devant être pris en compte
Pour l’exercice ouvert à compter du 1er janvier 2025, la loi précise que les trois exercices précédant cette date sont pris en compte pour l’appréciation du respect de la condition relative au niveau de bénéfice net fiscal.
Si l’entreprise dont l’exercice fiscal est calé sur l’année civile a réalisé un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % de son chiffre d’affaires en 2022, 2023 et 2024, elle devra ainsi mettre en place l’un des dispositifs prévus pour le partage au titre de l’exercice 2025 : régime d’intéressement ou de participation ou versement d’un abondement à un plan d’épargne salariale ou retraite ou d’une PPV (QR n° 10).
Recours possible à la décision unilatérale selon les règles propres à chaque dispositif de partage de la valeur
Les différentes modalités de partage (intéressement, participation, abondement ou PPV) peuvent être mises en place par une décision unilatérale de l’employeur selon les règles spécifiques prévues pour chacun de ces dispositifs, rappelle l’administration (QR n° 11) :
- une entreprise de moins de 50 salariés peut adhérer par décision unilatérale à un accord de branche agréé d’intéressement, de participation ou instituant un plan d’épargne salariale ou retraite, à condition que l’accord de branche prévoie cette possibilité sous forme d’accord-type avec des options prédéfinies, sans adaptation possible par l’entreprise ;
- une entreprise de moins de 50 salariés non couverte par un accord de branche d’intéressement agréé peut mettre en place un régime d’intéressement par décision unilatérale de l’employeur, en l’absence de délégué syndical et de CSE ou en cas d’échec des négociations avec ces interlocuteurs, et après consultation du CSE s’il existe ;
- une entreprise peut mettre en place un régime de participation volontaire en cas d’échec des négociations avec les représentants du personnel et après consultation du CSE ;
- toute entreprise peut mettre en place un plan d’épargne salariale ou retraite par décision unilatérale en l’absence de délégué syndical et de représentant du personnel ou en cas d’échec des négociations avec ces derniers, après consultation du CSE s’il existe ;
- un employeur peut décider unilatéralement du versement d’une PPV, sans conditions.
Géraldine Anstett et Fanny Doumayrou
L’ordre du jour de l’Assemblée nationale est publié au Journal officiel
16/07/2024
La prochaine session ordinaire de la nouvelle Assemblée nationale s’ouvre de droit le 18 juillet, comme le prévoit l’article 12 de la Constitution. L’ordre du jour a été publié au Journal officiel ce weekend. La séance publique de 15 heures s’ouvrira par l’installation du Bureau et l’élection du Président de l’Assemblée. Les députés devront également constituer les huit commissions permanentes :
- Affaires culturelles et éducation
- Affaires économiques
- Affaires étrangères
- Affaires sociales
- Défense nationale et forces armées
- Développement durable et aménagement du territoire
- Finances
- Lois
Leur composition sera publiée au JO du samedi 20 juillet.
Une autre séance publique se tenant vendredi 19 devra nommer (éventuellement par scrutin) les questeurs, les secrétaires et les vice-présidents de l’Assemblée.
Source : actuel CSE
Un arrêté fixe les indemnités des conseillers prud’hommes de Basse-Terre
16/07/2024
Selon l’arrêté du 8 juillet publié au Journal officiel du 14 juillet, l’indemnité forfaitaire des conseillers prud’hommes de Basse-Terre (Guadeloupe) est fixée à quatre fois le taux horaire prévu à l’article D. 1423-56 du code du travail pour les conseillers prud’hommes appartenant au collège des salariés, soit 48 euros. Ce montant est doublé pour les conseillers prud’hommes appartenant au collège des employeurs.
Source : actuel CSE
L’intérim poursuit son repli en mai
16/07/2024
Selon les résultats présentés le 11 juillet par Prism’emploi, la fédération du travail temporaire, l’emploi intérimaire a diminué de 8,4 % en un an. Ce sont ainsi 62 500 emplois qui ont été perdus en mai 2024 par rapport à la même période en 2023, portant le nombre d’intérimaires à 692 450 en ETP.
Tous les secteurs sont au rouge, notamment dans le BTP qui chute de 12,1 % en un an dans un contexte de ralentissement des mises en chantier et l’industrie de 10 %. Le commerce affiche une perte de 6,5 %, le transport-logistique de 4,2 % et les services de 6,1 %.
De même, toutes les qualifications sont touchées. Mais la dégradation est plus nette pour les ouvriers non qualifiés (-9,4 %), les ouvriers qualifiés (8,8 %) que pour les employés (-7,9 %) et les cadres intermédiaires (- 4,1 %).
Reste à savoir si ces chiffres seront confirmés le mois prochain. La fédération rappelle que ces résultats doivent être pris avec “prudence”; “le positionnement des jours fériés ayant été particulièrement défavorable à l’activité”, en mai dernier.
Source : actuel CSE
Un DRH n’a pas le pouvoir de sanctionner son directeur
17/07/2024
Pour la connaissance par l’employeur de faits reprochés au directeur d’une succursale, point de départ du délai de prescription des poursuites disciplinaires, le DRH hiérarchiquement subordonné à ce salarié ne peut pas être assimilé à l’employeur.
La date à laquelle un directeur des ressources humaines (DRH) est informé de faits commis par son supérieur hiérarchique marque-t-elle le point de départ du délai d’engagement des poursuites disciplinaires ? Telle est la question, originale, portée devant la chambre sociale de la Cour de cassation.
Rappelons que l’article L.1332-4 du code du travail dispose qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance. La jurisprudence a précisé que le point de départ de ce délai de prescription des poursuites disciplinaires correspond au jour où l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié (arrêt du 17 février 1993 ; décision du Conseil d’Etat du 20 avril 2005). Dans cette hypothèse, l’employeur s’entend également du supérieur hiérarchique, même non titulaire du pouvoir disciplinaire (arrêt du 23 juin 2021 ; arrêt du 19 avril 2023).
Les faits
Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 26 juin 2024, le DRH d’une succursale bancaire à Singapour a été informé le 17 juillet 2017 de rumeurs concernant le comportement inapproprié qu’aurait eu le directeur de cette succursale lors d’une soirée. C’est plus tard, le 15 mai 2018, qu’un signalement est adressé à la direction générale de la banque par une des collaboratrices victime des faits litigieux, à la suite duquel le directeur est convoqué par lettre du 28 mai 2018 à un entretien préalable s’étant soldé par un licenciement pour faute.
Le salarié conteste son licenciement en soutenant que les faits étaient prescrits à la date de l’engagement de la procédure disciplinaire car le DRH, titulaire du pouvoir disciplinaire sur le personnel de la filiale, en était informé dès 2017.
Pour rejeter cette argumentation, la cour d’appel rappelle que l’employeur est celui qui dispose de l’autorité hiérarchique sur l’auteur des manquements, qui a la qualité pour contrôler le salarié ou surveiller son activité. Elle relève que le DRH n’est ni le représentant local de l’employeur, quelle que soit son ancienneté, son expérience et son intégration locale, ni le supérieur hiérarchique du directeur de la succursale, ni titulaire du pouvoir de sanction à son encontre. D’ailleurs, le DRH était hiérarchiquement rattaché au directeur financier qui reportait lui-même au directeur de la succursale, lequel était donc son supérieur hiérarchique.
La solution de la Cour de cassation
La Cour de cassation confirme que l’employeur au sens de l’article L.1332-4 du code du travail pour la connaissance des faits fautifs s’entend non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire, mais aussi du supérieur hiérarchique du salarié, même non titulaire de ce pouvoir.
Ici, le DRH n’était ni l’un ni l’autre à l’égard du directeur de la filiale, ce dernier était lui-même représentant de l’employeur.
Elle approuve par conséquent la décision de la cour d’appel qui a jugé que la prescription des faits fautifs avait commencé à courir, non pas à compter du jour où des rumeurs avaient été rapportées au DRH de la succursale, mais à compter du signalement adressé à la direction générale de la banque.
► À notre avis : même si la question n’a pas été soulevée, on peut douter que de simples rumeurs aient, en tout état de cause, pu permettre à l’employeur d’avoir une connaissance exacte de la réalité et de l’ampleur des faits fautifs reprochés au salarié. On peut également s’étonner de l’absence de réaction du DRH, que l’on devine en creux, compte tenu de l’obligation de protection de la sécurité du personnel qui lui incombe de par ses fonctions. Cependant, si le défaut de déclenchement d’une enquête et l’absence de signalement pourraient être reprochés à un DRH informé de tels faits, ce n’était pas l’objet du litige, et il serait regrettable qu’une telle inaction, même fautive, profite à l’auteur d’un comportement inapproprié.
Aliya Benkhalifa
Toujours pas de Premier ministre, mais un pacte législatif proposé par LR à Ensemble
17/07/2024
Après les législatives qui ont vu le Nouveau Front populaire arriver en tête mais sans majorité, c’est toujours l’incertitude sur l’identité du futur Premier ministre, son profil politique et le soutien dont il pourrait disposer chez les députés. À gauche, le Nouveau Front populaire n’est pas parvenu à se mettre d’accord sur une proposition commune pour Matignon. Après que la candidature d’Huguette Bello, présidente du conseil régional de la Réunion, avancée par le PCF et relayée par les Insoumis, ait été refusée par le PS, celle avancée par le PS, Laurence Tubiana, une des personnalités ayant négocié la COP 21 sur la transition environnementale à Paris, a été rejetée par la France insoumise.
Pendant ce temps à droite et au centre, les manœuvres sont aussi en cours. Quelques jours après avoir pris la présidence du groupe LR à l’Assemblée, Laurent Wauquiez a commencé à poser les bases d’un “pacte législatif” qu’il entend proposer à Ensemble, le groupe parlementaire de l’ex-majorité d’Emmanuel Macron. Un accord sur des projets de loi, donc, mais sans participation de LR à un gouvernement. Selon le Figaro, LR souhaite “débloquer la France dans les 100 jours” autour de quelques priorités législatives centrées sur “la restauration de l’ordre, la défense des valeurs de la laïcité et pour la revalorisation du travail”. Ce dernier point peut inclure aussi bien des mesures pour le pouvoir d’achat (aux législatives, LR avait évoqué une baisse des cotisations sociales jusqu’à 3 Smic pour doper le salaire net) qu’un nouveau durcissement de l’assurance chômage.
LR insiste sur la nécessité de maîtriser les comptes publics et de ne pas augmenter les impôts. Gérald Darmanin a jugé des propositions “très intéressantes”.
Demain aura lieu la rentrée de la nouvelle Assemblée nationale qui devra élire son président ou sa présidente.
Source : actuel CSE
Travailleurs étrangers sans autorisation de travail : extension du champ de la sanction
18/07/2024
La loi immigration du 26 janvier dernier a réorganisé le mécanisme de sanctions à l’encontre des employeurs de salariés étrangers sans titre de travail qui encourent de ce fait des sanctions administratives et pénales. Une amende administrative a ainsi été créée en lieu et place de la contribution spéciale précédemment due à l’Ofii. Un décret du 9 juillet 2024 en fixe les modalités, resserre les conditions exigées de l’employeur sollicitant une autorisation de travail et étend le champ d’application de la sanction au donneur d’ordre.
Autorisation de travail : pour qui et qui doit la demander ?
Pour pouvoir exercer une activité professionnelle en France, doivent impérativement posséder une autorisation de travail :
- les étrangers non ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne, d’un autre Etat partie à l’Espace économique européen (EEE) ou de la Confédération suisse ;
- les étrangers ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne pendant la période d’application des mesures transitoires relatives à la libre circulation des travailleurs.
C’est, par principe, à l’employeur d’effectuer la demande d’autorisation de travail (par un service en ligne sur le site du ministère de l’intérieur) avec toutefois des exceptions.
Dans le cadre d’un détachement transnational, elle est effectuée par le donneur d’ordre établi en France lorsqu’il est le bénéficiaire de la prestation ou que les deux parties (entreprise d’origine et entreprise bénéficiaire) appartiennent au même groupe.
Lorsque le salarié étranger est mis à sa disposition par une entreprise de travail temporaire basée à l’étranger ou dans le cadre d’un prêt de main d’œuvre à but non lucratif, la demande est effectuée par l’entreprise utilisatrice.
Lorsqu’elle concerne un apprenti dont l’employeur est établi à l’étranger et vient en France pour compléter sa formation, la demande est faite par l’entreprise d’accueil (article R.5221-1 du code du travail).
Conditions à respecter
A compter du 1er septembre 2024, l’autorisation ne sera accordée que si plusieurs conditions sont respectées, dont plusieurs tiennent à la “probité” du demandeur, en l’occurrence l’employeur. Le décret du 9 juillet 2024 étend ces exigences au donneur d’ordre, à l’entreprise utilisatrice et à l’entreprise d’accueil (article R..5221-20 modifié du code du travail) :
- respecter les obligations sociales liées à leur statut ou à leur activité ;
- ne pas avoir fait l’objet de condamnations pénales ou de sanctions administratives pour des infractions relevant du travail illégal, pour des infractions aux règles de santé et de sécurité au travail, pour aide à l’entrée et au séjour irrégulier en France ou pour méconnaissance des règles relatives au détachement temporaire de salariés ; l’administration ne doit pas avoir relevé de manquement grave de leur part en ces matières ;
- ne pas avoir fait l’objet de condamnations pénales ou de sanctions administratives pour des atteintes à la personne humaine, pour faux et usage de faux mentionné et l’administration a relevé des manquements graves de leur part en ces matières ;
- l’employeur et le salarié ainsi que, le cas échéant, le donneur d’ordre, l’entreprise utilisatrice ou l’entreprise d’accueil doivent satisfaire aux conditions réglementaires d’exercice de l’activité considérée, quand de telles conditions sont exigées.
Lorsque la demande concerne un emploi saisonnier, le demandeur devra fournir la preuve que le travailleur disposera, pour la durée de son séjour, d’un logement lui assurant des conditions de vie décentes.
► Précision : le non- respect de ces règles pourra également justifier le refus de renouvellement d’une autorisation de travail.
L’autorisation de travail pourra être refusée lorsque le projet de recrutement est manifestement disproportionné au regard de l’activité économique de l’employeur, du donneur d’ordre, de l’entreprise utilisatrice ou de l’entreprise d’accueil (article R.5221-20-1 nouveau du code du travail).
Caractéristiques de la nouvelle amende administrative
Infractions concernées
Est passible de l’amende administrative l’employeur (à entendre au sens large puisque cela inclut également le donneur d’ordre, l’entreprise utilisatrice et l’entreprise d’accueil) qui embauche, garde à son service ou emploie pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France ou qui l’exerce dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autres que celles qui sont mentionnées, le cas échéant, sur cette autorisation de travail (article L.8251-1 du code du travail).
En est également passible l’employeur recourant sciemment aux services d’un employeur d’un étranger non autorisé à travailler (article L.8251-2 du code du travail).
Montant inchangé
Auparavant, l’employeur d’un étranger sans autorisation de travail était redevable, au titre des sanctions administratives, d’une contribution spéciale dont le montant était fixé par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) pour le compte de l’Etat et liquidée par le ministre chargé de l’Immigration (articles L.8253-1 et suivants du code du travail) et d’une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l’étranger prévue par le code des étrangers. La contribution spéciale a été remplacée par une amende administrative et la contribution forfaitaire a été supprimée.
Le montant de l’amende est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti (MG) et peut être majoré en cas de réitération dans la limite de 15 000 fois ce même taux. Il y a réitération lorsque l’auteur de l’infraction a déjà fait l’objet d’une amende administrative dans les cinq ans précédant la constatation de l’infraction (article R.8253-2 du code du travail).
Ce montant maximum est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsque l’employeur s’est acquitté spontanément des salaires et indemnités dûs au salarié.
L’amende est appliquée autant de fois qu’il y a d’étrangers concernés par l’infraction (article R.8253-1 du code du travail).
Le contrevenant peut s’expliquer
Les infractions peuvent être constatées par les inspecteurs du travail, les agents et officiers de police judiciaire, ou encore les agents des douanes. Ils établissent rapports et procès-verbaux, transmis au procureur de la République, et dont le ministère de l’immigration peut obtenir copie.
Au vu de ces éléments, le ministre de l’immigration informe l’auteur du manquement, par tout moyen conférant date certaine, qu’il encourt une amende administrative et qu’il peut présenter ses observations sur les faits qui lui sont reprochés dans un délai de 15 jours. Il l’informe également de son droit de demander copie du PV d’infraction ou du rapport sur la base duquel ont été établis les manquements reprochés. S’il formule cette demande, le délai pour présenter des observations court jusqu’à l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la date de réception du PV (article R.8253-3 du code du travail).
A l’expiration de ce délai, le ministre de l’immigration décide, au vu des observations de l’intéressé, de l’application et du montant de l’amende et lui notifie sa décision motivée (article R.8253-4 du code du travail).
Les contestations relatives à l’amende administrative sont portées devant le tribunal administratif dans le ressort duquel l’infraction a été constatée (article R.312-16 du code de la justice administrative).
Solidarité financière du donneur d’ordre
Lorsqu’une juridiction correctionnelle a condamné une personne pour avoir recouru sciemment aux services d’un employeur d’un étranger non autorisé à travailler, le greffe transmet une copie de la décision au ministre de l’immigration, afin qu’il puisse “activer” la solidarité financière (article R. 8254-7 du code du travail).
► Ce mécanisme de solidarité contraint le donneur d’ordre à payer solidairement avec l’employeur étranger tous les salaires et accessoires dûs au salarié, les indemnités de rupture du contrat de travail, les frais d’envoi des rémunérations impayées vers le pays dans lequel l’étranger est parti volontairement ou a été reconduit et l’amende administrative prononcée.
Si le ministre de l’immigration veut faire jouer cette solidarité, il informe le donneur d’ordre concerné, par tout moyen conférant date certaine, que ces dispositions sont susceptibles de lui être appliquées et qu’il peut présenter ses observations dans un délai de 15 jours.
Il l’informe également du fait qu’il peut se faire communiquer les PV et rapports établis lors de la constatation de l’infraction.
Si le donneur d’ordre demande communication de ces documents, le délai pour présenter ses observations court jusqu’à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter de la date de réception du PV.
A l’issue de ce délai, et au vu des observations éventuellement présentées, le ministre de l’immigration statue sur la mise en jeu de la solidarité financière et notifie sa décision au donneur d’ordres en l’informant des sommes dues à ce titre.
Les montants dont le paiement est exigible sont déterminés en fonction de l’étendue des relations entre le donneur d’ordre et son co-contractant, et en tenant compte, notamment, de la valeur des travaux réalisés, des services fournis, et de la rémunération en vigueur dans la profession.
Le ministre notifie également sa décision au directeur général de l’Ofii (Office français de l’immigration et de l’intégration).
Ces dispositions s’appliquent aux faits constatés depuis le 16 juillet 2024.
Rappel sur les sanctions pénales |
Outre les sanctions administratives, le contrevenant s’expose à des sanctions pénales que la loi du 26 janvier 2024 a, au passage, aggravées puisque l’amende encourue par l’employeur qui, directement ou par personne interposée, embauche, conserve à son service ou emploie pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France, a été doublée, passant de 15 000 à 30 000 euros, et de 100 000 euros à 200 000 euros lorsque l’infraction est commise en bande organisée (article L.8256-2 du code du travail). Selon ce même article, des peines d’emprisonnement sont également possibles : jusqu’à 5 ans et 10 ans en cas d’infraction commise en bande organisée, sans changement par rapport au régime antérieur. |
Marie Excoffier
Plus de licenciements et plus de recrutements en CDD début 2024
18/07/2024
Au 1er trimestre 2024, 238 200 licenciements ont eu lieu (en France métropolitaine, hors agriculture, intérim et particuliers employeurs), soit une hausse de 5,3 % par rapport au trimestre précédent, selon des données publiées le 11 juillet par la Dares (direction de l’animation de la recherche du ministère du travail). 20 200 licenciements ont un motif économique (+0,7 %) et 217 900 licenciements, un motif autre qu’économique (+5,7 %).
La Dares a également recensé 132 500 ruptures conventionnelles, conclues dans le secteur privé (en France métropolitaine, hors agriculture et particuliers employeurs), soit une augmentation de 2,3 % par rapport au trimestre précédent et de 3,2 % par rapport à l’année précédente. En 2022, le nombre de ces ruptures à l’amiable avait franchi le cap symbolique des 500 000.
Sur cette même période, la Dares compte 478 000 démissions de CDI, soit +0,3 % et 528 600 démissions (+0,5 %) en tenant compte des ruptures anticipées autorisées d’un CDD.
Le nombre d’embauches en CDI recule de nouveau (-2,7 % après -1,8 %) tandis que celui en contrat à durée déterminée (CDD) accélère (+1,2 % après +0,5 %).
Source : actuel CSE
Le télétravail contribue à assigner les femmes au travail domestique
19/07/2024
Le télétravail est souvent décrit comme améliorant l’articulation entre travail et famille. S’il est vrai qu’il permet des gains de temps et une certaines optimisation des tâches, il n’en reste pas moins que, selon le CEET, il accentue les inégalités de genre en rendant les femmes plus disponibles du point de vue domestique.
Selon les statistiques de l’Insee, 18,8 % des salariés ont télétravaillé au moins un jour par semaine en 2023. Présenté par les pouvoirs publics et les employeurs comme une solution à des situations exceptionnelles telles que la pandémie de Covid-19 ou les Jeux olympiques, le télétravail est donc désormais durablement ancré dans l’organisation du travail. Mais comment est-il vécu par les concernés, surtout quant à l’articulation entre leurs temps professionnels et personnels ?
Dans une publication datée du 10 juillet 2024, le Centre d’étude de l’emploi et du travail (CEET) tempère ses bienfaits : “Il est de l’ordre de l’évidence que le télétravail faciliterait l’articulation des temps sociaux. Pourtant, les pratiques des télétravailleuses et télétravailleurs soulignent des effets ambivalents”.
Les bénéfices : le télétravail fait gagner du temps et facilite la vie des parents
Il a déjà été démontré que le télétravail divise par trois les distances parcourues par les actifs, notamment car il permet d’éviter les trajets domicile-lieu de travail. Partant de ce constat, le CEET explique que “comme la réduction du temps de travail liée au passage à 35 heures avant lui, le télétravail se voit devenir le centre de promesses temporelles importantes”. Elles sont liées à la fois à un temps de transport qui se réduit et à la possibilité de disposer de ce temps gagné. Il offre en effet des marges de manœuvre et dans les moments de pause, ou en superposant deux tâches, un large panel d’activités non professionnelles sont réalisées (faire du sport, du rangement, se rendre à un rendez-vous médical, etc.).
Le télétravail facilite également la prise en charge familiale : il atténue le stress de ne pas être à l’heure pour aller chercher les enfants tout en permettant d’y aller plus tôt. Ce sont donc logiquement les parents qui perçoivent des gains plus forts de la pratique.
Le CEET le rappelle toutefois, “bien que la focale soit ici placée sur les enjeux d’articulation, il ne faut pas perdre de vue ce qui fait le cœur du télétravail, à savoir l’activité productive”. En dépit de bénéfices certains, l’activité professionnelle à domicile est plus intense avec des horaires allongés et des pauses plus rares.
Les inconvénients : il réactive les inégalités et entraine une “double journée des femmes”
Le travail dans les locaux de l’employeur pouvait permettre de mettre à distance les charges domestiques durant une partie de la journée. Un rempart qui cède en télétravail : “par les logiques d’optimisation temporelle précédemment exposées, les femmes sont réassignées au travail domestique”.
La gestion des enfants comme des tâches ménagères leur revient quasi systématiquement, les hommes s’en occupant surtout “si l’occasion se présente” ou s’ils ont “du temps à tuer”. Une double journée pour les femmes préexistante certes, mais qui “change de forme” en s’immisçant dans un temps qui était antérieurement protégé. Si un certain soulagement peut exister car les tâches effectuées durant la journée ne sont plus à faire ensuite le soir, une fatigue nouvelle nait du fait que les femmes travaillent de manière continue en télétravail, passant de l’activité salariée à l’activité domestique. Un risque “invisibilisé” selon le CEET, qui conclut par le fait que le télétravail “réactive des inégalités maintenues”.
Elise Drutinus