[8 mars un jour, 8 mars toujours] L’Index égalité professionnelle fait du surplace en 2024

11/03/2024

En 2024, l’Index égalité professionnelle affiche une note de 88 points sur 100, à l’identique de celle de 2023, selon les chiffres que le ministère du travail avait choisi de dévoiler le vendredi 8 mars, journée des droits des femmes. Les points noirs restent, pour beaucoup d’entreprises, la question de l’augmentation après un congé maternité et celle du plafond de verre.

Pas d’amélioration pour l’Index égalité professionnelle en 2023 : la note moyenne est de 88 sur un total maximum de 100, en 2024 comme en 2023, selon les chiffres publiés le 8 mars par le ministère du travail, à l’occasion de la Journée internationale des droits de la femme. En 2022, le score était de 84 points. Les structures de 50 à 250 salariés gagnent, elles, un point (de 87 à 88).

Cette année, la totalité des points n’est acquise que pour 2 % des entreprises. Le nombre des sociétés ayant une note inférieure à 75 points n’a pas été communiqué. La loi leur laisse deux ans pour rectifier le tir, sous peine sinon d’une sanction pouvant aller jusqu’à 1 % de sa masse salariale.

Mais d’ores et déjà, le ministère précise qu’une vingtaine d’entreprises de plus de 250 personnes “ont une note inférieure à 75 points depuis quatre ans et sont donc pénalisées”.

En mars 2024, 77 %, des entreprises ont publié leur Index contre 72 % en 2023, à la même date.

126 pénalités

Depuis 2019, 857 mises en demeure ont été prononcées soit parce que ces entreprises n’avaient pas publié leur score, soit parce que les mesures de correction n’étaient pas mises en place. Par ailleurs, 560 mises en demeure ont eu lieu pour absence ou insuffisance d’accord ou de plan d’action relatif à l’égalité professionnelle.

Au total, 126 pénalités (70 sur l’Index et 56 sur les accords) ont été notifiées. Mais le ministère n’a pas précisé leurs montants.

Des points faibles difficiles à corriger

Les points faibles restent difficiles à corriger. C’est le cas de l’indicateur 4 relatif au retour de congé maternité. Plus de 6 % des entreprises ont obtenu la pire note, 0, à l’instar de l’an dernier. Une disposition en vigueur depuis 15 ans, date de la promulgation de la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

De même, les entreprises de plus de 1 000 salariés peinent à parvenir à la parité dans les instances dirigeantes. 57 % d’entre elles comptent moins de 30 % de femmes parmi leurs cadres dirigeants et 38 % ont moins de 30 % de femmes dans ces comités de direction ou comités exécutifs.

Ces résultats pourraient toutefois s’améliorer indirectement, sous l’effet de la loi Rixain du 24 décembre 2021. Les entreprises d’au moins 1 000 salariés seront, en effet, tenues de compter une proportion d’au moins 30 % de femmes chez les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes, à compter du 1er mars 2026 et de 40 %, au 1er mars 2029.

“Les marges d’amélioration sont réelles”, constate le ministère.

Nouvel Index en 2025

Reste que l’Index égalité professionnelle est, lui aussi, perfectible. D’ores et déjà, l’exécutif a confirmé la refonte de cet outil d’ici à 2025 ; un chantier annoncé par Elisabeth Borne en octobre dernier, qui doit permettre d’anticiper la transposition de la directive européenne du 10 mai 2023. Laquelle prévoit l’obligation de communiquer des données sur l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes d’ici le 7 juin 2026.

Une concertation sera lancée au printemps avec les partenaires sociaux avec l’ambition de se “doter d’un nouvel outil” d’ici à 2025. Pour les y aider, le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a formulé, dans un rapport publié le 7 mars, quelques pistes d’amélioration. Il préconise notamment d’introduire de nouveaux indicateurs sur le temps partiel et les bas salaires ; de modifier les règles de calcul pour éviter les trop nombreuses exclusions de catégories de personnel et de conditionner l’accès aux marchés publics des entreprises à un résultat satisfaisant à l’Index.

Les notes de l’Index, entreprise par entreprise, se trouvent sur le site Internet dédié (entreprises de plus de 250 salariés).

Anne Bariet

[8 mars un jour, 8 mars toujours] Les freins aux candidatures de femmes aux élections CSE

12/03/2024

Lors de la manifestation parisienne du 8 mars pour les droits des femmes, nous avons interrogé des représentantes du personnel sur ce qui selon elles freine l’engagement de candidates à des élections CSE ou à des responsabilités syndicales. Nous avons aussi posé la question aux représentants des syndicats présents.

Les droits des femmes, c’est toute l’année. Leurs charges de famille et de travail aussi. On l’a vu pendant le Covid et les confinements, les femmes ont majoritairement plus assuré la vie familiale en plus des conditions de télétravail que les hommes. Selon une récente étude de la Dares, l’arbitrage entre la vie professionnelle et la vie familiale repose encore trop sur les femmes qui se dédoublent pour être performantes au travail et présentes auprès des enfants. De même, six fois plus de mères que de pères se trouvent sans emploi ou à temps partiel en raison de leurs enfants. Même une fois les fonctions représentatives endossées, le sujet reste entier car certaines ont également remarqué qu’en tant qu’élues au CSE, leur avis passe trop souvent au second plan.

Il est donc plus problématique pour les femmes que pour les hommes de s’engager dans la voie de la représentation du personnel au CSE ou de se lancer dans la vie syndicale. Bien que leur cause progresse, on peut s’interroger sur les raisons qui freinent leur engagement. Principale réponse apportée par les militantes lors de la manifestation parisienne du 8 mars 2024 : le manque de confiance en soi.

La confiance, talon d’Achille des femmes

“Les freins sont déjà dans la tête des femmes, elles pensent qu’elles n’ont pas les qualités ni les compétences”, nous répond Emmanuelle Jollet, enseignante et co-responsable de la FSU 75 et Île-de-France. Elle ajoute : “Ensuite, il y a le manque de confiance et le manque d’habitude de parler. Et puis enfin, ce sont elles qui portent les charges de famille, notamment quand les enfants sont jeunes. Or, le syndicalisme demande énormément de disponibilité, il faut du temps et de la souplesse pour les réunions le soir. C’est très compliqué de lier travail, vie syndicale et vie familiale”. Un “cumul des vies” lourd à porter donc, sujet que nous avions abordé lors de la journée du 8 mars 2021.

Véronique Bleuse, ancienne déléguée syndicale CGT de Pôle Emploi dans les Hauts-de-France, le reconnaît : “C’est à partir du moment où mes enfants ont été grands que j’ai pu m’investir. Après, il faut aussi une ouverture d’esprit de l’équipe en place car il peut exister un cercle vicieux : si les élus ou délégués syndicaux sont trop entre mecs, ce sera plus difficile. La tête de liste est souvent un homme, et la suppléante souvent une femme…”.

“Moi je n’ai pas longtemps réfléchi avant de me présenter aux élections CSE car je suis militante depuis longtemps. On a souvent des grèves dans l’hôtellerie donc mon engagement était une évidence. En revanche, dans d’autres sociétés, ce qui peut freiner c’est de ne pas donner confiance aux femmes, tout simplement. On leur dit qu’elles ne sont pas à la hauteur des situations, et cela peut venir de collègues hommes dans le syndicat comme dans l’entreprise. Cela les fait douter de leur personnalité et de leurs capacités”, estime Monia Guida, élue CGT au CSE dans un hôtel café restaurant.

Comment lever les freins ?

“Il faudrait déjà qu’elles soient dédommagées financièrement, et qu’il y ait la possibilité de financer des gardes d’enfant et des heures de ménage”, juge Emmanuelle Jollet (FSU). Pour Véronique Bleuse (CGT), il faut mobiliser le levier de la formation syndicale : “cela leur donne de l’assurance car qu’il s’agisse d’un CSE ou d’une équipe syndicale, les femmes s’expriment rarement car elles n’ont pas confiance, elles ont peur de dire des bêtises, et cela vient en grande partie du patriarcat. On nous a bâillonnées pendant des années, y compris dans les familles (d’ailleurs dans mon enfance, on écoutait plus mon frère que moi). Il y a donc un sujet d’éducation des parents et de place des représentations positives de ce que peuvent faire les femmes, par ailleurs largement invisibilisées dans l’histoire”.

Pour lever ces freins, il faut avant tout “se battre”, selon Monia Guida (CGT), “il faut insister, continuer et faire valoir ses aptitudes, c’est comme ça au quotidien et dans le travail de tous les jours, pas uniquement comme élue du personnel. Et puis il n’y a que la solidarité des femmes entre elles qui pourra faire levier pour porter d’autres femmes dans les syndicats et les CSE”, conclut-elle.

L’avis d’un élu au CSE d’Orange

Enfin, nous avons recueilli l’avis de Salim Mounir Alaoui, élu au CSE d’Orange Innovation et au CSE central d’Orange : “A Innovation, des femmes exercent les mandats de déléguée syndicale et de représentante syndicale, nous sommes un peu un contre-exemple. Mais cela a été très difficile. Pendant un an nous avons dit à la représentante syndicale qu’elle pouvait s’engager mais elle avait peur de prendre la responsabilité. Pourtant, aujourd’hui, c’est la meilleure que nous n’ayons jamais eue ! Mais elle n’avait pas confiance en elle, donc je pense que c’est beaucoup une question de confiance”. Sa proposition pour améliorer les choses : “Il faut que les hommes convainquent les femmes de se présenter, il faut que les hommes soient au courant que les femmes ont besoin de confiance, qu’ils les encouragent à prendre des responsabilités”.

Qu’en pensent les représentants des syndicats ?
La manifestation parisienne du 8 mars 2024 a réuni en carré de tête la CFDT, la CGT, la CFE-CGC, l’Unsa et Solidaires, FO ayant organisé sa propre campagne en faveur des droits des femmes ainsi qu’un meeting à la Bourse du travail.

► Pour Marylise Léon (CFDT) “le premier frein c’est l’idée que l’investissement nuit à la carrière, mais le syndicalisme a aussi des questions à se poser pour se montrer plus inclusif envers les femmes”. La secrétaire générale nous a également confié que l’index d’égalité professionnelle de la CFDT présentait une note de 93 sur 100, et que les déséquilibres constatés sont en faveur des salariées de la confédération…

► Sophie Binet (CGT) acte que les femmes, plus souvent employées dans les métiers à temps partiels et précaires, n’ont pas les mêmes capacités d’engagement que les hommes dans les CSE. “En revanche, les entreprises peuvent agir en aménageant les mandats, par exemple en ajoutant les heures de délégation des élues à temps partiel afin de leur permettre d’atteindre un temps complet”, affirme-t-elle. La CGT se dit aussi favorable à la représentation paritaire sur les listes de candidats aux élections (1). 

► Côté Force Ouvrière, Béatrice Cliq, secrétaire confédérale en charge de l’égalité hommes femmes, juge, comme les militantes, que “les femmes sont leur propre frein. Il faut donc que les équipes en place les sollicitent et leur donnent confiance, qu’elles connaissent leur accès à la formation. Avec la fonte des droits syndicaux et l’investissement personnel à fournir, les femmes craignent ne pas pouvoir faire face, en particulier avec des enfants à charge”. Les solutions : revenir à un périmètre de CSE plus raisonnable en proximité avec les salariés et rehausser des heures de délégation pour tous les élus.

► Selon Christelle Toillon, déléguée nationale CFE-CGC, “quand on pose aux femmes la question de candidater aux élections CSE, elles sont souvent d’accord sur le principe mais ensuite elles se disent qu’elles ne pourront pas s’investir correctement. Pour lever ces freins, on les accompagne, on les forme et on les soutient face à leur hiérarchie dans l’entreprise. Quant aux heures de délégation, qu’on leur laisse déjà poser les heures dont elles disposent”.

► “La première action [pour que les femmes s’inscrivent aux élections CSE], c’est faire en sorte qu’elles aient la certitude que c’est leur place ! Quand on veut s’engager à l’Unsa, on peut venir avec ses problèmes, ses contraintes, ses besoins d’équilibre et on s’arrange. Nous prenons en charge les gardes d’enfant si les réunions se tiennent tard”, indique Laurent Escure, secrétaire général de l’Unsa.

► A Solidaires, la co-déléguée Murielle Guilbert estime que “les obligations de pourcentages de femmes sur les listes de candidats a permis de prendre conscience d’une réflexion à mener. Sur les heures de délégation, il faut en débattre au sein des syndicats, voir si on pourrait étudier un fléchage en faveur des femmes”. (1) L’article L2314-30 du code du travail prévoit que les listes de candidats présentées par les syndicats doivent, au premier et au second tour, comporter alternativement des candidats des deux sexes à proportion de la part d’hommes et de femmes du collège électoral concerné. Cette obligation d’ordre public s’impose par liste et s’applique dans chaque collège sur les listes de titulaires et de suppléants.

Marie-Aude Grimont

Location-gérance : la CFDT attaque Carrefour en justice

12/03/2024

La CFDT a saisi la justice afin de faire condamner Carrefour pour abus de droit dans le passage des magasins en location-gérance, a annoncé hier un communiqué de la fédération CFDT des services. Selon le syndicat, l’enseigne de grande distribution a franchisé ou placé en location-gérance plus de  23 000 salariés sur 300 magasins. “Pour la CFDT, c’est une restructuration déguisée sans réel accompagnement social et dont les effets négatifs se concentrent uniquement sur les salariés” en termes d’avantages sociaux et de rémunération, indique le communiqué. La CFDT dénonce notamment le versement de redevances trop élevées au bénéfice du siège de l’entreprise, et espère obtenir l’interdiction de nouvelles mises en franchise et location gérance. Le phénomène est par ailleurs dénoncé de longue date par Force Ouvrière, premier syndicat du groupe.

Pour mémoire, la location-gérance permet au propriétaire d’accorder à un locataire-gérant le droit d’exploiter librement ce fonds à ses risques et périls moyennant le paiement d’une redevance (articles L.144-1 et suivants du code de commerce).

Source : actuel CSE

CDD Tremplin et travail temporaire adapté : les nouvelles modalités

13/03/2024

Dans son volet handicap, la loi Plein emploi a pérennisé les entreprises adaptées de travail temporaire (EATT) ainsi que les CDD Tremplin, et ce afin de faciliter l’emploi des personnes handicapées dans le milieu ordinaire. Selon quelles règles ? C’est ce qui est fixé par deux décrets publiés dimanche.

Issus de la loi du 18 décembre 2023, dite loi Plein emploi, les articles L.5213-13-2 et L.5213-13-3 du code du travail ont rendu pérennes deux dispositifs créés par la loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018 et qui n’étaient jusqu’alors que des expérimentations. Les CDD Tremplin tout d’abord, c’est-à-dire des contrats à durée déterminée conclus entre une entreprise adaptée (EA) et une personne en situation de handicap et qui offrent à cette dernière un accompagnement individualisé, une expérience professionnelle et le bénéfice d’une formation. Les entreprises adaptées de travail temporaire (EATT) ensuite, qui mettent à disposition à titre onéreux des travailleurs handicapés dans le cadre de contrats de travail temporaire (contrat de mission ou CDI intérimaire). Tirant les conséquences de ces pérennisations, deux décrets du 10 février 2024 en intègrent les mesures d’application dans la partie réglementaire du code du travail. 

Les durées dérogatoires attachées aux CDD Tremplin 

“Pour tenir compte des actions d’accompagnement et de formation professionnelle mises en œuvre ainsi que de la situation du salarié au regard de son projet professionnel”, les CDD Tremplin peuvent déroger aux dispositions du code du travail relatives à la durée des CDD, mais selon des modalités qui devaient être données par décret (article L.5213-13-2 du code du travail).

Le décret n° 2024-99 indique que la durée des CDD Tremplin ne peut être inférieure à quatre mois, renouvelables dans la limite d’une durée totale de 24 mois. A titre dérogatoire toutefois, ils peuvent être renouvelés au-delà de cette limite pour permettre au salarié d’achever une action de formation professionnelle en cours de réalisation à l’échéance du contrat, sans que ce renouvellement ne puisse excéder le terme de l’action concernée. Et à titre exceptionnel, “lorsque des difficultés particulières dont l’absence de prise en charge ferait obstacle à l’insertion durable dans l’emploi pour des salariés âgés de 50 ans et plus”, le CDD Tremplin peut être prolongé par décisions successives d’un an au plus, dans la limite d’une durée totale de 60 mois. Mais dans ce dernier cas, la prolongation ne se fait qu’après avis des organismes en charge du suivi du travailleur handicapé (article R.5213-79 nouveau du code du travail). 

Un nouvel article R.5213-79-1 énonce de son côté que la durée hebdomadaire de travail en CDD Tremplin ne peut en principe être inférieure à 20h (24 en droit commun), mais elle peut encore être réduite si cela est nécessaire à la réalisation du projet d’accès à l’emploi ou de réinsertion professionnelle du salarié. Elle peut varier lors de la période couverte par le contrat, sans dépasser 35h. 

Enfin, contrairement au droit commun, le CDD Tremplin peut être suspendu à la demande du salarié, afin de lui permettre, en accord avec son employeur, d’effectuer une période de mise en situation en milieu professionnel ou une action concourant à son insertion professionnelle. Cette suspension est aussi possible pour accomplir une période d’essai dans le cadre d’une offre d’emploi en CDI ou en CDD d’au moins six mois (article R.5213-79-2 nouveau du code du travail). 

Le contenu du CPOM et l’accompagnement spécifique pour les CDD Tremplin 

Pour être agréée entreprise adaptée, la structure candidate doit signer avec l’État un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM). Le décret n° 2024-99 ajoute à cela le fait que, lorsque l’EA recourt aux CDD Tremplin, les engagements et moyens associés à la mise en œuvre de ces contrats sont prévus par le CPOM et doivent notamment garantir que le projet porté par la structure répond aux besoins des travailleurs en situation de handicap et que celle-ci dispose du personnel et des compétences suffisants (article R.5213-62-1 nouveau du code du travail).  

Le CPOM doit aussi contenir des informations spécifiques et additionnelles lorsque l’EA met en œuvre des CDD Tremplin : 

  • le nombre maximal de postes pouvant être pourvus par le recours à ces contrats ; 
  • les modalités de l’accompagnement renforcé des travailleurs handicapés, notamment en termes d’encadrement, de formation professionnelle et d’accompagnement de leur mobilité vers d’autres employeurs ; 
  • la présentation des moyens mobilisés pour mettre en œuvre cet accompagnement renforcé ; 
  • les engagements en termes d’accès et de retour à l’emploi pris par l’entreprise et les indicateurs destinés à rendre compte des actions menées et des résultats obtenus (article R.5213-64 modifié du code du travail). 

En plus de détailler en quoi consiste l’accompagnement spécifique dont bénéficie l’ensemble des travailleurs handicapés employés dans les EA, le décret indique également que l’accompagnement renforcé, plus intensif, des salariés en CDD Tremplin passe notamment par un recours accru à des mises en situation de travail auprès d’employeurs et à des actions de formation dédiées à la réalisation du projet professionnel (article R.5213-66 modifié du code du travail). 

Les modalités de l’aide financière versée 

Comme pour les autres emplois qu’elles offrent aux travailleurs handicapés, les EA se voient attribuer une aide financière au titre des CDD Tremplin, aide qui contribue à compenser les conséquences du handicap et l’accompagnement renforcé des travailleurs concernés. En application du décret n° 2024-99, celle-ci comprend, comme c’était le cas lors de l’expérimentation, un montant socle et un montant modulé. La valeur maximale du montant socle est fixée dans l’avenant annuel au CPOM et est calculée en multipliant le nombre d’heures de travail prévisionnelles des travailleurs handicapés signataires du CDD par un montant d’aide fixé par arrêté et revalorisé en fonction du Smic. Le montant modulé varie lui de 0 % à 10 % du montant socle. Il est déterminé chaque année par le préfet de région, en tenant compte des caractéristiques des salariés ayant signé le CDD, des réalisations en matière d’accompagnement renforcé et des résultats constatés à la sortie de l’entreprise adaptée. Là où le montant socle est versé mensuellement, le montant modulé l’est en une fois, après réception du bilan annuel d’activité de l’entreprise (article R.5213-76 modifié du code du travail). 

Création et fonctionnement des EATT 

Avec le décret n° 2024-99, une nouvelle sous-section “Entreprises adaptées de travail temporaire” est ajoutée au code du travail. C’est le préfet de région, “en tenant compte des besoins économiques et sociaux et de l’offre existante sur son territoire”, qui peut conclure avec une structure présentant un projet économique et social viable en faveur de l’emploi de travailleurs handicapés un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens valant agrément en qualité d’EATT (article R.5213-86-1 nouveau du code du travail). Sont listées les informations et documents contenus dans ledit CPOM (article R.5213-86-2 nouveau du code du travail) : autorisation de l’autorité administrative et attestation de garantie financière, projet économique et social de la structure, engagements en termes d’accès et de retour à l’emploi durable, etc. 

L’EATT doit mettre en œuvre pour les travailleurs handicapés qu’elle emploie un accompagnement, qui concerne également les périodes qui s’étendent entre ses contrats de mission, accompagnement qui consiste en “un parcours individualisé qui tient compte des besoins et capacités de chaque travailleur handicapé, en lui permettant de développer, en vue de son insertion, ses capacités à agir par lui-même dans son environnement professionnel” (article R.5213-86-3 nouveau du code du travail). 

Quant à l’aide financière attribuée aux EATT, elle est également composée d’un montant socle et d’un montant modulé, fixés selon les mêmes modalités que dans le cadre du CDD Tremplin (article R.5213-86-5 nouveau du code du travail). 

Elise Drutinus

Travailleurs des plateformes : un accord européen entérine la présomption de salariat

13/03/2024

Lundi 11 mars, les ministres de l’emploi et des affaires sociales de l’Union européenne ont confirmé un accord provisoire conclu entre le Parlement et la présidence du Conseil sur un projet de directive réglementant les plateformes numériques de travail. Le texte prévoit l’établissement, dans le système juridique des Etats membres, d’une présomption légale de salariat que les chauffeurs et livreurs indépendants pourront invoquer à l’appui de leurs dossiers de requalification en salariés.

Le communiqué de presse du Conseil de l’UE indique que “les faits en question seront déterminés selon le droit national”. Ainsi, les législations des Etats membres serviront de référence pour la détermination des critères de subordination actant l’existence d’un contrat de travail et le statut de salarié. A noter également que la présomption de salariat étant instaurée, elle bénéficiera aux travailleurs des plateformes, à charge pour ces dernières de prouver l’absence de lien de subordination et le statut d’indépendant. L’accord prévoit également des mesures de transparence des algorithmes de fonctionnement des plateformes.

Une fois les étapes formelles de l’adoption achevées, les États membres disposeront de deux ans pour intégrer les dispositions de la directive dans leur législation nationale, soit d’ici mars 2026.

Source : actuel CSE

S. Binet (CGT) : “Bruno Le Maire n’est ni ministre du travail, ni Premier ministre”

14/03/2024

C’est peu de dire que les déclarations successives du ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, tant sur la simplification et les seuils sociaux que sur une assurance chômage qui devrait à ses yeux être reprise en main par l’Etat , agacent les organisations syndicales, d’autant que la ministre du travail et de la santé, Catherine Vautrin, semble surtout accaparée par ses dossiers santé (et notamment le projet de loi sur l’aide à mourir) et finalement peu présente sur les sujets de l’emploi et du travail.

Hier matin sur France Inter, Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT, a redit l’opposition de son organisation sur tous ces projets, en soulignant qu’un tiers seulement des demandeurs d’emplois sont indemnisés : “Le chômage augmente, et on nous dit qu’il faut encore baisser les droits des privés d’emploi (…) Je dis au gouvernement d’arrêter la guerre aux seniors. Bruno Le Maire n’a pas compris qu’il n’est ni ministre du travail, ni Premier ministre !”

Interrogée au sujet des préavis de grève évoqués par la CGT sur la période des Jeux Olympiques à Paris, la responsable syndicale a lancé : “Il y a une impréparation totale sur toutes les questions sociales liées au Jeux : il a fallu que nous menacions de déposer des préavis de grève pour qu’enfin une table ronde soit organisée mardi 12 mars”.

Par ailleurs, la CGT a réagi à l’accord européen en vue d’une directive entérinant la présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes numériques. Le syndicat y voit une “claque pour E. Macron et les multinationales” et se félicite de ce texte : “En cas de contestation, la charge de la preuve est inversée : il incombera, désormais, aux plateformes de prouver que le travailleur n’est pas salarié (…) Après avoir torpillé par deux fois les négociations, le président Macron – dont on connaît la proximité avec le patronat du secteur depuis les révélations des Uberfiles – n’est pas parvenu à imposer à l’Europe sa lubie de troisième voie, entre le salariat et le travail indépendant”.

La CGT promet d’être vigilante pour que la future directive soit transposée dans le droit national “dans le sens le plus favorable aux travailleurs”. 

Source : actuel CSE

L’Orse publie son édition 2024 du guide sur l’égalité professionnelle

14/03/2024

L’Observatoire de la responsabilité sociétale des entreprises (Orse) publie son édition 2024 du guide “Tout savoir sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes”. 

Ce guide a vocation à accompagner les entreprises “dans une démarche systémique de l’égalité professionnelle, invitant chaque organisation à réviser chaque process RH à l’aune de cet enjeu d’égalité entre les femmes et les hommes qui reste à atteindre”.

L’édition 2024 prend en compte :

  • la loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle dite “Rixain” qui impose désormais une représentation équilibrée (de 40 % minimum) parmi leurs cadres dirigeants et au sein de leur comité exécutif et comité de direction ; 
  • les changements en termes de congés parentaux, dont l’allongement du congé paternité, passé à 28 jours contre 14 auparavant, en comprenant les trois jours du congés de naissance ou d’adoption ; 
  • les évolutions en termes d’indicateurs de suivi (notamment la directive CSRD). 

Source : actuel CSE

Discriminations à l’embauche : la proposition de loi sur les testings vidée de sa substance au Sénat

14/03/2024

Adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, le 6 décembre, la proposition de loi contre les discriminations, déposée par le député Marc Ferracci (Renaissance), a été largement modifiée par la commission des lois du Sénat, le 6 mars, qui a supprimé deux des trois articles principaux.

Concrètement, elle a estimé que la Défenseure des droits était la mieux placée pour s’acquitter des tests individuels. Par conséquent, elle a limité la compétence de la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) à la production de tests statistiques ainsi qu’à la diffusion annuelle de résultats généraux sur l’état des discriminations en France obtenus par cet intermédiaire. Elle a également a supprimé les dispositions créant un comité des parties prenantes et définissant les procédures applicables à la suite d’un test statistique.

Autre retouche : la commission a rejeté l’article 3 qui détaillait la procédure à suivre pour les entreprises en cas de pratiques discriminatoires avérées, arguant qu’elle avait “de faibles chances de succès” et que la logique sous-jacente restait celle de la “sanction”.

Or, “cette approche ignore les nombreuses initiatives, sans doute perfectibles, mais cependant déjà prises par les employeurs en matière de lutte contre les discriminations”. L’objectif visé “peut tout à fait être atteint à droit constant par l’intermédiaire d’un dialogue informel avec les organismes concernés et, au besoin, une saisine de l’inspection du travail”.

La commission des lois a adopté la proposition de loi ainsi modifiée. Elle devait être examinée en séance publique, à partir du 12 mars, au Sénat.

Source : actuel CSE

Simplification des normes pour les entreprises : le Sénat crée un Haut Conseil en charge des “tests PME”

14/03/2024

Les sénateurs ont adopté hier, en commission des lois, une proposition de loi d’Olivier Rietmann (LR), président de la délégation sénatoriale aux entreprises, rendant obligatoires les “tests PME”, une revendication de la CPME.

Une instance, dénommée Haut Conseil à la simplification pour les entreprises, serait ainsi chargée spécifiquement de l’évaluation des normes ayant une incidence sur les entreprises et serait dotée du statut de commission administrative consultative. Par ailleurs, cette instance serait rattachée directement au Premier ministre.

Le président de ce nouveau conseil serait désigné en Conseil des ministres, et notamment chargé d’animer un réseau de correspondants à la simplification dans les administrations centrales.

La commission serait obligatoirement consulté par le gouvernement sur tous les projets de loi, assortis de leur étude d’impact, ayant une incidence sur les entreprises.

Ses avis – rendus publics – comporteraient systématiquement un “test PME”. 

Le texte adopté par la commission sera examiné en séance publique le 19 mars. 

Source : actuel CSE

Congés payés et maladie : le Conseil d’Etat passe au crible le projet du gouvernement

15/03/2024

Dans un avis rendu le 11 mars 2024, le Conseil d’Etat examine le texte gouvernemental visant à compléter le code du travail sur la prise de congés payés en cas de maladie non professionnelle du salarié afin de se mettre en conformité avec le droit européen, après les arrêts rendus par la Cour de cassation le 13 septembre 2023.

Les salariés et les entreprises devraient bientôt être fixés sur les règles applicables aux congés du salarié en cas de maladie après le rappel à l’ordre de la Cour de cassation le 13 septembre dernier qui a écarté le code du travail pour faire directement application du droit européen.

► Rappel : en droit français, selon les règles fixées par l’article L. 3143-3 du code du travail, un salarié atteint d’une maladie non professionnelle ou victime d’un accident de travail n’acquiert pas de jours de congé payé pendant le temps de son arrêt de travail. Or, selon le droit de l’Union européenne (UE), lorsque le salarié ne peut pas travailler en raison de son état de santé, situation indépendante de sa volonté, son absence ne doit pas avoir d’impact sur le calcul de ses droits à congé payé. La Cour de cassation a donc pris acte de ce que ce droit européen devait prévaloir en France.

Si le Conseil constitutionnel n’a rien trouvé à redire sur le droit existant, il n’a pas eu à juger les dispositions par rapport au droit de l’Union européenne. Et le gouvernement n’a pas le choix, il doit se mettre en conformité. C’est dans le cadre du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie et de finances, de transition écologique et de droit pénal, de droit social et en matière agricole que le gouvernement compte déposer un amendement en ce sens.

Le texte, après avoir été adopté par le Sénat le 20 décembre 2023, doit être examiné à l’Assemblée nationale à compter du 18 mars. Si nous ne disposons pas à cette heure du texte du projet d’amendement gouvernemental, l‘avis très nourri du Conseil d’Etat, d’une quinzaine de pages, rendu le 11 mars, nous permet d’en savoir plus sur les intentions du législateur.

Le gouvernement a ainsi posé 7 questions aux Sages de la rue Cambon. 

Limiter l’acquisition de droits à congés payés à quatre semaines par an

Est-il possible d’instaurer un délai maximum de quatre semaines ?

La première question porte sur la possibilité de limiter à quatre semaines les congés acquis au cours d’une absence pour maladie non professionnelle. 

Le Conseil d’Etat y apporte une réponse positive en appréciant la question au regard, d’une part, des exigences relatives à la durée minimale d’un congé annuel et, d’autre part, au regard des principes d’égalité et de non-discrimination. 

S’agissant de la durée minimale des congés payés, le Conseil d’Etat se réfère à la jurisprudence de la CJUE (Cour de justice de l’Union européenne) qui a indiqué qu’accorder des congés supérieurs à quatre semaines “ne [procède] pas à une mise en œuvre de cette directive au sens de l’article 51, paragraphe 1 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union”. Dès lors en conclut le Conseil d’Etat, “le droit de l’Union européenne ne peut être interprété comme imposant des droits à congés payés annuels de plus de quatre semaines”.

S’agissant du principe d’égalité et de non-discrimination, et notamment de la différence introduite entre le salarié absent en raison d’une maladie non professionnelle et les autres salariés, le Conseil d’Etat rappelle la décision récente du Conseil constitutionnel du 8 février 2024, alors saisi de deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), qui à cette occasion a écarté toute atteinte au principe d’égalité. Le Conseil d’Etat renchérit, estimant que le projet d’amendement gouvernemental “ne méconnaît pas le principe constitutionnel d’égalité, ni pour celle qu’il introduit avec les salariés en activité professionnelle ni pour celle qu’il introduit avec les salariés absents en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle”. Par ailleurs, le Conseil d’Etat indique que les dispositions envisagées par le Conseil d’Etat n’entrent pas dans le champ des discriminations interdites par le droit européen. 

En conclusion, le gouvernement peut tout à fait décider de limiter à deux jours ouvrables par mois l’acquisition de congés payés pendant une période de maladie non professionnelle. Il reste toutefois possible de prévoir un mécanisme qui conduirait à l’acquisition de droits à congés payés au-delà de quatre semaines.

Est-il possible de prévoir un effet rétroactif à cette durée limitée à quatre semaines ?

La deuxième question porte sur la possibilité d’appliquer aux situations passées la limite de quatre semaine de congés payés par une disposition législative à effet rétroactif. Afin de répondre à cette question, il convient de distinguer deux périodes.

La première du 25 novembre 1996 au 30 novembre 2009. Cette période correspond au délai courant de la fin du délai de transposition de la directive 93/104/CE auquel se réfère la directive 2033/88/CE – le 25 novembre 1996 – à l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne du 13 décembre 2007 – le 1er décembre 2009 – aux termes duquel la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dont l’article 31 paragraphe 2 qui dispose “que tout travailleur a droit (…) à une période annuelle de congés payés” a acquis la même valeur que les Traités.

Le Conseil d’Etat estime qu’une entrée en vigueur rétroactive ne s’impose pas pour cette période.

La seconde à compter du 1er décembre 2009, date à partir de laquelle tous les travailleurs ont pu invoquer directement à l’égard de leur employeur un droit à congés payés d’au moins quatre semaines par an quand bien même ils auraient été malades au cours de l’année d’acquisition des droits à congés payés. Pendant cette période, la nouvelle législation ne pourrait pas produire d’effets rétroactifs, indique le Conseil d’Etat. En effet, cela méconnaîtrait les stipulations d’effet direct de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Aucune dérogation en faveur du salarié ou en faveur de l’employeur ne peut donc produire d’effet rétroactif avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions.

Le Conseil d’Etat suggère toutefois au gouvernement de compléter son projet d’amendement afin de prévoir, s’agissant des droits à congés non définitivement acquis (qui résultent de périodes de maladie non professionnelle survenues lors de période de référence déjà expirées à la date d’entrée en vigueur de la loi) que le salarié ne se voie reconnaître que le nombre de jours de congés supplémentaires lui permettant, s’il n’a pas déjà atteint au moins 24 jours de congé annuel payé au titre des périodes de travail effectif ou de périodes que la loi y assimilait déjà, d‘atteindre ce nombre sans pouvoir le dépasser.

Prévoir un délai maximum de report 

Le gouvernement souhaite également savoir s’il peut imposer un délai maximum de report des congés acquis avant ou pendant un arrêt maladie et, le cas échéant, la durée de ce report, son point de départ et la possibilité de prévoir deux délais de report différents selon la durée de l’arrêt maladie.

Une chose est sûre : prévoir un délai de report est obligatoire. Le Conseil d’Etat rappelle ainsi que la CJUE interdit à une législation nationale de prévoir l’extinction automatique des droits à congés payés annuels acquis par le salarié à l’issue de la période de référence si le salarié n’a pas été en mesure de les prendre. Dans tous les cas, les Etats membres doivent prévoir une période de report s’agissant des droits acquis antérieurement à une absence pour cause de maladie, ainsi que pour les congés acquis au cours de l’absence du salarié en raison d’une maladie.

Quelle doit être la durée de ce report ?

Le délai de report doit être d’une durée “suffisante”, indique le Conseil d’Etat afin de “permettre au salarié d’échelonner et de planifier l’ensemble de ses congés, lesquels comportent aussi ceux correspondant aux droits qui sont nés pendant son absence pour maladie”.

Est-il possible de prévoir un régime spécifique pour les arrêts maladie de longue durée ?

Le Conseil d’Etat rappelle que la CJUE accorde un régime différent aux salariés absents pour maladie pendant une très longue durée, correspondant à plusieurs périodes de référence consécutives d’acquisition de congés payés. Dans ce cas, elle admet que le report ne peut pas être illimité, car alors cela ne répondrait plus à la finalité du repos des congés payés. “Elle admet que les droits acquis lors d’une absence pour maladie et dont la période de report expire alors que le salarié est encore absent à raison de cette maladie, soient définitivement perdus pour ce dernier, alors même qu’il n’a pas été en mesure de les exercer et que son employeur n’a pu lui fournir, en raison de la suspension de son contrat de travail, aucune information”, indique le Conseil d’Etat.

Attention toutefois, cette exception n’est admise par la CJUE qu’à la condition que la période de report, calculée à partir de la fin de la période de référence, soit substantiellement plus importante que celle-ci”. A titre d’exemple, pour une période de référence d’un an, la CJUE a admis une période de report de 15 mois.

Que prévoit le texte gouvernemental ? 

Le gouvernement, dans son projet d’amendement, envisage deux situations : 

  • celle du report des droits à congés qui n’ont pu être utilisés partiellement ou intégralement pendant la période de prise des congés payés sur une période de 15 mois qui débute à la reprise effective du travail sous réserve que l’employeur en informe le salarié 
  • celle des droits à congés qui naissent pendant des arrêts maladie de longue durée, pour lesquels un même délai de report de 15 mois est prévu mais dont le point de départ se situe à la fin de la période d’acquisition des droits. Les droits à congés expireraient définitivement à l’issue de ce délai même si le salarié est encore absent en raison de sa maladie et que l’employeur n’a pu l’informer de ses droits. 

Quel est l’avis du Conseil d’Etat sur ces dispositions ? 

Le Conseil d’Etat estime que dans le cas où les droits à congés acquis avant l’arrêt maladie et dont la période d’acquisition expire à un moment où le salarié est encore en arrêt maladie : 

  • le début de la période de report doit être postérieur à la date de la reprise du travail ; 
  • ainsi qu’à celle à laquelle l’employeur aura informé le salarié de ses droits à son retour et du délai dont il dispose pour les prendre.

Dans le cas où les droits sont acquis au cours de la période de maladie : 

  • la période de report peut débuter à la fin de la période d’acquisition des droits si le salarié n’a pas repris le travail ;
  • à l’issue de la période de 15 mois les congés s’éteindraient quand bien même l’employeur n’aurait pas pu en informer le salarié. Toutefois, si l’employeur est en mesure de fournir cette information avant que les droits à congés payés n’arrivent à extinction (si le salarié revient dans l’entreprise postérieurement à la fin de la période de référence mais avant la fin de la période de 15 mois) alors le point de départ se situe au jour où l’employeur en a informé le salarié.

Est-il possible d’appliquer de manière rétroactive le délai de report de 15 mois ? 

Le Conseil d’Etat estime qu’il est possible de prévoir une durée maximale de report pour les droits acquis avant et après l’entrée en vigueur de la loi (avec application des règles distinctes selon que l’arrêt maladie est de longue durée ou non). Aucune règle de droit de l’Union européenne ne s’y oppose.

Prescription, forclusion et loi de validation

Quel est le délai de prescription applicable ?

Le Conseil d’Etat rappelle qu’en matière d’indemnité compensatrice de congés payés, la prescription est de trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer. Lorsque le salarié est encore lié à son employeur au moment de sa demande (et demande donc l’exercice de son droit à congés et non une indemnité compensatrice), “la loi pourrait à titre transitoire faire obstacle à ce qu’en cas d’absence d’information du salarié par l’employeur sur l’étendue de ses droits, le point de départ du délai de report des congés antérieurement acquis soit indéfiniment repoussé”.

Le Conseil d’Etat estime “possible de prévoir que l’action du salarié qui est encore dans l’entreprise et qui demande le droit de prendre des congés au titre des dispositions introduites par le droit national par la loi de transposition, soit soumise à un délai de forclusion de deux ans à compter de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives, applicable même en l’absence d’information de l’employeur”. 

S’agissant d’une loi de validation qui viserait à éteindre les contentieux liés à des droits acquis pendant la période postérieure au 1er décembre 2009, le Conseil d’Etat indique qu’une telle loi violerait le droit de l’Union européenne en faisant obstacle à l’application de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Florence Mehrez

Geoffroy de Vitry, haut-commissaire à l’enseignement et à la formation professionnels

15/03/2024

Geoffroy de Vitry a été nommé haut-commissaire à l’enseignement et à la formation professionnels en conseil des ministres, le 13 mars, l’arrêté est paru hier au Journal officiel. Il est titulaire d’un double diplôme, Sciences Po et Hec Paris, le master corporate & public management.

Geoffroy de Vitry a commencé sa carrière comme administrateur à la Commission des finances, à l’Assemblée nationale, en 2015. Il rejoint ensuite le ministère de l’économie, en 2020, comme conseiller chargé des lois financières puis comme directeur adjoint du cabinet du ministère délégué aux comptes publics.

En 2022, il intègre le ministère du travail, comme directeur adjoint du cabinet d’Olivier Dussopt puis devient, en 2023, directeur du cabinet.

Il a été nommé haut-commissaire à l’enseignement et à la formation professionnels, par décret publié le 12 mars au Journal officiel. Il est placé sous la double tutelle de Catherine Vautrin, la ministre du travail, de la santé et des solidarités, et de Nicole Belloubet, la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Il interviendra sur les dossiers de l’ex-ministre déléguée, Carole Grandjean.

Source : actuel CSE

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : élections, formation, gouvernement, justice

15/03/2024

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) cette semaine, du vendredi 8 mars au jeudi 14 mars inclus, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous n’évoquons pas ici les très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, que vous retrouvez dans notre baromètre des branches.

Conseil économique social et environnemental

Égalité hommes femmes et IVG

  • Un arrêté du 27 février 2024 nomme  Anna Cherner-Drieux conseillère diplomatique au cabinet de la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations
  • Loi constitutionnelle n° 2024-200 du 8 mars 2024 relative à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse 

Élections TPE et travailleurs des plateformes

  • Un arrêté du 7 mars 2024 précise les modalités de dépôt et de validation des propagandes électorales pour la mesure en 2024 de l’audience des organisations syndicales dans les entreprises de moins de onze salariés
  • Un arrêté du 7 mars 2024 modifie l’arrêté du 19 janvier 2024 relatif à la liste électorale pour le scrutin destiné à mesurer l’audience des organisations de travailleurs des plateformes

Environnement

  • Un arrêté du 20 février 2024 modifie l’arrêté du 10 avril 2020 relatif aux obligations d’actions de réduction des consommations d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire

Gouvernement

  • Un décret du 6 mars 2024 précise les attributions de la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles
  • Un décret du 6 mars 2024 précise les attributions de la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées
  • Un décret du 6 mars 2024 précise les attributions du ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention
  • Un décret du 11 mars 2024 institue un haut-commissaire à l’enseignement et à la formation professionnels  
  • Un arrêté du 8 mars 2024 nomme Antoine-Mathieu Nicoli directeur adjoint du cabinet du ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention
  • Un arrêté du 11 mars 2024 nomme au cabinet du ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie, Nicolas Chantrenne, conseiller spécial, et Eric Paridimal, conseiller Europe, innovation, filière électronique, industrie du futur.
  • Un arrêté du 13 mars 2024 nomme au cabinet du Premier ministre : Pierre-Calendal Fabre comme conseiller justice (chef de pôle) et Gilles Halbout comme conseiller éducation, jeunesse, enseignement supérieur et sports
  • Un arrêté du 5 mars 2024 nomme Alicia Saoudi conseillère budgétaire au cabinet de la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées
  • Un décret du 13 mars 2024 nomme Geoffroy de Vitry haut-commissaire à l’enseignement et à la formation professionnels

Inondations

  • Un décret n° 2024-213 du 12 mars 2024 modifie le décret n° 2024-086 du 7 février 2024 portant création d’une aide pour les entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques résultant des inondations dans le Nord et le Pas-de-Calais en novembre 2023 et janvier 2024

Justice et prud’hommes

  • Un décret du 6 mars 2024 précise le recouvrement de l’aide juridictionnelle et de l’aide à l’intervention de l’avocat dans les procédures non juridictionnelles
  • Un arrêté du 23 février 2024 modifie l’arrêté du 12 décembre 2023 portant nomination des conseillers prud’hommes pour le mandat prud’homal 2023-2025

Nominations

  • Un arrêté du 1er mars 2024 porte nomination à la commission de France compétences en charge de la certification professionnelle
  • Un arrêté du 4 mars 2024 porte nomination d’administrateurs au conseil d’administration de la Caisse nationale des industries électriques et gazières (représentants CFE-CGC)
  • Un décret du 8 mars 2024 porte nomination de la présidente et de la présidente suppléante du conseil d’administration du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante
  • Un arrêté du 4 mars 2024 porte nomination au conseil d’administration de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (représentants FO et U2P)
  • Un arrêté du 4 mars 2024 porte nomination d’un membre du conseil d’administration de la Caisse nationale d’assurance vieillesse 
  • Un arrêté du 8 mars 2024 porte nomination d’un membre du conseil de la Caisse nationale de l’assurance maladie

Source :actuel CSE

Index égalité professionnelle : seules deux entreprises sur trois peuvent produire une note

15/03/2024

Suite à l’annonce du gouvernement, lors de la journée des droits des femmes, des premières tendances de l’index de l’égalité entre les femmes et les hommes, la Dares (direction des études et de la recherche du ministère du travail) a publié, le jeudi 14 mars, les résultats détaillés de cet index.

La note globale de l’Index s’établit désormais à 87,5 points sur 100. Un chiffre stable par rapport à l’année précédente mais en hausse de 3,6 points depuis 2019. La part des notes inférieures à 75 points se réduit de près de moitié, passant de 14,3 % à 7,7 % sur la période.

Dans le détail, ce sont les grandes entreprises qui sont le mieux classées en décrochant 89,7 points ; seules 1,8 % d’entre elles ont un score inférieur à 75 points. A l’inverse, les structures de 50 à 250 personnes affichent une note de 87, 2 points ; et 9,1 % d’entre elles sont en deçà de 75 points.

Deux indicateurs pèsent particulièrement sur la note finale : il s’agit de l’indicateur 1, relatif aux rémunérations (40 points) et de l’indicateur 5 sur les plus hautes rémunérations (10 points). L’indicateur portant sur le retour de maternité progresse : 14 % obtiennent le score total de 15 points alors que 3 % perdent des points.

A noter toutefois : en 2023, seules deux entreprises sur trois (29 390 structures) peuvent produire une note ; un taux encore plus faible parmi les structures de 50 à 250 salariés (91 %, contre 95 % pour celles de plus de 250 personnes).

Source : actuel CSE

Barème Macron : des effets de substitution entre les licenciements sans cause réelle et sérieuse et les licenciements nuls

15/03/2024

Les derniers rapports d’appels à projet dans le cadre du Comité d’évaluation des ordonnances du 22 septembre 2017 – depuis supprimé – sont publiés. Tel est le cas du rapport de Pierre Cahuc, Stéphane Carcillo, Pauline Carry, Flavien Moreau et Bérengère Patault sur le barème d’indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse (en pièce jointe).

Dans cette étude, les auteurs exploitent une nouvelle base de données obtenue en collectant systématiquement toutes les décisions de cour d’appel du 1er janvier 2006 au 31 juillet 2022, soit 259 608 décisions. En préambule, ils indiquent que “les résultats (…)  doivent être considérés avec précaution en raison de l’aspect temporel des données. En effet, il s’écoule en moyenne quatre années entre la date du licenciement et la date de l’arrêt en appel. Dans certains cas, cette durée peut être très supérieure”. 

Selon ces premiers résultats, les auteurs constatent que, toutes anciennetés confondues, l’indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse a diminué après l’introduction du barème tandis que le montant total des indemnités perçues dans le cadre de ces licenciements n’a pas diminué significativement du fait de la variation des autres indemnités.

Le rapport indique ensuite que “la proportion de demandes de nullité du licenciement a fortement crû entre 2017 et 2018, depuis la mise en place du barème”. Sont ainsi identifiés des effets de substitution entre les licenciements sans cause réelle et sérieuse et les licenciements nuls. “Toutefois ces substitutions semblent tirées par un changement dans les demandes et on ne peut pas distinguer si cela est associé également à un changement dans les comportements des juges”, analysent les auteurs.

Les demandes de licenciements nuls ont crû surtout pour les salariés dont l’ancienneté était inférieure à cinq ans au moment du licenciement ce qui a peut être “permis de contourner le barème pour les anciennetés d’au plus cinq années pour lesquelles le barème est particulièrement contraignant”. En effet constatent les auteurs du rapport, “ce phénomène ne s’observe pas pour les anciennetés supérieures…”.

Le rapport constate également une baisse de la dispersion des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que ce soit pour les travailleurs à faible ancienneté comme pour ceux ayant une ancienneté élevée. En revanche, la dispersion des indemnités totales obtenues pour l’ensemble des licenciements nuls et sans cause réelle sérieuse a augmenté après la réforme pour les personnes licenciées avec cinq années d’ancienneté au plus et a diminué pour les travailleurs avec plus de cinq ans d’ancienneté.

Pour les travailleurs à faible ancienneté, l’accroissement de la dispersion des indemnités totales semble résulter de deux mécanismes : 

  • un accroissement de la proportion de licenciements nuls pour le anciennetés de cinq ans au plus ; 
  • des montants d’indemnisation nettement supérieurs pour les licenciements nuls comparés à ceux des licenciements sans cause réelle et sérieuse. 

► Sur cette question, voir aussi l’étude de Raphaël Dalmasso, maître de conférences en droit à l’université de Lorraine, et Camille Signoretto, maître de conférences en économie à l’université de Paris

Source : actuel CSE