Salaires conventionnnels : les syndicats de l’industrie pharmaceutique réclament à l’Etat de faire pression sur les employeurs
Les syndicats de la branche de l’industrie pharmaceutique, dans un communiqué publié vendredi 13 mai, sollicitent des pouvoirs publics qu’ils fassent pression sur les entreprises du secteur en vue d’une revalorisation de l’ensemble des salaires de la grille conventionnelle. Les organisations CFDT, CFE-CGC, UNSA, CGT, FO, CFTC disent avoir sollicité cette revalorisation en début d’année, dans le cadre de la clause de revoyure de l’accord de novembre 2021 sur les minimas conventionnels. Mais ils déporent n’avoir obtenu en retour de la part des entreprises du médicament que des propositions minimales : seul le premier des 11 groupes de la grille, soit 0,5 % des salariés de la branche, se verrait accorder 2,6% d’augmentation, les deux groupes suivants (représentant 13% des salariés de la branche) recevant une prime temporaire de 20 € brut par mois. “L’indécence de ces propositions non-négociables orchestre la paupérisation inéluctable des salariés mobilisés sans répit pour la santé de tous”, dénoncent les syndicats qui ont décidé de cesser les discussions et d’en appeler aux pouvoirs publics afin qu’ils rappellent “aux entreprises du médicament leur responsabilité sociale et sociétale”.
Le baromètre des branches d’avril 2022
Quelles ont été en avril 2022 les nouvelles dispositions applicables dans les branches professionnelles ? Notre tableau fait le point.
Grâce au travail de veille de l’équipe du Dictionnaire Permanent Conventions collectives des Éditions Législatives (Lefebvre Dalloz), société éditrice d’actuEL-CSE.fr, nous vous proposons chaque mois un rendez-vous thématique consacré aux branches professionnelles. Il n’est pas question pour nous d’être exhaustif sur ce sujet. Mais de vous signaler, au travers des arrêtés d’extension parus au Journal officiel qui rendent obligatoires des dispositions pour toutes les entreprises d’une branche, ainsi qu’au travers d’accords récents, quelques tendances dans l’activité conventionnelle.
Ce baromètre nous paraît d’autant plus intéressant que la loi Travail, puis les ordonnances Macron, ont redéfini les possibilités de négociation données aux branches par rapport aux niveaux de la loi et de la négociation d’entreprise. En outre, une vaste opération de fusion des branches existantes est en cours, le gouvernement souhaitant en réduire fortement le nombre.
Baromètre des branches : avril 2022 | |
Volume des textes parus au Journal officiel relatifs aux branches professionnelles | 57 accords élargis/étendus, dont 22 au moins partiellement relatifs aux salaires, sont parus en mars 2022. Une fois étendus ou élargis, les accords et avenants deviennent obligatoires pour tous les employeurs, généralement le lendemain de la date de la publication de l’arrêté au Journal officiel. Exemples d’accords ou avenants étendus ou agréés : – un texte relatif aux congés exceptionnels pour événements familiaux et congé de solidarité familiale signé dans la branche des entreprises artistiques et culturelles (IDCC 1285, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux congés de proche aidant et congé de solidarité familiale signé dans la branche des autoroutes (IDCC 2583, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux congés en cas de décès d’un enfant et congé de deuil signé dans la branche des entreprises artisanales de boulangerie-pâtisserie (IDCC 843, voir l’arrêté) ; – un texte relatif au nouveau régime de travail à temps partiel signé dans la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires (IDCC 1517, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à l’amélioration des congés exceptionnels pour événements familiaux signé dans la branche de la désinfection, désinsectisation, dératisation (IDCC 1605, voir l’arrêté) ; – un texte relatif au contrat de chantier ou d’opération signé dans la branche des ouvriers, ETAM et cadres de la métallurgie (accords nationaux) (IDCC 20306, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à l’agrément du versement des indemnités mensuelles “Laforcade 1” et “Ségur 2” signé dans la branche de la mutualité (IDCC 2128, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux congés en cas de décès d’un enfant et congé de deuil signé dans la branche de la pharmacie d’officine (IDCC 1996, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux durées de la période d’essai et du préavis dans les entreprises de conception-fabrication d’articles de sport, dans la branche des commerces des articles de sport et équipements de loisirs (IDCC 1557, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à la suppression des dispositions relatives à la rémunération des titulaires d’un contrat de professionnalisation signé dans la branche des commerces des articles de sport et équipements de loisirs (IDCC 1557, voir l’arrêté) ; – un texte relatif au congé de paternité et d’accueil de l’enfant signé dans la branche des agences de voyage et de tourisme (IDCC 1710, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux nouvelles contreparties financières au travail du dimanche et des jours fériés et au travail de nuit signé dans la branche du transport ferroviaire et activités associées (IDCC 3217, voir l’arrêté) ; – un texte relatif aux conditions de mise en place du télétravail signé dans la branche de la distribution et commerce de gros de papiers-cartons (IDCC 3224, voir l’arrêté). |
Accords liés à la crise sanitaire du Coronavirus et à l’épizootie d’influenza aviaire | Des mesures exceptionnelles ont été prises pour faire face à l’épidémie de Coronavirus, notamment l’activité partielle de longue durée (APLD). Elle permet, sous réserve notamment de la conclusion d’un accord d’entreprise, d’établissement ou de branche étendu, de diminuer l’horaire de travail des salariés. Ces derniers perçoivent une indemnité plafonnée à 4,5 SMIC et fixée en pourcentage de leur rémunération brute. Branche du travail temporaire (salariés intérimaires) : accord du 15 avril 2022 applicable pour une durée de 24 mois à compter du lendemain de la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les engagements de l’employeur en matière d’emploi doivent porter sur l’absence de rupture anticipée du contrat en raison de difficultés économiques de l’entreprise utilisatrice au sein de laquelle les salariés sont mis à disposition. Branche des industries de transformation de volailles : accord du 28 mars 2022 applicable à compter du lendemain de la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension et jusqu’au 30 juin 2025. L’employeur doit s’engager à encadrer les conditions de détermination des éléments de rémunération des mandataires sociaux de l’entreprise et des actionnaires proportionnellement aux efforts consentis pendant la période d’application du dispositif. Les engagements de l’employeur en matière d’emploi doivent porter sur l’absence de recours au licenciement économique pendant l’application du dispositif dans l’entreprise ou l’établissement. Cependant, cette interdiction ne s’applique pas lorsque le seul volet du PSE est un plan de départs volontaires ou en cas de ruptures conventionnelles collectives. |
Abrogation de conventions collectives régionales au profit d’une CCN unique | Branche de la métallurgie : les conventions collectives régionales de Côte-d’Or (avenant du 18 mars 2022), de Savoie (avenant du 9 février 2022) et de Haute-Savoie (avenant du 4 mars 2022) sont abrogées. Les dispositions de la nouvelle convention collective nationale du 7 février 2022 (non encore étendue) s’appliqueront à compter du 1er janvier 2024. |
Contrat de chantier ou d’opération | Branche de la métallurgie (accords nationaux des ouvriers, ETAM, ingénieurs et cadres) : par un accord du 11 janvier 2022 applicable pour une durée de 3 ans à compter du 14 avril 2022, les partenaires sociaux prolongent la possibilité de recourir à titre expérimental au contrat de chantier ou d’opération. |
Durée du travail | Branche de l’industrie des ciments : par avenant du 9 décembre 2021, les partenaires sociaux fixent le contingent annuel d’heures supplémentaires et prévoient une majoration de salaire en cas de travail le 1er mai. |
Congés exceptionnels | Branche du négoce d’ameublement : par un accord du 10 décembre 2021, les partenaires sociaux créent un congé exceptionnel pour le salarié qui réalise des démarches en vue d’obtenir ou renouveler son statut de salarié en situation de handicap. Branche de l’industrie des ciments : par un avenant du 9 décembre 2021, les partenaires sociaux prévoient un congé en cas de décès d’un enfant et un congé de deuil. Branche des commerces de gros d’habillement, mercerie, chaussure et jouet : par un accord du 3 février 2022, les partenaires sociaux créent un congé exceptionnel pour hospitalisation d’un enfant et un congé de proche aidant. |
Primes Ségur 2 et Laforcade 1 | Branche de la mutualité : par un accord du 15 décembre 2021, les partenaires sociaux prévoient une revalorisation salariale sous la forme d’une indemnité “Ségur 2” (accord applicable depuis le 1er janvier 2022) et d’une indemnité “Laforcade 1” (accord applicable depuis le 1er novembre 2021) au bénéfice de certains professionnels de santé. |
Marie-Aude Grimont, avec l’équipe du Dictionnaire permanent Conventions collectives
Les syndicats mitigés sur la nomination d’Elisabeth Borne
Tous reconnaissent sa parfaite connaissance des dossiers. Elisabeth Borne fait donc l’unanimité auprès des syndicats sur ce point. Ceux qui ont côtoyé de près la nouvelle Première ministre déplorent en revanche l’absence de réelle négociation, notamment sur le dossier houleux de l’assurance chômage.
Ministre des transports, de l’écologie puis du travail, Elisabeth Borne a finalement tracé sa route jusqu’à Matignon (1). Si sa nomination lundi soir par Emmanuel Macron a mis fin à plusieurs jours de rumeurs, elle a aussi déclenché de nombreuses réactions politiques dans l’opposition. Mais côté syndicats, on retient surtout une personne ouverte au dialogue social et qui connaît parfaitement le fonctionnement de l’Etat et les sujets sociaux.
Une compétence indéniable
Les syndicats le reconnaissent : en contact avec Elisabeth Borne sur le chômage ou les retraites, tous ont constaté ses compétences. “Quand on discute de certains sujets, la conversation peut devenir technique et politique. Donc c’est pratique d’avoir en face de soi quelqu’un qui s’y connaît”, avance Michel Beaugas, secrétaire confédéral de Force Ouvrière. Cyril Chabanier ajoute “qu’elle nous donnait toujours des réponses. C’était oui ou c’était non, et ce n’était pas forcément ce que nous souhaitions, mais elle ne laissait pas les sujets en suspens”. Le président de la CFTC a également apprécié la double compétence de la nouvelle Première ministre sur le travail et l’écologie : “Il va falloir s’occuper de la transition écologique et sociale, et nous disons depuis longtemps à la CFTC que ce sont les deux faces d’une même pièce”.
Laurent Berger (CFDT) est en revanche resté très discret sur la nomination d’Elisabeth Borne. Interrogée sur la station de radio FranceInfo, Marylise Léon a refusé de commenter sa personnalité ni son style. Elle attend surtout de connaître la méthode. Les syndicats se montrent en revanche moins satisfaits des négociations qui ont eu lieu sur l’assurance chômage.
Des concertations mais pas de réelle négociation
“Avec Elisabeth Borne, l’espace de négociation était nul !”, affirme François Hommeril. Mais pour le leader de la CFE-CGC, “ce n’était pas forcément la volonté personnelle d’Elisabeth Borne, elle n’avait aucune marge de manoeuvre”. Il reconnaît également que sur le sujet de la dégressivité des allocations chômage des cadres, l’ancienne ministre du travail a écouté, respecté et compris ses positions. Il souhaite désormais “un nouvel espace de discussion où l’on puisse s’engager et des signes d’ouverture du gouvernement, sinon ce sera un échec”.
Eric Chevée, vice-président chargé des affaires sociales de la CPME admet quant à lui “des discussions loyales et transparentes, mais on ne négocie pas, on a tout juste une concertation”. Un point de vue partagé par Roger Dillenseger, ancien secrétaire général de l’UNSA Ferroviaire qui a traité avec Elisabeth Borne la réforme de la SNCF en 2017-2018 : “C’est une personne très rigoureuse, intransigeante voire coriace à la négociation. Elle a su parfaitement s’entourer dans ce dossier et elle connaissait très bien les transports. Nous avons beaucoup dialogué, concerté, mais nous n’avons jamais négocié”. Même sentiment chez Denis Gravouil, négociateur CGT de l’assurance chômage : “Elle n’a pas écouté une ligne de nos propositions d’amendements”.
Dans l’attente du nouveau ministre du travail
Les syndicats attendent désormais la formation du gouvernement au complet. Ils sont particulièrement impatients de connaître le nom du futur(e) ministre du travail. Si François Hommeril (CFE-CGC) souhaite bonne chance à Elisabeth Borne pour son “casting”, il espère que “la raison revienne au sujet des retraites car il ne faut pas mentir aux gens”. Michel Beaugas (FO) assure : “On travaillera avec tout le monde sur la base de nos propres revendications qui ne changent pas d’une personne à l’autre”. Cyril Chabanier (CFTC) attend aussi les noms des ministres de l’Economie et de la santé, “ceux avec lesquels on travaille le plus”. Eric Chevée (CPME) espère quant à lui un ou une ministre du travail qui ne soit pas DRH “car les DRH abordent les relations avec les entreprises sous l’angle des grands groupes. En revanche, un(e) ministre avec du poids politique peut davantage peser dans les arbitrages”.
La composition du gouvernement devrait être connue dans les prochains jours.
- Hier, Elisabeth Borne a nommé Aurélien Rousseau directeur de son cabinet. Ancien directeur général de l’Agence régionale de santé d’Île-de-France, il a travaillé sur la loi Travail sous le quinquennat de François Hollande et exercé des missions à la mairie de Paris.
Marie-Aude Grimont
Négociations salariales : la CFE-CGC demande des clauses de revoyure obligatoires
Le syndicat des cadres a mené une enquête interne auprès de ses délégués syndicaux, négociateurs d’accords salariaux dans toutes tailles d’entreprises. Résultat : 75% des NAO (négociations annuelles obligatoires) se sont conclues par un accord. La qualité des négociations est donc jugée “globalement positive”. 63% des négociateurs CFE-CGC ont obtenu plus de 2% d’augmentation générale. Ils sont 54 % à trouver les salariés “attentifs” aux résultats des négociations. Un point noir cependant : bien qu’obligatoire depuis la loi Rebsamen, le thème du partage de la valeur n’est abordé que dans 36% des NAO. La CFE-CGC relance donc sa proposition de mettre sur pied un index à ce sujet. Enfin, le dialogue social lui semble “de qualité mais fragile”. Elle appelle donc à des clauses de revoyure obligatoires et automatiques “lorsque le SMIC subit deux augmentations dans la même année, comme cela est déjà le cas en 2022”.
actuEL CE