DROITS DES SALARIÉS

Retraites et pouvoir d’achat : une rentrée sociale tendue sur fond d’inflation

04/09/2023

Olivier Dussopt s’est exprimé vendredi 1er septembre sur les sujets de la rentrée sociale, le jour de l’entrée en vigueur de la réforme des retraites. Certaines petites pensions ne seraient pas revalorisées dans un premier temps. De plus, l’inflation se poursuit, nourrissant l’inquiétude sur le pouvoir d’achat, et des préavis de grève ont été déposés dans différents secteurs.

Le mois de septembre à peine pointé, les épisodes de rentrée sociale se sont succédé. Après l’annonce d’une conférence sociale mercredi par Emmanuel Macron, le ministre du travail a évoqué différents dossiers vendredi matin. Le contexte est morose : les chiffres de l’inflation, notamment sur les produits alimentaires, se cumulent avec l’entrée en vigueur de la réforme des retraites. Olivier Dussopt a indiqué rencontrer “un par un” les responsables des organisations syndicales et patronales. Il n’est pas certain cependant que cela réchauffe les relations entre les syndicats et l’exécutif.

Olivier Dussopt confirme une conférence sociale limitée aux bas salaires

Interrogé sur France 2 vendredi 1er septembre, Olivier Dussopt a confirmé que la conférence sociale annoncée par Emmanuel Macron se limiterait aux sujets des bas salaires et des branches qui conservent des minimas conventionnels inférieurs au Smic. Rien sur le travail ni sur les retraites donc. Dans la matinée, la CGT a diffusé un communiqué de presse posant ses exigences.

Si elle “se satisfait de mettre sur la table la question des salaires”, elle remet d’emblée les projecteurs sur le pouvoir d’achat, non sans rappeler ses revendications : le Smic à 2 000 euros brut, l’indexation des salaires sur les prix, l’augmentation automatique des minimas de branche, la conditionnalité des aides publiques aux entreprises. Un second communiqué diffusé vendredi après-midi montre que le syndicat entend “continuer le combat” sur les retraites et dénonce “la non-communication de la clause de sauvegarde pour les carrières longues qui doit leur permettre un départ anticipé”.

Certaines petites retraites ne seront pas revalorisées dès cet automne

“83 % des décrets d’application de la réforme des retraites sont publiés”, a assuré le ministre du travail. “Quelques mesures entreront en vigueur en 2024-2025, ces textes paraîtront dans les prochaines semaines, il s’agit surtout de décrets de coordination sur des engagements très techniques que nous avons pris, comme les modalités de calcul de la cotisation des entreprises pour la branche accidents du travail”, a-t-il précisé.

Olivier Dussopt a également tenté de rassurer sur la capacité des équipes des caisses de retraites à traiter l’entrée en vigueur de la réforme : “Nous avons ouvert un nouveau simulateur début juin et de trop nombreuses connexions avaient saturé le site. Désormais, les simulateurs de calcul sont prêts, 8 millions de simulations ont été réalisées”. Le ministre a autorisé le recrutement immédiat de 200 personnes en renfort, et plusieurs centaines de personnes en 2024.

En revanche, sur le front des petites pensions (1 200 € de retraite pour une carrière complète au Smic), Olivier Dussopt a reconnu que sur les 200 000 nouveaux retraités concernés (1,7 million en comptant les retraités actuels), tous ne percevront pas immédiatement leurs nouvelles pensions. Seulement 600 000 personnes en bénéficieront dès le versement de leur retraite en septembre. Le reste des revalorisations sera échelonné jusqu’en début 2024, notamment en raison de l’appartenance des assurés à plusieurs caisses. Dans ce cas, les versements de janvier ou février 2024 incluront le paiement rétroactif des mois manquants depuis septembre.

La question des retraites reste donc dans tous les esprits en cette rentrée sociale. Côté politique, la présidente du groupe de La France Insoumise à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, a indiqué inscrire l’abrogation du report de l’âge légal de départ à l’ordre du jour de sa niche parlementaire, le 30 novembre.

L’inquiétude persiste sur le pouvoir d’achat

L’inflation se poursuivant dans les rayons des supermarchés, en particulier sur les produits alimentaires (+ 11,1% en un an), le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a tenu une réunion mercredi 30 août avec les représentants de la grande distribution. Trois mesures destinées à “casser la spirale des prix” en sont sorties :  

Un avancement des négociations commerciales avec les fournisseurs entre septembre et décembre, au lieu de décembre à mars, afin de répercuter plus rapidement les baisses de prix ;

Le blocage des prix de 5 000 références (au lieu des 1 500 actuels), sous le contrôle de la DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes) ;

L’obligation pour les distributeurs de répercuter immédiatement dans les rayons les baisses de prix consenties par les industriels sans grossir leurs marges, également sous l’égide de la DGCCRF. 

Les engagements du ministre sont intervenus quelques heures après la publication par l’Insee des derniers chiffres de l’inflation. Selon l’institut, les prix à la consommation augmentent de 4,8 % en août au lieu de 4,3 % en juillet. Un rebond lié à une hausse persistante des prix de l’énergie. Fin juillet, la Banque centrale européenne ait relevé son taux directeur de 25 points de base (pour le porter à 4,25 %), ce qui soutient les hausses de taux des crédits pour les ménages français, notamment les crédits immobiliers. Dans une autre main, l’institution financière demande aux États de réduire leurs dépenses, notamment les mesures d’aides autour des prix énergétiques.

De ce fait, la crise géopolitique liée à la guerre en Ukraine, qui désorganise les chaines internationales de production d’énergie, alliée avec le maintien de la pression sur les prix par les pays producteurs de pétrole, même si les prix généraux baissent, ils sont de nouveau tirés à la hausse par ceux de l’énergie. Les mesures annoncées par le ministre de l’Économie risquent donc de ne pas satisfaire les syndicats qui continuent de pousser leurs revendications sur les salaires. Sur ce front, malgré les hausses négociées dans les entreprises, la croissance des prix reste majoritairement en avant de celle des salaires, une situation qui continue de rogner le pouvoir d’achat. Selon la Dares, qui a pointé début août l’évolution des salaires, “L’indice du salaire mensuel de base (SMB) de l’ensemble des salariés progresse de 1,0 % au cours du 2e trimestre 2023. Sur un an, il augmente de 4,6 % après + 4,7 % le trimestre précédent”

FO refuse de se rendre à la réunion du Conseil national de la refondation (CNR)

Vendredi matin, le secrétaire général de Force Ouvrière a indiqué refuser l’invitation du Président Emmanuel Macron à se rendre à la prochaine réunion du CNR, prévue le 7 septembre.

Pour Frédéric Souillot, “FO n’a pas sa place dans cette instance qui, en réunissant des composantes aussi disparates que forces politiques, économiques, sociales, associatives, des élus des territoires et des citoyens tirés au sort, conduit à diluer la parole des organisations syndicales et affaiblit le rôle des acteurs sociaux”.

Le syndicat ne refuse cependant pas tout dialogue, pourvu qu’il soit organisé “dans le cadre des instances existantes”, et il revendique toujours la révision des ordonnances Macron sur le CSE. Sans oublier des hausses de salaires, le progrès des droits des travailleurs, les services publics, la transition climatique notamment (communiqué en pièce jointe).

Si on peut supposer que la CFDT, la CFTC et l’Unsa participeront à cette réunion puisqu’ils ont assisté au CNR, il est cependant peu probable que la CGT s’y rende.

Enfin, afin de maintenir la pression sur l’exécutif alors que se profile la coupe du monde de rugby organisée en France du 8 septembre au 28 octobre, des préavis de grève ont été déposés dans deux secteurs stratégiques. Le syndicat national des contrôleurs du trafic aérien (SNCTA) appelle les salariés à cesser le travail le 15 septembre, au moment où la majorité des supporters devraient se rendre en France par avion. Au cœur du conflit selon le SNCTA, l’inaction de la direction générale de l’aviation civile en matière salariale. Le syndicat revendique le rattrapage de l’inflation via une revalorisation indemnitaire (lire le communiqué).

Un préavis est également tombé côté SNCF. Les syndicats de cheminots CGT, Sud rail et CFDT appellent à la grève le 26 septembre, “contre la remise en cause de leurs droits et garanties sociales”. Rappelant que “depuis le début de l’année, les cheminotes et cheminots ont combattu les attaques du gouvernement contre nos retraites”, ils dénoncent également “la filialisation visant à disloquer le groupe et raboter les conditions sociales”. Rappelons enfin que l’intersyndicale appelle les salariés à manifester contre l’austérité lors de la journée européenne de mobilisation le 13 octobre prochain. Bonne rentrée !

Marie-Aude Grimont

Acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie : l’État condamné pour non-conformité au droit européen

06/09/2023

La cour administrative d’appel de Versailles condamne l’État pour ne pas avoir modifié les règles d’acquisition des congés payés par des salariés malades. Elle juge que sont contraires à l’article 7 de la directive 2003/88/CE, les dispositions du code du travail qui n’assimilent pas à du travail effectif les périodes pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause de maladie.

Invoquant une atteinte fautive portée par certaines dispositions du code du travail au droit aux congés payés des travailleurs tel qu’il résulte du droit de l’Union européenne, la CGT, FO et l’Union syndicale Solidaires saisissent la juridiction administrative. Elles demandent au juge de condamner l’Etat à leur verser à chacune la somme de 50 000€ en réparation du préjudice subi par les salariés dont elles défendent les intérêts.
Dans une décision du 17 juillet 2023, la cour d’appel de Versailles leur donne gain de cause et condamne l’État à leur verser 10 000€ chacune.

La non-conformité de certaines dispositions du code du travail au droit européen…

Le code du travail prévoit que le salarié a droit à un congé de 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur et que la durée totale du congé exigible ne peut excéder 30 jours ouvrables.

De nombreuses absences sont assimilées à du temps de travail effectif et plus particulièrement celles énumérées à l’article L. 3141-5 du code du travail. Il en est ainsi en cas de congés maladies en raison d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle.

En revanche, la période de suspension de son contrat de travail en raison d’un arrêt de travail pour origine non professionnelle ne permet pas au salarié d’acquérir des congés payés, ce cas de figure n’étant pas mentionné à l’article L. 3141-5 du code du travail.

La législation française est clairement contraire à la directive européenne sur le temps de travail de 2003 qui prévoit un droit à congés payés d’au moins quatre semaines (Directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, art. 7), sans distinguer selon l’origine des absences et donc y compris en cas d’arrêt de travail pour maladie non-professionnelle (Cour de justice de l’Union européenne du  24 janvier. 2012, aff. C-282/10).

… engage la responsabilité de l’État…

La directive européenne précitée ne peut pas être invoquée dans un litige entre salarié et employeur de droit privé. Elle n’a pas d’effet direct. Concrètement cela signifie que les juges ne peuvent s’y référer pour écarter les dispositions nationales contraires, si un salarié l’invoque pour réclamer des congés payés au titre d’une période d’absence pour maladie non-professionnelle (arrêt du 13 mars 2013).

► Cette directive est directement applicable et peut être invoqué par les salariés d’employeurs assimilés à une autorité publique (arrêt du 22 juin 2016).

Toutefois, le salarié peut engager la responsabilité de l’État pour ne pas avoir mis le droit national en conformité et obtenir réparation du préjudice subi.

C’est dans ce contexte que les organisations syndicales précitées ont demandé la condamnation de l’État à leur verser à chacune la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice moral subi par les salariés dont elles défendent les intérêts.

Dans un premier temps, le tribunal administratif de Montreuil, approuvé par la cour d’appel administrative de Versailles le 30 juin 2020, rejette leur demande. Il retient que les confédérations n’établissaient pas l’existence d’un préjudice moral qui leur serait propre.

Mais dans une décision du 15 décembre 2021, le Conseil d’État annule cet arrêt. Il précise qu’un syndicat professionnel peut demander, devant le juge administratif, réparation du préjudice résultant de l’atteinte portée, du fait d’une faute commise par l’administration, à l’intérêt collectif de la profession qu’il représente sans avoir à justifier de l’existence d’un préjudice moral qui lui serait propre. Le Conseil d’État renvoie l’affaire devant la cour administrative d’appel de Versailles.

Dans sa décision du 17 juillet 2023, la CAA de Versailles juge que les organisations syndicales sont fondées à soutenir que l’article 7 de la directive 2003/88/CE, codifiant l’article 7 de la directive 93/104/CE, n’a pas été totalement transposé par les dispositions législatives du code du travail, qui laisse subsister des dispositions incompatibles vis-à-vis de cet article comme de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

… qui doit indemniser les syndicats fondés à agir

Ce retard de transposition est susceptible, pour la cour administrative d’appel, d’engager la responsabilité de l’État en réparation du préjudice moral subi de ce fait par les salariés que représentent les organisations syndicales requérantes.

Le juge administratif reconnaît que les syndicats sont fondés à agir car elles justifient d’un préjudice moral résultant de l’atteinte portée à l’intérêt collectif que la loi leur donne pour objet de défendre. Elles peuvent dès lors demander réparation du préjudice ainsi subi, en conclut la cour administrative d’appel.

Alors que les organisations syndicales avaient demandé le versement à chacune de 50 000 euros, au regard de leur nombre d’adhérents et de leur audience au niveau national et interprofessionnel, le juge d’appel  limite l’indemnisation de leur préjudice à hauteur de 10 000€ chacune. Pour fixer ce montant, elle tient compte du caractère diffus du préjudice invoqué et sa limitation dans le temps du fait des décisions du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation, laquelle a interprété les dispositions du code du travail, lorsque c’était possible, dans un sens permettant de donner plein effet à l’article 7 de la directive 2003/88/CE ou les a laissées inappliquées à l’invitation de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Une solution en conformité avec la position de la Cour de cassation

Cette décision de la cour d’appel administrative de Versailles va dans le sens de la position de la Cour de cassation. Depuis 2013, dans ses rapports annuels elle demande au législateur à modifier le code du travail, en insérant le principe d’acquisition des droits à congés payés durant le congé maladie d’origine non professionnelle. Cette modification permettrait d’éviter la multiplication des actions en responsabilité contre l’État pour défaut de transposition de la directive de 2003 et mettrait fin à 20 ans de non-conformité au droit européen.

Karima Demri

Du nouveau pour les travailleurs de plateformes numériques

07/09/2023

Plusieurs textes sont parus cet été concernant les travailleurs des plateformes numériques : texte et homologation des accords relatifs au dialogue social, homologation des accords sur les modalités de rupture des relations commerciales et les revenus. Les deux secteurs du VTC et de la livraison sont concernés.

La construction du régime des travailleurs de plateformes, assez singulier par rapport au salariat, se poursuit. Le dialogue social a commencé à porter ses fruits, et plusieurs accords ont été signés. Après l’homologation de l’accord sur le revenu minimal par course dans le secteur du VTC du 18 janvier 2023, ce sont 4 autres accords qui sont homologués :

– Pour le secteur des livreurs (tous en date du 20 avril 2023) :

accord sur les modalités de rupture des relations commerciales

accord sur une garantie minimale de revenus

accord de méthode sur l’organisation des négociations collectives

– Pour le secteur des VTC : accord relatif à la méthode et aux moyens de la négociation (du 18 janvier 2023, avenant du 1er mars 2023).

En outre, dans le domaine du dialogue social, deux autres textes sont parus au Journal officiel :

– un décret permettant de prévoir par accord de secteur une indemnisation complémentaire des heures de délégation pour les représentants des travailleurs de plateformes (texte rendu nécessaire pour permettre l’effectivité des mesures prévues dans les deux accords de méthode sur le dialogue social prévoyant de telles indemnisations) ;
– un arrêté fixant le nombre de sièges au sein du conseil des acteurs de plateformes.

Homologation de l’accord sur l’encadrement de la rupture du lien commercial avec les livreurs 

Conclu le 20 avril, l’accord encadrant les modalités de rupture des relations commerciales entre les livreurs et les plateformes a été homologué le 10 juillet par décision de l’Arpe. Il sera applicable dès le 10 octobre. Parce que “l’intérêt partagé par les livreurs indépendants et les plateformes est de faire en sorte que [leur] relation puisse s’inscrire dans la durée”, il a pour principal objectif d’instaurer des mesures visant à prévenir la désactivation du compte des livreurs à l’initiative des plateformes. Il impose notamment à ces dernières : 

de créer des canaux permettant au livreur lui-même (et non plus juste aux utilisateurs) de signaler un incident ou une difficulté survenu à l’occasion de la réalisation d’une prestation;

de mettre en place les mesures qu’elles jugent “appropriées et efficaces” pour lutter contre les fausses déclarations des destinataires finaux des commandes ; 

d’informer le livreur que la désactivation de son compte pourrait être envisagée lorsque celui-ci a eu des comportements répétés de nature à constituer une violation de ses engagements. La désactivation ne peut alors intervenir que 48 heures après l’information ; 

d’adresser aux livreurs détenant une autorisation de travailler en France un rappel au moins 2 mois avant la date de fin de validité du document afin qu’ils puissent demander une prolongation ou un renouvellement de celui-ci.

De manière plus générale, les plateformes doivent mettre à la disposition des livreurs des informations précises sur les conditions de suspension/désactivation de leur compte, “faire tout leur possible” pour que les informations transmises dans le cadre d’une procédure de suspension/désactivation soient rédigées à la fois en français et en anglais, ou encore faire en sorte que chaque décision de rupture des relations contractuelles fasse l’objet, préalablement à sa mise en œuvre, d’un examen par une personne physique. Il est également souligné que les procédures de désactivation de compte doivent garantir l’application du principe du contradictoire, y compris en cas d’incident grave imputé au livreur. 

Homologation de l’accord instaurant un revenu minimal pour les livreurs à compter de fin novembre 

Un deuxième accord du 20 avril, homologué pour sa part par décision de l’Arpe du 28 août (JO, 30 août), instaure, comme cela avait été le cas pour les chauffeurs VTC (v. notre article), une garantie minimale de revenus pour les livreurs indépendants recourant aux plateformes. Il en ressort que, pour chaque mois civil, les livreurs se verront garantir un revenu d’activité moyen qui ne peut être inférieur à 11,75 € par heure d’activité sur une plateforme. Concrètement, cela signifie que, lorsque le revenu d’activité effectivement versé au cours du mois considéré ne permet pas d’atteindre ce montant, un complément différentiel sera versé dans le mois qui suit. 

► Le montant précité sera réexaminé tous les ans et pourra être réévalué en fonction de la conjoncture économique. 

L’accord précise que le temps d’activité pris en compte pour le calcul du revenu d’activité moyen correspond au cumul, pour chaque prestation effectuée au cours du mois, de la durée comprise entre l’acceptation d’une proposition de livraison et la remise au destinataire final. 

L’accord homologué vise également à “permettre aux livreurs d’augmenter leurs revenus via une meilleure connaissance de la demande”. Pour ce faire, les plateformes devront proposer un outil permettant d’indiquer en temps réel les secteurs géographiques dans lesquels une forte demande est observée. “Cette information permet aux livreurs indépendants le souhaitant de se rendre dans ces secteurs” afin de potentiellement générer des revenus plus importants. 

Notons toutefois que, puisque l’accord contenait une disposition précisant qu’il prendra effet 3 mois après la publication de la décision d’homologation, ces mesures ne seront véritablement effectives qu’à compter de fin novembre. 

Homologation des accords sur le dialogue social dans les deux secteurs du VTC et des livreurs

Un accord de méthode a été signé dans chacun des deux secteurs du VTC (18 janvier 2023 et avenant du 1er mars) et des livreurs (20 avril 2023).

Ces deux accords prévoient des dispositions très proches. Ils viennent, conformément aux dispositions des articles L. 7343-39 et suivants du code du travail, d’être tous deux homologués par décisions de l’Arpe du 31 juillet 2023 (JO, 1er août) pour le secteur du VTC, et pour le secteur des livreurs. Ainsi, à compter du 1er août, les stipulations de ces accords sont rendues obligatoires pour toutes les organisations de plateformes et les organisations de travailleurs indépendants compris respectivement dans leur champ d’application.

L’objectif de ces accords est de préciser les modalités d’organisation du dialogue social sectoriel. Ces accords apportent notamment des précisions sur les commissions de négociation, et créent une allocation complémentaire aux heures de délégation des représentants.

Commissions de négociation

Chaque accord reprend les dispositions fixées par les articles D. 7343-96 et suivants du code du travail relatifs à la composition des commissions de négociation, avec quelques précisions notamment concernant les suppléants. 

Les accords précisent le fonctionnement de la commission de négociation, lequel n’était pas prévu par les textes. Ainsi, le secrétariat de la commission est assuré par le collège des plateformes. Est également précisée la fréquence des réunions de la commission de négociation (au moins deux fois par an pour les livreurs, et au moins une fois par trimestre pour les VTC). Sont également prévues les modalités de ces réunions (en principe en présentiel et par exception à distance, feuilles d’émargement, calendrier, confidentialité des échanges, compte rendu).

Allocation complémentaire

Après avoir fait le constat partagé de l’insuffisance de l’indemnisation forfaitaire versée aux représentants au titre de leurs heures de délégation et de leur participation aux réunions de la commission de négociation (prise en charge par l’Arpe), laquelle est prévue à l’article D. 7343-76 du code du travail, chacun des accords prévoit la création d’une allocation complémentaire.

Cette allocation complémentaire comprend :

pour le secteur du VTC : un forfait de 6 heures mensuelles de délégation supplémentaires pour les représentants des travailleurs de chaque organisation, ainsi que de 6 heures mensuelles supplémentaires au titre de la préparation des négociations pour les représentants des travailleurs membres de la commission de négociation. L’avenant du 1er mars précise que ces deux forfaits de 6 heures sont calculés sur la base de 30 euros brut par heure, soit 180 euros bruts mensuels par représentant concerné pour les 6 heures mensuelles de délégation supplémentaires, et 180 euros bruts mensuels au titre de la préparation des négociations par représentant concerné ;

pour le secteur des livreurs : un forfait de 12 heures mensuelles de délégation supplémentaires pour les représentants des organisations de travailleurs représentatives. Le taux retenu pour chacune de ces heures est le montant horaire de référence fixé par l’arrêté du 25 juillet 2022 (applicable pour l’indemnisation forfaitaire légale), soit 17 euros brut.

Dans les deux cas, cette allocation complémentaire est versée directement par l’Arpe aux représentants des travailleurs. Les organisations professionnelles de plateformes versent à l’Arpe un montant équivalent à la somme des allocations complémentaires. Cette allocation est en effet financée par chacune des organisations professionnelles de plateformes représentatives, à due proportion de son audience.

Les accords précisent les modalités de ces versements, ainsi que des dispositions d’application au titre de l’année 2022.

Décret permettant de prévoir par accord de secteur une indemnisation complémentaire des heures de délégation

Les deux accords relatifs au dialogue social dans les secteurs du VTC et des livreurs prévoient donc une allocation complémentaire à l’indemnisation forfaitaire des heures de délégation des représentants des travailleurs de plateformes prévue par le code du travail (v. ci-dessus). Il est prévu que les organisations professionnelles de plateformes versent à l’Arpe le montant de ces allocations, lequel sera chargé de les reverser aux représentants des travailleurs. Or, le code du travail ne prévoyait pas une telle possibilité, une telle mission pour l’Arpe. Il a donc été nécessaire d’adopter ce décret. 

Ainsi, le décret n° 2023-682 du 27 juillet 2023 (JO, 29 juill.) instaure la possibilité de prévoir par accord collectif la création d’une allocation complémentaire financée par des contributions des organisations de plateformes signataires. Dans ce cadre, une convention est conclue entre ces organisations et l’Arpe déterminant les modalités de recouvrement et de reversement. Compétence est donnée au directeur de l’Arpe pour ce faire, selon les modalités de l’accord de secteur et les dispositions de la convention (C., trav., art. D. 7343-76 mod.).

Arrêté fixant la composition du conseil des acteurs de plateformes

Un arrêté en date du 27 juillet 2023 (JO, 4 août) fixe le nombre de sièges par catégorie de membres au sein du conseil des acteurs de plateformes.

Rappelons que ce conseil est placé auprès de l’Arpe. Il a pour mission de faire des propositions au président du conseil d’administration de l’Arpe sur les conditions de travail et d’exercice de leur activité des travailleurs, les moyens de favoriser le développement du dialogue social et de la négociation collective, l’usage des algorithmes, des outils numériques et des données personnelles des travailleurs. Le conseil peut en outre être consulté sur tout projet législatif ou réglementaire portant sur le dialogue social et les relations sociales entre les plateformes et les travailleurs (C. trav., art. R. 7345-12 et s.).

Il est constitué de représentants des organisations de plateformes et des organisations de travailleurs des plateformes, mais aussi de représentants d’associations de défense des consommateurs et d’usagers des transports, par exemple. On attendait l’arrêté fixant précisément sa composition.

Ainsi, le nombre de sièges des membres du conseil des acteurs des plateformes est fixé à vingt-sept, ainsi répartis :

3 sièges pour les représentants des organisations des plateformes ;

11 sièges pour les représentants des organisations des travailleurs des plateformes ;

1 siège pour les représentants d’associations de défense des consommateurs et d’usagers des transports ;

8 sièges pour les représentants des clients professionnels recourant aux services proposés par les plateformes ;

4 sièges pour les personnalités qualifiées dans le domaine du numérique, des transports et du dialogue social issues du secteur économique, du secteur académique, ou impliquées dans le développement du numérique au niveau local, national ou européen.

Séverine Baudouin, Elise Drutinus

Le CNR propose de lancer une charte sur l’intelligence artificielle dans le monde du travail

07/09/2023

Toujours boycotté par certaines organisations syndicales (CGT, FO, Solidaires par ex.), le Conseil national de la refondation (CNR), qui traite de multiples sujets (modèle productif, santé, éducation, planification écologique, etc.), tiendra une troisième séance ce jeudi matin à l’Elysée. Selon la présidence de la République, ce CNR dressera le bilan des réflexions et propositions menées depuis un an par les différents groupes de travail rassemblant l’Etat, les collectivités locales et les organisations de la société (comme les syndicats). La Première ministre devrait annoncer quelques grandes orientations et certains débouchés opérationnels, suite notamment au bilan des CNR thématiques (lire le document en pièce jointe). Devrait y figurer l’idée d’une charte de l’utilisation dans le monde du travail de l’intelligence artificielle, une charte sur laquelle devrait plancher le ministère du travail.

Certaines questions pourraient être reprises lors de la Conférence sociale voulue par le Président de la République et qui devrait se tenir en octobre, indique l’Elysée, sachant que des propositions assez prudentes, plutôt bien accueillies par la CFDT qui critique toutefois l’absence de volonté d’adaptation des ordonnances travail 2017, ont déjà été faites sur le plan du travail lors des assises du travail.  

Source : actuel CSE

La France compte 3 500 tiers-lieux

07/09/2023

L’association France Tiers-lieux, présidée par Patrick Levy-Waitz, a recensé 3 500 tiers-lieux sur le territoire. Ils étaient 1 800 en 2018 et 2 500 en 2021. “Si cette dynamique se poursuit, nous pouvons affirmer qu’ils seront 5 000 à horizon 2025”, indique France Tiers-lieux dans un communiqué publié le 4 septembre.

Ces espaces de compétences se développent en priorité en dehors des grands centres urbains : 62 % se situent en dehors des 22 métropoles administratives, et plus d’un tiers-lieu sur trois est situé en milieu rural. Près de 400 000 personnes ont suivi une formation dans un tiers-lieu, soit trois fois plus qu’en 2021. 46 % des tiers-lieux sont engagés dans l’économie circulaire et le réemploi. Ils génèrent 24 727 emplois directs, dont 70 % sont des femmes.

Source : actuel CSE

La conférence sociale se tiendra mi-octobre sur plusieurs thèmes autour des salaires

07/09/2023

Olivier Dussopt rencontre en ce moment les responsables des principales confédérations salariales et patronales. Marylise Léon (CFDT) a été reçue lundi dernier. Mardi, c’était le tour de Cyril Chabanier (CFTC), Patrick Martin (Medef) et François Asselin (CPME). Frédéric Souillot (FO) a quant à lui rencontré le ministre du travail hier, mercredi 6 septembre.

La conférence sociale serait organisée mi-octobre (sachant que les syndicats ont appelé à la mobilisation le 13 octobre) autour de ces grands thèmes :

les premiers niveaux de rémunération sous le Smic,

les effets pervers de l’exonération de cotisations patronales sur les salaires ne dépassant pas 1,6 Smic brut (aussi appelée « réduction générale des cotisations patronales » ou « réduction Fillon »), des articles L.241-13 et D.241-7 du code de la sécurité sociale,

la prime d’activité,

la négociation des grilles de classification.

Selon Cyril Chabanier (CFTC) que nous avons pu contacter, “on devrait aussi pouvoir parler des écarts de rémunération”. Frédéric Souillot (FO) nous a également indiqué que la date de la conférence n’était pour l’instant pas plus précisément fixée. Quoiqu’il en soit, Force Ouvrière s’y rendra (sans participer au CNR d’aujourd’hui), notamment pour demander un coup de pouce sur le Smic. 

Source : actuel CSE

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : Dreets, handicap, formation, nominations, santé sécurité, Union européenne

08/09/2023

Nous vous proposons un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) cette semaine, c’est-à-dire du vendredi 1er septembre au jeudi 7 septembre inclus, susceptibles de vous intéresser, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous ne parlons pas ici des très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, ce domaine étant couvert par notre baromètre des branches que vous retrouvez une fois par mois dans nos colonnes.

Dreets (Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités)

Un arrêté du 29 août 2023 modifie l’arrêté du 13 avril 2023 portant application de l’article 5-I du décret n° 2020-1545 du 9 décembre 2020 relatif à l’organisation et aux missions des directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités, des directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités et des directions départementales de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations

Handicap

Un décret du 30 août 2023 (et un décret rectificatif) portent modification de la composition et du fonctionnement du Conseil national consultatif des personnes handicapées

Formation

Une décision du 4 août 2023 du directeur général de France compétences porte enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles et au répertoire spécifique

Un arrêté du 21 août 2023 fixe un modèle de convention de stage pour les élèves et les étudiants des lycées professionnels maritimes et des organismes de formation agréés

Un décret du 6 septembre 2023 précise la fixation des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage (Ndlr : nous y consacrerons un prochain article)

Nominations

Un arrêté du 2 septembre 2023 porte cessation de fonctions et nomination à la présidence de la République

Un arrêté du 1er septembre 2023 précise la composition du cabinet de la Première ministre

Un arrêté du 4 septembre 2023 précise la composition du cabinet de la Première ministre (Taline Aprikian est nommée conseillère technique collectivités territoriales)

Santé sécurité

Un arrêté du 27 juillet 2023 fixe le cahier des charges de certification des services de prévention et de santé au travail interentreprises (lire notre article)

Union européenne

Une ordonnance du 6 septembre 2023 (et son rapport) est prise en application du 1° du VII de l’article 16 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture.

Source : actuel CSE

Attention à la durée des périodes d’essai !

08/09/2023

Petit rappel : à compter du 9 septembre prochain, il ne sera plus possible de déroger par accord à la période d’essai légale (2 mois pour les ouvriers et employés, 3 mois pour les agents de maîtrise et les techniciens, 4 mois pour les cadres), ce que la loi autorisait jusqu’à présent pour les accords de branches conclus avant le 25 juin 2008. Certaines branches, qui avaient prévu des périodes d’essai plus longues que la loi, doivent donc se mettre en conformité avec cette nouvelle règle, qui découle d’une loi française ayant transposé une directive européenne (la loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, dite “DDADUE”, lire notre article). En revanche, le renouvellement de cette période d’essai est toujours possible, ce qui fixe donc à un total de 8 mois la période d’essai possible pour les cadres (voir l’art.L.1221-21 du code du travail). Bien sûr, les branches peuvent toujours fixer des durées de périodes d’essai plus courtes que la loi.

Les branches de la banque, des assurances, du cancer, du Crédit agricole, du notariat et de la promotion immobilière ont d’ailleurs récemment modifié leurs accords. 

Source : actuel CSE

Le CNR va prolonger ses travaux sur le modèle productif et social

08/09/2023

Peu de mesures concrètes ressortent du Conseil national de la refondation organisé hier à l’Elysée un an après son lancement. Les discussions vont nourrir certains projets de loi (logement) et propositions de loi (sur le bien vieillir), indique l’exécutif qui entend aussi prolonger les travaux sur le modèle productif et social. Il est aussi question de lancer de nouvelles thématiques sur la santé mentale ainsi qu’un bilan des émeutes de juin-juillet dernier. Rien de nouveau en revanche sur une éventuelle charte sur l’utilisation dans le monde du travail de l’intelligence artificielle.

Tous ces travaux sont censés nourrir “un projet de société” tenant compte de cinq impératifs : un objectif de “croissance”, la transition climatique, la biodiversité, la justice sociale, l’équilibre des finances publiques. Le président de la République souhaite passer, avec ces discussions décloisonnées qui associe les pouvoirs publics, les territoires et les organisations de la société (associations, syndicats, etc.), “d’une culture de la norme à une culture de l’initiative”.

Source : actuel CSE

L’Agefiph veut porter le taux d’emploi des personnes handicapées à 4 % d’ici à 2027

08/09/2023

Le plan stratégique de l’Association pour la gestion des fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) 2023-2027, présenté hier, se fixe pour ambition d’atteindre plus de 4 % de personnes en situation de handicap dans les entreprises privées en 2027. Actuellement, il est de 3,5 %. Loin du seuil légal fixé à 6 % par la loi de 1987 pour les entreprises soumises à l’obligation d’emploi de personnes handicapées. Seules 29 % des entreprises atteignent cet objectif.

“L’embellie actuelle du marché de l’emploi, marquée par une forte baisse du chômage, et les tendances de recrutement ne bénéficient pas suffisamment aux personnes en situation de handicap”, insiste Philippe Roth, le président de l’Agefiph. Le taux de chômage, en diminution depuis cinq ans, est, certes, est à son niveau le plus bas depuis huit ans (12 %) mais il demeure beaucoup plus élevé que pour l’ensemble des demandeurs d’emploi.

Pour inverser la tendance, l’Agefiph compte sur plusieurs leviers, notamment le déploiement de nouvelles modalités opérationnelles pour les entreprises, la sécurisation des parcours professionnels, le soutien à l’apprentissage, le développement d’une offre d’appui à la professionnalisation…

Source : actuel CSE