Maintien des membres britanniques des CEE : Brexit or not Brexit ?

07/04/2025

Christine Chiffre, Anthony Perrocheau

L’institut de recherche syndical (Ires) a réuni chercheurs et élus de comités d’entreprise européens (CEE) pour une matinée d’étude. L’occasion de présenter les résultats d’une recherche sur la gestion des effets du Brexit dans les CEE. Entre exclusion, maintien et mise de côté des membres britanniques de l’instance, les CEE ont dû faire des choix alors que l’instance manque de solidité juridique et qu’une révision de la directive européenne est en cours.

Le 31 janvier 2020, après une campagne agitée et pas toujours sincère, un référendum sans filet  de sécurité organisé par le “Prime minister” David Cameron et des négociations ardues avec les institutions bruxelloises, le Royaume Uni a quitté officiellement l’Union Européenne. Un an plus tard, le 31 décembre 2020, il est sorti de l’union douanière et du marché unique. Depuis, nos voisins britanniques font cavalier seuls sur le plan diplomatique, économique et commercial. Les relations avec la France ne sont cependant pas rompues, notamment par l’intermédiaire des comtés d’entreprise européens.

Pour mémoire, les CEE ont été créés par une directive 94/45/CE du 22 septembre 1994 transposée par la France par la loi n° 96-985 du 12 novembre 1996, révisée en 2009 (directive n° 2009/38/CE transposée par l’ordonnance n° 2011-1328 du 20 octobre 2011). Trop peu nombreux malgré leur importance stratégique, leur régime fait l’objet d’un projet de révision initié par le Parlement européen en 2023 et poursuivi par la Commission.

La compétence du CEE est limitée aux questions transnationales, à savoir celles qui concernent l’ensemble de l’entreprise ou du groupe ou au moins deux établissements ou entreprises situées dans deux États membres (article L. 2341-8 du code du travail). Sont concernés les groupes ou entreprises de dimension communautaire employant au moins 1 000 salariés dans les États membres de la Communauté européenne ou de l’Espace économique européen et comportant au moins un établissement ou une entreprise d’au moins 150 salariés dans au moins deux de ces États (article L2341-1 du code du travail).

Après le Brexit, les instances ont dû s’adapter à ce nouveau contexte, les élus siégeant en CEE devant résoudre la question d’un maintien ou d’une exclusion de leurs homologues britanniques. C’est tout l’objet de l’étude menée par Anna Frisone, Kevin Guillas-Cavan et Marcus Kahman au bénéfice de l’Ires. Les résultats ont été présentés jeudi 3 avril au siège de l’institut de recherche syndicale à Noisy-le-Grand. L’atelier fut également l’occasion de recueillir les retours d’expérience des CEE de Suez, Safran et Thalès.

Maintien des représentants britanniques : l’entente cordiale

Malgré la tendance historique à l’affrontement entre la France et celle qu’elle a longtemps qualifiée de “Perfide Albion”, les rapports entre les deux pays se sont maintenus au sein des CEE et l’entente cordiale a pris le dessus. Sur un échantillon global de 56 CEE, 27 ont opté pour la stabilité, à savoir le maintien de la situation antérieure au Brexit, en conservant les membres britanniques des CEE ainsi que tous leurs droits. Concrètement, cela s’est traduit par une révision ou un avenant à l’accord fondateur du CEE négociés avec la direction de l’entreprise.

En revanche, 16 CEE ont limité l’implication des représentants britanniques en leur appliquant un statut d’observateur ou d’invité les privant de leur droit de vote, et en excluant le Royaume-Uni du champ d’application transnational de l’accord du CEE. Par conséquent, le CEE ne peut plus recevoir d’informations du Royaume-Uni.

Toujours sur le même échantillon, 13 CEE ont exclu le Royaume-Uni et banni les représentants britanniques de l’instance. Il reste encore un cas très rare, celui où en raison du Brexit, les seuils d’existence du CEE ne sont plus atteints et l’ensemble du CEE est démantelé. Cette situation n’a cependant pas été constatée dans l’échantillon des chercheurs qui était complété de quinze entretiens approfondis, a précisé la chercheuse Anna Frisone.

Des facteurs complexes expliquent le choix des CEE

Les chercheurs ont identifié les facteurs expliquant le choix entre le maintien des représentants britannique et leur exclusion. Dans le premier cas, le plus répandu, il s’agit par exemple du souci des salariés et de la reconnaissance de l’importance du Royaume-Uni dans l’entreprise. Les représentants britanniques ont également pu bénéficier de la forte intégration du Royaume-Uni dans les activités de l’entreprise et des effets positifs du bon fonctionnement de l’instance : des échanges bien installés et fluides, formels ou informels grâce à des groupes WhatsApp, ainsi que la création de groupes de travail actifs au sein du CEE. La stratégie et le soutien des syndicats a également joué un rôle, de même que la considération à égalité de toutes les nationalités potentiellement représentées dans l’instance.

À l’inverse, le choix de l’exclusion des membres britanniques du CEE peut s’expliquer par un trop faible intérêt pour le CEE, une volonté de ne se borner qu’à la stricte application de la loi un manque de cohésion et de consistance de l’instance. De même, la présence d’un plan de restructuration à court terme a pu nuire à la conservation des membres britanniques.

Selon le chercheur Marcus Kahman, “les points positifs et négatifs sont la double face d’une même monnaie. Il faut également noter que l’intérêt de la direction de l’entreprise présente un rôle déterminant.”

“Les syndicats français ont accepté de réduire leur membres”

Trois membres de CEE se sont exprimés sur leur expérience et leurs choix au moment du Brexit. Dans les trois cas, les représentants britanniques ont été maintenus mais selon des modalités différentes.

Selon Christine Chiffre, secrétaire CGT du CEE Suez, des points d’accord étaient établis avec la direction et les syndicats. De plus, le Royaume-Uni constituait le deuxième partenaire des activités de Suez. Un avenant a donc été conclu en 2018 en faveur du maintien des représentants britanniques. La clause a ensuite été reprise en 2022 et élargie à “tout pays candidat à l’entrée dans l’Union européenne s’il y exerce une activité avec plus de 1000 salariés”. Point important raconté par la secrétaire du CEE : “Les syndicats français ont accepté de baisser leur nombre de membres afin de conserver leurs homologues”. Une belle preuve d’amitié franco-anglaise..

“Ça a été compliqué”

Chez Safran Nacelles, le maintien des Britanniques prit la forme d’un combat de plus de cinq ans. Selon Corinne Schievene, secrétaire CFDT du CEE, malgré le positionnement favorable du CEE depuis 2016 et l’intervention des organisations syndicales européennes et internationales comme IndustriAll et Global Union, la direction s’opposait au maintien des Britanniques avec pour argument de s’en tenir à ce que prescrivait la loi.

En 2021, l’arrivée d’un nouveau directeur général change tout et le 30 mars, un avenant confirme la présence du Royaume-Uni dans le périmètre du CEE avec toutes ses prérogatives. La secrétaire du CEE de Safran conclut : “Ça a été compliqué, on n’a jamais su les raisons du refus de principe ni celles de l’accord de la nouvelle gouvernance”. Le CEE tente également d’intégrer la Suisse et la Norvège. Sans succès pour l’instant mais l’instance poursuit ses efforts sans désemparer.

“Les Britanniques ont trouvé un intérêt au CEE”

Le secrétaire CFDT du CEE de Thales a témoigné d’une situation encore différente. Selon Anthony Perrocheau, deux négociations ont échoué en 2013 et 2019 et l’accord relatif au CEE peine à être appliqué. Malgré les acquisitions de Gemalto et la vente d’une activité à Hitachi en 2019 et 2024, rien ne bouge dans la composition du CEE, pourtant favorable à la présence de représentants britanniques. Cependant, lors d’un projet de fermeture de site au Royaume-Uni, le syndicat Unite n’a pas pu comme en France être informé-consulté et rendre un avis.

Il se tourne donc vers le CEE et parvient à dialoguer avec la direction du groupe et trouver quelques solutions. Selon Anthony Perrocheau, “les Britanniques ont trouvé un intérêt au CEE à ce moment-là. De plus, nous avons des informations sur la politique salariale du groupe dont ils sont privés au Royaume-Uni. Cela leur permet de nourrir leur stratégie salariale dans leurs négociations”. Depuis, les représentants britanniques siègent toujours au CEE, sans qu’aucun avenant n’ait été signé.

Caroline Blot, secrétaire fédérale Europe et International de la métallurgie CFDT a clairement conclu les échanges : “Pour qu’un CEE fonctionne bien, il faut une solidarité transnationale et une information-consultation efficiente. Si possible, éviter de pousser la direction à concurrencer les pays représentés à l’instance, et ne pas se réjouir de pertes d’emplois dans un pays en se disant qu’on va récupérer des postes en France. La formation des élus sera également déterminante”.  Comme dans bien des domaines, au CEE comme au CSE…

L’ensemble des présentations est disponible sur le site internet de l’Ires.

CEE : une révision de directive tant attendue
À ce jour, les CEE sont dépourvus de personnalité juridique. Cela les prive notamment de toute possibilité d’agir en justice. En mai 2023, dans le cadre du projet de révision de la directive de 2009, la Confédération Européenne des Syndicats (CES) a revendiqué qu’il soit remédié à cette situation.

La Commission européenne a constaté la persistance des défauts des CEE actuels. La proposition de révision vise donc à renforcer leurs moyens et prérogatives dans le but d’accorder plus de place au dialogue social européen. Rappelons que ce point figure au principe 8 du socle européen des droits sociaux qui souligne l’importance de la participation des travailleurs aux décisions qui les concernent. 

En France, les cinq confédérations représentatives (CFDT, CGTForce OuvrièreCFE-CGCCFTC) ont à cet égard déposé leurs revendications en vue des dernières élections européennes et soutiennent la révision de la directive de 2009.

Rappelons que la proposition de révision propose par exemple une présomption de transnationalité afin de favoriser la consultation du CEE.  

Marie-Aude Grimont

Le Parlement européen vote le report de deux ans de l’application de la CSRD pour certaines entreprises

08/04/2025

Le texte doit désormais être formellement approuvé par le Conseil de l’Union européenne qui a déjà donné son accord le 26 mars.

Le 3 avril, les députés européens ont approuvé en séance plénière la proposition de décaler de deux ans l’obligation de publication des informations de durabilité pour certaines grandes entreprises et les PME cotées. Le même jour, le Parlement français a définitivement adopté le projet de loi DDADUE 5 dans lequel figure une mesure similaire.

531 voix pour, 69 voix contre et 17 abstentions : c’est à une large majorité que les députés européens ont adopté, le 3 avril, le report de deux ans de l’application de la CSRD (Corporate sustainability reporting directive, ou reporting environnemental et social) pour les entreprises des vagues 2 et 3 (voir la résolution législative). Le Parlement européen procédait ce 3 avril à un vote en urgence du mécanisme “stop the clock” proposé par la Commission européenne dans le projet “Omnibus 1“. C’est donc une nouvelle étape franchie pour la proposition de directive présentée le 26 février dernier.

Le texte doit désormais être formellement approuvé par le Conseil de l’Union européenne qui a déjà donné son accord le 26 mars. Ensuite, il sera publié au Journal officiel de l’Union européenne et les Etats membres auront jusqu’au 31 décembre 2025 pour transposer cette directive. 

Décalage de deux ans pour les entreprises des vagues 2 et 3

Qui est concerné par ce changement de calendrier ?

Les grandes entreprises (y compris les émetteurs de pays tiers) “qui ne sont pas des entités d’intérêt public (EIP) dépassant le nombre moyen de 500 salariés sur l’exercice” et qui répondent à au moins deux des trois critères suivants : plus de 250 salariés et/ou bilan supérieur à 25 millions d’euros et/ou chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros ; et les entreprises mères de grands groupes (y compris les émetteurs de pays tiers) lesquels “ne sont pas des EIP et/ou dont le groupe ne dépasse pas, sur une base consolidée, le nombre moyen de 500 salariés sur l’exercice” et répondent à au moins deux des trois critères suivants : plus de 250 salariés et/ou bilan supérieur à 25 millions d’euros et/ou chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (seuils majorés de 20% dans certaines situations) (*).

Ces entreprises de la 2e vague devraient publier un rapport de durabilité (état de durabilité individuel ou consolidé selon les cas) afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2027 (au lieu de 2025). Donc une publication du rapport en 2028 au lieu de 2026.

Les PME cotées, les établissements de petite taille et non complexes, et les entreprises captives d’assurance et de réassurance (y compris les émetteurs de pays tiers).

Ces entreprises de la 3e vague devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2028 (au lieu de 2026). Donc une publication du rapport en 2029 au lieu de 2027.

En revanche, rien ne changerait pour les entreprises de la 1e vague (grandes entreprises qui sont des EIP dépassant le nombre moyen de 500 salariés sur l’exercice) qui publient leurs premiers rapports cette année, ni pour les entreprises de pays tiers de la vague 4 qui devront publier leurs informations de durabilité à compter de 2029 (sur l’exercice 2028).

Adoption définitive du projet de loi DDADUE 5

Du côté français, les choses ont aussi évolué. Hasard ou non du calendrier, le Sénat a bouclé le 3 avril l’examen du projet de loi “portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes” (dit DDADUE 5), lequel contient une mesure calée sur la proposition européenne. Le projet de loi DDADUE 5 reporte aussi de deux ans les obligations de publication des informations de durabilité pour les entreprises des vagues 2 et 3, contenues dans l’ordonnance de transposition de la CSRD du 6 décembre 2023 .

Après la validation de l’Assemblée nationale le 2 avril et du Sénat le 3 avril, le projet de loi est donc définitivement adopté par le Parlement et sera publié au Journal officiel avec cette mesure de report (sous réserve de l’aval du Conseil constitutionnel). La France serait donc largement dans les clous du délai de transposition.

Vers une exemption de publication à terme ?

À noter cependant que certaines de ces entreprises pourraient ne plus être assujetties à la CSRD et, même, ne jamais avoir à publier de rapports de durabilité (à partir de la vague 2). En effet, une autre proposition de directive de la Commission européenne, du même paquet Omnibus I, réduit le périmètre de la CSRD et fait sortir de l’obligation de reporting toutes les PME notamment. Le projet prévoit que seraient assujetties à la CSRD uniquement les entreprises qui ont plus de 1 000 salariés et qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros et/ou qui ont un total de bilan supérieur à 25 millions d’euros.

Ces modifications substantielles de la CSRD seront discutées prochainement au niveau de l’Union européenne, la prochaine étape étant l’examen de cette proposition de directive par la commission des affaires juridiques du Parlement européen. Des incertitudes demeurent donc pour les entreprises concernées.

(*) Voir la directive 2022/2464 (article 5.2), une communication de novembre 2024 de la Commission européenne.

Céline Chapuis

Allégements généraux de cotisations patronales pour 2025 : les modalités sont fixées

09/04/2025

Les modalités d’application des allégements généraux de cotisations patronales pour 2025 sont enfin connues. Un décret n° 2025-318 du 4 avril 2025 fixe les règles applicables pour la réduction des taux des cotisations maladie et allocations familiales en 2025 et les paramètres de la réduction générale des cotisations patronales à compter du 1er mai 2025.

Les allégements généraux de cotisations patronales ont été remaniés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 du 28 février 2025. Le décret du 4 avril 2025 qui précise les modalités d’application de ces allégements pour l’année 2025 est paru au Journal officiel du 6 avril 2025.

Réduction des taux de la cotisation maladie et allocations familiales : prise en compte du Smic au 1er janvier 2025

Pour les cotisations et contributions dues au titre des périodes d’activité courant à compter du 1er janvier 2025, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) a modifié les articles du code de la sécurité sociale et les plafonds d’application de la réduction des taux sont réduits à :

  • 2,25 Smic (contre 2,5 Smic jusqu’au 31 décembre 2024) pour la réduction du taux de la cotisation maladie (article L.241-2-1 modifié du code de la sécurité sociale) ;
  • 3,3 Smic (contre 3,5 Smic jusqu’au 31 décembre 2024) pour la réduction du taux de la cotisation famille (article L.241-6-1 modifié du code de la sécurité sociale).

La valeur du Smic à prendre en compte devait être précisée par décret. Allait-on conserver la valeur du Smic applicable au 31 décembre 2023 ou prendre en compte la valeur du Smic applicable en janvier 2025 ?

Le décret répond à cette question et précise que la valeur du Smic à retenir pour les rémunérations versées depuis le 1er janvier 2025 est celle applicable à cette date, soit 11,88 € de l’heure ou 1 801,84 € par mois pour 151,67 heures de travail. Dans ce cas, pour un salarié à temps plein, présent tout le mois, ces seuils s’élèvent donc à :

  • 4 054,14 € pour le taux de la cotisation maladie (1 801,84 × 2,25) ;
  • 5 946,07 € pour le taux de la cotisation famille (1 801,84 × 3,3).

Réduction générale des cotisations patronales : les modalités applicables en 2025

Le plafond de la rémunération éligible à la réduction fixé à 1,6 Smic au 1er janvier 2025

Jusqu’à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 du 28 février 2025, le plafond de rémunération ouvrant droit à la réduction générale était fixé par la loi, à l’article L.241-13 du code de la sécurité sociale. La loi a modifié cet article afin d’y supprimer le plafond de rémunération, prévoyant que celui-ci est dorénavant fixé par décret.

Le décret du 4 avril 2025 fixe ce plafond de rémunération à 1,6 Smic applicable au 1er janvier 2025, soit 34 595,28 € (2 882,94 € x 12) pour un salarié à temps plein présent l’année entière.

Ce plafond n’évoluera pas au cours de l’année, même si le Smic augmente. En effet, le décret du 4 avril 2025 supprime le dernier alinéa du II de l’article D.241-7 du code de la sécurité sociale qui prévoyait cette évolution en cas de modification du Smic en cours d’année.

Diminution de la valeur de T à compter du 1er mai 2025

La valeur T à prendre en compte pour le calcul du coefficient de la réduction Fillon est modifiée au 1er mai 2025 par le décret.

En effet, le taux maximum de cotisation AT/MP pris en compte dans la valeur T est augmenté (il passe de 0,46 % à 0,50 %) et le montant des cotisations chômage diminue à compter du 1er mai 2025 (il passe de 4,05 % à 4 %).

En conséquence, les valeurs 0,3194 et 0,3234 sont remplacées par :

  • 0,3193 pour les entreprises de moins de 50 salariés (taux FNAL à 0,10 %) ;
  • 0,3233 pour les entreprises de 50 salariés et plus (Taux FNAL à 0,50 %).

Ces nouveaux paramètres de T s’appliquent aux cotisations et contributions dues sur les rémunérations afférentes aux périodes d’emploi courant à compter du 1er mai 2025. Pour les entreprises pratiquant le décalage de la paie, elles ne s’appliqueront donc qu’à compter du salaire de mai payé début juin 2025.

Des régularisations à prévoir ?

Le calcul de la réduction générale des cotisations patronales étant annuel, du fait du changement de coefficient en cours d’année, des régularisations seront peut-être nécessaires selon le mode de calcul qui sera fourni par l’administration pour l’articulation des deux périodes. Le Boss devrait apporter des précisions à ce sujet prochainement.

Taux AT/MP applicables à compter du 1er mai 2025

Comme l’avaient précisé l’Assurance maladie et le site Net-entreprises.fr, le décret prévoit que les taux de cotisations AT/MP 2025 s’appliqueront à compter du 1er mai 2025, sans effet rétroactif.

Les taux de cotisation AT/MP 2024 restent donc applicables jusqu’au 30 avril 2025.

Rappelons que les taux de cotisation AT/MP sont déterminés annuellement. Ils sont fixés en application de plusieurs arrêtés (publiés en application de la loi de financement de la sécurité sociale) fixant les majorations, les coûts moyens et les taux collectifs.

► Les arrêtés fixant ces taux pour l’année 2025 sont à paraître.

L’alinéa 3 de l’article D.242-6-11 du code de la sécurité sociale précise que les taux de cotisation AT/MP entrent en vigueur à partir du 1er jour du trimestre civil suivant leur publication au Journal officiel. En cas de publication après le 31 décembre, ce sont les taux nets antérieurs qui s’appliquent jusqu’à la publication des nouveaux taux nets.

Compte tenu de la date de parution de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, le 28 février, les nouveaux taux AT/MP auraient dû s’appliquer à compter du 1er avril 2025. Le taux de la cotisation AT/MP étant une des composantes de la valeur de T qui sert à calculer le coefficient de la réduction générale des cotisations patronales, cette date d’application aurait conduit à avoir trois valeurs de T différentes en 2025.

Le montant de la déduction forfaitaire des cotisations patronales sur les heures supplémentaires est intégré dans le code de la sécurité sociale

L’article 2 de la loi du 16 août 2022 “portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat” a créé une déduction forfaitaire des cotisations patronales sur les heures supplémentaires pour les entreprises d’au moins 20 à moins de 250 salariés.

Le montant de la déduction forfaitaire était jusqu’à présent fixé par décret à 0,50 € (n° 2022-1506 du 1er décembre 2022).

Le décret du 4 avril 2025 intègre ce montant de 0,50 € dans le code de la sécurité sociale (article D.241-24 modifié). En conséquence, le décret du 1er décembre 2022 est abrogé.

Eléonore Barriot

La justice annule le PSE de Sanofi Aventis

09/04/2025

Le 1er avril 2025, le tribunal administratif de Melun a annulé le projet de plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) déposé par le laboratoire Sanofi Aventis R&D. Visant 325 postes sur différents sites, ce PSE a fait l’objet d’une décision unilatérale de l’employeur faute d’accord avec les syndicats. L’administration a homologué cette décision le 13 novembre 2024.

Le CSE central et deux CSE d’établissement ont alors contesté en justice l’homologation en faisant valoir des irrégularités dans les critères d’ordre des licenciements. Le code du travail prévoit en effet (article 1233-5) que l’employeur définit ces critères après consultation du CSE, notamment en prenant en compte les charges de famille, l’ancienneté, les caractéristiques sociales facilitant ou non la réinsertion professionnelle et les qualités professionnelles appréciées par catégories.

Le tribunal administratif a fait droit aux demandes des CSE en retenant :

  • que l’employeur pénalise les salariés n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation en leur attribuant deux points alors qu’il en accordait jusqu’à 30 aux salariés évalués ;
  • que l’employeur crée une différence de traitement par l’attribution de 50 points aux seuls salariés parents isolés ou ayant à charge une personne en situation de handicap.

Reste à voir si Sanofi fera appel de ce jugement.

Source : actuel CSE

“Les institutions représentatives du personnel sont en grand danger !”

10/04/2025

Le Cercle Maurice Cohen, “le seul Think-tank dédié aux représentants du personnel” (*), s’alarme dans cette tribune des projets de simplification, portés par des parlementaires, touchant le CSE, notamment sur sa mise en place avec un relèvement des seuils d’effectifs, mais aussi sur ses attributions.

On se souvient qu’un rapport parlementaire sur la simplification, remis au ministre des Finances en février 2024, préconisait de nombreuses mesures réclamées par les chefs d’entreprises, notamment de TPE-PME, visant à alléger les “contraintes” qui pèseraient sur les entreprises s’agissant de la représentation du personnel, notamment en relevant les seuils d’effectifs pour la mise en place et les attributions des comités sociaux et économiques (CSE).

Le projet de loi sur la simplification de la vie économique, qui revient ces jours-ci en discussion à l’Assemblée nationale, ne comportait pas à l’origine de dispositions sur ce point suite au positionnement des organisations syndicales et des experts qui ont unanimement critiqué la hausse des seuils de CSE et les atteintes qu’elle porterait à la représentation des salariés et au dialogue social. Mais le texte fait aujourd’hui l’objet de plusieurs amendements reprenant les propositions du rapport parlementaire. Si ceux-ci étaient adoptés, ses conséquences seraient les suivantes :

  • le seuil pour mettre en place obligatoirement un CSE serait porté de 11 à 50 salariés ; les salariés de ces entreprises seraient ainsi privés de toute représentation du personnel ;
  • le seuil pour que le CSE puisse exercer ses attributions complètes (attributions économiques et santé au travail, droit aux informations-consultations récurrentes et ponctuelles, droit à l’expertise, subventions de fonctionnement et pour les activités sociales et culturelles [ASC], personnalité civile et droit d’agir en justice) serait porté, selon certains amendements, à 100 voire à 300 salariés ; cela constituerait un recul considérable qui nous ramènerait avant la loi du 16 mai 1946 ;
  • le seuil pour désigner un délégué syndical actuellement fixé à 50 salariés serait également impacté ; tout comme celui imposant l’élaboration d’un Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) et la publication, chaque 1er mars, des indicateurs relatifs aux inégalités salariales entre hommes et femmes ;
  • l’obligation de disposer d’une BDESE ne concernerait que les entreprises d’au moins 300 salariés contre 50 aujourd’hui et sa production serait conditionnée à la demande des membres de la délégation du personnel du CSE ; il est même proposé de la rendre facultative ; or, même si cette base de données n’est pas, telle qu’elle est conçue aujourd’hui, exempte de critiques, le dialogue social sera encore rendu plus difficile, puisque les élus verront leur capacité d’analyses et de propositions réduites, car tributaire du niveau d’informations que voudra bien leur délivrer leur employeur.

Dans tous les cas, l’argument avancé est le même : le franchissement des seuils actuels impose à l’entreprise une série d’obligations supplémentaires qui seraient contraignantes, chronophages et coûteuses.

Il n’a jamais été démontré que l’affaiblissement des IRP avait des effets bénéfiques sur l’emploi 

Il représenterait un frein au développement des entreprises et à la création d’emploi, car beaucoup préféreraient rester sous le seuil des 50 salariés afin d’éviter ces nouvelles contraintes. Or, il n’a jamais été démontré que l’affaiblissement des institutions représentatives du personnel produisait des effets bénéfiques sur l’emploi. D’autant plus qu’aucune étude d’impact n’est produite à l’appui du présent projet de loi.

Un autre amendement vise à isoler encore davantage les salariés des petites et moyennes entreprises face à leur employeur en supprimant l’obligation mensuelle de réunion du CSE dans les entreprises de moins de 50 salariés au motif que l’impératif de ces réunions mensuelles serait inadapté. Selon les auteurs, “le dialogue entre salariés et employeurs dans les petites entreprises se fait de façon spontanée et l’instauration d’un tel rythme tient de l’infantilisation des chefs d’entreprises”. Affirmer cela, équivaut à réduire le dialogue social à un simple échange verbal entre deux portes. C’est ignorer que, de tout temps, il a fallu de grandes lois, parfois assorties de sanctions pénales, pour contraindre les employeurs à un échange qui ne soit pas que de façade.

Enfin, pour tenter d’amadouer hypocritement quelques élus, d’autres amendements visent à précariser encore davantage les plus précaires. Ainsi, il est proposé d’autoriser les CSE à exiger une ancienneté minimum pour le bénéfice des ASC et ce, contrairement à ce qu’a jugé la Cour de cassation en 2024 selon laquelle l’ouverture du droit de l’ensemble des salariés et des stagiaires au sein de l’entreprise à bénéficier des ASC ne saurait être subordonnée à une condition d’ancienneté. Cela n’a rien à voir avec la simplification pour les employeurs car les CSE disposent seuls du pouvoir de gestion des ASC. Sans parler du fait que le relèvement des seuils privera purement et simplement des milliers de salariés du bénéfice des dites ASC.

Non à la confiance aveugle aux dirigeants d’entreprises ! 

Le Cercle Maurice Cohen s’insurge contre toutes ces propositions d’amendements qui aggraveraient les logiques des ordonnances de 2017, à savoir faire une confiance aveugle aux dirigeants d’entreprises, les accompagner en les contrôlant a minima. Le principe constitutionnel de participation des salariés en sortirait encore une fois affaibli. Qui plus est, réserver les attributions économiques et en matière de santé au travail et plus généralement le droit à l’information-consultation aux entreprises d’au moins 100 ou 300 salariés est en contradiction avec la législation européenne prévoyant de telles obligations dans les entreprises employant au moins 50 salariés.

La finalité du droit du travail qui est de protéger individuellement et collectivement les salariés ne saurait être placée sur le même plan, voire à un niveau inférieur, que le soutien à la compétitivité des entreprises.

À l’opposé de ces dispositions régressives, le Cercle Maurice Cohen présente et met en débat 10 propositions afin que les salariés soient réellement associés par l’intermédiaire de leurs représentants à la gestion de leur entreprise, ainsi que le prévoit la Constitution.

(*) Le Cercle Maurice Cohen est un cercle de réflexion portant sur les instances représentatives du personnel telles que le CSE (comité social et économique). Il regroupe syndicalistes, universitaires, avocats et juristes en droit social, experts auprès des CSE, inspecteurs du travail, ainsi que des personnalités dont les compétences et l’expérience peuvent nourrir la réflexion.

Le Cercle Maurice Cohen

Simplification : la plupart des amendements CSE tombent pour irrecevabilité, les Ceser sont rétablis

11/04/2025

Est-ce un effet de lobbying ou un moyen détourné de ne pas aborder le sujet pendant les débats à l’Assemblée nationale ? La plupart des amendements modifiant les seuils des CSE ont été déclarés irrecevables au motif de l’article 98 du Règlement de l’Assemblée nationale. L’alinéa 5 de cette disposition prévoit notamment que “les amendements ne peuvent porter que sur un seul article”. Selon l’alinéa 6, “sans préjudice de l’application des articles 40 et 41 de la Constitution, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis”. Est-ce à dire qu’il s’agissait de cavaliers législatifs ? Ce motif renvoie plutôt traditionnellement à l’article 45 de la Constitution. Toujours est-il que les amendements concernés ne seront donc pas discutés après l’article 7 comme prévu, qu’il s’agisse de revenir à la condition d’ancienneté des activités sociales et culturelles (ASC) ou de rendre facultative la BDESE (base de données économiques, sociales et environnementales).

Seul amendement toujours en lice, le n° 1573 qui se contente de proposer la présentation d’une loi de simplification des obligations pesant sur les entreprises en fonction du seuil du nombre de salariés d’ici le 1er juillet 2026. L’exposé des motifs vise particulièrement le seuil de 50 salariés qui “impose à l’entreprise une série d’obligations supplémentaires, contraignantes, chronophages et coûteuses”. 

Les amendements tendant à réduire le nombre de défenseurs syndicaux sont également tombés pour irrecevabilité de l’article 40.

La réduction du délai de contestation de son licenciement par le salarié (de 12 à 1, 3 ou 6 mois) est également tombée à la trappe pour la même raison.

Enfin, l’amendement prévoyant le rétablissement des Ceser a été adopté.

Source : actuel CSE