Expertise pour risque grave : des témoignages anonymisés par le CSE peuvent servir d’éléments de preuve
06/01/2025
Parmi les éléments destinés à prouver l’existence un risque grave et justifier une expertise, le CSE peut recourir à des témoignages qu’il a anonymisé pour protéger leurs auteurs d’éventuelles représailles.
L’affaire commence par la décision de l’un des CSE d’établissement de la société Gaz réseau distribution France (GRDF) de recourir à une expertise pour risque grave. Sans attendre, l’employeur saisit le président du tribunal judiciaire. Il lui demande d’écarter des débats, autrement dit de ne pas prendre compte, les témoignages anonymes produits par le CSE pour prouver qu’il y avait bien un risque grave dans l’établissement et d’annuler la délibération adoptée par les élus du personnel. Sous prétexte que le recours à des témoignages anonymes ne permettait pas de respecter le principe du contradictoire, le président du tribunal fait droit à la demande de l’employeur.
Le principe du contradictoire |
En cas de procès entre deux parties (un employeur contre un CSE, un salarié contre un employeur, un syndicat contre l’entreprise), chaque partie a le droit de prendre connaissance des observations ou pièces produites par l’autre et de les discuter à tous les stades de la procédure. C’est ça le principe du contradictoire. Il garantit que chaque partie au procès a la possibilité de prendre connaissance des arguments et des preuves présentés par l’autre partie et de les discuter. C’est essentiel pour assurer un procès équitable et garantir le respect des droits de la défense. Le principe du contradictoire est notamment inscrit dans le code de procédure civile, dont l’article 15 prévoit notamment que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les éléments de preuve qu’elles produisent. L’article 16 prévoit quant à lui que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. |
Plus précisément, il est jugé que “le principe du contradictoire impose de ne pas tenir compte, dans le cadre du débat judiciaire, d’une pièce non préalablement communiquée dans son intégralité à la partie adverse”.
Or, les pièces produites par le CSE ne permettaient pas à la société de vérifier si les témoignages présentés à l’appui de l’allégation de risque grave émanaient de salariés exerçant les fonctions de chargé d’affaires, ou de salariés faisant partie de ceux à l’encontre desquels une procédure disciplinaire avait été conduite. Elles ne pouvaient donc pas être utilisées pour prouver l’existence d’un risque grave dans l’établissement.
Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation en décide tout autrement dans un arrêt du 11 décembre 2024.
Des témoignages certes anonymisés mais étayés par d’autres pièces
Pour les magistrats, “si le juge ne peut fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des témoignages anonymes, il peut néanmoins prendre en considération des témoignages anonymisés, c’est-à-dire rendus anonymes a posteriori afin de protéger leurs auteurs mais dont l’identité est cependant connue de la partie qui produit ces témoignages, lorsque ceux-ci sont corroborés par d’autres éléments permettant d’en analyser la crédibilité et la pertinence”.
Or, dans cette affaire, les témoignages utilisés par le CSE avaient été anonymisés par ses soins afin de protéger les salariés ayant témoigné d’éventuelles représailles et étaient étayés par d’autres pièces. Il appartenait donc au président du tribunal judiciaire l d’en examiner la valeur et la portée ainsi que des autres pièces dont il avait constaté la production par le comité.
L’affaire est renvoyée devant un autre tribunal judiciaire.
Frédéric Aouate
Les plans sociaux se multiplient en France
06/01/2025
Selon une étude de la Dares publiée le 27 décembre, le nombre de plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) validés et/ou homologués s’accroît de 7,6 % au troisième trimestre 2024 par rapport au trimestre précédent pour atteindre 141. Dans le détail, ces procédures visent 23 800 suppressions de postes. Il s’agit du nombre “le plus élevé depuis la crise sanitaire”. Celui-ci a, en effet, doublé par rapport au deuxième trimestre 2024 (9 600 ruptures de contrats).
Sur un an, la progression est de 27 % et les effectifs concernés augmentent de 131,1 %, principalement issus des secteurs de la logistique et de la distribution.
Le nombre de procédures de licenciement collectif pour motif économique hors PSE est également à la hausse (2 917 répertoriés). Ces restructurations ne nécessitent pas la mise en place d’un PSE, soit parce que l’employeur emploie moins de 50 salariés soit parce qu’il licencie moins de 10 personnes à la fois. Sur un an, ces procédures ont bondi de 22 %.
Source : actuel CSE
Fonderie de Bretagne : une lettre commune CGT / CFE-CGC / Medef adressée à Emmanuel Macron
06/01/2025
La mobilisation se poursuit pour sauver la Fonderie de Bretagne et ses 310 salariés, implantée à Caudan (Morbihan). Fin décembre, un potentiel repreneur, Private Assets, s’était finalement désisté. Selon la presse locale, Renault, le principal client du site, refuserait “d’apporter suffisamment de visibilité sur la part de marché de ses commandes”.
Jeudi 2 janvier 2025, la CGE, la CFE-CGC et le Medef ont écrit une lettre commune au Président de la République. Ils demandent à Emmanuel Macron d’intervenir auprès de Renault afin que le constructeur automobile maintienne ses commandes à la fonderie jusqu’en 2028.
Selon François Hommeril, président de la CFE-CGC, qui s’est exprimé sur FranceInfo “ce qu’on veut dire à travers ce courrier, c’est que si les gens concernés par ce dossier n’arrivent pas, en se concertant, à sauver cette entreprise alors on pourra dire que l’industrie est foutue en France […] C’est pour ça qu’on a voulu interpeller le président de la République. La désindustrialisation continue sous les coups de boutoir d’une seule chose : la recherche du coût minimum partout et à n’importe quel prix et on en a ici un excellent exemple”.
Pour la CGT, “cette lettre démontre une mobilisation inéditede par la pluralité de ses signataires : la quasi-totalité des députés bretons de tous bords, le MEDEF et l’UIMM Bretagne, les syndicats et la direction de l’entreprise, les élus locaux… Tous et toutes refusent que les fonderies de Bretagne ne deviennent le symbole de la désindustrialisation et de l’impuissance de l’État face aux grands groupes”.
Source : actuel CSE
Intelligence artificielle : Dial-IA lance ses outils opérationnels pour les élus de CSE
08/01/2025
Capture d’écran dial-IA
Après 18 mois de travail, le projet DialIA sort sa boîte à outils. Certains s’adressent directement aux élus de CSE et aux délégués syndicaux. Objectif : proposer une appropriation des concepts clés de l’intelligence artificielle afin que les représentants du personnel puissent aborder collectivement les sujets travail autour de l’IA. Et pourquoi pas, lancer le dialogue avec l’employeur…
Ils ont le mérite de répéter depuis plusieurs mois que l’intelligence artificielle nécessite le développement d’un véritable dialogue social aujourd’hui inexistant dans les entreprises. Mais pour les organisations syndicales réunies autour du projet dial-IA (abréviation de dialogue et intelligence artificielle), à savoir la CFDT, l’Ugict CGT, Force Ouvrière et la CFE-CGC, l’heure n’est plus aux avertissements : il faut agir.
Appuyés par l’Ires (institut de recherche syndicale) et l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), le projet dial-IA a tout d’abord abouti à la rédaction d’un manifeste en faveur d’une IA au service du travail et non l’inverse. Hier à Paris, les initiateurs de dial-IA sont passés à la seconde étape et ont présenté l’acte 2 du projet : la boîte à outils.
Le but est d’aider les représentants du personnel à lancer une phase de dialogue social sur l’IA avec les directions. Car comme le rappelle Charles Parmentier, intervenant au nom de la CFDT, “les employeurs inscrivent l’IA dans leurs choix stratégiques et économiques, ils n’ont donc pas envie d’en discuter”. Ces outils sont là pour armer les élus de CSE et délégués syndicaux afin de lancer enfin les choses sérieuses.
Des outils d’appropriation de l’IA
Après un rapide rappel de définition du projet dial-IA, la boîte à outils se compose de deux parties : l’une dénommée “Acculturation à l’IA” et l’autre relative aux “Modalités du dialogue social“.
Dans l’acculturation à l’IA, le lecteur peut découvrir les grands repères de l’intelligence artificielle. Précisons que les textes sont rédigés de manière très accessible et peuvent être compris par tout un chacun. Ces “basiques de l’IA” explicitent ce qu’est une IA, et ce qu’une IA n’est pas.
Afin d’accompagner les élus, la boîte à outils propose des définitions des termes en marge de droite de l’écran. Les contenus fourmillent de références aux textes juridiques et autres études disponibles afin de donner la possibilité au lecteur d’approfondir les différentes notions.
A noter que les paragraphes ne sont pas trop longs, ce qui permet une lecture facile. Les titres et citations mises en exergue aèrent les textes et fournissent différents niveaux de lecture. Les élus ont de plus accès à un glossaire, aux dates importantes de l’IA pour retracer son historique (on y apprend qu’on peut remonter aux années 1930), un quizz, un jeu, une vidéo d’introduction et même un module informatique d’apprentissage pour les plus motivés.
Une cartographie des enjeux met en lumière les opportunités et risques de l’introduction d’un système d’intelligence artificielle en entreprise. Elle porte évidemment sur le travail et l’organisation des tâches mais évoque aussi une partie très intéressante sur les enjeux environnementaux liés à l’IA. Matthieu Trubert (Ugict-CGT) rappelle à cet égard qu’ils sont absolument fondamentaux : “L’IA touche à la dimension RSE (responsabilité sociale et environnementale) de l’employeur, aussi bien au niveau environnemental qu’énergétique, et c’est une occasion de créer des filières industrielles transverses sur l’énergie, les logiciels ou encore les data-centers”.
Des situations concrètes de développement d’une IA dans des entreprises permettent également aux représentants du personnel de se figurer comment un tel projet pourrait advenir dans leur structure. Ils peuvent ainsi de projeter et lancer leur propre réflexion sur les tenants et aboutissants de l’implémentation d’une IA.
Des outils de dialogue social : registre des IA, kits de survie
Dans la seconde partie relative aux Modalités de dialogue social, un argumentaire en 7 points présente “les bonnes raisons” de propulser l’IA comme un sujet de discussion avec la direction : entre autres, c’est un enjeu d’attractivité de l’employeur, les jeunes et les cadres ont déjà franchi le cap, le dialogue contribue à maîtriser les coûts et à exorciser les peurs autour de l’IA.
On retrouve donc ici l’aspect “grammaire partagée” développé par Eric Peres (FO-Cadres) : “Dial-IA pour FO représente une volonté de déployer une critique syndicale sur cet objet socio-technique que devient l’IA dans l’entreprise. Or, nous n’avons pas tous le même degré d’information, il existe une asymétrie entre employeurs, représentants des salariés et fournisseurs d’IA. Pour permettre le dialogue social, il faut partager cette grammaire critique”.
Et ce n’est pas tout, car cette partie de la boîte à outils propose des “leviers d’action” : un modèle de registres des systèmes d’IA, et des clauses de revoyure (car l’IA évolue sans cesse, un seul rendez-vous avec l’employeur ne suffira pas).
Un “kit de survie du dialogue social en entreprise” (développé aussi pour la fonction publique) propose une méthode pour “identifier l’IA dans l’entreprise et l’amener à devenir un objet de dialogue social au regard de cet intérêt commun entre l‘employeur et les salariés”. Il fournit quatre leviers :
- rendre visibles les SIA en place dans l’entreprise et leurs impacts potentiels ;
- mobiliser les canaux d’information et les consultations obligatoires du CSE ;
- intégrer les impacts des SIA dans la négociation d’un Accord de Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels ;
- proposer des pratiques et outils innovants de dialogue social itératif (à répéter plusieurs fois).
On le voit, les rédacteurs ont eu le souci du concret afin que Dial-IA ne se limite pas à des incantations. Comme l’indique Nicolas Blanc (CFE-CGC), “il s’agit de décliner l’accord cadre européen de 2020. Outiller les organisations syndicales permet aussi de placer l’employeur face à ses responsabilités. Sans appropriation par les représentants du personnel, l’IA se déploiera sans eux, dans l’opacité”.
Bientôt un accord national interpro ?
L’un des moyens de remplir cet objectif consisterait dans la négociation d’un accord national interprofessionnel relatif à l’IA. Elle figurait d’ailleurs à l’agenda autonome des partenaires sociaux en 2021. En 2024, ces derniers ont assuré de leur accord pour lancer les opérations. Depuis, il semble urgent d’attendre, en tout cas pour le patronat, ont indiqué d’une seule voix les représentants des organisations syndicales.
Pour l’heure, la présidente de l’Ires, Anne-Florence Quintin, et la chercheuse Odile Chagny qui ont toutes deux piloté le projet, indiquent que les organisations patronales ont également participé. Des contacts sont établis et réguliers avec le Medef, la CPME et l’U2P. Le 4 février 2025 doit d’ailleurs s’achever le “Tour de France de l’IA” lancé par le Medef en octobre 2024. L’opération se limite cependant à de la sensibilisation…
Marie-Aude Grimont
En décembre 2024, les prix à la consommation augmentent de 1,3 % sur un an
08/01/2025
L’inflation atteint 1,3 % sur un an en décembre 2024, selon l’Insee. Sur le seul mois de décembre, les prix à la consommation augmenteraient de 0,2 % (après ‑0,1 % en novembre). “Cette hausse s’expliquerait par celle des prix des services notamment ceux des transports, et dans une moindre mesure par celle des prix de l’énergie, plus particulièrement des produits pétroliers. À l’inverse, les prix des produits manufacturés baisseraient par rapport à novembre, tandis que ceux de l’alimentation et du tabac seraient stables ou quasi stables par rapport au mois précédent”, rapporte l’Insee.
L’institut de la statistique précise toutefois qu’il s’agit d’une estimation provisoire “ne devant pas être utilisée pour des revalorisations contractuelles”, les résultats définitifs devant être publiés le 15 janvier 2025.
Source : actuel CSE
KPMG France s’apprête à céder son activité d’expertise comptable
08/01/2025
La société de capital investissement TowerBrook Capital Partners s’est engagée à acquérir l’activité d’expertise comptable et de gestion sociale de KPMG en France, aux côtés des associés de KPMG ESC GS, selon un communiqué du 20 décembre. “L’opération sera finalisée lorsque les instances représentatives du personnel concernées auront été dûment informées et consultées, conformément aux dispositions légales applicables”, est-il précisé.
Source : actuel CSE
La Fonderie de Bretagne en grand danger
09/01/2025
Renault, qui a créé la Fonderie de Bretagne en 1966, refuse de garantir des commandes pour maintenir le site de Caudan (Morbihan). Cette attitude suscite une levée générale de boucliers en Bretagne. La Fonderie peut-elle être sauvée d’une nouvelle menace de fermeture alors qu’un CSE extraordinaire est prévu demain ? Les explications du secrétaire du CSE.
La Fonderie de Bretagne, créée par Renault en 1966 à Caudan (Morbihan), va-t-elle survivre ? La question s’était déjà posée il y a quelques années mais elle revient cette fois avec force : un CSE extraordinaire est programmé demain, vendredi 10 janvier. La Fonderie, cédée par le constructeur en 1999, avait été placée en 2008 en redressement judiciaire.
La marque au losange s’était résolue à la reprendre pour garantir l’avenir des 400 emplois. A l’époque, le comité d’entreprise employait encore 10 salariés pour la gestion de la cantine. “Nous gérons toujours la cantine, mais avec seulement 5 salariés”, commente aujourd’hui David Taillefer, le secrétaire CGT du CSE, joint hier par téléphone.
Un projet de reprise allemand
La société, qui avait par la suite changé de mains, est aujourd’hui gérée par une société d’investissement (Callista) qui semble n’avoir pas les moyens de relancer l’activité en la diversifiant. C’est pourquoi une autre société d’investissement, allemande celle-là (Private Assets), s’était déclarée candidate pour reprendre l’affaire.
C’est Jérôme Dupont, le directeur de la Fonderie, un homme placé là par Renault mais qui a fini par faire corps avec le personnel et le projet du site industriel, qui a trouvé ce repreneur, comme l’explique un article du Monde. Une reprise assorti d’un véritable projet industriel, mais toutefois conditionnée à l’assurance que donnerait Renault de maintenir des commandes le temps d’assurer l’avenir de l’entreprise.
Mais voilà : cela ne rentre pas du tout dans le projet industriel du constructeur. Renault a donc rejeté, en décembre, l’idée de garantir pour l’avenir un certain volume de commandes à la fonderie, d’où le retraite de la candidature de Private Assets. “Renault profite du vide politique et de l’impuissance de l’Etat. Nous n’avons même pas reçu la visite du ministre de l’industrie”, commente, d’une voix sourde et coléreuse, David Taillefer (*).
Un courrier commun
Dans un courrier commun adressé début janvier à l’Elysée, un grand nombre de personnalités locales (parmi lesquelles le directeur actuel de l’entreprise, les présidents du Medef et de l’UIMM du Morbihan, mais aussi des responsables des chambres de commerce, du conseil régional, des maires et députés, etc.) ainsi que les délégués syndicats de la CFE-CGC et de la CGT du site en ont appelé au président de la République, début janvier, pour qu’il demande à Renault de maintenir ses commandes avec un minimum de visibilité, 300 emplois étant en jeu :
“Contre toute attente, après 6 mois de négociation et alors que le plan de financement était bouclé et le projet validé et soutenu par les services de l’État, Renault a annoncé le 20 décembre dernier son refus de garantir la moindre part de marché à la Fonderie de Bretagne, préférant délocaliser sa production en Turquie, en Espagne et au Portugal. Cette décision est très grave et était nécessairement prévue de longue date. Elle s’inscrit dans une stratégie plus globale de maltraitance du tissu industriel français (..) Nous vous appelons donc à intervenir en urgence auprès de la direction générale de Renault. Renault a réalisé un chiffre d’affaires de 52,4 milliards d’euros en 2023 avec un résultat net de 2,94 milliards avec 248 millions d’aides publiques. L’impact du soutien à la Fonderie de Bretagne serait évidemment totalement indolore dans ses résultats. L’État dispose de leviers pour imposer à Renault de jouer le jeu du made in France. Renault profite de centaines de millions d’euros d’aides publiques. Le groupe a bénéficié d’un prêt garanti par l’État de 4 milliards pendant le COVID. Il opère sur un marché solvabilisé par de l’argent public. L’État est actionnaire“.
Une partie des salariés en activité partielle
En attendant un éventuel sursaut de l’Elysée et de l’Etat, l’entreprise a acté, lors d’un CSE extraordinaire lundi 6 janvier, la mise en activité partielle des deux-tiers des salariés, un autre tiers devant relancer la production. “C’est une décision de court terme, jusqu’au 17 janvier, pour faire rentrer de la trésorerie en transformant le reste de matière qu’il nous reste, ce qui va occuper une centaine des 350 salariés”, nous indique le secrétaire du CSE.
Ce dernier ne décolère pas contre Renault, qui achète 95% de la production de l’entreprise. “Nos pièces, comme les boitiers différentiels, les porte fusées ou les triangles, sont aussi bien destinées aux véhicules thermiques que mécaniques. Il nous faut deux ans de poursuite des commandes de ces pièces par Renault pour avoir le temps de nous diversifier. Car pour lancer la fabrication de pièces en série, il faut entre un an et dix-huit mois. Mais Renault a prévu depuis des années de se désengager”, analyse David Taillefer.
Et ce dernier d’insister sur la valeur de l’entreprise et de son savoir-faire : “Notre outil de travail est récent. La ligne de moulage ne date que de 4 ans, elle peut sortir 40 000 tonnes. L’ilot de noyautage est neuf. Et nous avons reçu en décembre une machine de 800 000€ pour faire des retouches automatiques. Si nous fermons, ce sera un gâchis et il y aura trois fois plus d’emplois supprimés que nos 350 postes, car nous faisons aussi travailler des sous-traitants”.
L’élu reste cependant combatif : “La mobilisation continue. Aujourd’hui, nous avons fait visiter l’usine au député François Ruffin”. Non loin de la Fonderie se trouve le site industriel de Hill Rom Baxter, à Auray. En 2014, le projet de délocalisation des services du site avait été mis en échec par le personnel et la direction locale qui avaient su mobiliser largement et faire jouer les leviers politiques. L’histoire va-t-elle se répéter pour la fonderie de Caudan ? A suivre…
(*) Ce dernier est Marc Ferracci. Sur RMC, le ministre de l’industrie a expliqué que l’Etat s’est impliqué depuis des semaines sur ce dossier pour rapprocher les points de vue tout en constatant le blocage de Renault : “Il faut que Renault s’engage, sinon sur des volumes, du moins sur une partie des achats des produits de la fonderie”. Et Marc Ferracci d’ajouter : “Il serait ubuesque de ne pas réussir à faire converger les points de vue (..) Le nombre de fonderies se réduit en Europe et il y a des besoins que pourront capter celles qui resteront”.
Bernard Domergue
Même indirectement, le comité social et économique ne peut pas remettre en cause le transfert des salariés
09/01/2025
Sous couvert de demandes d’information et de production de documents, le CSE ne peut pas s’opposer au transfert des contrats de travail des salariés dans le cadre d’une filialisation des fonctions support du groupe.
En tant que personne morale, le CSE a le droit d’agir en justice. Par exemple, le comité peut agir contre un prestataire qui n’a pas respecté ses engagements contractuels, contre l’employeur qui a manqué à l’une de ses obligations légales vis-à-vis du CSE…Ainsi, il pourrait intenter une action pour faire respecter ses droits en matière d’information/consultation, de budgets, de réunions, d’expertises, etc. Il le fait en son nom et pour son propre compte.
Qualité pour agir, intérêt à agir |
L’action en justice du comité social et économique n’est recevable que s’il a qualité pour agir et justifie d’un intérêt à agir. La qualité pour agir s’apprécie par rapport aux missions du CSE, à savoir assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, etc. (article L. 2312-8 du code du travail). Contrairement aux syndicats, le comité social et économique n’a pas pour mission de représenter les intérêts collectifs d’une profession. Le comité social et économique doit par ailleurs justifier d’un intérêt à agir en raison du préjudice qu’il subit. |
En revanche, le CSE ne tient d’aucune disposition légale le pouvoir d’exercer une action en justice au nom des salariés ou de se joindre à l’action de ces derniers, lorsque ses intérêts propres ne sont pas en cause (par exemple, Cass. soc., 14 mars 2007, n° 05-45.458). A ce titre, il ne peut pas contester le transfert des contrats de travail de certains salariés auprès d’un nouvel employeur en application de l’article L. 1224-1 du code du travail.
C’est cette règle que nous rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 11 décembre 2024. L’affaire est intéressante car elle nous montre que le CSE ne peut pas tenter de contourner l’interdiction d’agir au nom des salariés en faisant valoir une insuffisance d’information.
Un projet de regroupement
Dans le cadre d’un vaste projet de regroupement des fonctions supports du groupe Nestlé au sein d’une filiale, la direction de Nestlé France engage un processus d’information/consultation du CSE central en juillet 2021. Un document d’information relatif au projet de transfert de 369 salariés au sein de la filiale Nestlé Excellence Supports est remis aux représentants du personnel.
Plusieurs réunions ont lieu, une expertise est lancée, qui prolonge le délai de consultation… Malgré cela, les représentants du personnel estiment que les réponses apportées par la direction à leurs vingt-neuf questions sur la nature juridique du projet et ses conséquences sociales demeurent incomplètes ou insuffisantes.
L’affaire est portée en justice.
Le CSE veut obtenir de la direction un certain nombre d’informations, parmi lesquelles la liste précise des actifs matériels et immatériels transférés, la nature juridique de l’opération, la copie des actes de transferts et le PV de l’assemblée générale des actionnaires. Pour convaincre les juges qu’il est dans son bon droit, le comité soutient que “sans les informations sollicitées, il n’était pas en mesure d’apprécier la régularité de l’application de l’article L. 1224-1 du code du travail justifiant le transfert de plein droit des contrats de travail des salariés au sein de la société NES”.
Seul le salarié peut agir
Erreur ! Pour les juges, sous le couvert de demandes d’information et de production de documents portant notamment sur la consistance des actifs transférés, le CSE ne cherchait qu’à remettre en cause l’application de l’article L. 1224-1 du code du travail par l’employeur. Or, comme le rappelle la Cour de cassation, “l’action en contestation du transfert d’un contrat de travail est un droit exclusivement attaché à la personne du salarié”.
Sur le fond, compte tenu du nombre de réunions d’information, du contenu des différents PV de réunion, des réponses apportées par l’employeur aux 29 questions du comité et des apports pour les élus du rapport d’expertise, il est ensuite jugé que le CSE avait bénéficié d’informations “utiles, loyales, suffisamment précises et détaillées sur les objectifs poursuivis, les moyens pour y parvenir et les conséquences en termes d’emploi”.
Il pouvait donc se prononcer sur le projet de transfert des fonctions supports en pleine connaissance de cause.
Frédéric Aouate
Défaillance d’entreprises en 2024 : les chiffres alarmants de l’AGS
09/01/2025
Le régime de garantie des salaires (AGS) vient de publier son bilan de l’année écoulée. Et autant dire qu’il est plutôt sombre. L’AGS enregistre une hausse de 23 % du nombre de bénéficiaires. 2025 ne s’annonce guère sous de meilleurs auspices.
Il est des chiffres qui parlent d’eux-mêmes : avec une hausse de près de 20 % de ses bénéficiaires, selon un premier bilan de l’année 2024, le régime de garantie des salaires (AGS) tire la sonnette d’alarme (*). “Près de 250 000 salariés ont bénéficié de la garantie AGS en 2024, un chiffre record qui témoigne de la gravité de la situation économique actuelle”, alerte Christian Nibourel, président de l’AGS.
Une hausse de 23 % des montants avancés
Ce sont ainsi plus de 2,1 milliards d’euros que l’AGS a avancé en 2024, soit une hausse de 23 % par rapport à 2024, ce qui représente plus de 8 500 euros versés par salarié.
Les créances les plus importantes sont constituées par les salaires (25 % des montants avancés), les indemnités de licenciement (près de 25 % également) et leur préavis (plus de 19 %).
Cinq secteurs d’activité principalement impactés
Cinq secteurs d’activité concentrent plus de 70 % des bénéficiaires de l’AGS en 2024. Ce sont les mêmes qu’en 2023 :
- secteurs de la construction (près de 41 000 bénéficiaires) ;
- services aux entreprises (près de 43 500) ;
- industrie (plus de 36 000) ;
- commerce (près de 36 000) ;
- hébergement et restauration (près de 25 000).
Un tiers de bénéficiaires dans des TPE
87 % de ceux qui ont bénéficié de l’AGS en 2024 étaient en CDI. En moyenne âgés d’une quarantaine d’année, avec sept années d’ancienneté dans l’entreprise, ils percevaient un salaire mensuel de référence qui s’élevait à plus de 2 500 euros.
Plus de 30 % d’entre eux appartiennent à des très petites entreprises de moins de 10 salariés. L’AGS observe toutefois une “augmentation notable” du nombre d’entreprises de plus de 100 salariés (27 % des bénéficiaires y travaillaient en 2024).
L’AGS ne se montre pas très rassurante pour l’année à venir. “Les projections sur l’année 2025 laissent présager un niveau similaire de mobilisation du régime”, augure Christian Nibourel.
(*) L’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des Salariés (AGS) joue un rôle “d’amortisseur social” pour les entreprises et leurs salariés concernés par une procédure collective (sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire) : avance des salaires, maintien de la viabilité économique et financière des entreprises en difficulté et préservation de l’emploi.
Florence Mehrez
43 % des entreprises de 10 à 49 salariés recourent aux progiciels de gestion intégrée
09/01/2025
Selon une étude de l’Insee, 47 % des entreprises installées en France de 10 salariés ou plus (*) utilisent des progiciels de gestion intégrée (PGI) permettant le partage de données au sein de l’entreprise. Si l’utilisation des PGI augmente avec la taille de l’entreprise, elle est néanmoins répandue au sein des petites entreprises : 43 % des entreprises de moins de 50 salariés déclarent y avoir recours.
L’usage d’applications de gestion de la relation client et de logiciels d’informatique décisionnelle est moins répandu (respectivement 25 % et 11 % des entreprises de l’échantillon).
(*) L’enquête de l’Insee sur les technologies de l’information et de la communication dans les entreprises (TIC) 2023 a été réalisée début 2023 auprès d’un échantillon d’environ 14 200 entreprises implantées en France (hors Mayotte), de 10 personnes occupées ou plus (salariés et non-salariés) des secteurs principalement marchands hors secteurs agricole, financier et d’assurance.
Source : actuel CSE
Coordinateur d’intimité, un métier “émergent” en 2025 selon France compétences
10/01/2025
De clerc gestionnaire à expert en digitalisation et exploitation des bâtiments, en passant par responsable green IT, technicien de maintenance de batterie de véhicules électriques et technicien en bioproduction, France compétences publie une nouvelle liste de 16 métiers considérés comme particulièrement en évolution ou en émergence, suite au sixième appel à contributions lancé par l’institution publique en 2024 à destination des branches et syndicats professionnels.
Parmi ces métiers, un seul est nouveau, celui de coordinateur d’intimité, dans le sillage du mouvement #metoo : un poste qui vise à encadrer des scènes d’intimité sur les plateaux de tournage impliquant “des scènes de nudité, des actes sexuels simulés, des violences sexuelles, des baisers ou des caresses des parties intimes”, selon la fiche métier. Et à veiller au bien-être des actrices et des acteurs. Un métier dont le déploiement est d”ailleurs prévu par l’accord des partenaires sociaux rendu public lors du dernier festival de Cannes.
Cette liste est fixée pour une durée de deux ans.
Les certifications visant ces métiers bénéficient d’une procédure simplifiée d’enregistrement au RNCP et au Répertoire spécifique “afin de s’adapter au mieux aux évolutions du monde du travail”.
Source : actuel CSE