La Cour des comptes suggère de nouvelles économies sur les arrêts maladie
15/04/2025
La Cour des comptes a publié hier une note visant à dégager de nouvelles sources d’économies pour l’assurance maladie. Sans surprise, les arrêts de travail sont une nouvelle fois dans le collimateur des magistrats financiers.
La Cour des comptes a publié lundi 14 avril une note de synthèse sur l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) afin de “maîtriser sa progression” tout “en veillant à la qualité des soins”. Dans leur constat, les magistrats financiers pointent les indemnités journalières de sécurité sociale comme l’une des sources de la forte progression de l’Ondam.
La Cour des comptes constate ainsi que “les durées d’arrêt de travail prescrites par les médecins sont supérieures à celles prévues par les référentiels : parmi les motifs les plus fréquents correspondant à 2,9 millions d’arrêts, plus de 40 % des journées prescrites (9 millions) excèdent les durées les plus longues préconisées, notamment pour troubles anxiodépressifs, lombalgie, gastro-entérite virale, grippe saisonnière et angine, selon les données de la Cnam” (Caisse nationale de l’assurance maladie).
Alléger encore le poids des indemnités journalières de sécurité sociale
L’une des pistes proposées par la Cour des comptes est “en concertation avec les partenaires sociaux, [d’] alléger la charge pour l’assurance maladie obligatoire des indemnités journalières maladie des salariés” à hauteur de 0,5 Md€.
Les magistrats financiers rappellent que “la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 prévoit déjà une baisse du plafond de revenus pris en compte pour calculer les indemnités journalières dues au titre de l’assurance maladie de 1,8 à 1,4 Smic, soit une économie en année pleine estimée de 0,6 à 0,8 Md€ par les administrations [depuis le 1er avril 2025]”.
La Cour estime que “la limitation de la prise en charge par la branche maladie de la sécurité sociale et le transfert vers les employeurs et les salariés pourrait permettre d’économiser jusqu’à 950 M€. En actionnant en complément certains autres leviers, une économie supplémentaire de 0,5 Md€ pourrait être faite”. La Cour des comptes fait notamment référence à l’allongement du délai de carence, à la réduction de la durée maximale d’indemnisation, à l’instauration d’un jour de carence d’ordre public ou à l’absence d’indemnisation par l’assurance maladie des arrêts de courte durée.
Tenir compte de la sous-évaluation des AT-MP
Dans cette optique d’un meilleur équilibre des financements issus des employeurs et des salariés, la Cour des comptes suggère de mieux prendre en compte la sous-évaluation des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).
“Les indemnités journalières liées aux AT-MP sont prises en charge par une branche dont le financement repose sur les cotisations des seuls employeurs, souligne la Cour des comptes. Une incertitude sur l’imputation du coût des indemnités journalières entre la branche maladie et la branche AT-MP conduit à faire supporter par la première des coûts qui relèvent de la seconde”.
Elle estime qu’une “meilleure prise en compte du coût de cette prise en charge permettrait de mobiliser davantage les employeurs dans la prévention des accidents du travail dont ils assurent le financement”.
Elle pointe notamment la sous-évaluation des coûts liés aux AT-MP que la commission chargée de l’évaluation de la sous-déclaration des maladies professionnelles a estimé en juin 2024 comprise entre 2 Md€ et 3,6 Md€.
Il s’agit de “responsabiliser les employeurs dans la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, dès lors qu’ils en assurent le financement, leurs cotisations devant équilibrer les charges de la branche”.
Il s’agit donc de “fixer le montant de la contribution de la branche AT-MP à la branche maladie au niveau médian de l’estimation de la commission chargée de l’évaluation de la sous-déclaration des maladies professionnelles (2,8 Md€), pour un gain de 0,8 Md€”.
Mieux prévenir les fraudes
Enfin, la Cour des comptes préconise un renforcement des actions de la Cnam de lutte contre les fraudes aux arrêts de travail et de régulation auprès des assurés, des prescripteurs et des employeurs.
Elle recommande également d’optimiser la coordination avec les complémentaires de santé. “Le code de la sécurité sociale a organisé un cadre de coordination et d’échanges d’information entre l’assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires de santé en cas d’investigations relatives à la lutte contre les fraudes. Des échanges plus systématiques seraient à développer comme par exemple sur les arrêts de travail pouvant être considérés comme abusifs. Au vu du nombre important d’organismes complémentaires, il s’agirait de simplifier la procédure d’information existante en prévoyant la possibilité de recourir à des intermédiaires conjointement désignés”.
Florence Mehrez
Retraites et financement de la protection sociale : une séance de mise à plat
18/04/2025
Nouvelle séance de discussions consacrée aux retraites, hier après-midi, en l’absence de la CFTC. En effet, mercredi 16 avril, son conseil confédéral a décidé à l’unanimité de ne pas participer aux deux réunions consacrées au financement de la protection sociale. Selon Pascale Coton, la CFTC considère que toutes les organisations syndicales doivent être présentes pour aborder un tel sujet. Elle estime de plus que ce thème ne relève pas de l’objet initial du “conclave”. La vice-présidente de la CFTC craint également que ces séances ne se limitent à des exigences de réduction de cotisations patronales.
Selon les participants (CFDT, CFE-CGC, Medef et CPME), la réunion du jeudi 17 avril a consisté en une remise à plat des finances de la protection sociale. Comme l’a rappelé Yvan Ricordeau (CFDT), “on ne refera pas tout le schéma du financement dans cette délégation paritaire”. Les problématiques de financement ont donc été passées en revue. Pour la CFDT, le système français est équilibré par rapport à celui de ses voisins européens. De plus, le premier syndicat ne remet pas en cause les aspects contributifs du financement de la protection sociale, à savoir le financement des retraites, des accidents du travail et maladies professionnelles, de la santé et de l’autonomie (au travers des salariés aidants) par les cotisations assises sur le travail.
La délégation a également évoqué les effets d’un financement par le la TVA ou de la CSG, les syndicats demeurant conscients que la fiscalisation du financement risque de leur ôter la légitimité du pilotage des systèmes, ces sujets n’étant “pas tabou pour la CFDT”.
Cependant, la CPME considère que le retour à l’équilibre financier doit se faire avec des “solutions intrinsèques au régime des salariés du privé plutôt que de la TVA ou de la CSG”. Elle défend également l’affectation des 0,3 % de la contribution de solidarité au bénéfice de l’autonomie soit reversée aux retraites. L’organisation patronale porte toujours (tout comme le Medef) l’absence d’alourdissement du coût du travail et souhaite aborder le sujet des complémentaires santé.
Au Medef, Diane Milleron Deperrois a placé cette séance dans la droite ligne du discours tenu par François Bayrou il y a quelques jours sur le budget. Elle considère que certains blocs de la protection sociale historiquement financés par les cotisations ne devraient plus l’être : “Les risques financés sont devenus universalisés, et on ne peut ni augmenter les cotisations salariales ni augmenter les cotisations des employeurs”, a-t-elle expliqué.
Côté CFE-CGC, Christelle Thieffine a assuré souhaiter “écrire quelque chose en commun en regardant ce qui relève du contributif et de ce qui ne l’est pas. L’ATMP c’est employeur et cela doit le rester, mais la maladie et la santé c’est de la solidarité, pas du contributif, de même que la famille”. L’idée est donc pour la CFE-CGC de trouver des solutions de financement pesant moins sur les revenus du travail.
La prochaine séance reviendra sur ces sujets en ajoutant la question de la capitalisation. La délégation paritaire reviendra ensuite aux sujets de pilotage global des retraites, d’âge de départ, de durée de cotisation et de solidarité. Des séances pourraient se tenir encore au mois de juin.
Source : actuel CSE
Arrêts maladie : les salariés de moins de 29 ans et de 60 ans et plus contribuent pour plus de moitié à la hausse des dépenses
18/04/2025
La sonnette d’alarme n’en finit pas d’être tirée sur la progression des arrêts maladie.
Après la Cour des comptes, lundi, et le gouvernement mardi, c’est au tour du Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie de s’alarmer dans un avis rendu le 15 avril 2025. Les indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) ont représenté 26,1 % de la croissance des dépenses du sous-objectif des soins de ville en 2024.
“Sur le champ du régime général de sécurité sociale, la croissance en volume des indemnités journalières en 2024 (+ 3,9 points, contre + 3,6 points en valeur) dépasse celle qui pouvait être constatée en moyenne entre 2016 et 2019. Les deux classes d’âge extrêmes (les moins de 29 ans et les 60 ans et plus) contribuent pour plus de moitié à la hausse des dépenses ; c’est aussi pour ces deux classes d’âge que le nombre moyen de jours d’arrêt de travail augmente le plus”, constate le Comité.
S’agissant des arrêts AT-MP, le Comité souligne une croissance de 8 % pour l’ensemble des régimes après correction des jours ouvrés et des variations saisonnières. Une progression “principalement attribuable à la hausse du nombre de jours d’arrêt de travail indemnisés (effet volume), alors que celle du montant moyen de l’indemnité versée (effet prix) avait eu un impact prépondérant en 2023 comme en 2022, sous l’effet des revalorisations du Smic”.
Le Comité rappelle que depuis le 1er avril 2025, le plafond du revenu d’activité pris en compte pour calculer les indemnités journalières maladie a été abaissé de 1,8 à 1,4 Smic.
Le prochain avis sera rendu en juin.
Source : actuel CSE