Travail pendant le congé de maternité : droit à réparation automatique pour la salariée

18/09/2024

Le seul constat du manquement par l’employeur de son obligation de suspendre toute prestation de travail durant le congé de maternité ouvre droit à réparation pour la salariée.

En principe, depuis le revirement de jurisprudence du 13 avril 2016, tout manquement de l’employeur doit, pour ouvrir droit à réparation, être subordonné à l’existence d’un préjudice que le salarié doit justifier. Toutefois, la Cour de cassation apporte régulièrement des exceptions à ce principe et applique la théorie du préjudice nécessaire pour certains manquements de l’employeur.

C ‘est à nouveau le cas, dans un arrêt du 4 septembre, à l’égard du manquement de l’employeur à son obligation de ne pas faire travailler une salariée pendant son congé de maternité.

► Rappelons que depuis le revirement de jurisprudence en date de 13 avril 2016 (arrêt du 13 avril 2016), la Cour de cassation a abandonné la notion d’obligation de résultat à l’égard de l’obligation de sécurité qui pèse sur l’employeur et a retenu comme principe général que le manquement de l’employeur, pour ouvrir droit à réparation, doit être subordonné à l’existence d’un préjudice relevant de l’appréciation souveraine des juges du fond.

En l’espèce, une salariée a demandé le paiement de dommages-intérêts pour violation de l’obligation en matière de sécurité et de santé au travail en raison de la fourniture d’un travail pendant son congé maternité.

Elle est tout d’abord déboutée par la cour d’appel au motif qu’elle ne justifie d’aucun préjudice.

Obligation de suspendre toute prestation de travail

Mais la Cour de cassation n’est pas de cet avis : le seul constat du manquement de l’employeur à son obligation de suspendre toute prestation de travail durant le congé de maternité, ouvre droit à réparation pour la salariée.

Elle s’appuie sur les articles L. 1225-17L. 1225-29 interprétés à la lumière de l’article 8 de la directive n° 92/85/CEE du 19 octobre 1992.

Il résulte de ces articles que :

  • toute salariée bénéficie d’un congé de maternité pendant une période qui commence six semaines avant la date présumée de l’accouchement et se termine dix semaines après la date de celui-ci (article L. 1225-17 du code du travail) ;
  • il est interdit d’employer une salariée pendant une période de huit semaines au total avant et après son accouchement, ainsi que dans les six semaines qui suivent son accouchement (article L. 1225-29 du code du travail).

► Précisons que la salariée a le droit de bénéficier d’un congé de maternité, sauf dispositions conventionnelles plus favorables,  pendant une période qui commence six semaines avant la date présumée de l’accouchement et se termine dix semaines après la date de celui-ci (article L. 1225-17 du code du travail). Toutefois au cours de congé, il faut distinguer deux périodes : une période d’interdiction absolue de travailler et une période où la salariée peut travailler. L’interdiction absolue de travailler pendant une période minimale est de huit semaines, au total, avant et après l’accouchement, dont nécessairement les six semaines qui suivent l’accouchement (article L. 1225-29 du code du travail). Cette formulation permet à ce que la période de huit semaines puisse être allongée, en cas d’accouchement tardif. Pour le reste du congé de maternité, il s’agit d’un droit pour la salariée de le prendre mais il n’y a pas d’interdiction absolue de travailler.

Par ailleurs, l’employeur qui fait obstacle à l’exercice par la salariée de son droit de suspendre son contrat de travail est passible d’une amende de la contravention de cinquième classe (1 500 euros) qui peut être majorée en cas de récidive (articles R. 1 227-5 et R. 1 227-6 du code du travail).

Nathalie Lebreton

Avoir un master ne suffit pas toujours à garantir une entrée facile dans la vie active

18/09/2024

En 10 ans, le nombre de jeunes entrant sur le marché du travail avec un diplôme de master en poche a doublé. Ces diplômés ont-ils tous les mêmes débuts de vie active ? C’est à cette question que répond, par la négative, une étude du Céreq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications). Si 85 % sont en emploi trois ans après l’obtention de leur diplôme, leurs débuts de carrière sont qualifiés de “contrastés”. Le centre identifie en effet sept trajectoires-types, allant de plus la favorable, dominée par des emplois de bonne qualité et des revenus supérieurs à la moyenne, à la moins favorable, marquée de son côté par du chômage combiné à des emplois de mauvaise qualité.

Malgré leur niveau de diplôme similaire, les sortants de master sont assez bien répartis dans ces catégories, le meilleur parcours (84 % du temps en emploi cadre, 2 485 euros de revenu moyen) regroupant 26 % d’entre eux et le plus mauvais (5 % du temps en emploi cadre, 1 545 euros de revenu moyen) 16 %.

Le Céreq en conclut que “les premières années de vie active des jeunes diplômés de master varient largement en fonction de la spécialité de formation et des modalités de préparation du diplôme. D’autres facteurs, telle l’origine sociale, jouent également”. Il ajoute que l’alternance en dernière année, qui concerne 22 % des diplômés de master, augmente de 40 % les chances de suivre la meilleure trajectoire et qu’habiter en Île-de-France les double.

Source : actuel CSE

Selon la cour d’appel d’Amiens, l’accident survenu pendant la pause méridienne relève de la législation du travail

18/09/2024

Dans une décision du 2 septembre 2024, la cour d’appel d’Amiens qualifie en accident du travail l’accident survenu au domicile d’une salariée en télétravail pendant sa pause-déjeuner. 

Dans cette affaire, les plages horaires fixes de travail étaient fixées de 9h à 13h30 et de 14h à 16h15, les plages variables de 7h30 à 9h pour l’arrivée, de 11h30 à 14 h pour le déjeuner et de 16h15 à 19h pour le départ. La pause déjeuner étant prévue par l’employeur comme une plage horaire variable, “laquelle est assimilable au temps de travail”, les juges estiment que “la salariée n’avait pas interrompu son travail pour un motif personnel, de sorte qu’elle bénéficiait de la présomption d’imputabilité lors de la chute intervenue pendant cette plage de temps”. 

“Les premiers juges ont ainsi justement retenu que si l’évènement était survenu pendant la pause méridienne, il n’en demeurait pas moins que cette période constituait une interruption de courte durée du travail, légalement prévue, assimilable au temps de l’exercice de l’activité professionnelle tel que prévu par le dernier alinéa de l’article L.1222-9 du code du travail”, juge ainsi la cour d’appel.

Source : actuel CSE

L’action judiciaire relative au transfert de jours RTT sur un Perco se prescrit par trois ans

19/09/2024

La Cour de cassation poursuit son travail de clarification sur la prescription des actions en droit du travail. Cette fois, c’est au tour des actions portant sur le transfert des jours de réduction du temps de travail sur un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco).

L’action judiciaire relative à la demande de transfert de jours RTT sur un Perco (plan d’épargne retraite collectif) est-elle soumise à l’article L. 3245-1 du Code du travail (action en paiement ou en répétition du salaire) ou à l’article L. 1471-1 dudit code (action portant sur l’exécution du contrat de travail) ?

L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit alors que l’action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Dans cette affaire, un salarié sollicite auprès de son employeur, le 19 décembre 2016, le transfert de quatre jours de RTT vers le Perco existant au niveau de la branche du secteur d’activité de son entreprise (le BTP). Le règlement instituant ce plan permet en effet ce transfert.

► En l’absence de compte épargne-temps dans l’entreprise, le salarié peut, dans la limite de 10 jours par an, verser les sommes correspondant à des jours de repos non pris sur un Perco. L’indemnité pour jours de RTT correspond au montant de la rémunération légalement due en raison de l’exécution d’un travail.

Son employeur refuse de faire droit à cette demande. Le 25 avril 2019, au titre de ces quatre jours de RTT, le salarié saisit la justice :

  • d’une demande de transfert des jours RTT sur un Perco ;
  • d’une demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et pour préjudice moral ;
  • et, à titre subsidiaire, d’une demande  relative au paiement d’une indemnité compensatrice au titre des quatre jours de RTT perdus.

Les juges déterminent la prescription de l’action pour chaque demande

Les juges d’appel déclarent l’ensemble de ces demandes irrecevables, l’action devant être considérée comme une action portant sur l’exécution du contrat de travail. Elles sont donc prescrites, le délai courant entre le 19 décembre 2016 et le 25 avril 2019 (soit deux ans et quatre mois) étant supérieur à deux ans.
Mais la Cour de cassation n’est que partiellement de cet avis. Elle analyse pour chaque demande la nature de la créance afin de déterminer le délai de prescription qui s’applique.

► En effet, la détermination du délai de prescription dépend de la nature de la créance objet de la demande (arrêt du 30 juin 2021).

Si la demande aux fins d’exécution de l’obligation et de paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et pour préjudice moral porte bien sur l’exécution du contrat de travail et se prescrit donc par deux ans (les demandes du salarié sont de nature indemnitaire), la demande relative au versement sur le Perco de sommes correspondant à quatre jours RTT a une nature salariale, tout comme celle relative au paiement d’une indemnité compensatrice au titre des quatre jours de RTT perdus. L’action n’était donc pas prescrite à ces deux titres (prescription de trois ans).

► Cette décision semble transposable au Pereco (plan d’épargne retraite d’entreprise collectif) puisque les modalités d’alimentation sont similaires au Perco. Est-elle transposable au CET (compte épargne temps) ?

Geraldine Anstett

Pour France Stratégie, “les réfugiés constituent un vivier de recrutement”

19/09/2024

“Les trajectoires professionnelles des personnes réfugiées sont marquées par des difficultés significatives”, note France Stratégie. “Une situation paradoxale” puisque mieux les intégrer dans l’emploi serait bénéfique pour les entreprises. L’institution donne ses pistes pour lever les freins existants.

Elles sont environ 35,8 millions dans le monde, 6,7 millions en Europe et 547 000 en France et ont vocation à être de plus en plus nombreuses du fait de l’aggravation des conflits et du dérèglement climatique. Elles, ce sont les personnes réfugiées. Elles étaient, avec leur insertion professionnelle, au cœur d’un groupe de travail de la plateforme RSE (responsabilité sociale et environnementale) de France Stratégie constitué à suite d’une saisine interministérielle du 6 septembre 2023.

L’avis final a été rendu et présenté il y a quelques jours par les co-rapporteurs Pierre-Yves Chanu, Ghislaine Hierso et Odile Menneteau. Une de leur conclusion peut paraître surprenante : “L’intégration professionnelle des personnes réfugiées ne diffère pas en tant que telle de l’intégration des personnes éloignées de l’emploi mais implique une approche systémique et coordonnée entre tous les acteurs”. Et parmi ces acteurs se trouvent les entreprises, qui “jouent un rôle clé non seulement en tant qu’employeurs mais aussi comme acteurs de l’intégration sociale des personnes réfugiées” et qui auraient tout à gagner à s’investir davantage dans cette intégration.

L’état des lieux : une volonté de travailler mais un accès à l’emploi stable “complexe”

Contrairement à certaines idées reçues, dès leur arrivée les personnes réfugiées cherchent activement à travailler, 66 % d’entre elles ayant tenté de trouver un emploi. Toutefois, elles ne sont que 42 % à s’être positionnées sur le marché du travail un an après avoir reçu leur titre de séjour, dont seulement 43 % en CDI (84,7 % dans la population française) tandis que 22 % sont au chômage et 19 % en situation d’inactivité hors études. Cette inactivité touche d’ailleurs encore davantage les femmes. Les personnes réfugiées sont aussi bien plus concernées par les emplois précaires (37 % sont en CDD et 10 % en intérim) et le temps partiel subi (30 % des hommes réfugiés salariés et 50 % des femmes), “ce qui souligne la vulnérabilité de cette population sur le marché du travail”. Logiquement, elles ressentent donc souvent un sentiment de déclassement professionnel et, en effet, la proportion d’ouvriers entre le pays d’origine et le pays d’accueil passe de 22 % à 46 % et celle des cadres de 10 % à 2 %.

Le paradoxe : les freins à l’embauche persistent mais pourraient souvent être levés

Certes, les rapporteurs de l’avis le soulignent, les freins à l’emploi des personnes réfugiées sont systémiques (problèmes de mobilité géographique, de logement, de comparabilité des diplômes, etc.) et ne reposent pas qu’entre les mains des entreprises. Il n’empêche qu’elles ont aussi une responsabilité à porter. “Certaines peuvent écarter la possibilité de recruter une personne réfugiée en pensant que ce type de recrutement est complexe et chronophage”.

Or, ces personnes peuvent bel et bien accéder à l’emploi sans avoir à demander d’autorisation de travail. Mieux s’informer est donc de mise. Une certaine défiance et des préjugés existent aussi, qu’il appartient aux entreprises de combattre. “L’intégration des réfugiés relève d’un engagement personnel des dirigeants d’entreprise” pointe Odile Menneteau, l’avis appelant à former et sensibiliser collaborateurs et RH afin de déconstruire les stéréotypes. De même, les pratiques de recrutement peuvent ne pas correspondre à ces profils atypiques. Sauf que sur tous ces points un éventail d’outils (bilan de compétences, VAE, alternance, etc.) et de référents (associations, Opco pour la formation, etc.) peut être mobilisé, ces outils étant connus puisqu’ils sont les mêmes que ceux mobilisés pour les personnes éloignées de l’emploi.

La conclusion : les entreprises gagneraient en main-d’œuvre/compétences en les levant

La conclusion de l’avis est très claire : “Dans un contexte français de pénurie de main-d’œuvre et de métiers en tension, les personnes réfugiées constituent un vivier de recrutement en proposant des compétences précieuses qui peuvent stimuler l’innovation et la créativité. Elles apportent aussi une richesse culturelle dans l’entreprise et, plus globalement, à la société. Toutefois ce potentiel est sous-exploité en France”.

Un manque à gagner d’autant plus important que les personnes réfugiées en emploi sont majoritairement concentrées dans des secteurs comme l’hôtellerie, le commerce et la restauration (45 %) ou la construction et le bâtiment (21 %) qui figurent en haut de la liste de ceux en tension. Autre point positif pour les entreprises : le soutien à l’intégration des personnes réfugiées peut renforcer leur image de marque et leur réputation. Autrement dit, cette intégration ne peut être que bénéfique. La plateforme RSE recommande donc aussi aux partenaires sociaux de s’appuyer sur la négociation collective pour progresser en ce sens.

 Elise Drutinus

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : CESE, fonction publique, nominations

20/09/2024

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du samedi 14 septembre au jeudi 18 septembre inclus.

CESE

Fonction publique

Nominations

  • Un arrêté du 12 septembre 2024 porte nomination de M. Arnaud Pouly, sur l’emploi de directeur de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités de La Réunion
  • Un arrêté du 10 septembre 2024 porte nomination au conseil d’administration de l’établissement public Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi
  • Un arrêté du 16 septembre 2024 relatif à la composition du cabinet du Premier ministre nomme divers conseillers de Michel Barnier
  • Un arrêté du 5 septembre 2024 porte nomination sur l’emploi de directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités de Provence-Alpes-Côte d’Azur
  • Un arrêté du 17 septembre 2024 relatif à la composition du cabinet du Premier ministre nomme M. Jérôme Marchand-Arvier directeur adjoint du cabinet du Premier ministre.

Source : actuel CSE

La Cnil publie son guide sur la sécurité des données personnelles, avec une fiche sur l’IA

20/09/2024

La commission nationale informatique et libertés (Cnil) vient de publier l’édition 2024 de son guide sur la sécurité des données personnelles.

Composé de 25 fiches, il a pour objectif d’aider les professionnels à identifier les risques et à mettre en œuvre “les mesures de sécurité pour assurer la protection des données qu’ils traitent”. Cette édition 2024 fait un focus sur des thèmes nouveaux comme le cloud, les applications mobiles, les API (interface de programmation applicative) et l’intelligence artificielle. Concernant l’IA, le guide explique également…ce qu’il ne faut pas faire, comme : 

  • “Entraîner un modèle sur des données dont la source est inconnue ou n’est pas fiable, ou dont la qualité, et notamment celle de l’annotation, n’a pas été vérifiée ;
  • Déployer, partager, diffuser ou rendre accessible un modèle sans vérifier la qualité des sorties, et en particulier l’absence de sorties problématiques (ex : contenus haineux) et de données personnelles, hormis à des fins de tests et d’audit ;
  • Utiliser un système sans en connaître les limitations, ou sans évaluer les conséquences d’une erreur ou d’un biais”.

Source : actuel CSE

Le télétravail n’est plus une “option” mais un “acquis” pour les cadres

20/09/2024

Quatre ans après la crise sanitaire, le télétravail s’est installé dans les entreprises : 67 % des cadres travaillent au moins un jour par semaine à distance et 49 % aimeraient le faire davantage, selon une étude récente de l’Apec (Association pour l’emploi des cadres).

Pour la majorité d’entre eux, il ne s’agit pas d’une “option”, mais d’un “acquis” : le retour en arrière n’est pas envisageable. D’ailleurs, 82 % des cols blancs seraient mécontents si leur entreprise supprimait l’accès au télétravail. Et près de la moitié (45 %) pourrait changer d’emploi. Une proportion qui monte à 57 % chez les moins de 35 ans.

Même si ce mode de travail peut aussi avoir des inconvénients pour leur évolution professionnelle, avec notamment la crainte de rater des informations importantes ; la difficulté à demander de l’aide aux collègues ou l’absence de visibilité vis-à-vis du manager qui “ne voit plus ou moins leur charge de travail”. 

À noter toutefois : le télétravail n’est pas universel, un cadre sur quatre travaille en présentiel par choix ou par obligation.

Source : actuel CSE