Le gouvernement modifie le mode de calcul du montant net social
04/09/2023
Issu d’un arrêté du 31 janvier 2023, le montant net social figure depuis le 1er juillet sur tous les bulletins de paie. Pendant du net fiscal, il représente le montant des revenus pris en compte pour le calcul de certaines prestations sociales, dans une perspective de lutte contre le non-recours aux prestations. Il est censé améliorer l’information des salariés sur les ressources à déclarer pour bénéficier de leurs droits.
Problème : le mode de calcul inclut désormais des sommes qui augmentent l’assiette des revenus donnant droit (ou pas) aux prestations. Selon Force Ouvrière, “la mise en œuvre du montant net social aura pour principale conséquence de baisser, voire de supprimer dans certains cas, les allocations des bénéficiaires du RSA et de la prime d’activité”.
Le calcul intègre notamment de nouveaux éléments non soumis à l’impôt sur le revenu, comme la part salariale au financement des tickets restaurant, l’ensemble des cotisations à la protection sociale complémentaire (hors “frais de santé”), la participation des employeurs aux chèques-vacances et au financement des services à la personne. Des ajouts qui peuvent faire gonfler d’environ 100 € la base de ressources prises en compte pour calculer le droit des allocataires.
Selon Éric Gautron, secrétaire confédéral FO en charge de la protection sociale, “cette évolution se situe dans le projet global de la solidarité à la source. De nouvelles prestations pourraient être à terme concernées. Plus de personnes seront allocataires mais elles seront moins bien indemnisées”. Certains allocataires pourraient voire leurs indemnités baisser, voire être privés de leurs prestations.
Sur son document de questions-réponses, le ministère du travail liste dans un tableau les éléments pris en compte dans le calcul. On y retrouve bien la participation des employeurs aux chèques-vacances ou la protection sociale complémentaire, mais le texte précise qu’il s’agit d’une liste “non exhaustive”…
Source : actuel CSE
Agirc-Arrco : deuxième réunion de négociation aujourd’hui
05/09/2023
Les partenaires sociaux se retrouvent ce matin, au siège du Medef à Paris, pour leur deuxième réunion de négociation paritaire relative au régime de retraites complémentaires de l’Agirc-Arrco (la première s’est tenue le 11 juillet dernier). Des réunions justifiées par la nécessaire négociation quadriennale de l’accord national interprofessionnel de 2019. Le nouvel accord fixera donc les orientations des retraites complémentaires des salariés du privé pour les quatre années à venir.
Nul doute que les syndicats aborderont l’épineuse question de la préservation des réserves du régime (68 milliards d’euros), une manne financière que l’État pourrait tenter de capter à son profit, comme celles de l’Unedic. Autres sujets sur la table, l’adaptation du régime à la dernière réforme des retraites qui a porté l’âge légal de départ à 64 ans et la durée de cotisation à 43 annuités. Il pourrait par exemple être question d’ouvrir des droits à retraite complémentaire en cas de cumul emploi-retraite. Valeur du point et bonus-malus en fonction de l’âge de départ seront donc aussi au menu des discussions. Les partenaires sociaux sont en principe tenus d’aboutir à un accord d’ici début octobre.
Source : actuel CSE
Comprendre le nouveau régime social des indemnités de rupture conventionnelle
08/09/2023
Réduire le nombre des ruptures conventionnelles individuelles des seniors : c’est l’objectif du nouveau régime social qui s’applique à ces indemnités depuis le 1er septembre, celui sur les indemnités de mise à la retraite étant aussi modifié. Explications.
La loi de financement de la Sécurité sociale (LFRSS) du 14 avril 2023 prévoit l’allongement de la durée de cotisation pour une retraite à taux plein (jusqu’à 43 ans) et le report à 64 ans (à partir de la génération 1968) de l’âge légal de départ à la retraite. Ce texte comporte aussi une disposition modifiant le régime social de l’indemnité versée au salarié ayant signé avec son employeur une rupture conventionnelle.
Qu’est-ce que la rupture conventionnelle ?
C’est un mode de rupture du contrat de travail, plus “souple” que le licenciement. Le salarié et l’employeur conviennent de se séparer par accord, moyennant le versement d’une indemnité de rupture au moins égale à l’indemnité de licenciement. Avantage par rapport au licenciement : la rupture est supposée être moins brutale car négociée, et, pour l’employeur, elle n’a pas à être justifiée par un motif, même si l’administration la contrôle en l’homologuant. Avantage par rapport à la démission : le salarié conserve un droit à l’assurance chômage.
Il existe aussi une rupture conventionnelle collective (RCC) : l’employeur et les organisations syndicales peuvent négocier un accord prévoyant plusieurs ruptures conventionnelles. Notons tout de suite que cet article n’évoque pas cette RCC qui fait souvent débat, car le régime social des RCC n’est pas modifié.
Où est le problème ?
Cette disposition est victime de son succès : ce mode de rupture à l’amiable connaît une forte hausse, notamment pour les plus de 50 ans (+3% de ruptures conventionnelles en 2019 et 2020 et +4% en 2021 selon la Dares, le service statistiques du ministère du travail). Au moment où le gouvernement justifie sa réforme de retraite par la nécessité d’avoir davantage d’actifs et donc davantage de travailleurs seniors en emploi, cela fait mauvais genre. L’exécutif a donc estimé nécessaire de revoir le régime social des indemnités de rupture afin de le rendre moins “attractif” pour les entreprises et les salariés âgés.
Le gouvernement juge en effet que le régime qui s’applique à la rupture conventionnelle individuelle intervenant avant l’âge légal de la retraite incitait les employeurs à se séparer de leurs salariés seniors.
Quel est l’objectif ?
Plus on est âgé, plus le taux d’emploi est faible en France, même s’il a progressé ces dernières années selon la Dares.
En effet, alors que les 25-49 ans sont très majoritairement en emploi (81,8%), cette part baisse à 75% pour les 55-59 ans et à 35,5% pour les 60-64 ans. Le gouvernement fait donc le pari qu’en taxant davantage les ruptures conventionnelles intervenant avant l’âge légal de départ à la retraite, il va mécaniquement faire diminuer leur nombre et donc faire progresser le taux d’emploi des séniors. Au passage, dans un contexte budgétaire difficile, il s’assure de nouvelles recettes, estimées entre 200 et 250 millions d’euros.
Quel était le régime ?
La modification s’attaque à une différence de traitement concernant les prélèvements sociaux et fiscaux de l’indemnité de rupture conventionnelle.
Jusqu’alors, tout dépendait si le salarié était ou non en mesure de bénéficier d’une pension de retraite à la date de sa rupture. Si c’était le cas, l’indemnité était intégralement imposable et également assujettie aux cotisations sociales et à la CSG/CRDS (mais le forfait social n’était pas applicable).
Si le salarié n’était pas dans cette situation, l’indemnité était fiscalement et socialement très avantageuse (voir notre tableau).
Qu’est-ce qui change ?
Depuis le 1er septembre (voir notre tableau ci-dessous), toutes les indemnités de rupture conventionnelle individuelle ont le même régime social. La distinction selon que le salarié est ou non en âge de partir à la retraite ne joue plus.
► L’indemnité de rupture est donc soumise à une contribution patronale spécifique au taux de 30% (art. L. 137-12 du code de la sécurité sociale). Cela représente une hausse de 10 points (par rapport au forfait social de 20% qui s’appliquait auparavant) pour les ruptures conventionnelles de salariés n’ayant pas atteint l’âge légal de la retraite.
Ce prélèvement s’applique aussi à l’indemnité versée lors de la mise à la retraite d’un salarié à l’initiative de l’employeur, ce qui à l’inverse représente une baisse de 20 points pour l’employeur. Autrement dit, l’employeur n’a plus intérêt à choisir une rupture conventionnelle plutôt qu’une mise à la retraite.
► L’indemnité de rupture est exonérée de cotisations sociales jusqu’à 2 fois le Pass, le plafond annuel de la Sécurité sociale (soit 87 984€ en 2023).
Attention, l’indemnité de rupture conventionnelle versée à un salarié en droit de bénéficier d’une pension de retraite est soumise intégralement à l’impôt sur le revenu. Ce n’est pas le cas (dans la limite de 6 plafonds annuels de la sécurité sociale) pour les salariés qui n’ont pas atteint l’âge de départ à la retraite.
Quels effets ?
Ces changements alourdissent le coût des ruptures conventionnelles individuelles. Cela dissuadera-t-il les entreprises d’y recourir pour les seniors ? A suivre…
(1) La contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) sont prélevées sur les revenus d’activité (comme les salaires) et de remplacement (allocations chômage, indemnités maladie) et elles s’appliquent aussi aux revenus du patrimoine et du capital.
Bernard Domergue, avec la rédaction sociale
Réserves Agirc-Arrco : tout est une question de flux…
08/09/2023
Les partenaires sociaux se sont réunis le 6 septembre pour leur deuxième séance de négociation sur l’Agirc-Arrco. S’ils se sont montrés rassurants sur la préservation des réserves de l’organisme qui gère les retraites complémentaires, il se pourrait que l’Etat parvienne tout de même à capter quelques milliards d’euros. Les réserves de l’Agirc-Arrco se portent aujourd’hui à plus de 68 milliards d’euros. Ce sont ses réserves “de stock”, elles lui appartiennent. L’État s’intéresserait cependant à des réserves “de flux”, à savoir les montants annuels supplémentaires générés par les effets de la réforme des retraites (l’allongement progressif de l’âge légal de départ à 64 ans et de la durée de cotisation à 43 annuités). Cela représente pour l’instant 22 milliards d’euros. Mais il y a encore un “hic” : il n’existe pas de “tuyau financier”, de canal de transit pour récupérer ces sommes. Il se pourrait donc que l’État pratique “un swap de taux”, à savoir une réduction de la CSG dirigée vers l’Agirc Arrco au profit d’une hausse de la CSG dirigée vers l’État.
Source : actuel CSE