SYNDICAT

Désignation du DS parmi les adhérents : seule compte la renonciation des candidats ayant obtenu 10% des suffrages

11/04/2023

Un syndicat représentatif peut désigner un adhérent comme délégué syndical si les candidats qu’il a présentés renoncent au droit d’être désigné. La Cour de cassation précise que cette renonciation ne concerne que les candidats ayant obtenu 10 % des suffrages à titre personnel lors des élections professionnelles.

Le délégué syndical (DS) doit être choisi par l’organisation syndicale représentative parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés dans son collège au premier tour des dernières élections au CSE, quel que soit le nombre de votants (C. trav., art. L. 2143-3). S’il est impossible de déroger à cette règle d’ordre public, il apparaît souvent difficile de trouver des salariés qui acceptent le mandat de délégué syndical. C’est pourquoi, l’alinéa 2 de l’article L. 2143-3 prévoit la possibilité de désigner un adhérent, qui n’est pas un candidat aux élections dans certains cas, notamment en cas de renonciation au droit d’être désigné par « l’ensemble des élus qui remplissent les conditions ». La Cour de cassation s’est emparée de cette question, et sa jurisprudence est abondante.

Dans cet arrêt du 5 avril 2023, la chambre sociale apporte une précision : cette renonciation n’est obligatoire que pour les candidats présentés par le syndicat ayant recueilli au moins 10% des suffrages exprimés.

Désignation d’un adhérent en remplacement de son DS par un syndicat représentatif

Dans cette affaire, un syndicat représentatif désigne un de ses adhérents en remplacement de son DS. L’employeur conteste au motif que la désignation d’un adhérent est subordonnée à la condition que tous les candidats présentés par le syndicat aux dernières élections professionnelles aient préalablement renoncé par écrit à leur droit d’être désigné délégué syndical. Or, si le syndicat justifiait bien de la renonciation écrite des candidats ayant obtenu au moins 10 %, ce n’était pas le cas d’un candidat n’ayant pas obtenu 10 %. Pour ce dernier, le syndicat fournit une attestation de renonciation au mandat postérieure à la désignation litigieuse. Pour l’employeur, une telle attestation ne constitue pas une renonciation écrite préalable à la désignation, et ne peut donc régulariser cette dernière. 

► La Cour de cassation a en effet précisé que la renonciation écrite doit être préalable à la désignation de l’adhérent comme DS (Cass. soc., 9 juin 2021, n° 19-24.678).

Renonciation des seuls candidats ayant obtenu au moins 10 % des suffrages

Le tribunal judiciaire et la Cour de cassation ne sont pas d’accord et la désignation de l’adhérent est validée. Les juges rappellent tout d’abord les dispositions du code du travail. Ainsi, « l’article L.2143-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, fait obligation au syndicat représentatif qui désigne un délégué syndical de le choisir parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique. Aux termes du deuxième alinéa de ce texte, si aucun des candidats présentés par l’organisation syndicale aux élections professionnelles ne remplit les conditions mentionnées au premier  alinéa de ce texte, ou s’il ne reste, dans l’entreprise ou l’établissement, plus aucun candidat aux élections professionnelles qui remplit ces conditions, ou si l’ensemble des élus qui remplissent les conditions mentionnées audit premier alinéa renoncent par écrit à leur droit d’être désigné délégué syndical, le syndicat peut désigner un délégué syndical parmi les autres candidats ou, à défaut, parmi ses adhérents au sein de l’entreprise ou de l’établissement ou parmi ses anciens élus ayant atteint la limite de durée d’exercice du mandat au comité social et économique fixée au deuxième alinéa de l’article L. 2314-33 ».

Ainsi, en conclut la chambre sociale, il résulte des dispositions de l’article L. 2143-3, alinéa2 du code du travail « que la renonciation au droit d’être désigné délégué syndical, est celle des candidats présentés par l’organisation syndicale aux dernières élections professionnelles ayant recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés ».

La Cour de cassation confirme ainsi sa jurisprudence à ce sujet : la renonciation est celle des candidats présentés par l’organisation syndicale, il n’est donc pas obligatoire de proposer le mandat aux candidats ayant obtenu au moins 10 % présentés sur d’autres listes syndicales, même si cela est possible (Cass. soc., 23 févr. 2013, n° 12-15.807 ; Cass. soc.,8 juill. 2020, n° 19-14.605). Mais elle apporte une précision concernant la renonciation des candidats de l’organisation syndicale en cause : la renonciation écrite préalable n’est exigée que des candidats ayant obtenu au moins 10 % des suffrages.

► Il demeurait en effet un doute à ce sujet, suite à l’arrêt du 8 juillet 2020. La Cour de cassation avait précisé que, eu égard aux travaux préparatoires à la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, l’exception prévue à l’alinéa 2 de l’article L. 2143-3 du code du travail « doit être interprétée en ce sens que lorsque tous les élus ou tous les candidats qu’elle a présentés aux dernières élections professionnelles ont renoncé à être désignés délégué syndical, l’organisation syndicale peut désigner comme délégué syndical l’un de ses adhérents au sein de l’entreprise ou de l’établissement ou l’un de ses anciens élus ayant atteint la limite de trois mandats successifs au CSE ». Ainsi, la renonciation est exigée non seulement des élus, mais aussi des candidats présentés par le syndicat. En précisant que, parmi ses candidats, seuls ceux ayant obtenu au moins 10 % des suffrages sont concernés par cette renonciation écrite préalable, la Cour de cassation tranche le doute résultant de la formulation de sa décision de 2020.

Et dans cette affaire, la Cour de cassation constate que « sur les dix candidats présentés par le syndicat aux élections professionnelles, cinq candidats avaient été désignés en qualité de délégué syndical et que, parmi les cinq autres, les deux seuls candidats ayant obtenu au moins 10 % des suffrages avaient renoncé à leur droit d’être désignés délégué syndical ». Le syndicat avait donc valablement désigné l’un de ses adhérents en qualité de délégué syndical.

Séverine Baudouin

La contestation sur les retraites redore le blason des syndicats selon un sondage

11/04/2023

La contestation de la réforme des retraites aurait-elle un effet bénéfique sur l’image des syndicats ? C’est ce que pointe un sondage Elabe publié jeudi 6 avril pour le quotidien économique Les Echos. 52 % des Français (au lieu de 40 % en 2020) considèrent désormais que les syndicats de salariés sont plutôt un élément de dialogue de la société française. Leur action est jugée particulièrement efficace au sein des entreprises par 55 % des répondants. C’est la CGT tire le mieux son épingle du jeu : 29 % des sondés lui font confiance pour améliorer la situation des salariés (en hausse de 8 % par rapport en 2020). La CFDT recueille elle aussi 29 % des suffrages mais ne progresse que de 3 points parrapport à 2020. Force Ouvrière augmente son score de 2 points, à hauteur de 16 %. La CFTC est citée par 10 % des gens (+2 points), Sud obtient 8 % (+2 points), l’Unsa 5 % (-1 point) et la CFE-CGC 5 % également (-1 point). Rappelons que les syndicats enregistrent depuis le début du mouvement social sur les retraites un nombre supplémentaire d’adhésions.

Les Français sont plus sévères en ce qui concerne l’efficacité des syndicats au niveau national, puisque 64 % des sondés jugent les syndicats inefficaces à ce titre. Ils considèrent à 76 % que les manifestations violentes ne sont pas efficaces pour influer les décisions politiques. Les manifestations traditionnelles sont vues comme efficaces pour 56 % des répondants.  “L’opinion est beaucoup plus partagée concernant les grèves (51% pas efficaces, 48% efficaces)”, indique l’institut Elabe (lire sur leur site les résultats complets).

Source : actuel CSE

Gilles Lécuelle, ex-secrétaire national CFE-CGC : “Le syndicalisme, c’est de la relation humaine”

12/04/2023

Gilles Lécuelle a rendu ses mandats lors du 38ème congrès de la CFE-CGC, organisé fin mars à Tours. Il revient sur son engagement syndical et ses 27 années de militantisme. Interview.

Comment avez-vous vécu ce congrès ?

D’une manière très particulière puisque c’était le dernier ! Au-delà de ça, je l’ai trouvé très bien organisé et je veux saluer le travail des équipes qui ont su rendre dynamique un rapport d’activité qui ne l’est pas toujours. Là, c’était vraiment vivant et plaisant. Les films synthétiques donnant la parole à chaque secrétaire national ont montré tout le travail effectué.

Pas trop d’émotion au moment de rendre vos mandats ?

Il y a toujours de l’émotion : ce sont des moments clés d’une vie ! L’émotion aussi de quitter des amis fidèles, en particulier François Hommeril (Ndlr : qui reste président de la CFE-CGC), “un compagnon de route depuis plus de 20 ans ” comme il l’a dit dans son discours. J’ai partagé tant de bons moments avec lui, tant de difficultés, tant de convivialité et puis tant de travail ! J’ai l’impression de quitter quelqu’un avec qui je partageais beaucoup de choses, beaucoup de valeurs. Je disais toujours que l’un pouvait commencer une phrase et l’autre la finir !

Pourquoi cette décision de quitter la maison alors ?

A cause de la fatigue des déplacements. Je suis jurassien donc je passe plus 2 heures et demi de route par semaine pour venir à Paris, du lundi au vendredi, en laissant derrière moi la petite famille qui grandit trop vite…

Je n’ai pas l’impression d’avoir travaillé ces sept dernières années 

C’est donc un choix du cœur. J’aurais bien aimé continuer pour un troisième mandat si j’avais été parisien car je n’ai pas l’impression d’avoir travaillé ces sept dernières années. Le partage était tellement riche avec les élus et les salariés de la confédération ! On a une équipe d’une très grande qualité dans les services techniques, juridiques, communication. C’est vraiment du relationnel qu’on aime vivre au quotidien.

Vous êtes adhérent depuis 1996. Pourquoi avoir choisi la CFE-CGC ?

Elle correspondait à mes valeurs. Avant d’adhérer, je votais déjà CFE-CGC. J’étais sympathisant et je partageais ses idées : défendre l’encadrement mais pas que les cadres, car à l’origine, je suis agent de maîtrise.

 35 ans chez Solvay

 Je suis arrivé chez Solvay, à Tavaux, dans le Jura, avec un DUT de génie électrique, après avoir fait un peu d’enseignement. J’y suis resté 35 ans, dont 27 ans de militantisme.

En quoi consistait votre fonction d’agent de maîtrise concrètement ?

J’ai été embauché comme acheteur de matériel technique, en automatisme et électricité. J’ai acheté les premiers systèmes numériques de contrôle-commande en 1988, au début de l’automatisation des chaînes de production.  Solvay cherchait un technicien pour répondre aux acheteurs qui vendaient de la technique très spécialisée.

En quelle année devenez-vous délégué syndical chez Solvay ? Quel a été le déclic ?

Je suis devenu DS en mars 1996, huit ans après mon embauche. Le déclic, c’est qu’on est venu me chercher ! Un sondage dit que 80 % des gens ne sont pas syndiqués parce qu’on ne leur a jamais proposé. C’est tellement vrai ! 

 J’ai été DP, élu au CE puis au CHSCT

A l’époque, je ne connaissais pas le délégué syndical central de la CFE-CGC. Il m’a proposé de le rejoindre car il partait en retraite en 2006 et il voulait me former pendant dix ans avant de lui succéder. J’ai eu un parcours d’une qualité exceptionnelle : délégué du personnel, puis élu au comité d’entreprise puis au CHSCT. Enfin, on m’a laissé mener les négociations paritaires sous la responsabilité d’un ancien.

Comment êtes-vous devenu responsable de la branche chimie ?

J’ai intégré la délégation en 1999 au moment des trente-cinq heures, en suivant un collègue de Solvay qui en faisait déjà partie et qui me disait que c’était très intéressant. Ensuite, en 2003, le représentant de la branche est tombé malade. Le président de la fédération de l’époque m’a invité dans son bureau à une réunion préparatoire. Il m’a dit : “Demain, le responsable est absent et c’est toi qui vas mener la délégation !”. J’ai rétorqué que des personnes plus expérimentées étaient mieux à même de faire ce travail ! Il m’a répondu : “Certes, mais si on veut construire l’avenir, il nous faut un jeune”. Il a fallu l’expliquer aux plus anciens, ça a failli créer un drame ! J’ai enfin présenté ma candidature au congrès suivant, en 2003, et j’ai été élu.

Et comment êtes-vous passé secrétaire national ?

En 2006, je suis devenu délégué syndical central de Solvay, soit une expérience dix ans de négociation d’entreprise. Par ailleurs, j’ai été responsable de la branche pendant treize ans, de 2003 à 2016. Cela m’a permis de faire un beau tour des sujets ! Et puis j’aime bien changer, évoluer. Donc après l’entreprise et la branche, il ne restait plus que l’interpro’. Cette aspiration était assez naturelle. Et puis François me demandait de le rejoindre dans son équipe.

D’emblée sur le dialogue social ?

A ce moment, le poste n’existait pas. Quand François m’a demandé de l’accompagner, j’ai répondu que l’organisation ne me convenait pas. Je ne savais pas où me mettre, j’aurais pu rejoindre l’industrie, la formation… Il y avait quelque chose qui n’allait pas. Mon cœur, ma motivation, c’était le relationnel, le dialogue social. J’étais également choqué qu’aucun secrétariat de la confédération ne s’occupe de la représentativité et de la restructuration des branches. Ce fut donc l’occasion de le créer.

En quoi cette mission a-t-elle consisté ?

A l’époque, on n’organisait pas de réunions officielles entre les fédérations sur ces sujets. Mon premier travail fut donc de mettre en place un comité de représentativité, avec pour objectif de faire monter en compétence toutes les fédérations. Les plus grosses d’entre elles comme la banque ou la métallurgie les connaissaient déjà. Ce n’était pas le cas des petites fédérations qui n’avaient pas encore perçu le nécessaire développement en termes de listes et en voix pour continuer d’exister. Il fallait aussi faire en sorte que les fédérations retravaillent toutes ensemble.

Je ne voulais pas de guerre entre les fédérations 

Ensuite, le deuxième enjeu était d’œuvrer à l’intérêt général. La représentativité au niveau interpro’ est basée sur quatre piliers : l’industrie, le commerce, les services et la construction. A chaque élection dans une branche, on contribue à consolider la confédération. Je ne voulais pas de guerres entre fédérations. J’ai donc priorisé quelques cibles car certains piliers étaient plus faibles que d’autres.

Quelles évolutions de la CFE-CGC avez-vous constaté pendant toutes ces années ?

Une montée en compétences, en puissance, en ambition. Grâce à la réforme de la représentativité de 2008, notre organisation a pris conscience de la nécessité de se réformer, de se développer et pas seulement au niveau du terrain au coup par coup, mais également d’adopter une vision globale. Nous sommes la seule organisation syndicale représentative à avoir progressé tant en poids qu’en nombre de voix. La CFDT a continué de grimper mais elle a perdu des voix au dernier cycle électoral. Nous en avons encore gagné 38 000…

Plus généralement, comment a évolué le syndicalisme ces dernières années selon vous ?

Je quitte mes fonctions sur une bonne note : l’intersyndicale et sa position commune en faveur du système de retraite. Le débat fait prendre conscience aux citoyens que les organisations syndicales ont leur place dans un choix de société. De plus, nous avons géré toutes les manifestations dans le calme et nous avons été force de proposition, le tout avec un haut niveau de responsabilité. Derrière se dessine surtout l’envie que la démocratie sociale trouve sa place à côté de la démocratie politique. L’ANI [accord national interprofessionnel, NDLR] sur le paritarisme signé en 2022 montre aussi la capacité des syndicats de créer de normes et de les gérer de manière pérenne au niveau des confédérations.

Ce congrès a montré une certaine ferveur autour de François Hommeril, tandis que le nuage noir du conflit social sur les retraites a continué de planer avec la prise de parole d’Emmanuel Macron. Qu’en pensez-vous ?

Le conflit sur les retraites met en avant la démocratie sociale et met par terre la démocratie politique. Plus personne n’est capable de faire de la politique digne de ce nom dans ce pays, d’écouter la population, de prendre les bonnes décisions. Les prises de parole versent de l’huile sur le feu, il ne reste donc que les partis extrêmes. Mais on ne va quand même pas laisser le pays être guidé par les extrêmes !

La démocratie sociale est une des solutions 

La démocratie politique a quatre ans pour se reconstruire et il faut le faire très rapidement, réfléchir à une autre manière de travailler. La démocratie sociale est une des solutions qui permet de redorer la démocratie dans sa globalité. Cela signifie qu’il faut se remettre autour d’une table, relancer le dialogue social sans faire semblant : pas avec des concertations qui ne servent à rien et des décisions déjà prises à l’avance.

A titre plus personnel, que retirez-vous de ces années de mandat ?

Tout d’abord beaucoup de plaisir. Au point que j’avais l’impression de faire du bénévolat ! J’ai d’ailleurs toujours géré mes équipes comme une bande de copains, que ce soit dans l’entreprise, dans la branche ou à la confédération. Il n’y avait pas de hiérarchie, on discutait tous ensemble, dans la convivialité et le respect de chacun. Le syndicalisme, c’est de la relation humaine. Je pense que c’est comme cela qu’on progresse : nous diffusions des compétences depuis la confédération jusqu’à la plus petite section syndicale grâce à cette relation.

 Le relationnel et la proximité sont fondamentaux

Nous avons mis en place par exemple des outils très concrets pour aider les gens à adhérer, monter leur section, gérer le CSE. Pendant ce congrès, des gens m’ont dit que ces guides ont permis d’attirer des candidats sur les listes électorales parce qu’ils se sont sentis soutenus. Le relationnel et la proximité sont fondamentaux.

Allez-vous garder un pied à la CFE-CGC ?

Une chose est sûre : je vais rester adhérent. Dans un premier temps, je vais prendre un peu de repos, brûler l’agenda et détruire la valise ! Après on verra, pour l’instant je ne sais pas ! Pendant mon parcours, je n’ai jamais rien programmé, ni les postes dans l’entreprise, ni les responsabilités dans la branche ou à la confédération.

A quoi sera consacrée votre retraite alors ?

A voir grandir les petits-enfants, m’occuper du jardin, profiter des balades en forêt, aller aux champignons et à la pêche !

Marie-Aude Grimont

Ugict-CGT : Caroline Blanchot devrait succéder à Sophie Binet

12/04/2023

La commission exécutive de l’Ugict, le syndicat des cadres de la CGT, proposera le nom de Caroline Blanchot, lors du conseil national du 20 juin prochain, pour remplacer Sophie Binet, élue secrétaire générale de la CGT lors du dernier congrès confédéral fin mars. A l’Ugict, qu’elle a rejoint en mai 2014, Caroline Blanchot a eu pour responsabilité principale le renforcement de la CGT parmi les ingénieurs, cadres, techniciens et professions intermédiaire. Ancienne dirigeante de l’Union fédérale des cadres et agents de maîtrise cheminots, Caroline Blanchot a participé à la refonte des diplômes des travailleurs sociaux pour leur reconnaissance au niveau licence. Elle travaille depuis 2002 à la SNCF, où elle est conseillère en économie sociale et familiale.

Source : actuel CSE

Avec le Pacte du pouvoir de vivre, la CFDT pose les bases de l’après conflit des retraites

13/04/2023

La CFDT veut capitaliser sur la sympathie de l’opinion publique à l’égard des syndicats et se poser en force de propositions au-delà du conflit des retraites. Elle entend mettre à disposition des citoyens des moyens d’agir au travers de son Pacte du pouvoir de vivre, qui réunit désormais 64 associations de tous horizons.

Ne pas se laisser gagner par le ressentiment, proposer aux citoyens des moyens d’agir en matière de justice sociale, d’inégalités, de changement climatique. Tel est le nouvel objectif du Pacte du pouvoir de vivre, organisation éclectique mêlant associations et syndicats, composée en 2019 dans le but de bâtir un nouveau pacte social et écologique. Une démarche assumée comme politique dans un climat de défiance à l’égard du gouvernement.

Dans l’introduction de la conférence de presse du Pacte, Laurent Berger a posé le débat en ces termes : “Nous sommes dans un moment grave, en tout cas inquiétant. On a depuis janvier une mobilisation sans précédent, et la seule réponse du Président de la République est de nous dire qu’il a été élu après avoir annoncé cette réforme. C’est un peu court”. Le secrétaire général de la CFDT a donc dressé de nouveau le constat d’une crise démocratique et d’un divorce entre les citoyens et le pouvoir exécutif qui n’a jamais été aussi consommé, appuyé sur les résultats d’une enquête Ipsos/Sopra Steria.

Le Pacte du pouvoir de vivre, réponse syndicale et citoyenne à la crise démocratique

Selon le sondage commandé par le Pacte, réalisé du 31 mars au 1er avril 2023 sur un échantillon représentatif de 1 000 personnes, 83 % des répondants jugent que la crise démocratique actuelle risque d’empêcher l’adoption de grandes réformes en faveur de la transition écologique et la justice sociale. 60 % des citoyens craignent de basculer dans la précarité. Ils se disent inquiets pour l’avenir de la France (89 %), pour l’environnement (87 %), pour l’avenir de la démocratie en France (84 %) et pour celui de la protection sociale (84 %).

On le voit : selon ce sondage, le conflit social des retraites a continué de miner la confiance des citoyens dans l’aptitude des gouvernements à résoudre ces préoccupations. Une défiance liée aux promesses non tenues du Président de la République ? Voici ce qu’en dit Laurent Berger : “Gouverner de façon verticale, sans écouter la société civile, c’est aller au-devant d’une crise profonde comme celle de 2019 avec les Gilets Jaunes, qui avait d’ailleurs motivé à l’époque la création du Pacte du pouvoir de vivre. Pendant sa campagne, il s’était engagé à un changement de méthode. Force est de constater qu’il n’a pas la même fermeté à mettre en œuvre ses engagements sur le changement de méthode et sur la réforme des retraites”. 

La CFDT se dit donc inquiète des crises démocratique, sociale et écologique, du défaut d’articulation entre démocratie sociale, représentative et citoyenne. “C’était déjà le cas il y a cinq ans, mais les étapes nous font reculer, les murs se rapprochent et il y a urgence à agir”, insiste Laurent Berger qui voit le Pacte comme un interlocuteur “qui répondra toujours présent quand il s’agira de travailler à des politiques publiques pour la transition écologique et la justice sociale”.

L’ouverture d’un espace d’engagement pour les citoyens

Que chacun retrouve du pouvoir d’agir sur les axes du pouvoir de vivre, telle est l’ambition du Pacte mouture 2023. Si la CFTC et l’Unsa en faisaient partie en 2019, elles sont désormais sorties du Pacte, faute de disposer des ressources nécessaires pour faire face à cet engagement. De 19 membres en 2019, ils sont désormais 64 : fédération Abbé Pierre, Oxfam, Solidarités Logement, Pacte Civique, Coop’HLM entre autres. Depuis 2019 et la création du Pacte, peu de choses ont évolué dans le bon sens. Le dossier de presse indique d’ailleurs que “la première année du second quinquennat n’est pas à la hauteur des défis (…), certaines décisions suscitent l’inquiétude de nos organisations, en particulier les réformes de l’assurance chômage et du RSA (…)”.

“Il faut absolument recadrer le tir”, a martelé Christophe Robert, président de la Fondation Abbé Pierre. “La démocratie, ça se construit et ça se mérite”, a prôné Claire Thoury. La présidente du Mouvement associatif a également présenté les nouveaux axes du Pacte :

Proposer aux citoyens de rejoindre le Pacte pour se former, s’informer et partager les initiatives au sein de groupes locaux et le site internet du Pacte ;

Lancer une école du pouvoir de vivre, afin de transmettre l’expérience et l’expertise du Pacte en passant par un renforcement des corps intermédiaires ;

Organiser une journée du Pacte du pouvoir de vivre partout en France afin de débattre des propositions.

“Le but est d’en faire un espace dans lequel les gens souhaitant s’engager pour une autre vision de la société puissent le faire. Notre ambition est d’être un sas, un trait d’union entre les citoyens et les pouvoirs publics”, a conclu Claire Thoury.

Quid des CSE dans le pacte du pouvoir de vivre ?
Nous avons demandé à Laurent Berger si les CSE, corps intermédiaires entre les salariés et les directions, disposant d’un rôle économique et écologique, seraient associés à la démarche du Pacte. Réponse : “Nombre de CSE ont en effet des politiques de solidarité, de santé, d’égalité comme par exemple sur l’accès des salariés modestes aux vacances. Cela fait donc partie de nos préoccupations, pas seulement à la CFDT. Sur la transition juste par exemple, on voit de plus en plus d’initiatives d’élus autour de fresques du climat, de sentinelles vertes, avec des représentants du personnel qui ont une préoccupation très forte. L’idée est de faire percoler nos terrains d’action différents. Je suis frappé quand je me déplace dans les équipes CFDT de représentants du personnel, on me parle sans cesse du Pacte du pouvoir de vivre. Nous voulons porter ce travail jusque chez les élus en entreprise”.

Marie-Aude Grimont

Une analyse du dernier congrès de la CGT

13/04/2023

Dans Contretemps, une revue de critique communiste, la politiste Sophie Béroud, spécialiste du syndicalisme, revient sur le dernier congrès CGT et l’élection inattendue de Sophie Binet dans un long article d’analyse, en accès libre. La chercheuse rappelle les difficultés passées et présentes de la CGT, minée par les crises de succession, dépassée par la CFDT dans le privé et dont le nombre d’adhérents plafonne à 650 000. Elle détaille notamment les critiques adressées à Philippe Martinez sur “la façon de décider la politique confédérale”, avec “une séquence sanitaire qui a sans nul doute contribué à renforcer l’impression d’une direction confédérale en autarcie”, certains accusant le secrétaire général d’avoir fait du bureau confédéral et de la commission exécutive “des chambres d’enregistrement”.

A cet égard, l’élection de Sophie Binet “dans un bureau confédéral qui n’est pas à son service, qui n’est pas vidé de toute opposition mais qui regroupe au contraire des secrétaires généraux de fédérations puissantes et jusqu’alors très critiques” (Nldr : cheminots, mines-énergie) peut-il augurer d’un renouveau de la CGT notamment au sein de la confédération ? Oui, semble répondre Sophie Béroud : “On peut penser que le bureau confédéral peut redevenir un lieu de débats, mais aussi d’élaboration d’une ligne syndicale partagée. Ce sera la condition nécessaire pour faire face aux différents chantiers qui attendent l’organisation”.

Pour autant, la politiste s’interroge, à la fois sur une actualisation des conditions du débat interne et du processus de sélection des dirigeants (“L’idée de s’organiser en tendances est souvent agitée comme un spectre dans la confédération, avec la peur de la scission. Mais comment regrouper justement des sensibilités différentes sans que cela ne vire aux conflits interpersonnels, à une forme de lutte des places ?”), mais aussi sur les voies possibles d’un développement syndical pour la CGT  : “Comment enclencher de véritables dynamiques de syndicalisation (..) ? Bien des expériences ont été menées au sein de la CGT depuis une vingtaine d’années, en particulier au niveau des unions locales, qu’il s’agisse de créer des syndicats des travailleuses de l’aide à domicile, des entreprises franchisées dans la distribution ou des livreurs à vélo. Cependant, ces expériences peinent à acquérir une dimension cumulative pour gagner en importance, pour impulser la mise en place de nouveaux outils et de nouvelles structures syndicales à plus grande échelle”.

Source : actuel CSE

Les syndicats restent combatifs avant la décision du Conseil Constitutionnel

14/04/2023

Déterminé et combatif, tel était l’état d’esprit dominant des leaders syndicaux dans le carré de tête de la manifestation parisienne, hier midi. Malgré le constat d’une légère baisse du nombre de manifestants, les syndicats comptent maintenir la mobilisation, y compris après la décision du Conseil constitutionnel qui sera rendue ce soir. “Cette loi ne doit pas s’appliquer, c’est ça notre combat. Notre analyse de la réforme et de son contenu restera la même : c’est une réforme injuste et on utilisera le 1er mai pour faire une grande fête populaire”, a expliqué Laurent Berger. Le numéro un de la CFDT montre par ailleurs des réticences à rencontrer rapidement Emmanuel Macron : “Selon quelle méthode ? Pour nous expliquer ce qui est décidé et on pourrait l’amender à la marge ?”. Une méfiance partagée par Sophie Binet (CGT) : ” Ça dépend de l’ordre du jour : si c’est le retrait de la réforme, on viendra avec plaisir et on sablera le champagne. Si c’est de promulguer la réforme et parler d’autres sujets, on l’a dit de façon claire à Elisabeth Borne, il n’y a pas de raison que la réponse change à une semaine d’écart”.

Selon Frédéric Souillot (FO), “on est motivés pour continuer à demander le retrait de la réforme tout en ne remettant pas en cause la légitimité du Conseil constitutionnel”. Le secrétaire général de Force ouvrière pense déjà à attaquer les décrets d’application de la réforme devant le Conseil d’Etat. Quant à rencontrer le Président de la République, “on ira peut-être mais il y a deux mois, on a reçu une fin de non-recevoir…”.

François Hommeril (CFE-CGC) remarque qu’après un bond des adhésions aux organisations syndicales, “il observe un meilleur taux de participation aux élections dans les entreprises”. Il y a donc selon lui “une réadhésion au mouvement syndical, cela nous oblige, on doit être à la hauteur de cette confiance, et réfléchir à la façon dont on va organiser le mouvement dans les prochains mois et semaines”..

La combativité reste présente également chez la CFTC : pour Pascale Coton, “il est certain qu’on ne pourra pas se dire demain soir que tout est fini”. C’est aussi ce que pense Dominique Corona (Unsa) : “Que l’exécutif ne croit pas que tout est fini après la décision du Conseil constitutionnel, il se tromperait lourdement”. Simon Duteil et Muriel Guilbert (Solidaires) l’affirment d’une même voix : ” On ne tourne pas la page. Mercredi prochain, on rediscute avec nos structures de comment on voit la mobilisation”.

Source : actuel CSE