François Bayrou : un défenseur de la retraite par points à Matignon

16/12/2024

Vendredi en fin de matinée, François Bayrou, leader centriste et fondateur du MoDem (Mouvement Démocrate) a été nommé Premier Ministre par Emmanuel Macron. Celui que l’on surnomme “le Béarnais” prend donc le relais de Michel Barnier avec en perspective le débat sur la loi spéciale et un nouveau budget à préparer. Sur le plan social, il avait pris position en 2019 en faveur de la retraite par points. Le commissariat au plan qu’il occupe depuis 2020 a également émis un document relatif à la transformation du travail ne formulant aucune recommandation…

Le nouveau Premier ministre fut un allié majeur d’Emmanuel Macron dans la campagne présidentielle de 2017. Né à Bordères, dans les Pyrénées-Atlantiques le 25 mai 1951, François Bayrou est issu d’une famille d’exploitants agricole et agrégé de lettres classiques. Conseiller général puis député, il est nommé ministre de l’Éducation nationale en 1993. Son premier poste ministériel laissera percer ensuite des ambitions présidentielles demeurées contrariées. En 2017, il s’est contenté de porter la candidature d’Emmanuel Macron à l’Élysée.

Un parcours ministériel de l’Éducation à la Justice

François Bayrou est d’abord un homme de mandats locaux (lire notre encadré sur sa perception par les syndicalistes de Pau). Il fût député des Pyrénées-Atlantiques entre 1986 et 2012, et président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques de 1992 à 2001. Il s’est également essayé au scrutin européen et fût élu député à Bruxelles de 1999 à 2002. La ville de Pau (Pyrénées-Atlantiques) l’a élu maire à deux reprises : en 2014 avec 62,95 % des voix et en 2020 (55,52 %).

François Mitterrand aurait dit de lui “Suivez Bayrou, il sera Président. A droite, c’est le plus prometteur”. Les visées présidentielles du Béarnais resteront cependant sans succès : il recueille 6,84 % des voix en 2002, 18,57 % en 2007 et 13 % en 2012 (il appelle alors à voter François Hollande contre Nicolas Sarkozy).

Président du parti centriste UDF (Union pour la démocratie française) en 1998, il y défend une vision de centre droit autonome de la ligne du RPR (Rassemblement pour la République, parti de droite modérée). Après avoir voté pour la censure contre le gouvernement de Dominique de Villepin en 2006, il fonde en 2007 le MoDem, successeur de l’UDF.

En 1993, il est nommé ministre de l’Éducation nationale dans le gouvernement de cohabitation d’Édouard Balladur et sous la présidence de François Mitterrand. Il laissera en héritage la “circulaire Bayrou” demandant aux chefs d’établissement de proposer aux conseils d’administration une mise à jour des règlements intérieurs interdisant les signes religieux ostentatoires.

Son parcours de ministre de la Justice sera bref : nommé le 17 mai 2017 dans le gouvernement d’Édouard Philippe, il n’occupera la Chancellerie que jusqu’au 21 juin, rattrapé par l’affaire de ses assistants parlementaires.

Une affaire judiciaire toujours en cours

Le procès s’est ouvert le 16 octobre 2023 devant le tribunal correctionnel de Paris pour détournement de fonds publics européens. Le dossier rappelle celui qui pèse en ce moment sur les épaules de Marine Le Pen puisqu’il s’agit du même chef d’accusation : l’utilisation de fonds européens à des fins détournées en vue de faire travailler des assistants parlementaires dans les activités politique du parti.

Le Parquet national financier avait évalué les sommes concernées à 1,4 millions d’euros que le juge avait finalement ramené à 348 336 euros. Malgré les réquisitions du Parquet (trente mois d’emprisonnement avec sursis, 70 000 euros d’amende et trois ans d’inéligibilité avec sursis), la 11e Chambre a décidé de relaxer François Bayrou pour défaut de preuves le 5 février 2024. Manque de chance pour le nouveau Premier ministre : le Parquet a fait appel de ce jugement.

A noter que François Bayrou a pris position contre l’exécution provisoire requise par le Parquet à l’encontre de Madame Le Pen. Espère-t-il tirer des bénéfices politiques de ce geste en faveur de la dirigeante du Rassemblement National ?

Une note lacunaire du commissariat au plan sur le travail

Nommé commissaire au Plan par Jean Castex le 3 septembre 2020, “François Bayrou est chargé d’animer et de coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l’État, ainsi que d’éclairer les choix des pouvoirs publics au regard des enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturels”, indique le site Internet du commissariat.

Le 12 octobre 2023, il publie une note intitulée “La grande transformation du travail : crise de la reconnaissance et du sens du travail“. Le document pointe l’accélération et l’intensification du travail, des salariés soumis à davantage de stress, une instabilité liée à la décrue du contrat à durée indéterminée, l’ensemble étant lié à la mondialisation et la tertiarisation de l’économie. La note ne formule malheureusement aucune recommandation. Elle se termine de manière lacunaire par une annexe relative aux effets des 35 heures selon ces termes : “A ces tentatives pour protéger les travailleurs (…) doit aujourd’hui s’ajouter une politique qui traite la perte de sens et de la reconnaissance au travail”.

François Bayrou s’était également “illustré” sur les plateaux de télévision en 2014 en prônant une cure d’amaigrissement du code du travail français qu’il jugeait trop épais par rapport au code du travail suisse. Habile sur le plan de la communication politique mais assez faible sur le fond, cette posture avait en tout cas ravi le patronat, François Bayrou s’abstenant bien de dénoncer le nombre de pages du code de commerce.

Les positions sociales de François Bayrou

Si l’on s’en tient à son dernier programme électoral pour la présidentielle de 2012, François Bayrou proposait :

  • Une extension du rôle des comités d’entreprise de l’époque à la négociation des conditions de travail et des rémunérations ;
  • Une ouverture des conseils d’administration et les comités des rémunérations des entreprises aux salariés, avec droit de vote ;
  • Une négociation d’accords-cadres fixant dans les branches le cahier des charges de la discussion sur le temps, la durée de travail et les salaires ;
  • Une constitutionnalisation des grands principes de la démocratie sociale.

Il défendait également la retraite par points, ce qui le montre proche des idées de la CFDT qui dans un premier temps s’était dite favorable au projet de système de retraite universel présenté par Emmanuel Macron en 2019. Les discussions s’étaient ensuite durcies, la CFDT refusant l’instauration d’un âge pivot. Une mobilisation s’était mise en place début 2020 avant que le projet ne soit abandonné pour cause de crise sanitaire.

Sur le passage de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans, François Bayrou avait dénoncé la méthode et l’usage de l’article 49.3 par le gouvernement d’Elisabeth Borne afin de faire adopter le texte sans vote des députés.

Et maintenant ? Loi spéciale, budget, retraites

François Bayrou doit désormais nommer son gouvernement et décider avec lui du sort à réserver à l’agrément du dernier avenant négocié par les partenaires sociaux sur l’assurance chômage. Au menu également, la conférence sociale sur la santé au travail annoncée par Astrid Panosyan-Bouvet ainsi que des concertations sur les retraites. Mais les difficultés commenceront dès ce lundi 16 décembre, avec à partir de 16 heures le débat sur la loi spéciale et les projets de loi de finances à ficeler pour début 2025.

Lors de la passation de pouvoir, vendredi 13 décembre à Matignon, François Bayrou s’est d’emblée positionné sur le sujet de la dette et des déficits : “Nous avons le devoir d’affronter les yeux ouverts, sans timidité, la situation qui est héritée de décennies entières dans lesquelles on n’a pas regardé comme nécessaire et urgent la recherche des équilibres sans lesquels on a du mal à vivre. Disons simplement que les dernières années, l’accumulation de crises a été telle que les explications sont parfaitement compréhensibles”.

Il a ensuite confié ses deux “obsessions” : tout d’abord, le “mur de verre qui s’est construit entre les citoyens et les pouvoirs. Entre la base, les femmes et les hommes, les familles, ceux qui travaillent, ceux qui cherchent du travail, ceux qui sont à la retraite”. Ensuite, le rôle de l’école et “l’idée que c’est ceux qui ont les codes qui savent comment se diriger. Ceux-là connaissent la carte et ont la boussole pour se diriger dans la vie”.

Contrairement à Michel Barnier qui a remercié les partenaires sociaux, le nouveau Premier ministre n’a pas mentionné les syndicats, ni la démocratie sociale. Pas un mot non plus sur une esquisse de programme social.

Premières réactions syndicales : Solidaires a dénoncé “On prend les mêmes et on recommence”, ainsi que le “mépris pour la démocratie du Président de la République” ; Laurent Escure, président de l’Unsa a quant à lui renvoyé au dernier communiqué de presse intersyndical du 5 décembre dernier réclamant des mesures d’urgence sociales sur l’égalité hommes femmes, les salaires, les retraites…

François Bayrou vu par les syndicats de Pau : “Il ne nous reçoit jamais “
Comment François Bayrou est-il perçu par les syndicalistes des Pyrénées Atlantiques (64), sa région, et de Pau, ville dont il est maire ?

À l’égard du nouveau Premier ministre, tous n’ont pas la prudence de Christelle Aubuchou, secrétaire générale adjointe de la CFDT 64 : “On va dire qu’il y a des marges de progression. Espérons que les choses changent”, se borne-t-elle à nous répondre en restant sur le plan national.

Hervé Larrouquère, secrétaire général de l’UD FO 64 est plus cash : “François Bayrou est peu souvent ici. Et quand nous lui demandons une audience, il ne nous reçoit jamais Que ce soit pour le projet de retraites à points en 2019 ou pour la réforme de 2023, nous lui avions demandé un rendez-vous. Il n’a jamais répondu. Je ne crois pas que le dialogue social soit trop son truc “. Ce dernier cite aussi l’exemple du relogement houleux, après une longue attente, des organisations syndicales et des associations, dont les locaux sont passés du centre-ville au nord de Pau.

Un dossier qui exaspère toujours Denis Farandou, président de la CFTC des Pyrénées Atlantiques : “Avec ce nouveau local de 40 m2, nos taxes sont passées de 1200€ par an à 2000€ par an  dont 1 000€ de taxe foncière. Nous allons devoir saisir la presse pour faire bouger les choses car François Bayrou ni ses services ne nous reçoivent” . Et Denis Farandou de lâcher : “Il y a un monde entre les déclarations publiques et l’image nationale de François Bayrou et la réalité locale”.

B.D.

Marie-Aude Grimont

Licenciement économique d’un salarié protégé : l’autorité administrative ne contrôle pas la faute de l’employeur

16/12/2024

Dans le cadre du licenciement économique d’un salarié protégé, il n’appartient pas à l’autorité administrative de rechercher si les difficultés économiques rencontrées par l’entreprise sont dues à une faute de l’employeur. Cependant, le salarié peut demander au juge judiciaire réparation des préjudices causés par une telle faute. Cette solution n’est plus réservée à la cessation d’activité.

Les plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) et les licenciements économiques collectifs se multiplient. Des salariés protégés sont bien sûr concernés, et dans ce cas, l’inspecteur du travail doit donner son autorisation à leur licenciement. L’administration contrôle, outre la discrimination, si le motif économique est bien réel, quel qu’il soit.

Mais quid lorsque l’employeur est “fautif”, c’est-à-dire lorsqu’il est soupçonné de “légèreté blâmable” dans sa gestion, voire d’avoir “organisé” les difficultés de l’entreprise ? En effet, dans ce cas, les difficultés économiques existent bel et bien, et l’administration peut donc octroyer son autorisation de licenciement. C’est à cette question que répond l’arrêt du 2 décembre 2024, mentionné aux tables du recueil Lebon.

Les choix de gestion de l’employeur ne sont pas contrôlés par l’inspecteur du travail

Dans cette affaire, une société dont l’actionnaire unique est établi en Chine, invoque des difficultés économiques et engage une réorganisation. Un plan de sauvegarde de l’emploi, prévoyant la suppression de 75 des 115 emplois de la société, fait l’objet d’un accord collectif validé par la Direccte (Dreets).

Parmi les salariés concernés, plusieurs salariés protégés : l’inspectrice du travail autorise leur licenciement. Et ils n’ont pas non plus gain de cause lors de leurs recours.

Pour eux, les difficultés de l’entreprise avaient été “organisées” par sa direction, qui n’avait tenu aucun des engagements pris devant le tribunal de commerce lors de la reprise de l’entreprise en 2011. La cour administrative d’appel se borne toutefois à constater la baisse significative et continue du chiffre d’affaires et des résultats conduisant à des pertes élevées : les difficultés économiques existent, l’autorisation de licenciement est donc valable.

Les choix de gestion de l’employeur ne relèvent en effet pas du contrôle de l’administration. C’est ce qu’explique le Conseil d’État : “Lorsque l’employeur invoque, à l’appui d’un projet de licenciement pour motif économique d’un salarié protégé, les difficultés économiques rencontrées par l’entreprise, il n’appartient pas à l’autorité administrative de rechercher si ces difficultés sont dues à une faute de l’employeur”.

La “faute” de l’employeur peut donner lieu à des dommages et intérêts octroyés par le juge judiciaire

Puis la haute juridiction administrative ajoute que cette décision de l’autorité administrative ne fait “pas obstacle à ce que le salarié, s’il s’y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l’employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causé une telle faute”.

En d’autres termes, le salarié protégé licencié peut saisir le juge judiciaire pour obtenir des dommages et intérêts en cas de faute manifeste ou de fraude de l’employeur.

► Remarque : comme le souligne le Rapporteur public dans ses conclusions, l’administration ne contrôle que l’existence du motif économique, la cause de ce motif, cette éventuelle “faute”, relève de la méconnaissance par l’employeur de ses obligations contractuelles, et c’est alors le juge judiciaire qui est compétent.

Le Conseil d’État s’inspire de la solution applicable aux salariés “ordinaires” : en effet, le juge judiciaire ne peut apprécier les choix de gestion de l’employeur (Cass. ass. plén., 8 déc. 2000, n° 97-44.219 Cass. soc., 8 juill. 2009, n° 08-40.046), mais certains comportements fautifs de l’employeur peuvent priver de cause réelle et sérieuse un licenciement économique, dès lors qu’un lien de causalité direct et certain entre ces agissements et le motif économique invoqué est établi (Cass. soc., 24 mai 2018, n° 17- 12.560 ; Cass. soc., 16 janv. 2001, n° 98-44.647 Cass. soc., 4 nov. 2020, n° 18-23.029, par exemple).

Attention ! Compte tenu du principe de séparation des pouvoirs, le salarié protégé ne pourra pas obtenir du juge judiciaire qu’il juge son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et n’aura donc pas droit à la réintégration, contrairement au salarié « ordinaire ». Il ne pourra obtenir que l’indemnisation des préjudices résultant de la faute de l’employeur à l’origine des difficultés économiques, notamment le préjudice résultant de la perte de son emploi (Cass. soc., 20 sept. 2023, n° 22-13.500). 

► Remarque : le Conseil d’État se rapproche ainsi de sa propre jurisprudence (et de celle de la Cour de cassation) en matière de licenciement pour inaptitude : l’administration contrôle si l’inaptitude est réelle et justifie son licenciement, mais elle n’a pas à rechercher la cause de cette inaptitude. En revanche, le juge judiciaire peut être saisi pour faire juger de l’origine de l’inaptitude. Si celle-ci peut être attribuée à un manquement de l’employeur (harcèlement, manquement à l’obligation de sécurité), le salarié protégé peut obtenir des dommages et intérêts (CE, 20 nov. 2013, n° 340591 ; Cass. soc., 27 nov. 2013, n° 12-20.301 ; Cass. soc., 13 avr. 2023, n° 22-10.758, par exemple). 

Cette solution avait déjà été adoptée par le Conseil d’État mais uniquement en cas de licenciement pour motif économique pour cessation d’activité (CE, 1 er août 2013, n° 351917). Solution confirmée par la Cour de cassation (Cass. soc., 25 nov. 2020, n° 18- 13.771 ; Cass. soc., 20 sept. 2023, n° 22-13.494). Dans cette affaire, le licenciement économique était motivé par des difficultés économiques. Cette décision du 2 décembre 2024 étend donc cette solution dans ce cas. Il nous semble qu’elle devrait également s’appliquer lorsque le motif économique invoqué est la sauvegarde de la compétitivité. Mais il faudra que le Conseil d’État le confirme, l’arrêt ne visant directement que les difficultés économiques. 

► Remarque :  notons que la jurisprudence de la Cour de cassation vaut pour tous les motifs économiques, dont la réorganisation nécessaire à la sauvegarde de l’entreprise. Ce point est d’ailleurs souligné par le Rapporteur public dans ses conclusions sur l’arrêt du 2 décembre 2024.

L’administration contrôle le respect des règles de procédure conventionnelles

L’accord national du 23 septembre 2016 relatif à l’emploi dans la métallurgie, étendu par arrêté du 28 avril 2017, prévoit que “les entreprises qui envisagent le licenciement pour motif économique d’au moins 10 salariés en informent la ou les [commissions paritaires régionales de l’emploi et de la formation professionnelle, CPREFP] concernées”.

L’employeur devait donc saisir les CPREFP concernées. En conséquence, “il appartient à l’inspecteur du travail, dans le cadre de son contrôle de la régularité de la procédure suivie par l’employeur, de vérifier si ce dernier a dûment saisi la commission territoriale de l’emploi”.

En effet, le Conseil d’État explique, conformément à sa jurisprudence (CE, 2 mars 2022, n° 442578), que l’inspecteur du travail doit contrôler que la commission a bien été saisie, conformément aux dispositions conventionnelles applicables, mais il n’a pas à vérifier les recherches de reclassement externes (c’est-à-dire hors de l’entreprise et du groupe) effectuées dans ce cadre.

L’employeur n’a pas à transmettre à cette commission les informations individualisées 

Dans cette affaire, le Conseil d’État constate que l’employeur a bien rempli son obligation conventionnelle en saisissant la commission par l’envoi de 2 lettres. La première mentionnait les catégories de postes concernées et le nombre de salariés dont le licenciement était projeté, et la seconde précisait la liste des postes des salariés concernés par le PSE. 

Ainsi, l’employeur a respecté ses obligations. En effet, “ni les stipulations de l’accord national du 23 septembre 2016 ni aucune disposition législative ou réglementaire n’imposait de communiquer à cette commission paritaire le profil personnalisé des salariés concernés par le projet de licenciement collectif”. 

► Remarque :  comme le souligne le Rapporteur dans ses conclusions, une telle commission paritaire n’a pas pour rôle de reclasser les salariés, elle n’a qu’une connaissance générale du marché de l’emploi dans le secteur. L’envoi des profils personnalisés n’est donc pas pertinent. A noter que la Cour de cassation retient la même solution pour les salariés ordinaires (Cass. soc., 17 mars 2015, n° 13-24.303).

Séverine Baudouin

L’étrange défaite des médias

16/12/2024

Des millions de Français fuient les médias et des informations jugées trop répétitives, anxiogènes et conflictuelles, s’inquiète un rapport de la Fondation Jean Jaurès, ObSoco et Arte (*). Pour les auteurs, il appartient aux médias de renouveler leurs pratiques en sortant du flux permanent et en redonnant du sens à l’actualité, mais les politiques doivent aussi réguler les réseaux sociaux afin que l’information puisse toujours nourrir le débat démocratique.

“Fatigue informationnelle” : l’expression va-t-elle passer dans le langage courant ? Elle désigne la lassitude des citoyens à l’égard d’un volume d’informations jugé excessif. Ce sentiment devient une pratique sociale dès lors que certains Français choisissent de ne plus s’informer pour échapper à une boucle médiatique jugée anxiogène, une information inquiétante en chassant une autre aussi peu rassurante.

On pourrait presque apparenter ce ressenti à la désormais fameuse “charge mentale” qui pèse sur les femmes devant gérer de multiples éléments de la vie professionnelle et familiale.

Seuls 57 % des Français jugent important de s’informer

Le rapport met des chiffres sur ce sentiment et cette pratique (**). Il s’agirait bien d’une tendance de fond. Seulement 57 % des Français jugent important de s’informer, soit deux points de moins qu’en 2022. Et près de la moitié des Français (47 %) reconnait avoir des difficultés à suivre la continuité des sujets ou des événements, un chiffre en hausse depuis deux ans (+6 points).

Cette tendance s’illustre aussi par la baisse du nombre de médias utilisés pour s’informer (7,4 canaux différents en 2024 au lieu de 8,3 en 2022) et la focalisation sur 3 médias pour 31% des Français. 

Autre signe allant dans ce sens, la moindre utilisation, entre 2022 et 2024, des médias, le journal télévisé restant stable et les réseaux sociaux (dont le contenu mêle infos et divertissements) étant en progression : 

  • 11 points de moins pour les chaînes d’infos ;
  • 6 points de moins pour les émission d’actualité ;
  • 5 points de moins pour la radio ;
  • 1 point de moins pour la presse (seuls 53 % des Français, contre 61 % en 2022, s’informent via la presse).

Moins de discussions sur l’actualité

Chacun est bien sûr libre de son temps et de ses activités. Mais c’est tout de même l’information qui fonde la capacité d’un citoyen à agir dans la cité, à participer au débat démocratique (et à la démocratie sociale dans une entreprise !) et à voter de façon éclairée. Or, de moins en moins de Français semblent prêts à payer pour s’informer ( – 3 points) mais aussi à prendre du temps pour échanger avec les autres sur ces informations ( – 7 points). 

“Cette moindre envie de participer au débat ou de payer pour s’informer illustre nettement une perte de lien entre les médias d’information et leurs audiences. Une perte de lien, une perte de volonté de faire circuler les informations que l’on consulte et, ce faisant, de contribuer au débat public. C’est un nouveau signe encore de la rupture et de l’exode d’une partie de la population avec ses médias”, peut-on lire dans le rapport. 

L’impression que “tout va trop vite” (47 % des Français sont d’accord avec cette affirmation) s’accompagne d’une forme d’impuissance face au flux de l’actualité, d’autant que 57 % des personnes interrogés trouvent le langage journalistique “complexe”. Quand ils prennent connaissance des informations, 70 % des Français ont le sentiment de la subir, 80 % se sentent impuissants face aux évolutions du monde, et 83 % se disent désespérés. 

Le lien entre information et démocratie semble fragilisé. Seuls 34 % des Français ont suivi la “séquence” politique faisant suite à la dissolution de l’Assemblée en juin dernier, 19 % se désintéressant totalement de ce sujet. Font exception à cette tendance des faits d’actualité portant une forte charge émotionnelle comme l’assassinat de l’enseignant Dominique Bernard ou la guerre en Ukraine. 

Plus inquiétant encore, la part des Français privilégiant des partages de commentaires agressifs et polémiques tend à progresser, cet usage étant revendiqué par 23 % des personnes enquêtées, de même que monte en flèche le visionnage compulsif de vidéos sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram, TikTok). Ce “scrolling” est pratiqué par 77 % des 18-24 ans et 67 % des 25-34 ans, contre 22 % chez les plus de 65 ans. 

Une compétition pour capter l’attention

Dans une économie où la captation de l’attention constitue aussi une bataille économique et dans une société qui n’est plus comme autrefois marquée par des grands récits religieux ou politiques qui faisaient sens, l’information a-t-elle déjà perdu la partie ? Espérons que non !

Mais l’on voit bien, comme le soulignent les auteurs en conclusion, que le refus d’être dupe, en générant “une défiance généralisée”, peut paradoxalement mettre à mal l’attachement à une vérité : “Le désir de véracité suffit à enclencher un processus critique qui vient ensuite fragiliser l’assurance qu’il y aurait des vérités sûres”.

Le défi n’est pas mince pour les médias : comment “réengager des Français fatigués, lassés, méfiants face à une information qui souffre d’un déficit de sens et de valeur” ? Comment éviter le cauchemar évoqué par le patron de Tesla et de X, qui promet aux membres de son réseau social “d’être le media” alors que lui seul en contrôle les algorithmes ?

A ces questions, le rapport répond par des pistes qui sont autant de conseils donnés aux entreprises de presse comme aux responsables politiques : 

  • sortir du flux permanent en renouvelant formats et modes de diffusion pour “revenir à une logique de programmation” ;
  • renforcer l’éducation aux médias et à l’information dès le plus jeunes jeune ;
  • imposer des régulations strictes aux plateformes sociales concernant le traitement de l’information ; 
  • imaginer une labellisation pour les producteurs d’informations respectant certaines exigences ;
  • préparer une loi sur le pluralisme de l’information.

(*) Rapport de 30 pages rédigé par Sébastien Boulonne, chargé d’études à L’ObSoCo (société d’études et de conseil sur la société et la consommation), Guénaëlle Gault, directrice générale de L’ObSoCo et David Médioni, directeur de l’Observatoire des médias de la Fondation Jean-Jaurès, club de réflexion proche du Parti socialiste. 

(**) Il s’agit de la deuxième vague d’une enquête menée en ligne auprès d’un échantillon représentatif de 4 000 personnes, du 4 avril au 2 mai 2024 et du 16 au 26 septembre.

Bernard Domergue

Une étude sur la valorisation des parcours syndicaux

16/12/2024

Le centre d’études de l’emploi et du travail (CEE) publie une courte étude sur la valorisation des parcours syndicaux, un thème qui doit faire l’objet d’une négociation entre les organisations syndicales et patronales en 2025.

À propos de la reprise d’études universitaires visant à valider des compétences acquises pendant le mandat, cette étude constate que si elle est proposée par de plus en plus d’acteurs (Sciences Po Paris, université d’Orsay, Paris-Dauphine, Institut régional du travail de Toulouse, etc.), cette voie reste difficile pour les représentants du personnel : 

“Le passage par la formation universitaire permet d’acquérir un diplôme national qui vient en quelque sorte «blanchir» le parcours syndical (..). Toutefois, cette modalité de valorisation des acquis est aussi plus coûteuse financièrement et humainement. Outre les tarifs d’inscription en formation, qui se comptent en milliers d’euros, souvent pris en charge par l’entreprise ou un opérateur de compétences (OPCO), c’est l’investissement individuel du syndicaliste qui est réclamé sur le long terme. Or, tous les élus ne sont pas égaux face aux impératifs d’une formation universitaire qui, selon les cas, les mobilisent de quelques jours par semaine à plusieurs mois. Suivant son parcours scolaire initial, sa disponibilité, son niveau de responsabilités syndicales, son genre ou encore sa situation familiale, les conditions d’engagement de l’élu peuvent rendre cette rescolarisation, plus ou moins difficile. Les enseignants des formations suivies par les syndicalistes mesurent d’ailleurs le changement dans la vie des intéressés”.

Source : actuel CSE

Licenciement économique : l’offre de reclassement du salarié protégé doit être suffisamment précise

17/12/2024

L’inspecteur du travail, saisi d’une demande d’autorisation de licenciement pour motif économique d’un salarié protégé, doit vérifier que les offres de reclassement proposées à l’intéressé contiennent l’ensemble des mentions prévues par le Code du travail, celles-ci devant être aisément accessibles.

En vertu de l’article L 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017, l’employeur envisageant de licencier un salarié pour motif économique doit rechercher au préalable à le reclasser. Qu’elles soient adressées personnellement à chaque salarié ou diffusées à l’ensemble des travailleurs, les offres de reclassement doivent être écrites et précises, c’est-à-dire comporter au minimum les informations suivantes (C. trav. art. D 1233-2-1) :

  • l’intitulé du poste et son descriptif ;
  • le nom de l’employeur ;
  • la nature du contrat de travail ;
  • la localisation du poste ;
  • le niveau de rémunération ;
  • la classification du poste.

► À noter : L’ordonnance du 22 septembre 2017 et le décret 2017-1725 du 21 décembre 2017, pris pour son application, ont ainsi intégré dans le Code du travail des règles issues de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, qui a toujours considéré que, pour être valable, une offre de reclassement doit indiquer les caractéristiques du poste proposé (voir par exemple : Cass. soc. 15-6-2022 n° 21-10.676 F-D).

Dans une décision du 2 décembre 2024, mentionnée aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat se prononce, pour la première fois dans ce nouveau contexte juridique, sur le degré de précisions des offres de reclassement proposées à un salarié protégé pour lequel l’employeur a demandé à l’inspection du travail une autorisation de licenciement pour motif économique.

L’employeur diffuse par courriel à tous les salariés la liste des offres de reclassement

Dans cette affaire, à la suite de la cessation d’activité de l’entreprise, l’employeur a sollicité auprès de l’administration l’autorisation de licencier pour motif économique une salariée titulaire d’un mandat de membre du comité social et économique.

L’inspecteur du travail a refusé à deux reprises d’accorder l’autorisation :

  • la première fois, pour un motif d’intérêt général tiré de la nécessité de voir subsister une représentation du personnel jusqu’au licenciement de tous les autres salariés, comme l’y autorise la jurisprudence administrative (voir notamment CE 19-7-1991 n° 84259 ; CE 11-2-2005 n° 247673) ;
  • la seconde fois, en raison de la méconnaissance par l’employeur de son obligation de reclasser la salariée.

Toutefois, le ministre du travail, saisi par la société d’un recours hiérarchique, a annulé la décision de l’inspecteur du travail et autorisé le licenciement de la salariée. Celle-ci a alors demandé au juge administratif d’annuler la décision ministérielle, sans succès aussi bien en première instance qu’en appel. Elle s’est par conséquent pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat.

Des offres sans indication sur la classification des postes sont-elles suffisamment précises ?

À l’appui de son recours, la salariée protégée soutenait que les offres de reclassement n’étaient pas suffisamment précises en ce qu’elles ne comportaient pas d’indications sur la classification des emplois, la description des missions et la localisation exacte du poste. En effet, la liste des offres, diffusée à l’ensemble des salariés par courriel et actualisée tous les quinze jours, indiquait pour chacun des postes les éléments suivants : famille métier, libellé du poste (responsable magasin, commercial itinérant, comptable, technicien de maintenance), salaire de base brut annuel et existence ou non d’une rémunération variable, type de contrat (CDI ou CDD), catégorie (employé, agent de maitrise ou cadre), nom de la société et ville.

S’ils ont reconnu que la liste des emplois disponibles diffusée auprès des salariés ne comportait pas certaines précisions exigées par l’article D 1233-2-1 du code du travail, les juges du fond ont relevé cependant que ces informations étaient accessibles aux salariés sur un site internet recensant l’ensemble des postes disponibles avec le descriptif des fonctions et leur localisation géographique.

En outre, pour le ministre ayant accordé l’autorisation de licenciement contestée, ces lacunes n’étaient pas de nature à priver la salariée d’une réelle opportunité de reclassement, cette dernière ayant d’ailleurs marqué son intérêt pour deux postes figurant sur la liste.

Jugeant dès lors suffisamment précises les offres de reclassement, la cour administrative d’appel a débouté la salariée protégée de sa demande d’annulation de l’autorisation de licenciement fondée sur la violation par l’employeur de son obligation en la matière.

► À noter :  Dans ses conclusions, M. Chambon, rapporteur public, s’interroge sur le silence de la cour administrative d’appel à propos de l’absence de mention sur la classification dans la liste des postes proposés. Les juges du fond ont-ils estimé que « la mention de la catégorie (employé, agent de maîtrise ou cadre) était équivalente à celle de classification ou bien que l’absence d’une des indications réglementaires pouvait être neutralisée, une telle absence n’étant pas nécessairement de nature à interdire que les offres recensées dans la liste soient regardées comme précises » ?

Les offres de reclassement doivent comporter toutes les mentions prévues par le Code du travail

La question posée au Conseil d’Etat était donc de savoir si le défaut d’une des mentions prévues par le Code du travail rend automatiquement les offres de reclassement imprécises, caractérisant ainsi un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement ? Et sa réponse est positive.

Selon la Haute Juridiction administrative, l’administration doit en effet s’assurer, lors de l’examen d’une demande d’autorisation de licenciement pour motif économique d’un salarié protégé, d’une part, que les offres de reclassement comportent l’ensemble des mentions prévues à l’article D 1233-2-1 du code du travail et, d’autre part, que ces mentions soient aisément accessibles lorsque l’employeur communique la liste des postes disponibles aux salariés.

► À noter :  Ce faisant, le Conseil d’Etat rejoint la ligne jurisprudentielle de la chambre sociale de la Cour de cassation. Celle-ci a en effet récemment jugé qu’à défaut de l’une des mentions réglementaires, l’offre de reclassement adressée au salarié menacé de licenciement économique est imprécise, ce qui caractérise un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 23-10-2024 n° 23-19.629). Certes, cet arrêt a été rendu dans une affaire dans laquelle l’employeur avait adressé une offre de reclassement à un salarié de manière personnalisée, et non diffusé une liste de postes à tous les salariés, mais, d’une portée générale, il a vocation à s’appliquer dans les deux hypothèses, comme le précise le rapporteur public dans ses conclusions.

En ne contrôlant pas la précision des offres de reclassement et l’accessibilité de mentions devant y figurer, les juges du fond ont commis une erreur de droit entrainant la cassation de leur décision par le Conseil d’Etat. Il appartiendra donc à la cour administrative d’appel devant laquelle l’affaire est renvoyée de procéder à ces recherches afin de déterminer si l’employeur a bien rempli son obligation de reclassement et, in fine, si l’autorisation de licenciement du salarié protégé peut être accordée.

Guilhem Possamaï

Le projet de loi spéciale adopté à l’unanimité des députés

17/12/2024

Le projet de loi spéciale a été débattu hier après-midi en séance publique à l’Assemblée nationale. Le texte a été adopté à l’unanimité des députés : sur 544 votants et 481 votes exprimés, le texte a recueilli 481 voix pour, aucune voix contre.

En introduction des débats, le ministre de l’Économie Antoine Armand a insisté sur le fait que ce projet de loi “n’est pas un budget car il n’est pas sous-tendu par des prévisions de croissance, de déficit ni d’endettement”. Le désignant comme “un texte technique sans portée politique”, il a rappelé ses deux objectifs : continuer à lever l’impôt et émettre de la dette pour assurer la continuité des services publics.

Abondant dans le même sens, le ministre du budget Laurent Saint-Martin a rappelé aux députés que le projet de loi spéciale “ne préjuge pas des nouveaux arbitrages du gouvernement et ne préempte pas des futures discussions budgétaires”.

Le rapporteur général du budget et député de la Marne (Liot), Charles de Courson, a appelé tous les groupes parlementaires à voter en faveur du texte “incontournable puisque la censure du gouvernement Barnier a suspendu l’examen des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale. Ne pas le voter serait irresponsable”.

Suivant l’avis du Conseil d’État qui considérait que ce projet de loi ne pouvait pas contenir de mesure fiscale, la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet a déclaré irrecevables les amendements prévoyant d’ajouter au projet de loi une indexation du barème de l’impôt sur le revenu. Plusieurs parlementaires ont regretté cette décision et auraient préféré que le sujet soit soumis au Conseil constitutionnel.

Charles de Courson et Éric Coquerel (président LFI de la commission des finances) ont écrit un courrier au nouveau Premier ministre François Bayrou, lui demandant de rédige un projet de loi portant diverses dispositions d’ordre économique et financier afin d’y inscrire notamment l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu et les mesures en faveur des agriculteurs.

Deux amendements ont été adoptés. Le  n° 29 inscrit dans le texte les prélèvements sur les recettes de l’État à destination des collectivités territoriales ; l’amendement n° 38 précise que l’autorisation d’emprunt ne vaut que pour l’année 2025.

Source : actuel CSE

La Cour des comptes préconise d’allonger le congé maternité et de mieux rémunérer le congé parental

17/12/2024

Dans un rapport, publié le 13 décembre, la Cour des comptes propose d’allonger le congé maternité d’un mois (fixé actuellement à 16 semaines pour les deux premiers enfants) et de mieux indemniser le congé parental pour “réduire la demande d’accueil du jeune enfant”.

“Dans un contexte de pénurie de professionnels de la petite enfance”, un congé parental mieux rémunéré et plus court permettrait de réduire le besoin de places de quelque “70 000 berceaux”, pour un “coût net d’environ 360 millions d’euros par an”, indique la Cour.

Le gouvernement réfléchit depuis fin 2023 à réformer ce congé parental. Le “congé maternité accordé pour les deux premiers enfants est “de courte durée en France, par comparaison avec d’autres pays de l’OCDE”, note la Cour dans ce rapport évaluant la politique publique d’accueil du jeune enfant (moins de trois ans). Sa durée est actuellement d’un renouvelable deux fois jusqu’au troisième anniversaire de l’enfant. 

Par ailleurs, la Cour recommande de supprimer le crédit d’impôt famille accordé aux employeurs réservataires de berceaux et de consacrer les sommes correspondantes au financement de places d’accueil dans les zones sous-dotées.

Source : actuel CSE

Paie : les principales mesures qui pourraient prendre fin au 1er janvier 2025

18/12/2024

En l’absence de reconduction, plusieurs mesures temporaires pourraient cesser de s’appliquer au 1er janvier 2025. Tour d’horizon rapide des principaux dispositifs pour lesquels une mesure législative ou réglementaire est nécessaire pour qu’ils puissent perdurer au-delà du 31 décembre 2024. 

Les différents dispositifs concernés pourront bien entendu être prolongés en cours d’année 2025, avec effet rétroactif au 1er janvier. Mais la situation politique inédite crée une période d’incertitude puisqu’il est impossible de savoir lesquelles de ces mesures seront effectivement reconduites et, si elles le sont, si elles auront ou non un effet rétroactif.

Frais de transport domicile travail

S’agissant des frais de transport domicile travail, plusieurs dispositifs ont été mis en place à titre temporaire pour aider les salariés à faire face à l’inflation. Reconduits en dernier lieu jusqu’au 31 décembre 2024 par la LFSS (loi de financement de la sécurité sociale) pour 2024, ils cesseront de s’appliquer au 1er janvier 2025. On trouvera ci-après deux tableaux récapitulatifs du régime social et fiscal applicables aux différents types de prise en charge en 2024 et, faute de reconduction, en 2025.

► À noter : Le gouvernement Barnier ne souhaitait pas reconduire en 2025 les dispositifs temporaires en vigueur en 2024. Un article avait néanmoins été ajouté au PLF (projet de loi de finances) pour 2025 par le Sénat, contre l’avis du gouvernement, visant à maintenir la possibilité pour l’employeur de financer, en franchise de cotisations et d’impôt, l’abonnement aux transports en commun à hauteur de 75 % pour tous les salariés. Il est encore impossible de savoir si cette mesure, voire d’autres, seront reprises dans le futur PLF pour 2025. En tout cas, elles ne pourront pas être adoptées avant le 1er janvier 2025.

Modalités de prise en charge des frais de transport domicile-travail

Dans ce tableau, les changements à prévoir en 2025 sont mentionnés en caractères gras.

Modes de déplacementTransports publicsVéhicule personnel (1)Modes de déplacement dits «durables» (2)
Dispositif de prise en chargeRemboursement des abonnementsIndemnité kilométriquePrime transport = prise en charge, le cas échéant, sous forme de titres-mobilité, des frais de carburant ou d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride rechargeable ou hydrogèneForfait mobilité durable = allocation forfaitaire, le cas échéant, sous forme de titres-mobilité
Caractère facultatif ou obligatoireObligatoire jusqu’à 50 % du coût de l’abonnement Facultatif au-delàFacultatifFacultatifFacultatif
BénéficiairesTout salarié abonné à un service de transport en commun ou à un service de location de vélosSalarié contraint d’utiliser son véhicule personnelEn 2024 : tout salarié utilisant son véhicule personnel. En 2025 : salarié contraint d’utiliser son véhicule personnelTout salarié utilisant des modes de transport dits «durables»
Cotisations sociales, CSG et CRDSEn 2024 : exonération à hauteur de 75 % du prix de l’abonnement En 2025 : 50 % du prix de l’abonnement (3)Barèmes fiscauxEn 2024 : 700 euros par salarié et par an, dont 400 € au maximum pour les frais de carburant (4). En 2025 : 600 euros par salarié et par an, dont 300€ au maximum pour les frais de carburantEn 2024 : 700 euros par salarié et par an (5). En 2025 : 600 euros par salarié et par an
Impôt sur le revenuAssujettissement

(1) Voiture, moto, scooter.

(2) Vélo, trottinette électrique, covoiturage (y compris thermique), services de mobilité partagée non thermique, transports publics (hors prise en charge obligatoire de l’abonnement), etc.

(3) Si la prise en charge par l’employeur excède 50 %, la part excédentaire est exonérée de cotisations dans la limite des frais réellement engagés sous réserve, pour les salariés résidant dans une autre région que celle où ils travaillent, que leur éloignement soit dû à des contraintes liées à l’emploi ou à des contraintes familiales (Boss-FP-770). Cette tolérance ne concerne pas l’impôt.

(4) Limites portées à 900 euros et 600 euros en Guadeloupe, Martinique, Guyane, à La Réunion et à Mayotte.

(5) Limite portée à 900 euros en Guadeloupe, Martinique, Guyane, à La Réunion et à Mayotte.

Cumul des différents dispositifs

 20242025
Prime transport + forfait mobilités durables700 euros par salarié et par an, dont 400 euros au maximum pour les frais de carburant Respectivement 900 euros et 600 euros en Guadeloupe, Martinique, Guyane, à La Réunion et à Mayotte600 euros par salarié et par an, dont 300 euros au maximum pour les frais de carburant
Prime transport + remboursement de l’abonnement aux transports publicsAutoriséInterdit
Forfait mobilités durables + remboursement de l’abonnement aux transports publics800 euros par an ou, s’il est supérieur à cette somme, montant de la prise en charge obligatoire par l’employeur de l’abonnement aux transports en commun900 euros par an ou, s’il est supérieur à cette somme, montant de la prise en charge obligatoire par l’employeur de l’abonnement aux transports en commun

Mise à disposition d’un véhicule électrique ou d’une borne de recharge

Plusieurs mesures temporaires ont été mises en place ces dernières années visant à inciter l’employeur à mettre des véhicules électriques et des bornes de recharge à disposition de ses salariés. Ainsi, l’utilisation à des fins personnelles par les salariés d’une borne de recharge installée sur le lieu de travail échappe à cotisations et impôt sur le revenu alors que la mise à disposition d’une borne à l’extérieur de l’entreprise fait l’objet d’un régime social et fiscal de faveur.

En outre, en cas de mise à disposition d’un véhicule 100 % électrique, pour le calcul des cotisations et de l’impôt, l’avantage en nature résultant de son utilisation à titre personnel est abattu et les frais d’électricité engagés pour la recharge du véhicule ne sont pas pris en compte. Faute de reconduction, ces dispositifs prendront fin le 31 décembre 2024.

► À noter : La reconduction de ces mesures peut être réalisée par un simple arrêté. Si le gouvernement Barnier n’avait semble-t-il pas l’intention d’adopter un tel arrêté, il est trop tôt pour savoir ce que fera le prochain gouvernement.

Pourboires

Depuis le 1er janvier 2022, afin de renforcer l’attractivité des emplois en contact avec la clientèle, mise à mal par la crise sanitaire de la Covid-19, les pourboires remis volontairement aux salariés en contact avec la clientèle dont la rémunération ne dépasse pas 1,6 Smic sont exonérés de cotisations et contributions sociales et d’impôt sur le revenu. Cette mesure temporaire, reconduite par la LFSS pour 2024 jusqu’au 31 décembre 2024, cessera de s’appliquer au 1er janvier 2025.

► À noter : Initialement, le gouvernement Barnier ne souhaitait pas reconduire ce dispositif mais un amendement au PLF pour 2025 avait été adopté par le Sénat avec avis favorable du gouvernement le prolongeant jusqu’à la fin de l’année 2025. Il est impossible de savoir si le futur PLF prévoira une prolongation rétroactive. À défaut, les pourboires réglés à partir du 1er janvier 2025, notamment ceux versés par carte bancaire, seront passibles de cotisations et d’impôt.

Titres restaurant

La loi du 16 août 2022, dite “loi pouvoir d’achat”, permet à titre dérogatoire et temporaire, jusqu’au 31 décembre 2024, l’utilisation des titres-restaurant pour acquitter en tout ou en partie le prix de tout produit alimentaire, qu’il soit directement consommable ou non. Une proposition de loi, adoptée le 20 novembre 2024 par l’Assemblée nationale, prévoyait de reconduire cette mesure jusqu’à fin 2026. Du fait de la censure du gouvernement Barnier, cette reconduction ne pourra pas être adoptée par le Parlement avant la fin de l’année 2024.

De ce fait, à partir du 1er janvier 2025, le titre restaurant ne pourra être utilisé que pour acheter des repas, des préparations alimentaires directement consommables ou des fruits et légumes.

► À noter : L’élargissement de l’utilisation du titre-restaurant pourra être rétablie en cours d’année 2025 par le législateur.

Valérie Maindron

Le Conseil d’État rejette la demande de nullité du décret sur l’abandon de poste

19/12/2024

Dans une décision du 18 décembre 2024, le Conseil d’Etat rejette la demande d’annulation du décret du 17 avril 2023 et du questions-réponses du ministère du travail sur l’abandon de poste. À cette occasion, le Conseil d’Etat apporte une précision non mentionnée dans le décret : pour que la démission d’un salarié puisse être présumée, ce dernier doit nécessairement être informé des conséquences que peut avoir l’absence de reprise du travail sans motif légitime.

La loi du 21 décembre 2022 a instauré un dispositif de présomption de démission du salarié qui abandonne volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste dans le délai fixé par l’employeur. Les modalités d’application de cette nouvelle procédure ont été fixées par le décret du 17 avril 2023. Un questions-réponses publié le 18 avril 2023 sur le site internet du ministère du travail a complété les détails de cette procédure.

Le Conseil d’Etat a été saisi par la CGT, FO, l’Union nationale des syndicats autonomes, le Cercle Lafay et l’Alliance plasturgie et composites du futur. Ces derniers demandaient l’annulation du décret et du questions-réponses pour excès de pouvoir.

Le Conseil d’Etat rejette ces recours et apporte une précision de taille dans sa décision.

Le salarié doit être informé des conséquences de l’absence de reprise du travail

Le Conseil d’Etat apporte une précision qui ne figure ni dans la loi ni dans le décret. Les juges estiment ainsi que, pour que la démission d’un salarié puisse être présumée, ce dernier doit nécessairement être informé des conséquences que peut avoir l’absence de reprise du travail sans motif légitime. La mise en en demeure de l’employeur doit donc apporter ces informations.

Le fait que le décret ne le précise pas ne permet toutefois pas de l’estimer illégal.

Cette précision étant indiquée, le Conseil d’Etat rejette la demande d’annulation du décret en ce qu’il ne permettrait pas de faire bénéficier le salarié des garanties prévues par la convention internationale du droit du travail n° 158 sur le licenciement. En effet, indiquent les juges, cette convention n’a vocation à s’appliquer qu’en cas de cessation du contrat de travail à l’initiative de l’employeur “et non dans les situations de démission volontaire”.

Or, souligne le Conseil d’Etat, dans le cadre de cette procédure, “si c’est bien l’employeur qui initie la procédure par l’envoi d’une mise en demeure, c’est en réalité le salarié, par son absence persistante sans justification, qui est à « l’initiative » de la rupture de la relation de travail”. 

Le Conseil d’Etat rappelle par ailleurs que des garde-fous existent et “l’abandon de poste ne peut pas être considéré comme volontaire en cas de motif légitime, par exemple des raisons médicales, l’exercice du droit de retrait ou du droit de grève, le refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à la réglementation, ou des modifications du contrat à l’initiative de l’employeur”.

► Le Conseil d’Etat en profite pour indiquer au passage qu’un projet de décret ne peut “être regardé comme un “projet de réforme » qui aurait dû être soumis à une concertation préalable, comme le prévoient le Préambule de la Constitution de 1946 et le code du travail [article L.1 du code du travail]”.

La question de la légalité du questions-réponses devenue sans objet

La première version questions-réponses avait fait couler beaucoup d’encre. Le ministère y assurait que l’employeur ne pouvait plus enclencher la procédure de licenciement pour faute grave en cas d’abandon de poste, la seule procédure de présomption de démission étant désormais applicable. Cette affirmation ne reposait sur aucun fondement textuel comme le rappelle le Conseil d’Etat. “Ni la loi ni le décret ne comportent de dispositions sur ce point”, indique le Conseil d’Etat dans le communiqué joint à la décision. 

Cette première version du questions-réponses avait été retirée du site en juin 2023, rendant ainsi la demande d’annulation des requérants désormais sans objet puisque la nouvelle mouture ne reprenait pas les mentions contestées.

La question de l’application de la procédure de licenciement pour faute grave reste donc toujours soulevée, le Conseil d’Etat ne se prononçant pas sur ce point retiré du questions-réponses. 

Florence Mehrez

Fermer l’entreprise pour congés payés pendant les fêtes de fin d’année, ce n’est pas automatique

19/12/2024

Avec l’arrivée des fêtes de fin d’année, il est fréquent pour une entreprise d’envisager une fermeture pour quelques jours. En effet, dès lors que les formalités conventionnelles ou légales sont respectées, l’employeur peut imposer cette fermeture et demander à ses salariés de poser des congés payés pour couvrir cette période.

Fermeture de l’entreprise entre Noël et le jour de l’An : l’employeur peut-il l’imposer ?

Oui. Sous réserve de se conformer aux formalités requises, l’employeur peut choisir de fermer l’entreprise entre Noël et le jour de l’An et ainsi imposer à ses salariés de prendre des congés payés sur cette période. Cette décision peut être prise de manière unilatérale ou en application d’un accord collectif.

Un choix encadré

L’employeur doit ainsi :

  • vérifier les accords collectifs applicables à l’entreprise : ces dispositions conventionnelles peuvent déjà avoir fixé des modalités spécifiques en matière de fermeture d’entreprise (la période de prise des congés, les délais à respecter…) (article L.3141-15 du code du travail) ;

► La fermeture de l’entreprise doit se faire dans le respect de l’accord collectif applicable. Si celui-ci ne l’autorise que du 1er mai au 31 octobre, l’employeur ne peut pas décider de fermer du 24 au 31 décembre (arrêt du 13 mars 2024).

  • déterminer le nombre de jours de fermeture de l’entreprise : cette durée ne doit cependant pas dépasser 24 jours ouvrables consécutifs (quatre semaines) (article L.3141-17 du code du travail). Il est donc tout à fait possible pour un employeur d’imposer quatre semaines de fermeture en août et une semaine en décembre ;

► Si l’entreprise ferme plus de 30 jours par an, c’est-à-dire au-delà de la durée légale de congé, l’employeur doit verser à son personnel une indemnité pour chacun des jours excédant la durée légale de congé. Cette indemnité ne peut pas être inférieure à l’indemnité journalière de congés payés (article L.3141-31 du code du travail).

  • consulter le CSE : l’employeur doit recueillir son avis sur la période choisie et sur la durée de la fermeture. Toutefois même en présence d’un avis négatif, l’employeur peut fermer l’entreprise durant la période choisie (article L.2312-8 du code du travail) ;
  • informer les salariés de la fermeture de l’entreprise : la période de prise de congés payés doit être portée à la connaissance des salariés au moins deux mois avant l’ouverture de cette période. La date de fermeture doit être communiquée au moins un mois avant la fermeture de l’entreprise (articles D.3141-5 et D.3141-6 du code du travail).

Un choix qui s’impose aux salariés

Lorsque la décision de fermeture a été prise en respectant les conditions légales ou conventionnelles, le salarié doit se plier aux dates de fermeture et ne peut pas prendre ses congés à une autre date. Si le salarié ne respecte pas les dates de congés qui lui ont été imposées, il s’expose à une sanction disciplinaire pouvant aller, selon les circonstances, de l’avertissement au licenciement pour faute grave (arrêt du 19 janvier 2005).

Quelle est l’incidence de Noël et du jour de l’An ?

Cette année, Noël et le jour de l’An tombent un mercredi qui est un jour ouvrable. Ces deux journées sont des jours fériés légaux ordinaires (C. trav., art. L.3133-1), c’est-à-dire que l’obligation de repos ne s’impose légalement que pour les jeunes de moins de 18 ans (article L.3164-6 du code du travail), étant précisé qu’il peut être dérogé à cette interdiction de travail des jeunes les jours fériés dans certains secteurs listés par décret (articles L.3164-8 et R.3164-2 du code du travail) et dans les usines à feu continu (article L.3164-7 du code du travail).

► Dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, le droit local prévoit non seulement que ces jours sont chômés mais il prévoit deux jours fériés supplémentaires dont le 26 décembre (article L.3134-13 du code du travail).

En pratique, ces deux jours fériés sont généralement chômés, en application d’usages professionnels ou de conventions collectives. Il convient de distinguer les situations suivantes pour mesurer leur incidence sur les congés payés :

  • lorsque les congés sont décomptés en jours ouvrables, il sera décompté un jour de congé en moins (arrêt du 27 octobre 2004 et arrêt du 24 septembre 2024) ;
  • lorsque les congés sont décomptés en jours ouvrés et que ce décompte n’est qu’une simple transposition du décompte en jours ouvrables (30 jours ouvrables = 25 jours ouvrés), un jour de congé en moins doit être décompté, même si le jour férié tombe un jour ouvrable non travaillé dans l’entreprise (le calcul ne doit pas être moins favorable qu’en jours ouvrables). En revanche, si le décompte en jours ouvrés permet aux salariés de bénéficier d’un nombre total de jours de congé supérieur à ce que prévoit la loi, le jour férié qui coïncide avec un jour ouvrable non travaillé n’a aucune incidence (ce sera le cas si un accord prévoit un nombre de jours de congé supérieur aux congés légaux).

Quelles solutions pour les salariés qui n’ont pas suffisamment de congés pour couvrir la période de fermeture ?

Dès lors que les règles relatives à la fixation des congés payés ont été respectées, l’employeur peut imposer la fermeture de l’entreprise pour congés payés à tous ses salariés même à ceux qui n’ont pas suffisamment de jours pour couvrir toute la période de fermeture soit parce qu’ils sont arrivés récemment dans l’entreprise, soit parce qu’ils ont déjà pris tous leurs jours de congé. Ils ne reçoivent ni rémunération ni indemnité d’activité partielle. Il existe toutefois des solutions pour que ces derniers soient indemnisés pendant cette période.

Proposer des congés payés anticipés ou des RTT 

L’employeur peut ainsi leur proposer de prendre des RTT (s’ils y ont droit) ou des jours de congés payés par anticipation. Si le salarié est d’accord, l’employeur devra recueillir son consentement écrit. Si un salarié ne souhaite pas prendre des congés par anticipation, il sera obligé de prendre un congé sans solde non rémunéré.

Informer les nouveaux embauchés de la possibilité d’obtenir une aide pour congés non payés versée par France Travail

Si le salarié a été récemment embauché et que l’entreprise ferme, sans qu’il ait pu acquérir suffisamment de droit à congés payés, l’employeur doit l’informer qu’il peut prétendre à l’aide pour congés non payés auprès de France Travail (Règlement d’assurance chômage annexé au décret n° 2019-797, du 26 juillet 2019, article 37). C’est au salarié de réaliser les démarches pour obtenir cette aide et non à l’employeur.

Pour bénéficier de cette aide, le salarié doit :

  • avoir été indemnisé par France Travail et ne pas avoir épuisé ses droits au titre de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) ou de l’allocation de sécurisation professionnelle (ASP) ;
  • avoir repris une activité salariée dans une entreprise qui ferme pour congés, sans avoir eu le temps d’acquérir assez de droits à congés payés pour être rémunéré durant la fermeture ;
  • ne plus être inscrit comme demandeur d’emploi.

Le montant de l’aide est déterminé en tenant compte du nombre de jours de fermeture de l’entreprise et des droits à congés payés éventuellement acquis au titre de l’emploi en cours.

Quid des salariés en CDD, en période d’essai ou en arrêt maladie au moment de la fermeture de l’entreprise ?

Si l’entreprise ferme pendant la durée des congés et que le salarié recruté sur contrat à durée déterminée n’a pas droit à un congé correspondant à la durée de la fermeture de l’entreprise, il peut prétendre à l’aide ci-dessus si les conditions sont remplies.  Par ailleurs, la fermeture de l’entreprise pour congés payés ne retarde pas le terme du CDD (arrêt du 25 février 2004). Une clause prévoyant que le CDD sera suspendu pendant la période de fermeture de l’entreprise pour congés payés peut d’ailleurs être insérée dans le contrat.

Si un salarié est en période d’essai au moment de la fermeture de l’entreprise, cette période sera prorogée d’une période équivalente à celle de la fermeture (arrêt du 16 mars 2005 et arrêt du 31 janvier 2018).

Enfin, si le salarié tombe malade pendant la période de fermeture, il ne pourra pas voir ses congés payés reportés. Ni le code du travail ni la jurisprudence ne prévoient le report des congés dans une telle hypothèse. En revanche, si le salarié est en arrêt pour maladie ou accident (d’origine professionnelle ou non) avant la période de fermeture de l’entreprise, l’employeur doit reporter les congés posés pour cette période. En effet depuis le 24 avril 2024, lorsqu’un salarié est dans l’impossibilité, pour cause de maladie ou d’accident, de prendre au cours de la période de prise de congés tout ou partie des congés qu’il a acquis, il bénéficie d’une période de report de 15 mois afin de pouvoir les utiliser (article L.3149-19-1 du code du travail).

Karima Demri

L’Igas identifie les enjeux sociaux du changement climatique

19/12/2024

Dans un rapport publié hier, l’Inspection des affaires sociales (Igas) formule plusieurs recommandations afin d’intégrer dans les politiques climatiques les enjeux sociaux relatifs aux populations vulnérables et aux travailleurs, parmi lesquelles : 

  • lancer des travaux d’expertise, y compris au niveau territorial, sur le lien entre changement climatique et santé au travail en France ; 
  • améliorer l’intégration des différents niveaux de vulnérabilité sociale (y compris pour les travailleurs) dans les planifications existantes en matière d’adaptation et d’atténuation du changement climatique ; 
  • identifier les territoires économiquement les plus impactés par les effets directs du changement climatique, à court/moyen/long terme, et les conséquences pour l’emploi, incluant les effets en termes de migrations internes. 

L’Igas souligne également l’importance du dialogue social en la matière. Pour l’heure, la France reste à la traîne. “La France est dans une situation comparable au reste de l’Union Européenne : selon la DGT, qui s’appuie sur son dernier bilan de la négociation collective disponible (données de 2022), les accords ne comportent que peu de développements sur la transition écologique”, note l’Igas.

Les représentants du personnel interrogés en France et en Espagne ont souligné l’importance de disposer de “ressources supplémentaires” pour “mieux appréhender le sujet du changement climatique : la formation et un temps dédié à ce sujet pour les représentants sont cités comme des leviers souhaitables”.

En Espagne, par exemple, les entreprises, dans le cadre de certaines conventions collectives, peuvent mettre en place un délégué environnement, spécialisé dans les questions environnementales. 

Source : actuel CSE

La mise à pied disciplinaire ne nécessite pas l’accord du salarié protégé

20/12/2024

La mise à pied disciplinaire n’est pas subordonnée à l’accord du salarié protégé. En effet, il ne s’agit pas d’une modification de son contrat de travail ni un changement de ses conditions de travail.

La question des sanctions disciplinaires des salariés protégés implique d’articuler deux principes : la soumission des représentants du personnel, comme tous les salariés, au pouvoir disciplinaire de l’employeur, et l’interdiction d’imposer à un salarié protégé toute modification de son contrat ou de ses conditions de travail sans son accord.

L’arrêt publié du 11 décembre 2024 de la Cour de cassation tranche cette question concernant la mise à pied disciplinaire d’un salarié protégé, pour la première fois à notre connaissance.

► Rappelons d’emblée que la mise à pied disciplinaire est comme son nom l’indique une sanction disciplinaire. Elle fait partie des sanctions “lourdes”, tandis que la mise à pied conservatoire est, elle, une mesure d’attente, préalable à un licenciement pour faute grave. Dans ce dernier cas, l’employeur doit respecter la procédure protectrice. Des délais spécifiques s’appliquent alors (C. trav., art. L. 2421-1 et R. 2421-6 pour les mandats syndicaux ;  R. 2421-14 et L. 2421-3, pour les membres du CSE).

La mise à pied disciplinaire d’un salarié protégé…

Dans cette affaire, un salarié protégé se voit notifier une mise à pied disciplinaire de 5 jours. Il saisit le conseil des prud’hommes pour obtenir l’annulation de cette mise à pied.

La cour d’appel annule cette mise à pied au motif que celle-ci emportant une modification de la rémunération du salarié et de la durée du travail pendant cette période, l’employeur aurait dû informer le salarié de son droit d’accepter ou de refuser cette sanction.

L’employeur conteste cette décision. Il argue que la sanction disciplinaire de mise à pied n’emporte aucune modification du contrat de travail, ni même de changement des conditions de travail, ayant seulement pour effet de suspendre provisoirement les effets du contrat de travail.

…n’est pas une modification du contrat ou des conditions de travail nécessitant son accord…

La Cour de cassation est d’accord. Elle explique que “la mise à pied disciplinaire du salarié protégé, qui n’a pas pour effet de suspendre l’exécution du mandat de représentant du personnel et n’emporte ni modification de son contrat de travail ni changement de ses conditions de travail, n’est pas subordonnée à l’accord du salarié”.

On ne saurait être plus clair.

À notre connaissance, la Cour de cassation ne s’est jamais prononcée sur la nature de la mise à pied disciplinaire prononcée à l’encontre d’un salarié protégé. 

Par sécurité, il était souvent conseillé aux employeurs d’informer les salariés protégés de leur droit d’accepter ou de refuser une sanction ayant des conséquences sur la durée du travail et la rémunération du salarié. En effet, la jurisprudence relative à la modification du contrat ou des conditions de travail du salarié protégé est assez stricte, et exige cet accord quelle que soit l’origine de la modification (économique, disciplinaire, inaptitude, etc.) (Cass. soc., 2 mai 2001, n° 98-44.624 ; Cass. soc., 6 avr. 1999, n° 97-40.499 ; Cass. soc., 30 avr. 1997, n° 95-40.573 ; Cass. crim., 26 nov. 1996, n° 94-86.016).

► À noter que la mise à pied disciplinaire, pour être valable, doit être prévue comme sanction applicable dans le règlement intérieur de l’entreprise, lequel doit préciser sa durée maximum (qui doit bien sûr être respectée) (Cass. soc., 26 oct. 2010, n° 09-42.740 ; Cass. soc., 26 févr. 2013, n° 11-28.293). En outre, l’employeur doit, comme pour tous les salariés, respecter la procédure disciplinaire prévue aux articles L. 1332-1 et suivants du code du travail.

… mais une sanction provisoire et n’affectant pas le mandat

La chambre sociale se fonde sur l’article L. 2411-1, 2° du code du travail, lequel dresse la liste des salariés protégés. En outre, elle précise dans sa solution que la mise à pied disciplinaire “n’a pas pour effet de suspendre l’exécution du mandat du représentant du personnel”.

Il s’agit, d’après nous, de bien souligner que le salarié protégé continue de pouvoir exercer son mandat, mais reste un salarié de l’entreprise, à ce titre soumis au pouvoir disciplinaire de l’employeur.

En outre, il nous semble que le caractère provisoire de la sanction a son importance. En effet, une rétrogradation ou une mutation disciplinaire, lesquelles constituent une modification du contrat nécessitant l’accord du salarié (Cass. soc., 26 juin 1991, n° 88-41.147 ; Cass. soc., 15 févr. 2023, n° 21-20.572 ; Cass. soc., 3 mars 1999, n° 96-45.306 ; Cass. soc., 25 nov. 1997, n° 94-42.727), est définitive. Ce n’est pas le cas d’une mise à pied disciplinaire.

À cet égard, la Cour de cassation a récemment décidé qu’un déplacement professionnel provisoire s’imposait à un salarié protégé. La chambre sociale a précisé que dès lors que ce déplacement était exceptionnel et qu’il n’affectait pas l’exercice du mandat, il ne s’agissait pas d’une modification ou d’un changement des conditions de travail, et que l’employeur n’avait donc pas à recueillir l’accord du salarié protégé (Cass. soc., 11 sept. 2024, n° 23-14.627). La solution du 11 décembre 2024 semble s’inscrire dans cette logique.

Séverine Baudouin

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : CESE, épargne, formation, gouvernement, nominations, Mayotte

20/12/2024

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du vendredi 13 décembre au jeudi 19 décembre inclus.

► Nous ne traitons pas ici les textes liés aux conventions collectives, car nous vous proposons tous les mois un baromètre des branches sur ces nouveautés.

CESE

Épargne

  • Un avis fixe le taux de rémunération des plans d’épargne-logement

Formation

Gouvernement

Nominations

  • Un arrêté du 11 décembre 2024 porte nomination à la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du Conseil d’orientation des conditions de travail (Frédéric Maitre, CGT)
  • Un arrêté du 11 décembre 2024 porte nomination à la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du Conseil d’orientation des conditions de travail (Estelle Saminadane, FO)
  • Un arrêté du 9 décembre 2024 porte nomination à la commission spécialisée relative à la prévention des risques physiques, chimiques et biologiques du Conseil d’orientation des conditions de travail (Aurélia Cordevant, Medef)
  • Un arrêté du 10 décembre 2024 porte nomination sur l’emploi de directeur régional adjoint de la direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités d’Occitanie, chargé des fonctions de responsable du pôle “politique du travail”
  • Un arrêté du 10 décembre 2024 portant nomination sur l’emploi de responsable du pôle “politique du travail” à la direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités de Guadeloupe
  • Un arrêté du 16 décembre 2024 précise la composition du cabinet du Premier ministre (Nicolas Pernot nommé directeur de cabinet et Pierre-Emmanuel Potheret chef de cabinet)
  • Un arrêté du 11 décembre 2024 porte nomination à la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du Conseil d’orientation des conditions de travail

Mayotte

Source : actuel CSE

Hommage national à Mayotte lundi : les employeurs doivent permettre aux salariés d’y participer

20/12/2024

Par décret du 19 décembre 2024, le gouvernement déclare le lundi 23 décembre 2024 jour de deuil national en hommage aux victimes du cyclone Chido qui a dévasté le département de Mayotte le 14 décembre 2024.

Dans ce cadre, un hommage national sera rendu aux victimes du cyclone Chido à 11h. A cet effet, “les employeurs sont invités à permettre à leurs salariés d’y participer”.

Un arrêté du 19 décembre 2024 reconnaît l’état de catastrophe naturelle pour les dommages causés par les chocs mécaniques des vagues, les vents cycloniques et les inondations et coulées de boue à Mayotte. 

Source : actuel CSE

François Bayrou propose d’aménager d’ici septembre la réforme des retraites

20/12/2024

Nommé Premier ministre le 13 décembre, François Bayrou a proposé hier aux forces politiques issues des législatives, à l’exception du Rassemblement national (RN) et de LFI (la France insoumise), de participer à son gouvernement ou à tout le moins de “participer au dialogue”. Le Premier ministre, qui entend nommer son gouvernement avant Noël, leur donne jusqu’à ce vendredi soir pour se prononcer.

À cette occasion, François Bayrou a déclaré : “Je propose de reprendre, et non pas de suspendre, la réforme des retraites, et de mettre en place un travail approfondi d’ici septembre, soit 8 à 9 mois pour conduire ce travail avec l’ensemble des forces économiques et sociales, et avec l’ensemble des forces politiques qui sont représentées dans notre Parlement”. 

Au sujet des retraites, le Premier ministre a précisé hier soir sur France 2 qu’il ne s’agissait pas d’abroger la réforme tout en considérant qu’il y a d’autres possibilités que l’âge de départ à 64 ans : “J’accepte que chacun des syndicats mette sur la table ce qu’il souhaite. Il est normal que ceux qui sont au marteau-piqueur partent plus tôt. J’accepte qu’on rouvre tous les sujets (..) Mais il faut se poser la question du financement des retraites (..) A terme, si on ne trouve pas de solution en commun, on en restera avec la loi d’aujourd’hui, cela place chacun face à ses responsabilités”.

François Bayrou a précisé qu’il s’engageait à ne pas utiliser le 49.3 “sauf en cas de blocage sur le budget”. Répondant à une interpellation de Sophie Binet (CGT), le Premier ministre a expliqué que la solution ne consistait pas à augmenter les impôts des entreprises. “J’espère qu’on peut avoir un budget à la mi-février”, a-t-il dit en précisant que le gouvernement reprendrait les textes suspendus par la censure. 

Les déclarations des responsables politiques, à la sortie de cette réunion commune, invitent à la prudence. 

Les Républicains (LR) ont réagi en réclamant, pour s’engager, une “feuille de route claire” (baisse des dépenses publiques, absence de hausse d’impôts, etc.). 

Le Parti socialiste (PS) se déclare “insatisfait” des échanges tout en reconnaissant “une toute petite ouverture” sur les retraites. Le secrétaire du PS regrette que le Premier ministre ne remette pas en cause l’âge de départ de 64 ans ni n’évoque un gel de la réforme, Olivier Faure évoquant toujours la possibilité d’une censure. 

Source : actuel CSE