Retraites : syndicalistes et députés préparent la bataille parlementaire

22/10/2024

Les députés Charles de Courson (Liot, Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) et Eric Coquerel (France Insoumise) ont convié les représentants des huit organisations syndicales à une “pré-conférence de financement” des retraites ce lundi 21 octobre au matin à l’Assemblée nationale. Une réunion demandée de longue date qui entend poser un rapport de force politique à quelques encablures des débats sur les retraites issus des niches parlementaires.

“On n’en a pas fini avec la réforme des retraites qui pâtit toujours de son illégitimité”, a clamé Eric Coquerel dès l’introduction de la conférence. Le député La France Insoumise, président de la commission des finances de l’Assemblée, considère que l’année passée a de plus “confirmé les mensonges du gouvernement sur le minimum de pension comme sur le nombre de retraités concernés qui ne seraient que 185 000 au lieu des 750 000 annoncés”.

Le ton est donné et montre que la réforme menée en 2023 contre l’opinion publique et les organisations syndicales n’est toujours pas digérée. Le moment est donc venu d’accentuer la pression en prenant appui sur les syndicats et les meilleurs économistes spécialistes du sujet. Ce timing n’est pas innocent alors que le 31 octobre se tient la journée de niche parlementaire du Rassemblement national qui entend remettre en cause la réforme de 2023.

Les retraites restent un irritant politique et social 

Éric Coquerel a également rappelé que « le gouvernement n’a pas renoncé à ponctionner l’Agirc Arrco puisqu’il pourrait récupérer de 1,2 milliards d’euros en 2026 à 3 milliards à l’horizon 2030 ». Il pointe également le montant d’économies budgétaires annoncé mais selon lui non tenu : loin des 5 milliards d’euros, le Conseil d’orientation des retraites (COR) prévoit un surcoût à long terme à compter des années 2070″.

On le voit, le sujet des retraites est resté épidermique. Bien qu’entrée en vigueur, la réforme continue de jouer le rôle d’agitatrice politique. Cette conférence intervient par ailleurs alors que que les syndicats ont de nouveau réclamé l’abrogation des 64 ans et de l’allongement de la durée de cotisation au nouveau gouvernement de Michel Barnier. Un amendement du Parti Socialiste au PLFSS pour 2025 devrait également remettre les sujets dans le débat public, de même que le parti LFI lors de sa propre niche parlementaire le 28 novembre. Au Sénat, des projets de texte seraient présentés le 23 janvier dans le cadre de la niche communiste puis le 6 février de nouveau à l’Assemblée nationale dans la niche des écologistes.

En attendant ces rendez-vous, Charles de Courson, rapporteur général du budget à l’Assemblée, s’est opposé lui aussi à la ponction des fonds de l’Agirc Arrco : “Foutez la paix aux partenaires sociaux, les retraites représentent 420 milliards, et tout se passe bien sur le régime complémentaire. Je m’oppose au comportement prédateur d’un Etat en déficit structurel”. De fait, les partenaires sociaux et la présidente de l’Agirc Arrco, Brigitte Pisa, ont unanimement rappelé la bonne gestion réalisée par l’organisme de gestion des retraites complémentaires des salariés du privé qui vient d’augmenter les pensions de 1,6 % : “Nous versons 90 milliards de prestation par an, pour 14 millions de retraités, avec 27 millions de cotisants, et le régime est à l’équilibre sur le long terme”.

L’abrogation de la réforme de 2023 est envisageable selon les économistes

Les députés ont également convié trois économistes, dont certains s’étaient illustrés pendant la contestation de la précédente réforme, à commencer par Michaël Zemmour qui avait dénoncé l’absence de véritable retraite minimale à 1 200 euros du gouvernement. Il relève aujourd’hui que revenir sur les 64 ans “n’est pas de l’ordre de l’impossible” et propose une hausse de 0,15 point de cotisation retraite pendant 7 ans, voire 4 ou 5 années supplémentaires si l’on souhaite supprimer le déficit du régime. Une hausse acceptée par les syndicats et d’autant bien digérée par les salariés que ceux-ci se montrent favorables à la préservation de leurs droits à la retraite. “Il n’y a pas de révolte du cotisant, a pointé Michaël Zemmour, mais au contraire un affermissement du soutien au financement de la protection sociale”. Revenir sur la réforme présenterait également l’avantage selon le chercheur associé à SciencesPo de refermer la fracture politique et sociale ouverte par la réforme, et qui se trouve selon lui à l’origine de la crise politique actuelle.

Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE, a rappelé que les retraites doivent relever du choix social des salariés entre le taux de cotisation et l’âge de départ. “Or, ce choix à l’heure actuelle ne va pas dans le sens d’un allongement des carrières mais au contraire une forte la mobilisation contre cet allongement”. Il faut selon lui un autre scénario que celui proposé par le COR et basé sur l’idée d’une absence de recul de l’âge de départ, et qui se résume au chiffrage du coût en termes de points de PIB que les salariés devront payer en conséquence.

Un point de vue largement partagé et développé par Pierre-Louis Bras, lui aussi économiste et ex président du COR dans une tirade mémorable dont il a le secret : “Qui paie les retraites ? Les actifs, pas les entreprises, ni le patronat, ni le capital ! Les cotisations payées par les salariés et les employeurs sont de nature juridique différente, et au final, elles sont payées par les salariés puisque quand on augmente les cotisations employeurs, ils les répercutent sur la hausse du salaire brut. Il faut donc en finir avec cette fiction qui sert à alimenter l’imaginaire de la lutte des classes et de la démocratie sociale”.

En dernière partie de cette “pré-conférence de financement”, les représentants des groupes parlementaires France insoumise (Mathilde Panot), Parti socialiste (Boris Vallaud), Ecologistes (Cyrielle Chatelain) et Liot (Olivier Serva) ont réaffirmé leur soutien à une abrogation de la réforme.

Unanimité syndicale contre les arguments budgétaires de Gilbert Cette

Le président du COR Gilbert Cette (qui a succédé à Pierre-Louis Bras) n’a pas manqué de reprendre un certain nombre de schémas issus du rapport 2024, notamment une comparaison avec les Etats-Unis et les Pays Bas. Le président du COR a pointé les différences de taux d’emploi entre ces pays (10 % en France sur les qui selon lui rejaillit sur les richesses relatives en termes de PIB et expliquent les difficultés des finances publiques françaises. “Quand on parle de réforme des retraites, on ne doit pas penser uniquement financement des retraites mais aussi et surtout finances publiques globalement considérées”

Cette position a fait l’unanimité contre elle et Gilbert Cette, sentant peut-être l’hostilité des participants, s’est éclipsé de la conférence dès la fin de son intervention. Les organisations syndicales ont pointé qu’il justifiait la réforme par un argument de sauvegarde des comptes publics, alors qu’en 2023, le gouvernement prétendait sauver le système de retraites lui-même.

Les syndicats prêtes à rejouer le match
Les représentants syndicaux ont également formulé des propositions dans le sens d’une augmentation des recettes plutôt que d’une baisse des dépenses, à commencer par l’égalité des salaires entre hommes et femmes qui entraînerait une hausse mécanique des cotisations ou l’allongement du temps d’emploi des seniors. Leur présence aux côtés des économistes a rappelé la conférence organisé au CESE sur l’assurance chômage en juin 2024. Sur les retraites, ils restent tout autant déterminés et mobilisés. Extraits de leurs interventions.

Yvan Ricordeau (CFDT) : “Il y a trois déterminants sur les retraites : la justice sociale, la solidarité intergénérationnelle et l’équilibre financier. Il faut revenir sur les 64 ans car ce n’est pas la bonne réponse. Si on répond à l’emploi des seniors, on répond à toutes les questions. Il faut augmenter la quantité de travail : soit on augmente le taux d’activité des seniors, soit on impose violemment un décalage de l’âge.  Il faut améliorer la soutenabilité au travail afin de permettre de continuer à travailler dans de bonnes conditions”

Sophie Binet (CGT) : “Le souci c’est aussi la situation économique de notre pays, où les régimes de retraite se dégradent à cause d’une croissance trop faible car la politique de l’offre est un désastre. Nous proposons de soumettre à cotisations sociales les primes et les sommes issues de l’intéressement et de la participation, d’augmenter de 0,5 point le taux de cotisation retraite, de doubler le forfait social sur l’épargne retraite et de soumettre à cotisation des revenus financiers des entreprises”.

Michel Beaugas (FO) : “Pour le financement des retraites, la solution n’est pas le recul en juillet de la revalorisation des pensions qui pénalise notamment les retraités les plus pauvres. Il faut favoriser l’emploi des seniors, des jeunes et des femmes en pénalisant les employeurs qui ne respectent pas l’égalité salariale. Si les cotisations étaient augmentées d’un point d’ici 2027, cela produirait 15 milliards d’euros de recettes supplémentaires”.

François Hommeril (CFE-CGC) : “La réforme commence à révéler sa vérité non assumée : renflouer les caisses de l’Etat, pas celles du régime par répartition. Le besoin de réformes structurelles est ailleurs. Regardons par exemple les causes de la baisse de la natalité : le manque de stabilité éprouvé par les jeunes, la précarité, l’anxiété environnementale, la difficulté à concilier une vie parentale et son emploi, le manque de mode de garde des enfants”.

Pascale Coton (CFTC) : “Les réformes paramétriques seules ne suffiront pas à long terme. Il est indispensable de s’attaquer aux causes profondes des déséquilibres : les 42 régimes différents rendent le système fragile. Un régime universel pourrait résoudre les inégalités de traitement entrer assurés en harmonisant les conditions d’ouverture et de liquidation des droits”.

Dominique Corona (Unsa) : “Il faut relativiser les déficits car nous savons bien les gérer. Nous voulons en revanche un index seniors coercitif avec des objectifs d’emplois : je ne crois plus aux incantations. Par ailleurs, l’intelligence artificielle devrait générer 7 % de PIB en plus. Quelle partie voulons-nous consacrer à la protection sociale ?”

Julie Ferrua (Solidaires) : “La Sécurité sociale ne cesse d’être attaquée par le gouvernement et le patronat. Nous réclamons une réunification dans une seule caisse englobant les retraites et l’assurance chômage. Il faut aussi mener une réflexion sur la cotisation qui est en partie assise sur la valeur ajoutée avant la répartition primaire entre salaires et profits”.

Benoît Teste (FSU) : “On a le sentiment de ne jamais en voir le bout. A chaque réforme on alerte mais une fois qu’elle est mise en œuvre, on nous dit qu’elle n’est pas suffisante et on observe toujours plus de dégradation des droits. Aucun déterminisme économique ne permet de justifier le recul de l’âge et la durée de cotisation qui ont de toute façon un impact négatif sur les régimes de chômage et de maladie”. A l’inverse, les organisations patronales se sont positionnées sur l’urgence de résorber les déficits et de préserver les entreprises.

Diane Milleron Deperrois (Medef) : “Nous sommes sur une ligne de crète, il faut plus que jamais réfléchir à la pérennité des finances du régime par répartition, pilier de notre modèle social. Les réformes sont nécessaires mais pas suffisantes par rapport à l’ampleur des déficits et de leur poids sur l’économie. Il serait irresponsable de revenir en arrière, abroger ma réforme aurait un coût considérable”.

Eric Chevée (CPME) : “La hausse des cotisations ou la baisse des pensions ne sont pas les bonnes pistes. Il faut viser des équilibres pérennes dans un système extraordinairement complexe. Les allégements de charges prévus dans le PLFSS 2025 devraient procurer 5,6 milliards d’euros mais l’Etat en reprend 1 au titre de la cotisation sur l’impôt sur les sociétés, c’est ubuesque”. Eric Coquerel a conclu la matinée en ces termes : “Espérons que le gouvernement embrayera avec une conférence de financement à part entière”…

Marie-Aude Grimont

Négociation assurance chômage : les partenaires sociaux actualisent les chiffrages de 2023

23/10/2024

Mardi 22 octobre, les partenaires sociaux se sont retrouvés à l’Unédic afin de reprendre les discussions relatives à l’assurance chômage. Cette première séance s’est limitée à une actualisation des chiffrages issus de l’accord de 2023. Il faudra trouver les 400 millions d’économies supplémentaires demandés par le gouvernement mais pour l’instant, les termes de la négociation restent ouverts.

Il s’agit de retourner à la case départ mais avec de nouveaux éléments. Les syndicats peuvent en effet s’appuyer sur ce qui avait été négocié en novembre 2023 mais en respectant les demandes de la nouvelle ministre du Travail : trouver 400 millions d’euros d’économies supplémentaires. Parmi les pistes mises sur la table se trouvent les conditions d’indemnisation des travailleurs frontaliers et le régime des demandeurs d’emploi qui reprennent ou créent une entreprise. Si le sujet des frontaliers a uniquement été évoqué sans entrer dans les détails, l’Unédic a fourni des chiffrages actualisés par rapport à novembre 2023.

250 millions de moindre coût sur la mensualisation des allocations

“Un an plus tard, on a une actualisation des estimations de l’Unédic pour l’accord de novembre 2023, et au final, on a un peu moins de dépenses, surtout sur la mensualisation et le plafonnement de l’allocation de retour à l’emploi (ARE) pour les salariés qui reprennent une activité”, a indiqué Olivier Guivarch pour la CFDT.

Selon Denis Gravouil (CGT), l’économie ainsi réalisée se chiffre à 250 millions d’euros. Pour mémoire, la mensualisation des allocations chômage consiste à ne plus adapter leur montant au nombre de jours par mois (28, 30 ou 31) mais à ne les verser que pour 30 jours par mois tous les mois. Cette mesure figurait dans l’accord de novembre 2023, les syndicats ayant veillé à ce qu’elle ne modifie pas le capital de droits qui reste inchangé.

Il apparaît déjà très difficile à la CFE-CGC de signer l’accord : “Nous n’avons pas signé celui de 2023, je ne vois pas comment nous pourrions signer celui-ci puisque la dégressivité y sera”, a fait savoir Jean-François Foucard. Bien qu’il considère que “l’équilibre financier présenté ne soit que de l’affichage”, il continuera cependant de participer aux discussions.

Un complément dans les plafonds de cotisation et le cumul d’activité ?

La CGT a également demandé à l’Unédic d’autres actualisations des chiffres sur le relèvement du plafond de cotisations patronales de quatre à huit fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale. Selon Denis Gravouil, “cela viserait les 130 000 plus hauts salaires de France sur des emplois qui ne sont pas délocalisables”.

Le négociateur de la CGT a également souligné que “certaines mesures de l’accord de 2023 sont en gros 25% plus dures que ce qui était prévu en baisses d’allocations, par exemple cela ferait 621 millions d’euros sur quatre ans pour les demandeurs d’emploi cumulant une allocation avec une activité non salariée” (Ndlr : l’allocation à la reprise ou à la création d’entreprise). Au global, l’Unédic a chiffré de potentielles économies de 811 millions sur les 4 années de 2025 à 2028, soit 200 millions par an, et donc, la moitié de l’effort demandé par la ministre du Travail Astrid Panosyan Bouvet.

Les travailleurs frontaliers renvoyés à la prochaine séance

Les allocations des travailleurs français exerçant leur activité dans des pays frontaliers comme la Belgique, la Suisse ou le Luxembourg coûtent 800 millions par an à l’Unédic. Ces salariés paient leurs cotisations dans le pays qui les emploient mais perçoivent les allocations françaises (liées au pays de résidence) s’ils perdent leur emploi.

Revoir les conditions d’indemnisation de ces travailleurs fait donc partie des pistes d’économies envisagées mais le sujet a été repoussé à la prochaine séance de négociation, mardi 29 octobre. Pour Olivier Guivarch (CFDT), “déjà en 2023 nous n’étions pas allés au bout de la réflexion mais il est difficile d’estimer la réalité de moindres dépenses car la responsabilité se trouve plus du côté du gouvernement”. Ce dernier pourrait en effet être amené à renégocier les accords bilatéraux signés avec les Etats frontaliers. Frédéric Belouze s’est dit en tout cas ouvert sur le sujet, relevant cependant que le sujet dépendait de la négociation du règlement européen. Le négociateur de la CFTC ne souhaite pas réduire les droits des allocataires et se dit conscient que “si on n’aboutit pas, on va avoir un décret encore plus restrictif que celui de Gabriel Attal” (Ndlr : avant la dissolution, Gabriel Attal envisageait de prendre un décret durcissant le régime d’assurance chômage à compter du 1er décembre 2024).

L’état d’esprit des organisations patronales

Pour le Medef, Hubert Mongon a indiqué “avoir à coeur d’étudier les éléments d’actualisation sur la base des services de l’Unédic”.

À la CPME, Eric Chevée voit cette négociation comme “l’occasion d’avoir une deuxième chance. On trouve donc une motivation à la fois sur l’assurance chômage et les seniors”, notamment pour terminer dans les temps (mi-novembre). On arrive avec un background de fin 2023, celui de nos négociations donc on ne part pas de rien. Cadrer nos négociations permet déjà d’avancer, voire un peu plus car nous avons commencé à aborder les sujets de fond et nous avons eu des discussions intéressantes. Sur l’assurance chômage, la question sera de dégager les 400 millions supplémentaires. On a le cadre juridique mais pas encore les économies éventuelles. On voit cependant que si on considère la lettre de la ministre comme un cadre, on devrait pouvoir y arriver, à condition de s’accorder sur les seniors”.

Les organisations patronales ont donc bien l’intention de trouver ces économies sur l’assurance chômage. Il faudra pour cela s’accorder avec les organisations syndicales sur les bornes d’âge des seniors.

À noter également que les négociateurs ont de nouveau abordé le retour du CHSCT. Selon Patricia Drevon (FO), “on a cependant peu d’espoir de l’obtenir, en revanche un abaissement des seuils est plus probable”. La fin de la limitation à trois mandats des élus de CSE, qui avait été évoquée dans la négociation Pacte de la vie au travail, est également revenue dans les discussions. Si sa suppression n’est pas encore actée, elle figurait dans le projet d’accord avec l’assentiment des organisations patronales.

Rappel de l’accord de 2023

En novembre 2023, Les partenaires sociaux avaient trouvé un accord (hors CGT et CFE-CGC) prévoyant :

  • Une baisse de cotisation chômage patronale de 0,05 % ;
  • Une réduction de la condition d’affiliation des primo-entrants et des saisonniers de 6 à 5 mois sur 24 mois ;
  • Une réduction du plafonnement du nombre de jours non travaillés de 75 à 70 % ;
  • Le versement mensualisé des allocations ;
  • Une dégressivité des allocations versées aux moins de 55 ans au lieu de 57 ans.
Les prélèvements de l’Etat nuisent au désendettement de l’Unédic
Avant l’entrée en lice des négociateurs, l’équipe de direction de l’Unédic a présenté ses prévisions de croissance pour 2024-2027 et a laissé s’exprimer son mécontentement. Non seulement, le contexte politique, économique et budgétaire crée de l’incertitude, mais les prélèvements de l’Etat jusqu’en 2026 privent l’organisme de gestion de l’assurance chômage de l’accès à des moyens de financement. Selon Jean-Eudes Tesson, président de l’Unédic, “en 1958, l’Etat a confié aux partenaires sociaux la gestion de l’assurance chômage. Depuis, il cherche à reprendre le pouvoir dans le pilotage mais ne prend pas la responsabilité financière en contrepartie”.

De fait, en 2024, les recettes totales s’élèveraient à 45,3 milliards d’euros au lieu de 47,9, à cause du prélèvement public de 2,6 milliards. De plus, si ces prélèvements ne sont pour l’instant prévus que jusqu’en 2026, rien ne dit que l’Etat n’y prendrait pas goût pour les années suivantes. Rappelons également que l’Etat a imposé à l’Unédic de contribuer à hauteur de 11 % des contributions d’assurance chômage de l’exercice N-2  au financement de la création de France Travail. Cette contribution est de plus calculée sur les recettes avant les prélèvements de l’Etat.

L’Unédic cumule par ailleurs les 18,1 milliards d’euros de “dette Covid” avec 13 milliards de non compensation partielle des exonérations de cotisations patronales par l’Etat (intérêts compris) ainsi que 9 milliards (sur 2024-2027) liés à l’indemnisation de travailleurs frontaliers, sujet également abordé lors des négociations. En tout, il lui revient donc de financer en partie par l’emprunt plus de 40 milliards de dette dont elle n’est pas décisionnaire.

Le recul de l’inflation, s’il constitue une bonne nouvelle pour le pouvoir d’achat, obère les rentrées de cotisations dans les caisses de l’Unédic en créant un ralentissement des salaires, de même que la faible croissance constatée dans notre pays (1,1 % en 2024, 1 % en 2025). En 2024, la masse salariale n’augmenterait que de 3,2 % au lieu de 5,7 % en 2023.

Enfin, la hausse du chômage a entraîné une augmentation du nombre de personnes indemnisées par l’Unédic. En 2023, les dépenses d’allocation se sont élevées à 35 milliards au lieu de 33,4 en 2022. Cependant, dès le 2e semestre 2024, sous l’effet d’une poursuite de la montée en charge de la dernière réforme, le nombre de chômeurs indemnisés entamerait une baisse. Les dépenses retrouveraient leur niveau de 2022 à la fin de l’année 2027.

Que les demandeurs d’emploi se rassurent cependant, l’Unédic reste, comme elle l’a toujours été, en mesure d’assurer le paiement des allocations chômage. La vice-présidente de l’Unédic, Patricia Ferrand, a salué le retour des partenaires sociaux en négociation comme “un renforcement du paritarisme qui constitue un revirement par rapport aux décisions de ces cinq dernières années”.

Marie-Aude Grimont

PLFSS : la commission des affaires sociales se prononce contre un article clef sur les cotisations patronales

24/10/2024

Les députés de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, notamment ceux des groupes macronistes, LR et RN, se sont prononcés, mardi 22 octobre, en faveur de plusieurs amendements (voir exemple ici) supprimant l’article 6 qui prévoit une mesure phare du PLFSS pour 2025. Selon cet article 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, les exonérations de cotisations patronales devaient baisser au niveau du Smic, de 2 points en 2025 et de 2 points supplémentaires en 2026 jusqu’à 1,3 Smic. Elles devaient ensuite être renforcées entre 1,3 et 1,8 Smic et baisser ensuite jusqu’à 3 Smic. La mesure de 2025 est critiquée par les syndicats patronaux, le Medef, l’U2P et la CPME, au motif qu’elle va renchérir le coût du travail et risque de détruire des emplois. Cette mesure devait  aussi permettre à l’Etat de dégager une économie nette de quatre milliards d’euros dès 2025. 

Il ne s’agit toutefois que d’une étape : la suppression de l’article 6 du PLFSS pour 2025 doit désormais être confirmée lors de l’examen du texte en séance publique, le 28 octobre.

► La commission des affaires sociales a également adopté des amendements supprimant les alinéas 1 à 5 de l’article 7 du PLFSS pour 2025 qui prévoient notamment d’assujettir les rémunérations des apprentis à la CSG/CRDS au-delà de 50% du Smic.

Source : actuel CSE

Les députés continuent de modifier le PLFSS 2025 en commission des affaires sociales

25/10/2024

Un amendement de l’opposition de gauche, adopté hier en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, vise à abroger les principales règles de la réforme des retraites de 2023. Il est ainsi prévu, au 1er janvier 2025, l’abrogation de la hausse de l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite de 62 à 64 ans et de l’avancement du calendrier de relèvement de la durée d’assurance nécessaire pour bénéficier d’une pension de retraite au taux plein. 

Toutefois, cet amendement figurait à une annexe de l’article 14 qui a été rejetée en commission ultérieurement. Cet amendement sera déposé de nouveau en séance publique, assurent les députés PS.

Un autre amendement de députés PS vise à calculer les allègements généraux de cotisations sociales pour leur part employeur pour les entreprises qui relèvent d’une branche dont les salaires minimaux sont inférieurs au Smic sur ces salaires minimaux et non plus sur le Smic. 

Enfin, un amendement Ensemble pour la République rétablit le volet social du régime de la jeune entreprise innovante. 

Ces amendements complètent ceux déjà détaillés dans notre édition du 24 octobre. 

Source : actuel CSE