Le financement des retraites plombé par la baisse des recettes

16/07/2025

Pourquoi ne pas augmenter les cotisations ? Quel bilan dresser de la baisse des recettes ? Quelles nouvelles sources de financement mobiliser ? Lors d’une matinée de débats organisée par l’Ajis et l’Ires, chercheurs et partenaires sociaux ont dressé le bilan de plusieurs années de réformes et tenté de dégager des pistes de financement dont une semble s’imposer : la hausse des cotisations.

L’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis) a organisé, vendredi 11 juillet, une matinée de débats réunissant partenaires sociaux et chercheurs de l’Ires, l’Institut de recherche économique et social. Au cœur du sujet, la place des cotisations dans le financement du système, un rôle que les organisations syndicales défendent bec et ongles. Remplacer les cotisations par l’impôt étatiserait les recettes des retraites et permettrait à l’État de les diminuer à sa guise. Au-delà du débat du pilotage, les chercheurs invités à cette matinée ont dressé un bilan inquiétant, à la fois sur la baisse des recettes et le refus politique de mobiliser les cotisations.

“Les ressources sont programmées à la baisse”

Le constat de Michaël Zemmour, maître de conférences en économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et chercheur au laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques de SciencesPo, sonne l’alarme : “Les besoins sont en hausse et on a des ressources programmées à la baisse”. De plus, pour l’économiste, “on tire le tapis sous le système en disant que l’État a prévu de se retirer”.

Il porte donc une solution : il n’existe aucune raison de ne pas augmenter les cotisations assises sur les salaires, d’autant que le levier des recettes lui semble à “soutenabilité forte”. Dit autrement, les salariés sont, selon les études, favorables à une hausse des cotisations pour consolider et développer leurs droits à la retraite.

Les cotisations, Graal de financement ?

Il est rejoint sur ce point par un chercheur de l’Ires, Antoine Math. Selon ce dernier, la hausse des cotisations est hélas présentée dans le débat public comme “une option non discutable”. Pourtant, assure-t-il, le choix entre les trois leviers de financement, à savoir l’âge de départ, le montant des pensions et les cotisations, est “parfaitement débattable” et constitue un choix de société de nature politique.

Le chercheur ajoute que l’appel à cotisations a été interrompu depuis trente ans. En parallèle, le taux de cotisation patronal a fortement diminué à partir des années 2010″. Pourtant, note Antoine Math, une hausse de 0,8 point de cotisations salariales étalée sur 45 ans ne représente que 0,018 point de cotisations à payer en plus pour les salariés, soit une somme dérisoire, en particulier sur la base d’une augmentation des salaires supérieure à 0,13 % par an en moyenne.

Autre sujet soulevé par le chercheur, qui se trouve selon lui à la racine du problème du sous-financement des retraites : les non-compensations d’exonérations par l’État qui représentent 10 milliards d’euros de manque à gagner pour la Sécurité sociale de 2018 à 2023, et dont 60 % concernent la branche vieillesse… Une “machine infernale” qu’il est urgent d’arrêter. Antoine Math suggère par exemple de soumettre la participation et l’intéressement aux cotisations et d’élargir l’assiette du taux de cotisation vieillesse fin de dénicher de nouvelles ressources.

Une “sur fiscalisation” du revenu

Pour Olivier Redoulès, chercheur rattaché à l’institut Rexecode (plus proche des organisations patronales), le salaire fait l’objet d’une surcharge de prélèvements. Une “sur fiscalisation” qui selon lui “est neutre pour le salarié car à la fin, soit il choisirait d’épargner lui-même, soit il retrouve du revenu différé”. Il qualifie ce trop-plein de prélèvements de “choix pernicieux” qui démobilise à la fois l’offre et la demande.

Par ailleurs, Olivier Redoulès souligne un autre déséquilibre : celui des écarts de niveaux de vie entre les retraités et les actifs. Si aujourd’hui la situation des retraités leur est plutôt favorable, ce ne serait plus le cas pour les générations futures. Une solution de long terme selon lui : ajouter un fonds de capitalisation collectif “permettant de doper le rendement du système et trouver de nouvelles ressources”. Mais si les organisations patronales valident cette option, les syndicats y sont, eux, farouchement opposés.

La capitalisation, meilleure ennemie des salariés ?

Un seul point réunit patronat et syndicats sur ce sujet : la volonté de ne pas remplacer le système actuel par répartition par un système généralisé de capitalisation. En revanche, tous ne déroulent pas le tapis rouge à “la capi”. À la CFDT, si on ne s’y oppose pas, Yvan Ricordeau souligne qu’il faudra “sacrifier une génération” car ajouter un étage de capitalisation nécessitera de réduire la répartition. De ce fait, pendant 1 an, certains salariés n’en bénéficieront plus et ne toucheront pas encore les bénéfices de leurs fonds placés en capitalisation.

À la CGT, Denis Gravouil est quant à lui fortement opposé à la capitalisation, d’une part parce qu’elle ne permet pas de préserver la solidarité inhérente à la répartition, et d’autre part parce que des fonds de capitalisation placés en Bourse font planer sur les pensions les risques des krachs boursiers. Au contraire, Michel Picon (syndicat patronal U2P) voit la capitalisation comme “une réponse pragmatique au déséquilibre démographique de nos sociétés”, d’autant qu’il juge le rendement financier plus élevé que celui de la répartition.

Sur ce point, il reçoit le soutien de l’autre organisation patronale présente aux débats, la CPME (le Medef ayant refusé l’invitation). Son président récemment élu, Amir Reza-Tofighi, reconnaît qu’il faudra résoudre la difficulté de l’amorçage des ressources mais avance que les fonds de capitalisation pourraient être réinvestis dans l’économie réelle française.

Mais quand bien-même la capitalisation serait gérée par les partenaires sociaux, c’est non pour Frédéric Souillot (Force Ouvrière) qui s’oppose d’emblée au terme “capitalisation”. Il souligne également la nécessité de protéger les salariés des fluctuations des marchés, d’autant que selon lui, “si la capitalisation rapporte plus que la répartition, c’est uniquement sur une carrière complète”, laissant donc de côté les femmes et les salariés aux parcours interrompus.

“C’est un problème de partage de la valeur”, a insisté François Hommeril (CFE-CGC). A rebours des avis patronaux, il soutient que la capitalisation n’offre pas de meilleur rendement que la répartition, en particulier aux Pays-Bas où ce système est obligatoire. Enfin, Cyril Chabanier (CFTC) se montre davantage ouvert à la capitalisation, à condition qu’elle ne concerne pas que les salariés les plus aisés des grandes entreprises. Il faudrait aussi “que le patronat mette un peu d’argent sur la table…”.

“Foutez la paix aux retraités !”
Les débats du vendredi 11 juillet ont également abordé la question d’un gel des pensions de retraite, alors que François Bayrou étudie avec le plus grand sérieux l’hypothèse d’une “année blanche” sur les prestations sociales pour rapporter 40 milliards d’euros dans le prochain budget.

Faire payer les retraités, c’est hors de question pour certains syndicats. Denis Gravouil (CGT) s’y oppose en rappelant que tous les retraités ne sont pas aisés et privilégie une hausse de la fiscalité des plus gros patrimoines, tandis que Frédéric Souillot (FO) se fend d’un grand “Foutez la paix aux retraités, ils payent déjà de l’impôt”. Au passage, le  comité de suivi des retraites ayant recommandé une sous-indexation des pensions de retraite cumulée de 1,9 point à l’horizon 2030, voire une hausse de l’âge légal ou une action sur le taux de remplacement (la différence entre le salaire et la pension de retraite), Michel Beaugas, secrétaire confédéral en charge des retraites chez FO a rappelé que selon lui, “l’équilibre et la préservation de notre système de retraite par répartition doivent reposer sur les cotisations salariales et patronales”. 

Si la CFDT s’y montre plus ouverte, Yvan Ricordeau défend cependant un relèvement du minimum contributif et l’absence de tout gel intégral des pensions quel que soit le revenu. Pour François Hommeril (CFE-CGC) et Cyril Chabanier (CFTC), un effort des retraités devra nécessairement s’accompagner d’un effort des entreprises.

Marie-Aude Grimont

L’APLD rebond ouvre droit à l’attribution de points Agirc-Arrco

16/07/2025

Une circulaire Agirc-Arrco du 30 juin 2025 étend aux bénéficiaires de l’activité partielle longue durée “Rebond” (APLD-R) l’application de l’article 67 de l’accord national interprofessionnel du 17 novembre 2017. Cette disposition permet la validation des périodes d’activité partielle dans le régime Agirc-Arrco (retraites complémentaires) s’agissant des salariés indemnisés au titre de l’activité partielle prévue à l’article L.5122-1 du code du travail, ce qui n’inclut pas l’APLD-R.

Par mesure de cohérence, les partenaires sociaux ont décidé d’adopter, par une délibération du 19 juin 2025, l’attribution de points Agirc-Arrco aux salariés en APLD-R, dans les mêmes conditions que pour l’activité partielle visée à l’article 67 de l’ANI et l’activité partielle longue durée (APLD) pour toute la durée d’application du dispositif.

Ainsi, des points Agirc-Arrco seront accordés aux salariés placés en activité partielle indemnisée par l’employeur au-delà de 60 heures chômées dans l’année civile.

Source : actuel CSE