Inspection du travail : l’Igas recommande d’étendre le champ des amendes administratives, notamment pour les infractions en santé-sécurité

22/04/2025

L’inspection générale des affaires sociales (Igas) analyse dans un rapport la mise en œuvre des nouveaux pouvoirs donnés en 2016 à l’inspection du travail. Elle déplore qu’ils soient globalement “très peu utilisés”. Seules les amendes administratives “ont connu un développement encourageant au cours des dernières années”, et pourraient donc voir leur champ d’application s’élargir, par exemple pour venir sanctionner l’absence de DUERP.

Extension des décisions d’arrêt de travaux et d’activité à de nouveaux risques et secteurs d’activité, renforcement des mesures de protection de la santé et de la sécurité des mineurs, élargissement du champ des amendes administratives et possibilité nouvelle de faire des transactions pénales : ces quatre nouveaux super-pouvoirs donnés en 2016 aux agents de l’inspection du travail par l’ordonnance n° 2016-413  du 7 avril 2016 sont “très peu utilis[és]”, constate l’Igas dans un rapport publié le 11 avril 2025. De plus, il y a une “forte hétérogénéité” territoriale. 

En 2023, seuls 11 arrêts d’activité, 2 retraits d’affectation de mineurs à certains travaux, 223 propositions de transactions ainsi que 1 756 décisions d’amendes administratives ont été saisis dans le système d’information utilisé par l’inspection du travail. “Au total, est-il précisé, ces mesures constituent à peine un peu plus de 1 % des suites à intervention.” La plupart du temps, c’est-à-dire dans 70 % des cas, les inspecteurs et inspectrices adressent des “lettres d’observation” aux employeurs. “Ce qui reflète bien la prévalence d’une posture pédagogique ‘d’accompagnement’ vis-à-vis des entreprises”, commentent les auteurs du rapport.  

Seules les amendes administratives “ont connu un développement encourageant au cours des dernières années”. Si le nombre de décisions “semble stagner depuis 2021”, le montant des amendes est en augmentation. En 2023, le montant moyen des amendes notifiées dans le système d’information de l’inspection était de 8.140 euros, en augmentation de 22 % par rapport à l’année précédente. Les infractions à la durée du travail sont les plus fortement sanctionnées financièrement en montant total.  

Garder les ingénieurs de prévention 

Qu’est-ce qui explique ces difficultés d’appropriation ? Pour les arrêts d’activité, les inspecteurs ont, en répondant aux questionnaires soumis par l’Igas et lors d’entretiens, pointé “des lourdeurs de procédure et la nécessité de mobiliser des compétences techniques”. Si la règlementation concernant l’amiante, désormais assez ancienne, est relativement bien maîtrisée, celle sur les agents CMR (cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction) l’est beaucoup moins.  

“La mobilisation des compétences internes, et tout particulièrement celle des ingénieurs de prévention apparaît souvent nécessaire, voire indispensable, dans le cas des ‘nouveaux risques’ qui exigent une expertise technique, y compris en matière d’équipements de travail”, plaide l’Igas, recommandant leur maintien, en plus de “la réactivation des réseaux des risques particuliers dans les DDETS(-PP)” (Ndlr : DDETS : directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités ; PP : protection des populations).

Où sont les mineurs ?  

L’ordonnance de 2016 a créé trois procédures d’urgence pour renforcer la protection des jeunes travailleurs de moins de 18 ans. L’une est à la main des agents de contrôle : le retrait d’affectation à certains travaux. Les deux autres nécessitent une décision du Dreets (directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) sur proposition de l’agent de contrôle : la suspension et la rupture du contrat de travail ou de la convention de stage. 

Là encore, les agents relèvent la complexité des règles applicables pour expliquer qu’ils utilisent peu ce pouvoir, “mais c’est en premier lieu l’identification de leurs lieux de travail ou de stage et donc le ciblage des contrôles qui pose question”, disent-ils. L’Igas recommande d'”assurer au système d’inspection du travail, un accès aux données des DSN (déclarations sociales nominatives) permettant d’identifier, sur une base départementale, les établissements employant des travailleurs mineurs”.  

Vers de nouvelles amendes administratives ?  

La mission de l’Igas a relevé des délais d’instruction très longs (7,8 mois en moyenne et même supérieur à un an pour 3 régions) pour les amendes administratives, ce qui fait partie des freins pour certains agents. Autre “critique récurrente” : la “nécessité d’établir des rapports détaillés, y compris pour des manquements simples”.  

Les inspecteurs des affaires sociales préconisent “de mettre à disposition des agents de contrôle un rapport-type simplifié pour les infractions au code du travail les plus simples”, et d’établir deux référentiels, l’un permettant une “mise en commun des bonnes pratiques” pour le processus d’instruction, l’autre “indiquant une typologie des infractions par niveau de gravité, et y associant des fourchettes indicatives du montant des amendes”.  

Reprenant une requête “fréquemment revenue dans l’ensemble des réponses recueillies” auprès des inspecteurs et inspectrices du travail, la mission recommande d’étendre le champ des amendes administratives à “toutes les infractions contraventionnelles, notamment dans le champ de la santé et de la sécurité au travail”. Cela pourrait par exemple venir sanctionner l’absence de DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels), ou un DUERP non actualisé, l’absence d’adhésion à un service de santé au travail interprofessionnel, ou encore des manquements aux obligations d’affichage. 

Transactions pénales à la peine 

Lors de la réforme de 2014 et au cours du processus d’adoption de l’ordonnance de 2016, les transactions pénales étaient vues comme une “dépénalisation du droit du travail”. “On constate, près de 10 ans après l’entrée en vigueur de l’ordonnance, que la critique a quasiment disparu”, écrit l’Igas. Pourtant, ces pouvoirs sont faiblement utilisés.  

“Cette procédure ne paraît pas poser de question de principe mais plutôt de pratique professionnelle, particulièrement dans la relation transactionnelle avec les entreprises (lourdeurs dans le traitement interne de la procédure, notamment lors de la phase de négociation, difficulté à fixer le montant des amendes)”, explique la mission, pointant “la mobilisation variable des Parquets”. Sa recommandation : que la Chancellerie et le ministère du travail définissent dans une circulaire conjointe “les objectifs partagés et les priorités d’une politique pénale en droit du travail”.  

Les transactions pénales concernent principalement la santé et la sécurité au travail : absence de protections collectives sur les chantiers, non-respect des normes de sécurité pour les échafaudages et équipements, risques liés à l’amiante, mais aussi défauts de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé. Les accidents du travail, en particulier les chutes de hauteur, sont signalés comme thème récurrent des procès-verbaux qui vont donner lieu à une transaction pénale.  

Formation et échanges sur les pratiques  

De façon globale, l’Igas constate un niveau de formation “insuffisant” sur les nouveaux pouvoirs de l’inspection. Elle note par exemple que la formation “amendes administratives a disparu”. En plus de “rendre obligatoire la formation continue des agents de contrôle portant sur la mobilisation de leurs pouvoirs de contrôle”, les auteurs du rapport formulent une recommandation “d’augmentation de l’offre”.  

Les agents de l’inspection du travail devraient aussi pouvoir plus facilement accéder “aux documents supports et référentiels d’accompagnement”, qui sont “nombreux et de qualité”. Enfin, au sein des unités de contrôle, les échanges sur les pratiques professionnelles pourraient être plus fréquents.  

Élodie Touret

L’Anact lance une consultation nationale sur le thème : “Parler du travail, c’est productif”

22/04/2025

En vue de la semaine de la 22e semaine de la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) qui se déroulera du 16 au 20 juin 2025, l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) lance une consultation nationale en ligne sur le thème : “Parler du travail, c’est productif !”

Cette consultation s’adresse aux salariés, manageurs, employeurs, représentants du personnel d’organisations privées ou publiques. Elle vise à recueillir leur perception sur la façon dont ils traitent les questions de travail dans leur entreprise. Elle est en ligne jusqu’au 9 mai 2025. Cinq minutes suffisent pour y répondre. 

Les résultats seront dévoilés le 16 juin.

Source : actuel CSE

AT/MP : un décret précise la date d’imputation sur le compte employeur d’un accident mortel

23/04/2025

Un décret du 15 avril 2025 modifie les règles de tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles mortels des assurés du régime général de sécurité sociale. 

Il est désormais précisé que pour le calcul de la valeur du risque d’un établissement pour le calcul de son taux AT/MP, l’imputation par la Carsat du coût d’un AT/MP mortel au compte de l’employeur s’effectue à la date de la notification de la reconnaissance du caractère professionnel du décès.

Cette règle s’applique à compter du 17 avril 2025.

Source : actuel CSE

Suivi médical : une “attestation d’absence de contre-indications” au lieu du SIR pour certains travailleurs

24/04/2025

À compter du 1er octobre 2025, les travailleurs affectés à un poste “pouvant nécessiter une autorisation de conduite [un Caces, généralement : Certificat d’Aptitude à la Conduite En Sécurité] ou une habilitation électrique” ne feront plus partie de ceux bénéficiant d’un suivi individuel renforcé par le service de santé au travail. C’est le sens du décret du 18 avril 2025, publié au Journal officiel du 19 avril.

L’objectif est d’”optimiser les ressources médicales et de les redéployer sur le suivi des salariés affectés à des postes présentant un risque particulier, ainsi que sur les actions de prévention primaire vers lesquelles les missions des SPST (services de prévention et de santé au travail) ont été orientées par la réforme [de 2021]”. 

Le décret introduit une nouvelle “attestation” dont le modèle devra être défini par un arrêté. Pour qu’une autorisation de conduite soit valide, il faudra, à compter du 1er octobre 2025, qu’elle soit couplée à une “attestation” délivrée par le médecin du travail “à l’issue d’un examen médical qu’il réalise”, indiquant que le travailleur “ne présente pas de contre-indications médicales à la conduite du ou des équipements dont la conduite est autorisée”.  

Pour les travailleurs qui doivent avoir une habilitation électrique, le décret ne prévoit cette attestation “d’absence de contre-indications médicales” que pour les travaux sous tension et pour les “opérations au voisinage de pièces nues sous tension”. 

Cette attestation est valable pendant cinq ans. L’employeur en conserve une copie pendant toute sa durée de validité. Le médecin du travail verse une copie de l’attestation au DMST (dossier médical en santé au travail). S’il refuse de la délivrer, l’employeur ou le salarié peuvent se tourner vers le CPH (conseil des prud’hommes) pour contester.  

À titre transitoire, pour les travailleurs qui auront besoin de la nouvelle attestation, il est prévu que les avis d’aptitude délivrés au titre du SIR tiennent lieu, pendant cinq ans à compter de leur délivrance, de l’attestation.

Source : actuel CSE