Le réseau Cezam organise une journée sur l’IA
13/01/2025
Le réseau Cezam de Bretagne organise le 4 février à Saint Malo (Ille-et-Vilaine) une journée d’échanges autour de l’intelligence artificielle (IA) destinée aux CSE. L’occasion de s’intéresser à cette association qui emploie 25 salariés au service de 500 comités sociaux et économiques.
Christophe Bouvier, pouvez-vous nous présenter le réseau Cezam de Bretagne que vous dirigez ?
Cezam est une association loi 1901 qui est au service des élus des comités sociaux et économiques (CSE) et qui est elle-même gérée par des élus CSE, qui composent les conseils d’administration. Autrement dit, tout ce que nous proposons, que ce soit le choix des activités ou les tarifications, reflète complètement les besoins et les attentes terrain des élus. En Bretagne, notre réseau comporte trois associations : Cezam Ille-et-Vilaine, Cezam “en Bretagne” (qui résulte de la fusion du Finistère Nord, des Côtes d’Armor et du Morbihan), et Cezam Finistère Sud. Au total, nous employons 25 salariés en Bretagne au service de 500 CSE.
Des CSE de quelle taille ?
De toutes tailles ! Nous avons des petites entreprises, des PME, des sociétés de plusieurs milliers de personnes (informatique, télécom, banque et assurance, etc.), mais aussi des entreprises de moins de 50 salariés dont nous démarchons les employeurs pour qu’ils apportent des avantages sociaux (des activités sociales et culturelles) à leurs salariés. L’adhésion à l’association, pour un CSE revient à 1,37€ par mois et par salarié. Comme nous permettons à un CSE d’économiser 2,50€ à 3,50€. par ticket de cinéma, il suffit que chaque salarié ayant droit du CSE ou d’un employeur prenne un ticket par mois pour rentabiliser l’adhésion à Cezam.
Que proposez-vous aux CSE ?
Depuis les années 80, nous accompagnons les élus dans la réalisation de toutes leurs missions : la formation à leur mandat, l’accompagnement technique et juridique en fonction de leurs questions, la rédaction de procès-verbaux, la tenue de permanences du CSE, la tenue de la comptabilité.
Nous voulons soutenir l’activité locale
Et un CSE adhérent a aussi accès à toutes nos œuvres sociales et culturelles (billetterie Cezam, prix roman, prix BD, prix du film, etc.), sachant que nous privilégions les commerces de proximité. Car notre coeur de métier et nos valeurs, c’est de soutenir l’économie locale. Nous proposons aussi des offres négociées nous-mêmes avec des partenaires, comme pour les camping par exemple. Dans notre catalogue vacances, vous trouvez des semaines à 180€ en basse saison et à partir de 770€ en haute saison.
Pourquoi organisez-vous une journée d’échanges le 4 février à Saint-Malo autour de l’IA ? Qu’en attendez-vous ?
Avec Cezam Pays-de-Loire et la fédération nationale de notre réseau, nous avons monté cet événement pour éclairer un peu la lanterne des élus, avec des intervenants comme Yann Ferguson, directeur scientifique de Labor IA à Inria (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique) et Vincent Mandino, chef de projet à l’Anact (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de Travail). Ce forum sera d’ailleurs repris ensuite un peu partout en France.
Faire de l’IA un objet de dialogue social, c’est le but !
Pourquoi ce thème ? Parce qu’il y a une vive interrogation sur l’intelligence artificielle et sur son impact sur le travail. On entend parler partout de l’IA mais sans toujours vraiment savoir de quoi on parle ni là où nous en sommes en France. Les élus veulent comprendre ce qui est en train de se passer et à quoi ils doivent s’attendre, afin d’en faire un sujet de dialogue social. Nous attendons que cela suscite un débat, des prises de position, et qu’il en sorte des informations et des conseils utilisables par les élus. C’est le but du forum que nous organisons avec nos partenaires, la Macif et le Grand aquarium de Saint-Malo, qui soutient financièrement ce projet, un forum qui est aussi ouvert aux CSE non-adhérents de Cezam. A cette occasion, nous tentons de renouveler un peu le format traditionnel des salons destinés aux CSE.
Ce forum est aussi un salon ?
Nous ne voulons pas d’un lieu qui soit une grande surface où on vient faire ses petits achats. Nous cherchons à apporter davantage de convivialité et de proximité en proposant, en plus des débats de la journée, la présence de 70 partenaires.
Nous cherchons à faire se rencontrer les élus de différents CSE
Ces moments d’échange, nous essayons de les organiser régulièrement entre élus. Le 21 janvier à Rennes et le 23 janvier à Brest, nous organisons le “Cezam Day”. Une journée d’échange entre les élus pour qu’ils se rencontrent et échangent entre eux. Beaucoup d’élus de comité se sentent un peu seuls dans leur coin, sans trop savoir ce qui se fait dans les autres CSE. Mais c’est vrai qu’il faut consacrer beaucoup plus d’énergie qu’il y a quelques années pour arriver à recréer ces liens : nous les appelons, nous les relançons, et ça finit par marcher.
En ce début d’année, quelles sont les attentes des CSE ?
Il y a une attente de formation sur le harcèlement moral et sexuel et les agissements sexistes, cela reflète l’émergence dans l’opinion de faits longtemps cachés. J’observe aussi un fort besoin d’accompagnement sur la rédaction des procès-verbaux du CSE. Les élus souhaitent se décharger de la rédaction du PV pour consacrer plus de temps à leurs missions (consultations et négociations, proximité avec les salariés). Ils nous confient donc la rédaction de ces PV. C’est compréhensible.
De nombreux CSE souhaitent se décharger de la rédaction des PV
J’ai moi-même été secrétaire d’un comité d’entreprise pendant 14 ans avant de rejoindre Cezam. A l’époque, nous étions plutôt sur un ratio de 70 % d’activité sur les œuvres sociales et loisirs et 30 % sur les prérogatives économiques du comité. Aujourd’hui, c’est l’inverse, avec des sujets de plus en plus complexes pour défendre les salariés, rendre un avis, négocier avec l’employeur, et il y a aussi des sujets nouveaux comme la transition écologique. Cela demande beaucoup de temps et d’investissement, et donc il faudrait un renouvellement plus important des CSE. Remettre des valeurs, c’est ce que prône Cezam. Mais attirer les jeunes vers un syndicat ou un CSE, ce n’est pas facile, car l’idée de se frotter à un employeur peut faire peur. Si la limitation à trois mandats successifs au CSE est supprimée, ce sera l’occasion pour les élus expérimentés et très investis, et beaucoup de membres des comités en sont à leur deuxième ou troisième mandat, de poursuivre leur action et peut-être de recruter et former des jeunes. Au conseil d’administration du Cezam Ille-et-Vilaine, nous renouvelons chaque année une petite partie des membres du conseil d’administration, dans le but d’intégrer de nouveaux administrateurs et rendre nos conseils d’administrations dynamiques, inventifs et force de propositions.
► Pour connaître le programme et s’inscrire à ce forum sur l’IA, cliquez ici
Bernard Domergue
La Fonderie de Bretagne va se déclarer en état de cessation de paiement
13/01/2025
Lors d’un CSE vendredi 10 janvier, la direction de la Fonderie de Bretagne, qui emploie 350 personnes à Caudan (Morbihan), a annoncé aux représentants du personnel son intention de se déclarer le 15 janvier en état de cessation de paiement. Un nouveau CSE se tiendra jeudi 16 décembre pour décider de la poursuite ou non de l’activité pour une dizaine de jours. Le tribunal de commerce de Rennes devrait donc ouvrir une nouvelle période de recherche de repreneur pour la Fonderie dont Renault s’est désengagée. Reste à savoir si le repreneur allemand, qui avait retiré son offre suite au refus de Renault de garantir des volumes pour deux ans, reviendra dans la course…
Source : actuel CSE
Le travail temporaire continue à décrocher
13/01/2025
Pas de répit pour l’intérim : en novembre 2024, l’emploi intérimaire représente 722 000 équivalents temps plein, selon le baromètre de la Fédération patronale Prism’emploi, publié le 9 janvier. C’est 50 000 emplois de moins que l’an dernier. Une tendance similaire à octobre dernier (-6,2 %) et en ligne avec les premiers mois de l’année (-6,6 %).
Tous les secteurs sont concernés, mais le transport, pénalisé par le repli de la consommation des ménages (-7,9 %) et l’industrie qui rencontre des difficultés notamment dans la filière automobile (-6,5 %); paient un plus lourd tribut. Dans le commerce, le BTP et les services, la dégradation est moins marquée (respectivement -5,7 % pour les deux premiers secteurs et -5,4 %).
Côté qualifications, la détérioration est plus importante pour les cols blancs et les employés (respectivement -9 % et -9,7 %). Les ouvriers qualifiés enregistrent une baisse de 6,9 % et les ouvriers non qualifiés 3,2 %.
Source : actuel CSE
La financiarisation des cabinets comptables, source d’opportunités et de dangers
16/01/2025
Une société de capital-investissement va devenir co-propriétaire de la branche expertise comptable de KPMG en France. L’entrée d’acteurs financiers au capital des cabinets comptables se développe en France et à l’étranger. Et soulève des questions majeures sur l’évolution du secteur.
KPMG France est sur le point de s’ouvrir à une société de capital-investissement. TowerBrook Capital Partners va en effet devenir co-propriétaire, aux côtés des associés ESC GS, de l’activité d’expertise comptable et de gestion sociale du cabinet destinée aux TPE-PME.
“Nous nous réjouissons que KPMG en France franchisse aujourd’hui, avec ses associés et avec TowerBrook, une étape décisive dans sa décision stratégique d’autonomie de son activité d’expertise comptable et de conseil aux TPE-PME, d’une part, et de fort réinvestissement dans ses métiers historiques, audit, conseil et tax & legal, d’autre part. En 2025, les entreprises pourront compter sur deux leaders confortés dans leurs trajectoires respectives pour servir, de façon encore plus puissante, les marchés des grands comptes/ETI et des TPE-PME”, ambitionnent Marie Guillemot, présidente du directoire, et Axel Rebaudières, directeur général et membre du directoire de KPMG en France.
Libéralisation de la législation sur la détention du capital
Cette annonce récente illustre une tendance qui devient structurelle, celle de l’arrivée d’acteurs non traditionnels au capital de structures comptables. Souvent, il s’agit de répondre au besoin de financer des investissements, par exemple dans l’immatériel ou pour acheter un cabinet. Un besoin auquel la libéralisation relative de l’expertise comptable répond à sa façon (lire l’encadré ci-dessous). Aujourd’hui, le capital social d’une société d’expertise comptable peut être détenu par des tiers sans aucune limitation, la seule règle portant sur la détention des droits de vote par les professionnels (lire l’encadré ci-dessous). Ce n’était pas le cas avant mai 2014.
Détention des sociétés d’expertise comptable et de commissariat aux comptes : ce que dit la loi Le capital tant des sociétés d’expertise comptable que de commissariat aux comptes est complètement ouvert, en France, à la condition que les droits de vote soient détenus majoritairement par des professionnels. Précisément, la législation française impose que plus des deux tiers des droits de vote dans les sociétés d’expertise comptable soient détenus par des professionnels de l’expertise comptable (article 7 de l’ordonnance n° 45-2138) — aucune obligation européenne n’est fixée sur ce sujet. L’exigence que plus de la moitié du capital soit détenu par des experts-comptables a disparu en mai 2014 après que la Commission européenne ait fait savoir à la France que la législation nationale posait des questions de conformité au droit de l’Union européenne. En ce qui concerne les sociétés de commissariat aux comptes, la directive européenne 2006/43/CE impose qu’une majorité des droits de vote soit contrôlée par des contrôleurs légaux des comptes (article 3, paragraphe 4)b)) et interdit aux Etats membres d’imposer une condition de détention du capital (article 3). Une exigence reprise dans le code de commerce (article L 822-1-3). |
Fin 2024, la société d’investissement Perwyn s’est félicité de sa contribution à la création du groupe comptable Kerogo finance. Ce dernier est composé de Kerobiz, un cabinet dans lequel Perwyn a investi en 2020, et des cabinets Jacques Rozenbaum (Paris) et Audit Conseils (Alsace). Le financier ne cache pas ses ambitions : “avec notre soutien, Kerogo Finance continue de rechercher de nouvelles acquisitions dans le domaine de la comptabilité. Les cibles idéales doivent avoir un chiffre d’affaires supérieur à 5 millions d’euros et reconnaître la nécessité d’évoluer et de s’adapter à un environnement commercial en évolution rapide”, affiche Perwyn.
Financement de l’immatériel
D’autres opérations ont été réalisées dans l’Hexagone ces dernières années. En 2017, les co-fondateurs de Wity, un cabinet comptable 100 % en ligne, font entrer le fonds M Capital Partners dans la holding qu’ils détiennent à 71 %. Objectif de l’opération : obtenir des ressources pour structurer en amont leur projet d’offre globale de conseil 100 % en ligne (plateforme et outils de communication), en particulier pour résoudre la difficulté de financer l’immatériel.
Fin 2018, Amarris Group achète l’intégralité du capital du célèbre cabinet 100 % en ligne ECL Direct. Particularité de l’opération : elle est financée en partie par l’arrivée d’acteurs financiers (BNP Paribas développement, Ouest croissance, Arkéa capital), filiales de banques, au capital d’Amarris group.
Et fin 2021, le fonds commun de placement à risques (FCPR) Experts génération a vu le jour pour “accompagner l’ensemble de la profession comptable dans des projets d’acquisition, de transmission et de développement ou de transformation numérique de cabinets”. Particularité de ce véhicule d’investissement : toute personne, physique ou morale, peut y souscrire même si l’objectif affiché consiste à solliciter en priorité les experts-comptables.
Autre exemple, celui du cabinet Dougs qui a levé (en 2023) 25 millions d’euros auprès du fonds d’investissement Expedition growth capital. Objectif affiché : accélérer la croissance par des investissements technologiques, des recrutements et un développement à l’international.
Définanciarisation chez In Extenso
Exemple emblématique, celui d’In Extenso, l’un des plus grands cabinets d’expertise comptable en France qui a aussi une activité de commissariat aux comptes. En 2019, il ouvre son capital, de façon minoritaire, au Crédit Agricole Centre-Est. Une opération destinée à “pallier” la sortie de Deloitte, son actionnaire historique, au moment où, selon son directeur général à l’époque, le cabinet devait investir de “façon assez importante”. Mais depuis, la donne a changé. En 2023, les associés ont racheté une partie du capital détenu par cette banque. Il s’agit donc d’un exemple de définanciarisation.
L’actualité de KPMG coïncide avec la vigilance officialisée de l’Ifiar
À quelques jours près, cette actualité de KPMG France coïncide avec une annonce de l’Ifiar (international forum of indemendant audit regulators), un espace de réflexion qui regroupe une cinquantaine de régulateurs nationaux de l’audit. Cette organisation, dont fait partie la H2A, considère que la financiarisation des cabinets d’audit légal se développe dans le monde. Et déclare vouloir suivre de près le phénomène.
“Les membres de l’Ifiar ont observé une tendance internationale croissante des cabinets d’audit à accepter l’investissement du private equity [capital-investissement] dans leur modèle économique. Compte tenu des avantages et des risques potentiels sous-jacents à cette question, l’Ifiar continuera de surveiller l’évolution des investissements du private equity dans les cabinets d’audit et aidera ses membres à prendre en compte les risques et les impacts de ces investissements dans leurs juridictions respectives”, affiche ce forum international qui ne dispose d’aucun pouvoir de régulation.
L’Ifiar liste les bénéfices potentiels que certains régulateurs nationaux du secteur attribuent au capital-investissement : des ressources supplémentaires pour investir, notamment dans la technologie, qui peuvent améliorer la qualité de l’audit ainsi qu’une concurrence accrue et davantage d’acteurs.
Une exigence de rentabilité axée sur le court-terme ?
Mais elle se fait aussi l’écho des risques potentiels que cette financiarisation fait peser sur le secteur : une réduction de la qualité d’audit en raison d’impératifs de rentabilité davantage court-termistes, un risque accru de conflit d’intérêts dû à l’étendue des portefeuilles d’actifs détenus par les fonds d’investissement ou encore une compréhension limitée par ces financiers de la mission d’intérêt public des cabinets d’audit.
Les exemples de Grant Thornton et Baker Tilly aux Etats-Unis
Même si l’Ifiar ne fournit aucun exemple, des opérations d’envergure ont été réalisées — à l’étranger — l’année dernière. Grant Thornton LLP, le membre états-unien du réseau mondial Grant Thornton, a annoncé en mars puis en mai l’investissement de New Mountain Capital — une société qui revendiquait à l’époque avoir environ 50 milliards de dollars d’actifs sous gestion — dans Grant Thornton advisors LLC, une structure qui fournit exclusivement des services sans assurance. Et en octobre dernier, un accord supplémentaire a été annoncé. Il vise à combiner cette entité de Grant Thornton aux Etats-Unis avec les activités de conseil et de fiscalité de Grant Thornton Ireland. Une opération soutenue par un groupe d’investisseurs dirigé par New Mountain Capital !
Autre exemple venant des Etats-Unis, celui de Baker Tilly. En février dernier, ce cabinet annonçait l’arrivée prochaine de deux financiers à son bord, Hellman & Friedman (“H&F”) et Valeas Capital Partners (“Valeas”). “L’investissement significatif de H&F et de Valeas permet à l’entreprise d’accéder à des capitaux et à des capacités supplémentaires pour accélérer sa croissance grâce à des investissements dans les talents, la technologie et d’autres acquisitions stratégiques visant à fournir les meilleurs services clients de leur catégorie”, argumente Baker Tilly.
L’interrogation Fiducial
“Est-ce que votre cabinet serait intéressé pour faire entrer des financiers au capital ?”, demandions-nous fin 2023 à Thierry Denjean, président fondateur du cabinet Denjean et associés. Réponse : “On ne s’interdit rien. Mais on a une particularité : tous les associés s’investissent beaucoup professionnellement et techniquement chez leurs clients. Un fonds d’investissement ne pourra pas suivre ce même projet d’entreprise mais pourra peut-être nous donner d’autres moyens pour investir encore davantage sur l’humain”.
L’arrivée de financiers au capital de cabinets comptables pourrait aider les associés de certaines structures à transmettre leurs parts sociales ou actions. Surtout pour celles dont le ticket d’entrée est élevé en raison de leur prise de valeurs. Sur ce sujet, l’une des questions récurrentes qui se pose au secteur comptable est celle de la succession de Christian Latouche. “Qui va reprendre Fiducial une fois que le fondateur sera parti ? Ce n’est pas clair. Est-ce qu’une banque va y aller ? Est-ce qu’un autre cabinet va y aller mais avec le soutien d’une banque parce que ça coûtera très cher ?”, se demandait en 2022 l’enseignant-chercheur Frédéric Fréry.
Pour ce dernier, les problèmes d’attractivité des cabinets comptables à l’égard des collaborateurs pourraient aussi contribuer à la financiarisation du secteur. “Vous avez un problème de recrutement qui est considérable, rappelait-il. Peut-être que l’une des raisons aussi à ce problème c’est que votre métier est devenu vraiment très compliqué. Vous êtes formé pour être expert-comptable mais vous devez aussi être manager, DRH, community manager, commercial… enfin faire plein de choses qui finalement sont très en dehors de ce pourquoi vous êtes à la base formés qui est un métier technique et financier, développait-t-il. Ça peut finir par décourager un certain nombre de gens qui veulent être expert-comptable et qui disent que, finalement, salarié c’est bien”, développe-t-il. Bref, “il y a aussi un besoin de financement s’il faut salarier les gens”, résumait-il.
Quel impact sur les activités ?
Mais par certains aspects, l’entrée d’acteurs non traditionnels pourrait détériorer le recrutement et la fidélisation des associés et des collaborateurs. Car elle pourrait conduire à scinder davantage les activités d’audit et de conseil. Pour au moins deux raisons : premièrement, pour éviter les conflits d’intérêts qu’entraînerait l’arrivée de fonds d’investissement d’autant plus lorsqu’ils détiennent de nombreuses entités dans leur portefeuille d’actifs. Deuxièmement, on peut se demander si les financiers ne vont pas pousser la spécialisation des tâches afin d’optimiser la rentabilité de leurs investissements. Bref, la financiarisation du secteur pourrait remettre en cause le modèle pluridisciplinaire cher à de nombreux groupes comptables.
Ludovic Arbelet
La fragilité bancaire des TPE et PME début 2024 dépasse le niveau d’avant-crise sanitaire
16/01/2025
Le nombre de jours de dépassement d’autorisation de découvert bancaire dans le mois permet de mesurer de potentielles difficultés de trésorerie ou de gestion de trésorerie d’une entreprise et constitue un indicateur de fragilité bancaire. Pour les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME) clientes du Crédit Mutuel Alliance Fédérale (CMAF), la fréquence mensuelle des dépassements s’élevait en moyenne à 1,6 jour sur les trois mois précédant le premier confinement (de décembre 2019 à février 2020). En mars 2024, la fréquence mensuelle des dépassements s’élève à 1,9 jour, selon une étude de l’Insee.
Dans le détail, la situation bancaire des TPE, initialement plus favorable (les TPE dépassant moins fréquemment leur autorisation de découvert que les PME), se rapproche de celle des PME :
- pour les TPE, de 1,5 jour avant le premier confinement à 1,9 jour en mars 2024 ;
- pour les PME, de 1,9 jour avant le premier confinement à 2,1 jour en mars 2024.
Source : actuel CSE
Le projet de loi d’urgence pour Mayotte adopté en commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale
16/01/2025
Le projet de loi d’urgence pour Mayotte, présenté en conseil des ministres, le 8 janvier, a été adopté, le 14 janvier par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale.
Pour rappel, ce texte, prévoit, par le biais de son article 22, une modulation géographique des indemnités versées dans le cadre de l’activité partielle. Ces taux seront fixés par décret.
À noter : le placement en activité partielle étant autorisé pour plusieurs mois, la période de majoration ne doit pas dépendre de la date d’autorisation. “Le dispositif doit concerner toutes les activités partielles à partir du 14 décembre 2024, y compris celles qui ont débuté à une date antérieure”. A l’inverse, “il ne doit pas concerner les périodes d’activités partielles après le 31 décembre 2025 qui ont été autorisées avant cette date”, selon l’amendement adopté en commission.
Le projet de loi, dont le gouvernement a engagé une procédure accélérée, sera examiné par les députés, en séance publique, le 20 janvier 2025.
Source : actuel CSE
Expertise sur la situation économique et financière de l’entreprise : il y a des limites à ne pas franchir !
17/01/2025
L’expertise relative la situation économique et financière a pour objet la compréhension des comptes de l’entreprise et l’appréciation de sa situation économique. Elle porte sur l’année en cours et les deux années précédentes.
En novembre 2022, la direction du groupe Zara, structuré en unité économique et sociale (UES) composée de sept sociétés, convoque son CSE central en vue de le consulter sur la politique sociale et les conditions de travail et l’emploi, la situation économique et financière de l’entreprise, ainsi que les orientations stratégiques.
Le comité central décide alors de se faire assister par un expert-comptable. Le projet de lettre de mission adressée par l’expert à la présidente du CSE central annonce notamment un coût prévisionnel estimé à 203 000€ HT.
L’expert doit s’en tenir à l’année de consultation sur la situation économique et financière et aux deux années précédentes.
La direction conteste une demande d’informations
L’affaire est portée en justice à l’initiative du groupe Zara, qui conteste notamment la demande de communication par l’expert “d’informations portant sur une période antérieure de trois à cinq ans à la consultation du comité central”. A savoir “les contrats de travail type par poste en 2019 et en 2021” et “tous éléments chiffrés permettant de comprendre l’évolution des rémunérations des salariés suite aux accords de branche de 2017 et 2019”.
Sous prétexte que ces documents étaient nécessaires en ce qu’ils avaient un lien avec la consultation sur la situation économique et financière, le président du tribunal judiciaire rejette la contestation de Zara et se range du côté du CSE central et de son expert.
À tort décide la Cour de cassation.
Des éléments présents dans la BDESE
Comme le rappellent notamment les juges dans leur arrêt, la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) rassemble l’ensemble des informations nécessaires aux consultations et informations récurrentes que l’employeur met à disposition du CSE (article L. 2312-18 du code du travail). Et surtout, d’après l’article R. 2312-10 du code du travail, en l’absence d’accord, les informations figurant dans la BDESE portent sur l’année en cours, sur les deux années précédentes et, telles qu’elles peuvent être envisagées, sur les trois années suivantes.
Conclusion, à laquelle était déjà arrivée la Cour de cassation dans une précédente jurisprudence (Cass. soc., 1er juin 2023, n° 21-23.393) : “L’expertise à laquelle le comité social et économique peut décider de recourir … en vue de la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l’entreprise ne peut porter que sur l’année qui fait l’objet de la consultation et les deux années précédentes ainsi que sur les éléments d’information relatifs à ces années”.
► Remarque : un accord d’entreprise peut limiter l’antériorité des informations à mettre à la disposition des représentants du personnel dans la BDESE et prévoir, par exemple, que ces informations porteront sur l’année en cours et l’année passée. Cet accord faisant loi au niveau de l’entreprise, il s’imposera au CSE. Reste à savoir si l’expert-comptable chargé d’assister le comité devra s’en tenir à l’antériorité des informations contenues dans cette BDES conventionnelle. Pas certain du tout car, d’après la jurisprudence, l’expert-comptable n’est pas obligé de s’en tenir aux informations de la BDESE (Cass. soc., 18 mai 2022, n° 20-21.444).
Une expertise faite pour permettre de comprendre les comptes de l’entreprise et d’apprécier sa situation économique
Dans notre affaire, la direction de Zara contestait aussi l’étendue de l’expertise telle qu’elle ressortait de la lettre de mission de l’expert.
Elle estimait en effet qu’une partie de l’expertise sortait du cadre de la consultation sur la situation économique et financière en ce qu’elle visait “la soutenabilité de la rémunération actuelle et passée des salariés” ou “la rentabilité et les marges de manœuvre de négociation pour les salariés”. La soutenabilité des rémunérations, c’est la capacité d’une entreprise à maintenir un système de rémunération viable à long terme tout en respectant ses contraintes économiques, sociales et environnementales. Sur un plan économique, l’entreprise doit être en mesure de supporter les charges salariales sans compromettre sa santé financière. La soutenabilité des rémunérations doit également prendre en compte les attentes des salariés et des investisseurs en matière de justice sociale.
Le juge saisi de l’affaire rejette cette contestation sous prétexte que ces points relatifs à la soutenabilité des salaires et la rentabilité et les marges de manœuvre de négociation pour les salariés étaient liées à l’analyse de la charge représentée par la masse salariale. Ils étaient donc bien en rapport avec la situation économique et financière de l’entreprise.
Ici aussi, la Cour de cassation n’est pas d’accord.
Comme elle le rappelle, la mission de l’expert-comptable porte sur tous les éléments d’ordre économique, financier, social ou environnemental nécessaires à la compréhension des comptes et à l’appréciation de la situation de l’entreprise (article L. 2315-89).
Pas de lien évident
Ainsi que le demandait la direction de Zara, il aurait donc fallu caractériser “en quoi la soutenabilité de la rémunération actuelle et passée des salariés et la rentabilité et les marges des manœuvres de négociation pour les salariés étaient des éléments nécessaires à la compréhension des comptes et à l’appréciation de la situation de l’entreprise”.
► Remarque : il est bien évident que cette expertise est une source précieuse d’informations sur la santé économique et financière de l’entreprise, et donc d’arguments pour de futures négociations salariales. Mais elle n’a pas pour objet d’analyser la politique salariale de l’entreprise et de se pencher ouvertement sur les marges de manœuvre de négociation pour les salariés. L’erreur commise par l’expert dans notre affaire est peut-être d’avoir été un peu trop explicite dans sa lettre de mission ou d’avoir vu trop grand.
Frédéric Aouate