[Notes de lecture] 10 livres sociaux pour l’été
01/08/2025

Nous les avons tous lus, oui tous. De la première à la dernière page. Les coins cornées et autres annotations en attestent. Pour vous en faire profiter, voici 10 notes de lecture autour de sujets sociaux : grève, retraites, travail immigré, histoire sociale, handicap, mobilisations… 10 livres pour vous accompagner cet été et… préparer la rentrée ?
SOCIAL
La grève n’a pas dit son dernier mot
Pratique contestataire par excellence, porte-voix délaissé par les collectifs ces dernières années, la grève serait-elle passée de vie à trépas dans l’esprit des salariés ? Si elle n’a pourtant pas dit son dernier mot, cette prise de parole éruptive du ras-le-bol généralisé se heurte à la fragmentation des équipes, au risque des représailles et à la précarisation des travailleurs. Maître de conférences en sciences politiques à l’Université d’Aix-Marseille, Baptiste Giraud mène ici une enquête minutieuse sur les obstacles à la grève dans le secteur des services. Il décrypte également le rôle des unions locales, des délégués syndicaux et autres animateurs de conflits dans l’entreprise et propose un nouveau mode d’emploi de la grève à travers son analyse des stratégies militantes dans trois mouvements sociaux différents : chez PizzaRapido, Nuidot et Chaussure. En bref, comment lancer une grève, la maintenir, la terminer. A mettre entre toutes les mains d’ici la rentrée que d’aucuns nous promettent chaude ?
Réapprendre à faire grève, Baptiste Giraud, éditions Puf, 365 pages, 20 €
Quand le travail soigne
Et si le travail guérissait les personnes atteintes de handicaps neurologiques ? C’est la thèse développée par le Professeur Jean-Michel Oughourian, neuropsychiatre spécialisé dans la psychologie mimétique. Sa théorie novatrice a été confirmée par l’expérience des usines Amipi qui embauchent des salariés handicapés dans le but de réduire leurs difficultés cognitives et de les insérer dans des entreprises classiques (lire notre article). Selon cet ancien professeur de psychologie à la Sorbonne, grâce à une structure et à un accompagnement adapté, ces salariés développent de nouveau un réseau neuronal qui serait laissé à l’abandon en l’absence de sollicitation. Les usines Amipi qui ont recruté plus de 700 travailleurs handicapés depuis 2014 et réalisé près de 200 insertions en entreprise en sont la parfaite illustration.
Le travail qui guérit, Jean-Michel Oughourian, éditions Plon, 139 pages, 12,90 €
Un point de vue communiste sur les réformes des retraites
Allergiques aux idées communistes, s’abstenir. Bernard Friot, adhérent au Parti communiste français et au syndicat FSU, sociologue et économiste, s’agace, dans ce très court opuscule militant, de l’obstination des gouvernements à imposer des réformes des retraites, en même temps qu’il constate l’échec quasi systématique des mobilisations destinées à les faire tomber. Selon lui, les réformateurs ne visent pas les montants des pensions mais leur nature en contestant le lien entre la retraite et le travail, et par là même, l’essence de la pension comme attribut de la personne en retraite. Et si les oppositions syndicales et populaires contre les réformes échouent, c’est qu’elles-mêmes conçoivent la pension comme une continuation du salaire de référence. A son avis, il faudrait au contraire, pour remporter les batailles, sortir de la logique des gouvernements et de l’emprise de la “bourgeoisie” sur le travail : adopter le “salaire communiste” non comme contrepartie du travail subordonné mais comme attribut de la personne, rendre ainsi aux salariés le pouvoir sur le travail et la maîtrise sur la production. Par suite, il conviendrait de supprimer le lien entre la carrière, les cotisations et le calcul des pensions.
Prenons le pouvoir sur nos retraites, Bernard Friot, éditions La Dispute, 109 pages, 8 €
Déconstruction d’un poncif
Qui n’a jamais entendu cette ritournelle destinée à couper court à toute contradiction sur l’immigration ? “On ne peut pas accueillir toute la misère du monde”. Les auteurs laissent de côté les polémiques sur les intentions de Michel Rocard qui avait prononcé cette phrase avant d’ajouter que la France devait prendre sa part de cette misère. L’affirmation en forme de guillotine est en réalité une fausse évidence, un pur proverbe, horizon indépassable de tout argumentaire visant à refuser des étrangers sur le sol français. Une contre-vérité que le philosophe Pierre Tevanian et le juriste Jean-Charles Stevens dissèquent par le menu cette contre-vérité en la découpant en petits morceaux. A commencer par son sujet : “On”. Mais qui est ce “On” ? Rien ni personne, justement : “Nous voici face à une première entourloupe, très classique en politique. Plutôt que de dire “Je” et d’assumer seul avec l’unique force des arguments rationnels un choix politique éminemment critiquable. Celui de la fermeture des frontières, du maintien de la forteresse Europe et de la chasse aux sans-papiers”, affirment les auteurs. Le “ne peut pas”, nouveau coup de force rhétorique, vise à retirer le pouvoir et donc à déresponsabiliser. En tout, cette petite phrase dispose d’un grand pouvoir : neutraliser en nous toute affection et toute idée de l’intolérable. Des arguments chocs pour une question clé.
“On ne peut pas accueillir toute la misère du monde”, Pierre Tevanian et Jean-Charles Stevens, éditions Anamosa, 67 pages, 8 €
Un cadre français en prison de haute sécurité
En quelques secondes, la vie de Frédéric Pierucci bascule depuis le Boeing 777 tout juste posé sur la piste de l’aéroport JFK de New York en avril 2013. Le cadre supérieur responsable d’une filiale d’Alstom, se voit intimer l’ordre de se présenter dès le débarquement au personnel de bord. A la sortie de l’avion, un homme en uniforme lui demande de confirmer son identité, avant qu’un autre lui plaque un bras sur les reins afin de lui passer les menottes : “Vous êtes en état d’arrestation”. Commence alors une longue descente au pire des enfers des prisons les plus dures des États-Unis. Accusé de corruption dans une affaire de vente de centrales nucléaires alors qu’il a respecté toutes les procédures internes, Frédéric Pierucci va se heurter aussi aux plus injustes procédures destinées à le faire plaider coupable et à museler sa défense. Il découvrira au fil de son incarcération qu’il n’est que l’objet d’un enjeu bien plus lourd que lui : le rachat du fleuron français Alstom par le prédateur américain General Electric. Voici le récit d’une guerre économique souterraine et sans pitié qui, depuis l’ascension présidentielle de Donald Trump, se révèle enfin au grand jour.
Le piège américain, Frédéric Pierucci et Matthieu Aron, éditions J’ai Lu, 411 pages, 7,80 €
HISTOIRE
47 jours de grève dans la sardine
La plupart des journalistes envoyés en reportage à Douarnenez, cette ville portuaire du Finistère, pour couvrir le mouvement des sardinière, évoqueront “la grève de la misère”. Entassées dans des entrepôts crasseux et nauséabonds, 2 000 “filles d’usine” trient, découpent et mettent en boîte la seule ressource économique de la région : les sardines que les hommes, frères, pères ou maris, rapportent de la pêche. Parfois engagées par les patrons à l’âge de huit ans au lieu des douze requis par la loi, elles travaillent sans eau, sans toilettes, sans représentants du personnel et avec pour seul droit celui de se taire. Le 21 novembre 1924, tout part de l’usine Carnaud où le contremaître refuse de recevoir des ouvrières réclamant un dialogue sur leurs heures et leur paye. Cette dérobade de l’encadrement est aussitôt assimilée à du mépris. Quatre jours plus tard, les 25 usines de la côte débrayent en même temps. Outre le récit trépidant de la mobilisation sociale et des réactions politiques, Anne Crignon rappelle aussi la triste condition féminine de l’époque avec une gouaille bien sentie : “Que la femme soit libérée de l’usine, la voici déjà à faire la vaisselle”…
Une belle grève de femmes, Anne Crignon, éditions Libertalia, 163 pages, 10 €
La fresque épique d’une guerre oubliée
Qui parmi nous, quel que soit son âge, a étudié la guerre de 1870 pendant son parcours scolaire ? Le conflit qui a vu la Prusse nous rafler l’Alsace et la Lorraine, creusant ainsi un traumatisme profond, est devenu une affaire de spécialistes. Grave erreur car cette guerre fulgurante constitue la matrice des deux guerres mondiales qui suivirent. Elle explique aussi en partie la Commune de Paris, disparue elle aussi des programmes éducatifs. Avec une culture du 19e siècle exceptionnelle, l’historien du Second Empire Alain Gouttman retrace à la fois les causes diplomatiques, géopolitiques, économiques, sociales et historiques d’un conflit qui a vu “la première armée du monde” s’écrouler exsangue dans la cité ardennaise de Sedan. Désorganisation des troupes, défaut de communication, état de santé avancé de Napoléon III, visées dynastiques de l’impératrice Eugénie, rivalités entre maréchaux, incurie du commandement… Les causes de la débâcle sont détaillées avec brio et érudition. Un “must” pour lecteurs passionnés.
La grande défaite, 1870-1971, Alain Gouttman, éditions Tempus, 474 pages, 11 €
Leçon de courage et d’engagement
L’histoire racontée par ceux qui l’ont faite, en première ligne, et sans l’intermédiaire du narrateur. Tel est le pari de ce recueil de récits de soldats engagées dans les commandos du capitaine de corvette Philippe Kieffer. 176 jeunes militaires (notamment fusiliers marins), surentraînés dans des conditions dantesques depuis les camps retranchés d’Achnacarry, en Écosse, premiers Français à fouler les plages de Normandie, le 6 juin 1944, lors de la plus vaste opération de débarquement jamais entreprise. Leurs points communs : être issus de milieux sociaux modestes, répondre à l’appel du Général de Gaulle et rejoindre l’Angleterre coûte que coûte avec un courage à toute épreuve. Michel Vincent, ouvrier agricole dans le civil et âgé de 21 ans à l’époque, explique comment il réagissait face à la peur : “J’avais dormi très peu pendant la traversée. J’étais très jeune, je me disais que je verrais bien ce qui se passerait le lendemain. On n’avait pas le temps de réfléchir. Si vous réfléchissez trop, vous êtes anéanti. Faut pas penser. Puis on m’a annoncé : ‘Il faut débarquer. Allez, on y va'”. Des récits ou le courage se dispute à l’honneur.
Nous, les hommes du commando Kieffer, Récits du 6 juin 1944 recueillis par Stéphane Simonnet, éditions Texte, 302 pages, 10.50 €
ROMANS
Enquête policière à l’aube du Front populaire
À Paris dans les années 30, le feu couve entre l’agitation de l’extrême droite et les premières secousses sociales qui déboucheront sur le fameux gouvernement Front populaire de Léon Blum. Dans ce contexte survolté, Gabriel Funel, journaliste à l’Humanité, vient d’être nommé responsable de la rubrique sociale. Pourvu d’un solide réseau d’informateurs syndicaux sur le terrain, il se charge de couvrir l’affaire d’une jeune femme noyée dans la Seine à quelques centaines de mètres de son usine sucrière. Probablement une ouvrière, une parmi les 500 000 que compte le département. D’interview en filature, le projet d’article se transforme en véritable enquête. S’agit-il d’un crime maquillé en accident du travail, ou d’une sordide affaire de maltraitance sur le lieu de travail ? Épaulé par le commissaire Bornec, Gabriel découvrira l’histoire et le destin de celle que la rue a baptisé “Fleur de misère”.
Passage de l’avenir, 1934, Alexandre Courban, éditions Folio Policier, 214 pages, 11 €
Travailleur immigré recherche planche de salut
Saïd est ouvrier à l’usine Renault de Billancourt. En 1959, il a quitté l’Algérie pour tenter une nouvelle vie en France avec sa femme, Naja, et leurs trois enfants. De la fin de règne(De la démission) du président De Gaulle à l’ère Giscard, leurs conditions de vie se dégradent au même rythme que la cité HLM où ils résident. Installées au début de l’âge d’or des habitations à loyer modéré, les classes moyennes quittent progressivement ces quartiers abandonnés par l’État français. Peu à peu, rongés par des conditions leur permettant à peine de vivre dignement, Saïd et Naja s’éloignent, devenant l’un pour l’autre des “absents intranquilles”. Cette fracture s’étendra à leurs enfants lorsqu’après un accident, l’un d’eux rejoindra son oncle et bénéficiera ainsi d’un niveau de vie et d’une éducation lui permettant d’envisager l’avenir autrement. Chronique sociale et familiale, “Soleil amer” retrace aussi la culpabilité et les espoirs déçus de générations d’Algériens venus en France pour ne plus courber l’échine.
Soleil amer, Lilia Hassaine, éditions Folio, 178 pages, 7.99 €
Marie-Aude Grimont
À l’occasion de la rentrée scolaire, le CSE peut distribuer des bons d’achat exonérés de cotisations sociales
01/08/2025
À condition de bien respecter les règles Urssaf, les bons d’achat offerts par le CSE pour la rentrée scolaire sont exonérés de cotisations de sécurité sociale.
Il existe une première règle générale en vertu de laquelle les bons d’achat et les cadeaux attribués à un salarié au cours d’une année civile sont exonérés de cotisations lorsque leur montant global n’excède pas 196 € en 2025.
Si le montant 2025 des bons d’achat et cadeaux dépasse 196€, et sous réserve de la justification du suivi de scolarité, le bon d’achat rentrée scolaire est exonéré de cotisations sociales si les conditions suivantes sont respectées :
- l’enfant du salarié doit être âgé de moins de 26 ans dans l’année de l’attribution du bon d’achat rentrée scolaire. Un salarié sans enfant ne peut donc pas recevoir un bon d’achat car il n’est pas concerné par la rentrée scolaire ;
► Remarque : il s’agit de toute rentrée de début d’année scolaire ou universitaire. Peu importe la nature de l’établissement (établissement scolaire, lycée professionnel, centre d’apprentissage…). Il faut veiller à ne pas trop tarder à distribuer les bons d’achat. En décembre, ce serait trop tard ! Cela pourrait amener l’Urssaf à priver le CSE du bénéfice de l’exonération de cotisations sociale.
- le bon d’achat doit avoir une utilisation déterminée en lien avec la rentrée scolaire. Il doit mentionner soit la nature du bien qu’il permet d’acquérir, soit un ou plusieurs rayons de grand magasin, soit le nom d’un ou plusieurs magasins (bon multi-enseignes) ;
► Remarque : la mention des rayons doit être liée à l’événement. Un bon d’achat rentrée scolaire doit permettre l’accès à des biens tels que papeterie, livres, vêtements enfant, équipement informatique, etc.
- le montant de chaque bon d’achat ne doit pas excéder 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale, soit 196 euros en 2025 par enfant. Le salarié qui a plusieurs enfants en âge d’être scolarisé peut donc recevoir autant de bons d’achat qu’il a d’enfants. C’est 5 % par enfant.
► Remarque : dans le cas particulier où deux conjoints travaillent dans la même entreprise, le seuil de 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale s’apprécie pour chacun d’eux. Ainsi, chaque parent pourra recevoir un bon d’achat pour la rentrée scolaire de l’enfant.
Frédéric Aouate