CONSEILLER PRUD’HOMMES

Des changements à venir pour la saisie sur salaire et les prud’hommes

17/05/2023

Le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, dont l’examen au Sénat débutera en juin, modifie la procédure de saisie sur rémunération et assouplit les conditions de candidature aux fonctions de conseiller prud’hommes.

Le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, adopté le 3 mai en Conseil des ministres, contient des dispositions qui intéressent les salariés et leurs représentants, et notamment les conseillers prud’hommes. L’une des mesures phares est la déjudiciarisation de la procédure de saisie sur salaire. Explication.

Simplifier la procédure de saisie sur salaire

Actuellement, la procédure de saisie sur salaire se déroule devant le juge du tribunal judiciaire, seul compétent en la matière, quelle que soit la nature et quel que soit le montant de la créance à recouvrer. Il exerce les fonctions du juge de l’exécution. La procédure de saisie des rémunérations débute, à peine de nullité, par une tentative préalable de conciliation entre le débiteur et le créancier premier saisissant. Cette audience a lieu devant le juge du tribunal judiciaire. Le greffier en chef doit, dans les huit jours qui suivent l’audience de conciliation et au vu du procès-verbal de non-conciliation, procéder à la saisie.

Dans l’étude d’impact du projet de loi, le gouvernement explique que “la procédure de saisie des rémunérations actuelle souffre d’un déficit d’attractivité du fait de sa lenteur (…) et de la complexité attachée au formalisme d’une procédure judiciaire. Elle pâtit également d’un grand manque de lisibilité : seule procédure civile d’exécution mobilière conditionnée à une autorisation judiciaire préalable, ses dispositions sont en outre dispersées entre le code du travail et le code des procédures civiles d’exécution. Ces disparités de régime juridique et de codification ne sont pas justifiées”.

L’objectif du texte est multiple, indique l’étude d’impact. Il s’agit d’une part de “replacer la procédure de saisie des rémunérations dans le régime de droit commun des mesures d’exécution forcée mobilières”. D’autre part, le texte vise à “recentrer l’office du juge de l’exécution dans sa première acception, qui est de trancher les contestations qui naissent à l’occasion de l’exécution forcée quand il est expressément saisi à cet fin par les débiteurs”. Enfin, le texte entend “transférer les dispositions relatives à la procédure de saisie des rémunérations au sein du code des procédures civiles d’exécution, tout en maintenant les dispositions relatives à la protection du salaire au sein du code du travail”.

Pour ce faire, l’article 17 du projet de loi confie aux commissaires de justice la mise en œuvre de la saisie des rémunérations, après délivrance d’un commandement de payer permettant à la fois un droit de recours utile et suspensif au bénéfice du débiteur, et la possibilité d’un accord sur les modalités de paiement. La procédure est ensuite organisée autour du rôle du commissaire de justice répartiteur, qui assure un rôle de tiers, interface entre le débiteur, l’employeur et les créanciers, qui demeurent représentés par leur mandataire.

Concrètement :

le commissaire de justice délivrera un procès-verbal de saisie des rémunérations à l’employeur du débiteur ;

l’employeur sera tenu de déclarer au créancier saisissant l’existence de mesures de saisie antérieures ; 

concomitamment à la saisie, le créancier procèdera aux formalités d’attribution de la saisie à un commissaire de justice chargé de recevoir les versements effectués par l’employeur et de répartir ensuite les sommes saisies aux créanciers.

A noter : une liste des commissaires de justice répartiteurs sera fixée par la Chambre nationale des commissaires de justice.

un registre numérique des saisies des rémunérations sera créé, placé sous l’autorité de la Chambre nationale des commissaires de justice. Il sera destiné à recenser les mesures en cours afin de permettre notamment aux créanciers d’intervenir à la répartition des sommes saisies, ou susceptibles de l’être en cas d’accord de règlement ; 

le débiteur disposera d’un droit de contester la mesure à tout moment de son exécution ; 

Le juge de l’exécution sera amené, à la demande du débiteur, à contrôler tout à la fois la proportionnalité de la mise en oeuvre de la saisie des rémunérations par rapport au montant de la créance à recouvrer, et la proportionnalité des frais d’exécution antérieurs dont le recouvrement est poursuivi à l’occasion de la saisie des rémunérations.

Assouplir les conditions de candidature aux fonctions de conseiller prud’homal

Le projet de loi, à son article 8, modifie également certaines règles applicables aux candidatures à la fonction de conseiller prud’homal. Le texte harmonise ainsi les règles de désignation relatives au conseil de prud’hommes limitrophes afin de permettre à un plus grand nombre de candidats de postuler aux fonctions prud’homales et de garantir “un plus grand vivier dans les conseils de prud’hommes en sous-effectifs.

L’article L.1441-11 du code du travail prévoit actuellement que les personnes susceptibles d’être candidates aux fonctions de conseiller prud’hommes sont candidates dans la section du conseil de prud’hommes dans le ressort duquel elles exercent leur activité principale, ou dans la section de même nature de l’un des conseils de prud’hommes limitrophes.

Il est précisé que les voyageurs, représentants ou placiers (VRP) peuvent en outre être candidats dans le conseil de prud’hommes dans le ressort duquel est situé leur domicile.

S’agissant des demandeurs d’emploi et des personnes ayant cessé d’exercer toute activité professionnelle, ils sont candidats dans la section du conseil de prud’hommes dans le ressort duquel ils exerçaient leur dernière activité professionnelle, dans la section de même nature de l’un des conseils de prud’hommes limitrophes ou dans celle du conseil de prud’hommes dans le ressort duquel est situé leur domicile.

Le projet de loi assouplit les conditions de candidature qui permettent aux personnes en recherche d’emploi ou ayant cessé toute activité professionnelle de se porter candidat dans les conseils de prud’hommes de ressorts voisins de celui de leur domicile. Ces derniers pourront également postuler au sein du conseil de prud’hommes du dernier exercice de leur activité et limitrophe ainsi qu’au sein de celui de leur domicile mais sans possibilité de postuler sur le conseil de prud’hommes limitrophe de leur domicile.

Le texte assouplit également les conditions de candidature des VRP et de certains salariés qui exercent à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement en permettant qu’ils puissent postuler dans le conseil de prud’hommes dans le ressort duquel est situé leur domicile ou limitrophe à celui-ci.

Le texte prévoit également la possibilité de prononcer des sanctions disciplinaires même en cas de cessation des fonctions du conseiller prud’homal.

Le projet de loi sera examiné au Sénat en séance publique à compter du 6 juin. 

Florence Mehrez