L’acquisition de droits à congés payés pendant un arrêt maladie bientôt intégrée dans le code du travail

15/04/2024

L’acquisition de droits à congés payés pendant un arrêt maladie sera bientôt expressément prévue par le code du travail, qui, par ailleurs, fixera une période de report des congés non pris du fait de l’arrêt de travail et impose à l’employeur d’informer sur le sujet. La situation pour le passé sera également réglée.

Le législateur vient de mettre le code du travail en conformité avec le droit européen en prévoyant l’acquisition de congés payés pendant tout arrêt maladie en fixant une période de report de congés non pris en raison de la maladie et en instaurant une obligation d’information à la charge de l’employeur sur les droits à congés.

En effet, bien que récemment jugées constitutionnelles (Cons. const. QPC 8-2-2024 n°2023-1079), les dispositions de l’article L.3141-5 du code du travail, qui excluaient jusqu’à présent la prise en compte, pour la détermination des droits à congés payés, des périodes d’absence pour maladie ou accident non professionnels et, au-delà d’un an, des périodes d’absence pour accident du travail ou maladie professionnelle (AT/MP), étaient contraires à la jurisprudence de la CJUE (CJUE 24-1-2012 aff. 282/10), et leur application a été écartée en conséquence par la Cour de cassation le 13 septembre 2023 (Cass. soc. 13-9-2023 n° 22-17.340 et n° 22-17.638).

Ces dernières décisions ont amené le gouvernement à déposer un amendement au projet de loi d’adaptation du droit national au droit de l’Union européenne. Les sénateurs et députés réunis en commission mixte paritaire (CMP) le 4 avril 2024 ont abouti à un accord sur l’ensemble de ce texte. Celui-ci a été adopté définitivement au Sénat le 9 avril, puis à l’Assemblée nationale le 10 avril.

Les dispositions de l’article 37 de ce nouveau texte modifiant le code du travail entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, celle-ci pouvant être retardée par un recours devant le Conseil constitutionnel.

Tout arrêt maladie ouvre droit à des congés payés…

Sont désormais considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination des droits des salariés à congés payés les périodes de suspension du contrat de travail pour cause d’AT/MP (accident du travail, maladie professionnelle), y compris pour celles excédant la durée d’un an, ainsi que les périodes de suspension du contrat pour cause d’accident ou de maladie non professionnels (article L.3141-5 modifié du code du travail).

Ainsi, tout arrêt maladie ouvre droit à congés payés, quelle qu’en soit l’origine.

Cette acquisition de droit à congés est aussi reconnue aux travailleurs temporaires, qui bénéficient d’une indemnité compensatrice de congé payé pour chaque mission. Il est ainsi précisé que les périodes d’arrêt de travail pour cause d’accident ou de maladie, qu’ils soient d’origine professionnelle ou non, sont assimilées dans leur totalité à un temps de mission.

La loi ajoute, à cette occasion, qu’il en est de même du congé de paternité et d’accueil de l’enfant (article L.1251-19 modifié du code du travail).

 Il sagit dharmoniser la situation des intérimaires bénéficiant dun congé de paternité et daccueil de lenfant avec celle des autres salariés pour lesquels lassimilation de ce congé à du travail effectif est déjà prévue par larticle L.3141-5 du code du travail.

… dans la limite de deux jours ouvrables par mois en cas d’origine non professionnelle

Une dérogation pour l’acquisition du congé…

En principe, la durée légale du congé annuel est fixée à 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur sans pouvoir excéder 30 jours ouvrables par période de référence (article L .3141-3 du code du travail).

Pour rappel, la période de référence correspond à la période d’acquisition des congés payés. A défaut d’accord collectif, cette période est fixée du 1er juin de l’année précédente au 31 mai de l’année en cours. Par exemple, pour les congés de 2024, elle va du 1er juin 2023 au 31 mai 2024.

La présente loi prévoit une dérogation pour les périodes d’arrêt de travail pour cause d’accident ou de maladie non professionnels : bien qu’elles soient assimilées à du travail effectif, elles ouvrent droit à 2 (et non 2,5) jours ouvrables de congé par mois, dans la limite de 24 jours ouvrables par période de référence, soit 80 % de la durée normale (article L.3141-5-1 nouveau du code du travail).

Ainsi, les périodes de maladie ou daccident non professionnels nouvrent droit quau congé principal de quatre semaines garanti par le droit européen, à lexclusion de la cinquième semaine. Rappelons toutefois que, en application des règles d’équivalence (quatre semaines de travail effectif ou 20 jours si lhoraire de travail est réparti sur cinq jours de la semaine, 22 jours si lhoraire de travail est réparti sur 5,5 jours de la semaine et 24 jours si lhoraire de travail est réparti sur six jours de la semaine équivalent à un mois de travail), toute absence inférieure ou égale à ces durées n’a aucune incidence sur la durée du congé.

Pas de changement, en revanche, pour les arrêts de travail résultant d’un accident ou d’une maladie d’origine professionnelle : le salarié acquiert des congés à hauteur de 2,5 jours ouvrables par mois d’absence, soit 30 jours ouvrables en cas d’absence pendant toute la durée de la période de référence.

… et pour le calcul de l’indemnité de congés payés

Corrélativement, les règles de calcul de l’indemnité de congés payés sont adaptées : pour son calcul selon la règle “du dixième” , les absences pour accident ou maladie non professionnels sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l’horaire de travail de l’établissement, mais cette rémunération est prise en compte dans la limite de 80 % (article L.3141-24, I modifié du code du travail).

A notre avis : lindemnité de congés payés ne peut pas être inférieure au salaire que lintéressé aurait perçu sil avait travaillé. La règle du maintien de salaire pourrait donc savérer plus favorable que la règle du dixième.

L’employeur désormais tenu d’informer le salarié de ses droits lors de la reprise du travail

À l’issue d’un arrêt de travail pour maladie ou accident, l’employeur doit informer le salarié du nombre de jours de congé dont il dispose et de la date jusqu’à laquelle ces jours de congé peuvent être pris. Cette information doit intervenir dans le mois suivant la reprise du travail par tout moyen conférant date certaine à leur réception, notamment au moyen du bulletin de paie (article L.3141-19-3 nouveau du code du travail).

A noter : 

1. Le texte vise l’arrêt de travail pour cause de maladie ou d’accident. Il en résulte que l’obligation d’information s’impose quelle que soit l’origine de l’incapacité de travail, professionnelle ou non.
2. Le texte ne prévoit pas de durée d’absence minimale. Par conséquent, l’employeur est tenu d’informer le salarié quelle que soit la durée de son arrêt de travail, même si finalement cet arrêt n’entraîne aucune conséquence sur ses droits à congés payés compte tenu des règles d’équivalence.
3. Sauf exception, l’information marque le début de la période de report pour le salarié qui n’aurait pas pu prendre tous ses congés avant la fin de la période légale ou conventionnelle de prise des congés du fait de ses absences pour maladie ou accident (voir ci-après).

Les congés non pris du fait de l’arrêt de travail reportés dans certaines limites

Une période de report de 15 mois…

La loi instaure une période de report des congés fixée à 15 mois pour le salarié qui n’aurait pas pu, en raison d’un arrêt de travail pour AT/MP, pour accident ou maladie non professionnels, prendre tout ou partie de ses congés payés au cours de la période de prise des congés applicable dans l’entreprise (article L.3141-19-1, al. 1 nouveau du code du travail).

Dans le cas général, la période de prise de congés sentend des 12 mois débutant à la fin de la période dacquisition. Si la période dacquisition s’étend du 1er juin de lannée N au 31 mai de lannée N+1, la période de prise des congés s’étend du 1er juin de lannée N+1 au 31 mai de lannée N+2.
Ces dispositions ne concernent pas le salarié absent au cours de la période de prise des congés qui reprendrait le travail avant son expiration et pourrait solder ses congés avant le 31 mai (ou avant la fin de la période de prise fixée par accord).

… débutant à réception de l’information délivrée par l’employeur

La période de report de 15 mois débute à la date à laquelle le salarié reçoit, après sa reprise du travail, les informations sur le nombre de jours de congé dont il dispose et la date ultime de prise de ces jours de congé (article L.3141-19-1, al. 2 nouveau du code du travail).

… sauf en cas d’absence durant toute la période de référence

La loi distingue le cas des congés payés acquis pendant un arrêt pour maladie ou AT/MP d’une durée d’au moins un an et couvrant toute la période de référence : la période de report de 15 mois débute alors à la fin de la période de référence au titre de laquelle ces congés ont été acquis (article L.3141-19-2, al. 1 nouveau du code du travail).

Donc, pour des congés acquis pendant une absence couvrant toute la période de référence allant du 1er juin de l’année N au 31 mai de l’année N + 1, le délai de report de 15 mois commence à courir à partir du 1er juin de l’année N + 1 dans les entreprises qui appliquent la période légale 1er juin-31 mai.

A notre avis : les droits à congés acquis pendant une absence de longue durée devraient dès lors expirer définitivement au terme de ce délai de 15 mois, même si le salarié est encore absent en raison de sa maladie ou de son AT/MP et que lemployeur na pas pu, en raison de la suspension du contrat de travail, linformer de ses droits.

Si le salarié reprend le travail avant la fin de la période de report, la période de 15 mois est suspendue jusqu’à ce que le salarié ait reçu les informations désormais exigées lors de la reprise du travail (article L.3141-19-2, al. 2 nouveau du code du travail).

Ainsi, en cas de période de report débutant le 1er juin de l’année N, la fin de cette période est, non le 31 août de l’année N + 1, mais le 31 août de l’année N + 1 + le nombre de jours écoulés entre la date de reprise du travail et celle de l’information.

Une augmentation de la durée du report possible par accord

La loi prévoit que la durée de la période de report peut être fixée à plus de 15 mois par voie d’un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par voie de convention ou d’accord de branche (articles L.3141-20 modifié et L.3141-21-1 nouveau du code du travail).

Quels droits à congé pour les périodes antérieures à la loi?

Le législateur a prévu des mesures pour les salariés ayant été en arrêt de travail antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi.

La loi est rétroactive au 1er décembre 2009

La loi prévoit expressément que, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, ou de stipulations conventionnelles plus favorables en vigueur à la date d’acquisition des droits à congés, les nouvelles dispositions relatives à l’acquisition des congés pendant une période de maladie ou d’accident d’origine non professionnels et de report des congés non pris sont applicables pour la période courant du 1er décembre 2009 à la date d’entrée en vigueur de la loi.

Paradoxalement, le texte ne vise pas lacquisition de congés pendant les périodes darrêt de travail pour AT/MP excédant la durée dun an, alors que lexposé des motifs de lamendement gouvernemental ne faisait aucune distinction.

Il est précisé que ces congés supplémentaires, acquis entre le 1er décembre 2009 et l’entrée en vigueur de la loi, ne pourront pas excéder le nombre de jours permettant au salarié de bénéficier de 24 jours ouvrables de congés, par période de référence, après prise en compte des jours déjà acquis, pour la même période.

 Cette limite de 24 jours sexplique par labsence de rétroactivité de la loi pour les absences pour AT/MP au-delà dun an.

Deux ans pour agir à compter de l’entrée en vigueur de la loi

Toute action en exécution du contrat de travail ayant pour objet l’obtention de jours de congés doit être introduite, à peine de forclusion, dans un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi.

L’action en octroi de jours de congés payés concerne les salariés en poste dans l’entreprise.

A notre avis : pour les salariés dont le contrat est rompu, la prescription triennale de larticle L.3245-1 du code du travail applicable aux créances salariales devrait sappliquer. Les salariés auraient donc trois ans pour agir à compter de la rupture de leur contrat de travail.

La rédaction sociale

Pour que les salariés se forment, il faut que l’environnement professionnel y soit propice

15/04/2024

“Accès à la formation : pourquoi souhaiter se former ne suffit pas”. Dans cette étude, le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq) souligne que l’environnement créé par l’entreprise est déterminant en matière de formation, tant au commencement, pour que les salariés aspirent à se former, que dans l’accompagnement pour que ces désirs se réalisent.

Selon le Céreq Bref paru lundi dernier, les dernières réformes de la formation professionnelle, notamment la loi Avenir professionnel, “renvoient la responsabilité de se former vers les salariés, les appelant à se projeter dans le futur et à assurer, par la formation, le développement et la continuité de leur parcours”. Mais face à cela, l’étude insiste, “il est crucial que, de leur côté, les entreprises investissent le rôle qui leur est dévolu” et qu’elles ne s’affranchissent pas de leurs responsabilités en matière de formation.

Pourquoi ? Précisément parce que le simple souhait de se former ne suffit pas à accéder à la formation. Certes quand un salarié désire se former ses chances d’y arriver sont accrues. Mais 1) vouloir se former relève aussi d’un environnement favorable, 2) concrétiser une action de formation dépend d’une bonne information et de la délibération de l’entreprise, 3) les inégalités d’accès à la formation persistantes sont liées aux points précédents.

L’émergence ou non d’un souhait de formation découle avant tout du contexte professionnel

Ce ne sont pas seulement les caractéristiques individuelles des salariés qui sont en jeu, “la capacité à aspirer à se former est largement façonnée par le contexte et les interactions avec l’environnement professionnel”. Le désir de formation n’est donc pas indépendant des facteurs externes à l’individu, ils dépendent aussi du rapport de l’entreprise elle-même à la formation et de l’investissement qu’elle y met. Ainsi, les salariés d’entreprises qui consacrent entre 1 et 3 % de leur masse salariale à la formation ont 6 % de chance en plus d’aspirer à se former. C’est même + 10 % lorsque la formation représente au moins 3 % de la masse salariale.

Pareillement, les secteurs faisant un faible effort de formation, tels que la construction ou la logistique, sont ceux où les aspirations à se former sont les plus faibles (respectivement -9 % et -8 % que dans les secteurs du commerce et des services).

L’information et la discussion autour de la formation aident à la concrétiser

Autre impératif essentiel dans le processus de formation : la rendre faisable et opérationnelle. Et là aussi, l’importance de l’entreprise est grande puisque les entretiens professionnels et la diffusion de l’information, notamment de la part de la hiérarchie ou du service RH, sont au cœur de l’accès à la formation. Les salariés évoluant au sein d’une entreprise qui leur a permis de participer à un entretien professionnel sont deux fois plus nombreux à avoir suivi une formation (70 % contre 35 %), et ceux qui bénéficient d’une information sur les perspectives de formation ont un taux d’accès de 64 %, contre 37 % pour ceux qui en sont privés.

Ces disparités dans la concrétisation existent même lorsque les salariés ont manifesté en amont leur aspiration à se former.  S’ils n’ont pas suivi d’entretien professionnel, ils ont 17 % de chance en moins de suivre une formation. S’ils n’ont pas été informés des opportunités de formation, c’est -4 % de chance. “Les salariés aspirant à se former, mais n’appartenant pas à des organisations vertueuses, accèdent nettement moins à la formation”.

Le contexte et les choix de l’entreprise influent aussi sur les inégalités d’accès à la formation

Le Céreq le déplore, les inégalités d’accès à la formation, en particulier entre les salariés occupant des postes qualifiés ou non, sont souvent imputées à un différentiel d’intérêt pour la question. En réalité, le désir à se former est largement présent aussi bien parmi les plus hauts niveaux de qualification que parmi les plus bas.

Comment se fait-il alors que 61 % des salariés en emploi qualifié aient suivi une formation entre 2014 et 2019, contre 44 % des ouvriers non qualifiés ? Ces derniers font face à un double obstacle démontre le Céreq. D’une part, ils bénéficient moins souvent de conditions favorables à l’émergence des aspirations de formation. D’autre part, quand ils expriment des souhaits de formation, ils ont moins de chances d’y accéder que les salariés en emploi qualifié (-6 %). Un différentiel qui peut peut-être être rattaché au fait que, comme le pointait le Céreq dans une précédente étude, les entreprises orientent moins leurs politiques de formation vers la sécurisation des trajectoires des salariés que vers ce qui est utile à leur croissance/performance.

Enfin, au sujet de ces inégalités la conclusion de l’étude est amère : “elles pourraient être plus marquées encore en prenant en compte l’adéquation des formations suivies avec les autres aspirations professionnelles des salariés”.

Elise Drutinus

Publier le bulletin de paie d’un DS dans un tract syndical porte atteinte à sa vie privée

15/04/2024

La diffusion du bulletin de salaire d’un délégué syndical dans un tract émanant d’un autre syndicat constitue une atteinte à sa vie privée dont le seul constat ouvre droit à réparation.

Le salarié d’une société de conseil qui cumulait divers mandats syndicaux dont celui de délégué syndicat CFDT d’établissement et délégué syndical CFDT de groupe et qui faisait partie des médiateurs de la société, se trouve pointé du doigt par deux autres syndicats (le syndicat CGT Altran La Défense et le syndicat CGT Altran Sud-Ouest) dans des tracts diffusés auprès du personnel. Ces publications intitulées “Le Consultant enchaîné” le visent expressément ou font allusion à ses fonctions de médiateur sous le terme péjoratif de “mediator”. Elles allèguent l’existence d’une corruption de certains délégués syndicaux en établissant le lien entre, d’une part la signature d’accords collectifs défavorables aux salariés, d’autre part, une augmentation de rémunération des représentants syndicaux les ayant signés et l’attribution d’emplois fictifs “mediators”.

L’un de ces tracts intitulé “Les Corps Rompus à la Direction”, reproduit des copies partielles de ses bulletins de salaire à 9 ans d’intervalle avec la légende suivante : “Notre délégué syndical CFDT a ainsi vu sa rémunération mensuelle brute progresser de 84,42 % en 9 ans !”. Estimant que ces publications syndicales constituaient un manquement aux missions légales de la Fédération et des syndicats CGT, ainsi qu’un harcèlement moral (voir encadré) et une atteinte à sa vie privée, le délégué syndical CFDT et son syndicat saisissent le tribunal de grande instance afin d’obtenir des dommages-intérêts.

Divulguer un bulletin de paie porte atteinte à la vie privée

En application de l’article L 2142-5 du Code du travail, le contenu des tracts, comme de toute publication ou affichage syndical, est librement déterminé par l’organisation syndicale, sous réserve de respecter les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 relatives à la liberté de la presse interdisant la diffamation, les fausses nouvelles, la provocation et les injures.

Ainsi, une publication syndicale ne peut pas contenir d’attaques personnelles à l’égard d’un directeur qui excéderait les limites admissibles d’une polémique née d’un conflit social (Cass. crim. 23-11-1993 n° 90-86.396) ou encore des propos insultants, injurieux et vexatoires (T. corr. Paris 17-1-2012 n° 1034008388), ou encore diffamatoires (Cass. crim. 18-6-1985 n° 84-90.045 ; Cass. crim. 23-1-1993 n° 91-80.198).

Le syndicat est également tenu de respecter dans ses publications la vie privée des salariés de l’entreprise, protégée par l’article 9 du Code civil. Par définition, un bulletin de paie comporte de nombreuses données à caractère personnel qui relèvent de la vie privée des salariés : âge, salaire, adresse personnelle, domiciliation bancaire, existence d’arrêts de travail pour maladie, etc. Il a notamment déjà été jugé que l’employeur qui communique à des syndicats (en l’espèce, dans le cadre d’un litige électoral) des bulletins de paie de salariés sans l’accord des intéressés et sans masquer les informations personnelles porte une atteinte injustifiée à leur vie privée (Cass. soc. 7-11-2018 n° 17-16.799). 

Dans une affaire isolée, le tribunal judiciaire de Paris a refusé d’ordonner le retrait d’un tract auquel était annexé un tableau contenant la grille des salaires de l’entreprise, après avoir toutefois relevé notamment que le tableau faisait état de rémunérations minimales, moyennes, médianes et maximales par coefficient et que les informations communiquées ne permettaient pas d’identifier les rémunérations individuelles des salariés, ni même leurs postes (TJ Paris 1-6-2021 n° 21/54080).

Dans la présente affaire, le tract syndical ne se contentait pas de publier des rémunérations moyennes mais reproduisait partiellement les bulletins de salaire d’un salarié clairement identifiable. C’est donc sans surprise que les juges d’appel ont considéré que ces publications, remises à des tiers sans que l’intéressé ait donné son accord, portaient atteinte à la vie privée de l’intéressé. Ils ont cependant refusé d’accorder au salarié et à son syndicat des dommages-intérêts, estimant que le salarié n’apportait aucun élément de nature à établir que la communication, à des tiers, du montant de sa rémunération aurait eu un effet quelconque en termes de réputation, de carrière, d’image au sein de l’entreprise. L’arrêt est cassé sur ce point.

Ce seul constat ouvre droit à réparation

La chambre sociale de la Cour de cassation rappelle que “la seule constatation de l’atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation”. C’est ce qu’elle avait déjà jugé dans l’arrêt précité du 7 novembre 2018. Ainsi, dès lors que l’atteinte à la vie privée avait été constatée, le salarié et son syndicat auraient dû se voir allouer des dommages-intérêts, dont il appartenait aux juges d’apprécier le montant. L’arrêt d’appel est donc cassé et la cour d’appel de renvoi devra réexaminer l’affaire sur ce point. Rendue à propos d’un salarié exerçant un mandat syndical, la solution est bien entendu transposable à un salarié sans mandat syndical ou d’élu dans l’entreprise. 

Chacun a droit au respect de sa vie privée ; les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée. Pour débouter le salarié et le syndicat de leurs demandes de dommages-intérêts résultant de l’atteinte à la vie privée causée par la diffusion du bulletin de salaire du délégué syndical, l’arrêt retient que les bulletins de salaire du salarié ont été publiés, que ce sont des éléments de sa vie privée qui ont été transmis à des tiers sans que l’intéressé ait donné son accord, mais que celui-ci n’apporte aucun élément de nature à établir que la communication, à des tiers, du montant de sa rémunération aurait eu un effet quelconque en termes de réputation, de carrière, d’image au sein de l’entreprise. En statuant ainsi alors que la seule constatation de l’atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation, la cour d’appel a violé l’article 9 du Code civil.

Rejet des dommages pour harcèlement moral
La Cour de cassation décide de statuer au fond sur la demande de dommages-intérêts au titre d’un harcèlement moral pour les mêmes faits. Elle la rejette après avoir constaté la nullité de l’assignation qui visait expressément l’article L 1152-1 du Code du travail et non les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, alors qu’elle tendait à obtenir la réparation d’allégations diffamatoires ou injurieuses.

Audrey Gauvin-Fournis

Le contenu de l’avant-projet de loi de simplification

15/04/2024

Le site Contexte a publié le sommaire de l’avant-projet de loi sur la simplification que le gouvernement a transmis au Conseil d’Etat. Ce texte, déjà évoqué par le Monde, ne contient en l’état pas de relèvement des seuils sociaux concernant le CSE, mais cette disposition, si l’exécutif décide de reprendre les propositions du rapport parlementaire sur le sujet, serait plutôt intégrée dans le projet de loi annoncé pour l’automne par le Premier ministre. 

Pour l’heure, le sommaire de cet avant-projet de loi comprend notamment : 

  • la réduction de 2 à 1 mois du délai de consultation des salariés, en cas de projet de cession d’entreprise, pour les sociétés de moins de 50 salariés ;
  • une simplification de la présentation du bulletin de salaire ; 
  • une hausse des seuils de contrôle de concentration (la mesure concernerait le secteur du commerce) ; 
  • une clarification de l’étendue de la subrogation du régime de garantie des salaires (AGS) dans les procédures collectives ;
  • la création d’un test PME obligatoire pour les projets de loi (Ndlr : une mesure réclamée par la CPME) ;
  • l’intégration de l’innovation dans le mandat de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) notamment au sujet de l’intelligence artificielle, etc. 

​A noter que ce projet prévoit des habilitations à légiférer par ordonnances (notamment pour supprimer certaines autorisations ou déclarations préalables et pour élargir le champ du rescrit). 

Source : actuel CSE

JO 2024 : le non-respect des conditions liées aux dérogations autorisées au repos dominical sanctionné par une amende de 5e classe

16/04/2024

La loi du 19 mai 2023 sur les Jeux olympiques et paralympiques crée une dérogation temporaire au repos dominical pour certains commerces situés dans les communes d’implantation des sites de compétition ainsi que dans les communes limitrophes ou à proximité de ces sites. La dérogation s’applique du 15 juin au 30 septembre 2024.

Le salarié doit être volontaire pour travailler le dimanche, il peut se rétracter et doit bénéficier de contreparties : une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente et un repos compensateur équivalent en temps.

L’employeur doit également prendre toute mesure nécessaire pour permettre aux salariés d’exercer personnellement leur droit de vote aux scrutins nationaux et locaux lorsque ceux-ci ont lieu le dimanche.

Un décret du 12 avril 2024 instaure une infraction contraventionnelle en cas d’inobservation par l’employeur de ses obligations en termes de volontariat des salariés, de respect du droit de vote et d’octroi des contreparties.

Ainsi, le fait de méconnaître ces dispositions est puni des peines prévues à l’article R. 3135-2 du code du travail, soit une amende de 5e classe. Les contraventions donnent lieu à autant d’amendes qu’il y a de salariés illégalement employés.

Rappelons que l’amende de 5e classe s’élève à 1 500 euros au plus, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive. 

 Ces dispositions entrent en vigueur à compter du 14 avril 2024. 

Source : actuel CSE

Régularisation au titre des métiers en tension : un formulaire et une notice de remplissage sont disponibles

16/04/2024

La loi du 26 janvier 2024 a mis en place un nouveau cas d’admission exceptionnelle au séjour au titre des métiers en tension. Prévue par l’article L.435-4 du Ceseda (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), la procédure s’applique jusqu’au 31 décembre 2026. Une circulaire du 5 février 2024 est venue détailler les modalités d’instruction des demandes. Suite à ce document, un formulaire de 14 pages “de demande d’admission exceptionnelle au séjour et d’autorisation de travail au titre des métiers en tension”, qui comporte notamment une liste des documents à transmettre, est désormais diffusé sur les sites internet de nombreuses préfectures (Gironde, Bouches du Rhône, Puy de Dôme, Seine et Marne, etc.). Il est accompagné d’une notice de remplissage de trois pages.

On signalera toutefois que ce formulaire n’a toujours pas été diffusé sur le site du ministère de l’intérieur.

Source : actuel CSE

Un décret fixe la composition du jury pour la VAE

17/04/2024

Un décret du 10 avril 2024 fixe la composition du jury pour la validation des acquis de l’expérience (VAE). Ce texte complète par ailleurs les dispositions du code du travail qui portent de 24 à 48 heures la durée du congé pour VAE.

La loi Marché du travail du 21 décembre 2022 a réformé la validation des acquis de l’expérience (VAE).

L’article L.6412-3 du code du travail indique que “la validation des acquis de l’expérience est prononcée par un jury dont la composition et les modalités de fonctionnement sont fixées par décret”.

Ce décret – du 10 avril 2024 – vient d’être publié au Journal officiel.  

Le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication – soit le 13 avril 2024 – et s’applique aux parcours de validation des acquis de l’expérience initiés à compter de cette date.

La composition du jury fixée

Un nouvel article D.6412-6 du code du travail apporte les précisions nécessaires à la composition du jury.

Le jury doit être composé conformément aux dispositions régissant le diplôme, le titre à finalité professionnelle ou le certificat de qualification professionnelle visés. 

Il doit réunir au moins deux personnes, dont au moins une personne qualifiée au titre de la certification visée.

Un président ou un responsable de jury doit être désigné parmi ses membres et a voix prépondérante, en cas de partage égal des voix.

Le décret précise que la composition du jury de certification doit concourir à une représentation équilibrée des femmes et des hommes.

A noter que le décret indique que les membres du jury ne doivent entretenir ou avoir entretenu aucune relation professionnelle ou personnelle avec le candidat, ni avoir accompagné le candidat dans sa démarche de validation des acquis de l’expérience.

L’indemnisation du salarié mise en conformité avec la durée maximale du congé pour VAE 

Tout salarié peut demander à son employeur un congé pour préparer la VAE ou pour participer aux épreuves de validation. Il est toutefois nécessaire de justifier d’une expérience professionnelle d’un an (1 607 heures) en rapport avec la certification visée. La loi Marché du travail du 21 décembre 2022 a doublé la durée de ce congé qui est donc passé de 24 à 48 heures.

 La durée du congé pour VAE ne peut excéder 48 heures par session d’évaluation. Cette durée peut être augmentée par convention ou accord collectif  pour les travailleurs n’ayant pas atteint un niveau IV de qualification, au sens du répertoire national des certifications professionnelles, ou dont l’emploi est menacé par les évolutions économiques ou technologiques (article L.6422-2 du code du travail).

L’article D.6422-8 du code du travail indique par ailleurs que “le salarié bénéficiaire d’un congé pour validation des acquis de l’expérience a droit, dès lors qu’il a obtenu d’un organisme paritaire agréé ou d’un organisme paritaire collecteur habilité la prise en charge des dépenses correspondantes à ce congé, à une rémunération égale à celle qu’il aurait perçue s’il était resté à son poste de travail, dans la limite de vingt-quatre heures par validation”.

Ce texte est modifié afin de porter également la durée de 24 à 48 heures.

Florence Mehrez

Rémunération de Carlos Tavares : “Faites une loi !”

17/04/2024

Le montant de la rémunération annuelle du PDG de Stellantis (36,5 millions d’euros, soit 7 fois plus que le patron de Renault et 3 fois plus que le patron de Total), Carlos Tavares, suscite un débat public en France. La CGT a par exemple jugé “totalement choquant et scandaleux” le niveau de cette rémunération, qui représente 100 000€ par jour, une rémunération malgré tout approuvée hier par 70% des actionnaires lors de l’assemblée générale de Stellantis à Amsterdam. 

Interpellé sur le sujet, Carlos Tavares, qui se prévaut des résultats de son groupe (18,6 milliards de bénéfices nets pour 2023, soit +11% en un an) a répondu que sa rémunération était fixée contractuellement et qu’elle dépendait largement des résultats de l’entreprise, en ajoutant au micro de France Bleu Lorraine Nord : “Si vous estimez que ce n’est pas acceptable, faites une loi, modifiez la loi et je la respecterai”. Une interpellation qui pourrait donner des idées à certains députés. 

De son côté, la CFE-CGC souligne, que “mis à part les deux avancées sociales significatives ces dernières années que sont le télétravail généralisé et l’actionnariat salarié”, Stellantis pratique “un partage des richesses plus que discutable avec une diminution drastique des effectifs ces dernières années sur le territoire, avec notamment des externalisations qui se généralisent dans le groupe et qui portent parfois préjudice à l’efficience des services rendus par ces nouvelles sociétés”. 

Exemple de ces externalisations : le transfert des opérations de data center et de réseaux, jusqu’alors assurées par les  équipes Stellantis des technologies de l’information et de la communication (ICT), vers la société Kyndryl. La CFDT de Stellantis dénonce cette opération, qui a fait l’objet d’une consultation du CSEC, qui recours à l’art. L. 1224-1 du Code du travail. “L’utilisation de cet article n’est pas en adéquation avec le dialogue social de notre groupe et va à l’encontre des accords d’entreprise de GEPP, de ruptures conventionnelles collectives et de nos dispositifs d’adéquation des emplois et compétences”, dénonce la CFDT.

Source : actuel CSE

Frais de télétravail : ce qui change pour l’imposition des revenus 2023

18/04/2024

L’allocation pour frais de télétravail reste a priori exonérée d’impôt sur les revenus. Son plafond journalier présumé justifié passe de 2,5 euros à 2,6 euros pour l’imposition 2024 des revenus 2023. Idem pour la déduction des frais de télétravail au régime réel.

“Les allocations versées par l’employeur couvrant exclusivement des frais de télétravail à domicile à l’exclusion des frais courants généralement nécessités par l’exercice de la profession, qui peuvent prendre la forme d’indemnités, de remboursements forfaitaires ou encore de remboursements de frais réels sont exonérées d’impôt sur le revenu, dans les limites de 2,60 € par jour, 57,20 € par mois”. La brochure pratique 2024 de la déclaration des revenus 2023 dévoile une hausse des plafonds des allocations pour frais de télétravail à domicile qui sont en principe exonérées d’impôt sur le revenu. Dans cette fiche pratique, la DGFip précise que ce montant de 57,20 € par mois correspond à 22 jours de travail et que le plafond annuel est fixé à 603,20 €. La limite a priori exonérée augmente ainsi de 4 % par rapport à l’année précédente. C’est moins que l’inflation qui s’est élevée à 4,9 % en 2023 selon l’Insee.

Exonération au-delà du plafond si c’est justifié

“Ces allocations sont réputées couvrir des frais non courants et sont exonérées dès lors qu’elles sont utilisées conformément à leur objet (article 81, 1° du CGI)”, est-il rappelé. Dans un document complémentaire, qui porte sur la déclaration des revenus 2022 mais vers lequel la DGFip continue de renvoyer, il est indiqué que le montant exonéré peut être augmenté s’il est justifié. Des exemples de dépenses concernées y sont donnés : frais de fournitures et d’imprimés (cartouches d’encre, papier, etc.), dépenses d’acquisition de mobilier et de matériel informatique, frais de téléphone portable, etc. Nous avons récapitulé dans le tableau ci-dessous le traitement fiscal de l’allocation pour frais de télétravail et celui des frais de télétravail selon la situation du contribuable.

Allocation et frais de télétravail à domicile : les règles applicables pour la déclaration 2024 sur les revenus 2023

Allocation perçue pour frais de télétravail à domicileDéduction au réel des frais professionnelsTraitement fiscal de l’éventuelle allocation perçue pour frais de télétravail
OuiNon► L’allocation est exonérée d’impôt dans la limite de 2,6 € par jour, 57,2 € par mois (pour un mois comprenant 22 jours de télétravail) et 603,20 € dans l’année. ► Au-delà de ce montant, l’allocation est exonérée si cela est justifié
Oui. L’option pour la déduction au réel vaut pour l’ensemble des frais professionnels mais les frais de télétravail peuvent ne pas y être intégrés. Il est possible de déduire les frais de télétravail : ► soit à hauteur de 2,6 € par jour, 57,2 € par mois (pour un mois comprenant 22 jours de télétravail) et 603,20 € dans l’année. ► soit pour leur montant exact. ► Dans tous les cas, en optant pour la déduction des frais au réel, il faut être en mesure de pouvoir justifier ces frais► L’allocation est exonérée (à hauteur de 2,6 € par jour, 57,2 € par mois et 603,20 € dans l’année voire davantage si cela est justifié) si les frais liés au télétravail ne sont pas déduits au réel ► L’allocation est imposable (il faut donc l’intégrer dans les traitements et salaires à déclarer) si les frais de télétravail sont déduits au réel.
NonNonRien à faire car aucune allocation n’a été perçue
Oui. L’option pour la déduction au réel vaut pour l’ensemble des frais professionnels. Il est possible de déduire les frais de télétravail : ► soit à hauteur de 2,6 € par jour, 57,2 € par mois (pour un mois comprenant 22 jours de télétravail) et 603,20 € dans l’année. ► soit pour leur montant exact. ► Dans tous les cas, en optant pour la déduction des frais au réel, il faut être en mesure de pouvoir justifier ces fraisRien à faire car aucune allocation n’a été perçue

Source : site impots.gouv.fr (à la date du 11 avril 2024

Ludovic Arbelet

La loi visant à soutenir l’engagement bénévole étend les droits du CPF

18/04/2024

Pour encourager l’engagement bénévole, la loi du 15 avril 2024 visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative étend les droits à CPF (compte personnel de formation) pour les bénévoles, élargit le recours au congé d’engagement associatif, ouvre la possibilité à un salarié de faire don de ses jours de repos à des bénévoles, facilite le prêt de main d’œuvre en faveur d’une association.

 La loi du 15 avril 2024 visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative comporte des mesures concernant le compte personnel de formation, le CPF (articles 1 et 2), le congé d’engagement associatif (article 3 et 4), le don de jours de repos (article 5), le prêt de main-d’œuvre (article 6). Ces mesures entrent en vigueur le 17 avril 2024, lendemain de la publication de la loi. Certaines nécessiteront un décret pour s’appliquer.

Compte d’engagement citoyen : les conditions d’acquisition de droits à formation sont assouplies (articles 1 et 2)

Le compte d’engagement citoyen (CEC) permet à son titulaire d’acquérir des droits inscrits sur son CPF à raison notamment de l’exercice d’activités de bénévolat associatif. Les modalités d’acquisition de ces droits sont assouplies par la loi du 15 avril 2024.

Assouplissement de l’acquisition des droits à formation pour certains bénévoles

Le CEC permet à son titulaire d’acquérir des droits inscrits sur son compte personnel de formation (CPF) à raison de l’exercice d’activités bénévoles ou de volontariat.

Les droits inscrits sur le CPF au titre de l’engagement citoyen peuvent contribuer au financement des formations éligibles au CPF et compléter les droits acquis sur ce compte.

Les activités permettant l’acquisition de ces droits à formation sont listées de manière limitative par le code du travail. Parmi elles, figurent notamment le service civique, l’activité de maître d’apprentissage et sous certaines conditions, les activités de bénévolat associatif.

Au titre du bénévolat associatif, seules permettent d’acquérir des droits sur le CPF les activités exercées par un bénévole siégeant dans l’organe d’administration ou de direction d’une association ou participant à l’encadrement d’autres bénévoles (article L.5151- 9 du code du travail). De plus, l’association doit être déclarée depuis une certaine durée et l’ensemble de ses activités doit avoir un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.

L’article L.5151-9 du code du travail, modifié par la loi du 15 avril 2024, prévoit que l’association doit être déclarée depuis une durée d’au moins un an au lieu de trois ans comme actuellement.

L’association doit également être régie par la loi du 1er juillet 1901 ou inscrite au registre des associations en application du code civil local applicable dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. 

Possibilité pour les associations d’abonder le CPF

Lorsque le coût de la formation envisagée est supérieur au montant des droits inscrits sur le CPF, celui-ci peut faire l’objet, à la demande de son titulaire, d’abondements en droits complémentaires pour assurer le financement de la formation (article L.6323-4, II du code du travail). Les associations remplissant les conditions fixées par l’article L. 5151-9 du code du travail peuvent abonder le CPF via le compte d’engagement citoyen.

La loi du 15 avril 2024 les ajoute à la liste des personnes ou organismes pouvant procéder à ces abondements sur laquelle figurent déjà l’employeur, les Opco, France Travail et l’Etat. L’objectif est de permettre aux bénévoles de pouvoir se faire financer toute ou partie d’une formation spécifique répondant aux missions de l’association notamment lorsque la formation aura un coût supérieur au plafond du CEC.

Le montant des droits acquis au titre du CEC ne peut excéder le plafond de 720 euros.

Les conditions de recours au congé d’engagement associatif sont assouplies (articles 3 et 4)

Le congé d’engagement associatif est ouvert aux bénévoles dirigeant ou encadrant des associations récemment créées (article 3)

Les responsables ou dirigeants associatifs bénévoles peuvent bénéficier du congé d’engagement associatif prévu par l’article L.3142-54-1 du code du travail pour exercer leurs fonctions associatives et concilier leur activité professionnelle et leur engagement associatif. Sont visées notamment les associations dites “1901” (ou relevant du code civil d’Alsace-Moselle) déclarées, jusqu’au 17 avril 2024, depuis plus de trois ans exerçant les activités listées à l’article 200-1,b du CGI.

Les activités visées sont celles ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.

La loi du 15 avril 2024 abaisse ce seuil minimum d’existence des associations permettant à leurs bénévoles dirigeants ou encadrants de demander un congé d’engagement associatif de trois ans à un an. Il s’agit de soutenir les associations récemment créées.

Rappelons que la durée du congé d’engagement associatif, non rémunéré, est fixée à six jours ouvrables maximum par an (article L.3154-9 du code du travail), fractionnables en demi-journées (C. trav., art. L3142-54-1). Ce congé ne peut être imputé sur la durée du congé payé annuel et est assimilé à une période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés ainsi que pour l’ensemble des autres droits résultant pour l’intéressé de son contrat de travail (article L.3142-55 du code du travail).

Extension du congé d’engagement associatif (article 4)

Le congé d’engagement associatif est désormais ouvert aux personnes exerçant à titre bénévole les missions de délégué du Défenseur des droits (article L.3142-54-1, 4° du code du travail).

Un don de jours de repos monétisés à des associations devient possible (article 5)

En plus des salariés aidants ou ayant la charge d’un gravement malade notamment, peuvent désormais être bénéficiaires d’un don de jours de repos des fondations ou associations reconnues d’utilité publique et certains organismes d’intérêt général (CGI, art. 200, 1, a) et b)).

Plus précisément tout salarié peut, en accord avec son employeur, renoncer sans contrepartie, dans une limite fixée par décret, à des jours de repos non pris au bénéfice de ces structures. Cette possibilité est ouverte que les jours de repos aient été affectés ou non sur un compte épargne temps. Ils seront convertis en unités monétaires selon des modalités déterminées par décret et l’organisme auquel l’employeur verse ces jours de repos monétisés est choisi d’un commun accord avec le salarié. Comme pour les autres dons de jours, les congés payés ne peuvent être cédés que pour leur durée excédant 24 jours ouvrables (article L.3142-131 nouveau du code du travail).

Le recours au mécénat de compétence est élargi (article 6)

L’article L.8241-3 du code de travail concernant un cas particulier de prêt de main-d’œuvre licite permet aux entreprises de plus de 5 000 salariés de mettre des salariés à la disposition temporaire. Ce prêt de main-d’œuvre particulier (appelé “mécénat de compétences”) qui déroge aux règles générales du prêt de main-d’œuvre vise à faciliter les transferts de savoir-faire, renforcer les liens entre l’entreprise prêteuse et celle utilisatrice et à permettre à un salarié de s’investir dans une autre entité, tout en conservant un lien avec son entreprise.

La particularité de ce prêt de mains-d’œuvre est qu’il est considéré comme à but non lucratif pour les entreprises utilisatrices, même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse à l’entreprise utilisatrice est inférieur aux salaires versés au salarié, aux charges sociales afférentes et aux frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de sa mise à disposition temporaire ou est égal à zéro.

La loi du 15 avril 2024 ouvre le mécénat de compétences en faveur des organismes définis à l’article 238 bis-1, a à g du CGI aux entreprises de moins de 5 000 salariés. Par ailleurs, la durée maximale de mise à disposition du salarié passe de deux à trois ans dans tous les cas de recours au mécénat de compétences, y compris en faveur des PME récemment créées. 

Nathalie Lebreton, Elise Drutinus et Sophie Picot-Raphanel

Le temps partiel concerne toujours plus d’un quart des femmes

18/04/2024

“En près de 50 ans, la part de salariés à temps partiel a été multipliée par 2,5”. Et après une baisse continue depuis 2017, pour la première fois cette part a réaugmenté très légèrement l’année dernière. En 2023, 17,4 % des salariés (hors Mayotte, hors apprentis) travaillaient à temps partiel selon les chiffres de la Dares publiés mardi, soit 0,1 point de plus qu’en 2022. Hormis ce changement, les statistiques sont très proches de celles de l’année précédente : les employés sont bien plus souvent à temps partiel que les cadres et l’écart se creuse de plus en plus (30,1 % contre 8,7 %), et il concerne toujours plus d’une femme sur quatre (26,6 %) mais moins d’un homme sur dix (7,8 %), même si, là, la différence s’amenuise (26,7 % contre 7,5 % en 2022).

Enfin, le temps partiel touche avant tout les deux extrêmes des bornes d’âges. Son taux atteint ainsi 26 % chez les 15-24 ans et 24,8 % pour les 55 ans et plus, les deux étant en hausse sur un an. Il reste donc, encore aujourd’hui, “le reflet d’une inégalité d’accès au marché du travail, entre femmes et hommes en premier lieu, selon l’âge ou entre générations”.

Source : actuel CSE

En 2022, des grèves plus intenses motivées par les rémunérations

19/04/2024

La direction des études et de la recherche du ministère du Travail (Dares) a publié mercredi 17 avril sa nouvelle étude relative aux grèves en 2022. Les conflits sont en nette hausse par rapport à 2021 et portent sur les rémunérations dans 79 % des entreprises concernées.

En 2022, “les revendications salariales s’amplifient”, indique la Dares dans sa nouvelle étude. Les caractéristiques des conflits sociaux semblent donc dans la même veine que l’année 2021 lors de laquelle l’organisme observait déjà une hausse des grèves motivées par les salaires. Il constate par ailleurs en 2022 une hausse de 0,8 point par rapport à l’année précédente des entreprises connaissant un ou plusieurs arrêts collectifs de travail (2,4 %), et au-dessus de la moyenne observée depuis 2008. Les années 2020 et 2021 furent particulièrement calmes en termes de grèves en raison de la crise sanitaire. Il faut donc remonter à 2019 pour retrouver un niveau semblable de conflictualité collective. Les années marquées par une réforme des retraites (2010 par exemple) restent de ce point de vue exceptionnelles comme on le voit ci-dessous :

Des grèves dans les grandes entreprises et l’industrie

En 2022, 35,4 % des entreprises employant au moins 500 salariés ont été confrontées à un épisode de grève, une hausse de 8,2 points sur un an. Cette proportion se réduit à 1,1 % dans les entreprises de 10 à 49 salariés, où l’arrêt du travail ne fait donc pas recette. Cependant, la hausse des grèves en 2022 marque tous les secteurs d’activité. Elle est très prononcée dans l’industrie (3,8 % des entreprises contre 3 % en 2021) et dans les activités d’enseignement / santé / action sociale (6,8 % d’entreprises en 2022, 5,4 % en 2021). Les secteurs les moins conflictuels sont l’hébergement restauration (0,3 %), la construction (1,1 %) et le commerce (0,4 %).

99 journées individuelles non travaillées

La Dares désigne par “journée individuelle non travaillée (JINT)” l’ensemble du temps de travail non effectué par les salariés impliqués dans des grèves, exprimé en jours, rapporté à 1000 salariés. En 2022 tous secteurs confondus, le nombre de JINT s’élève à 99 contre 58 en 2021. Le chiffre explose mécaniquement si l’on restreint l’observation aux seules entreprises ayant connu au moins une grève : 391 JINT en 2022 contre 283 en 2021. Le secteur du transport / entreposage connaît à lui seul 414 JINT en 2022 après 325 en 2021. Dans l’industrie, les jours non travaillés atteignent 189 en 2022 contre 89 en 2021.

Hausse des conflits liés aux rémunérations

Les grèves ayant eu lieu en 2022 sont à 79 % justifiées par des revendications salariales. Ce motif est habituel mais augmente de 6 points en un an selon la Dares. 18 % des grèves ont visé les conditions de travail (moins 13 points sur un an), 8 % le temps de travail et 9 % la réforme des retraites. Le maintien de l”âge légal à 62 ans était en effet déjà évoqué dans les entreprises que la Dares a consultées, bien que l’essentiel de la mmobilisation contre la réforme se soit tenu en 2023. Le sujet revient d’ailleurs plus souvent dans l’industrie (16 % des entreprises). Dans les services, les grèves sont d’avantage motivées par les salaires (78 %) et les conditions de travail (22 %).

Marie-Aude Grimont

Eric Trappier réélu président de l’UIMM

19/04/2024

Eric Trappier, 63 ans, a été réélu hier président de l’UIMM après un premier mandat de trois ans, pour un second mandat non renouvelable. 

Président directeur général de Dassault Aviation depuis 2013 qu’il a rejoint en 1984, il est également président du Gifas (le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales).

Eric Trappier défend une “une UIMM offensive car, non seulement elle est un formidable laboratoire d’idées, mais surtout car elle a la capacité de les transformer en actions opérationnelles au service de ses adhérents et de la branche de la métallurgie. Une UIMM offensive qui, ainsi, saura soutenir la politique de réindustrialisation dont notre Nation a tant besoin”. 

Source : actuel CSE

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : formation, IA, Jeux olympiques, nominations, protection sociale

19/04/2024

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) cette semaine, du vendredi 12 avril au jeudi 18 avril inclus, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous n’évoquons pas ici les très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, que vous retrouvez dans notre baromètre des branches.

Budget

Droits des salariés

Énergie

Fonction publique

  • Un décret du 11 avril 2024 précise la durée des mandats des représentants des personnels des comités d’agence et des conditions de travail et du Comité national de concertation des agences régionales de santé

Formation

  • Un décret du 10 avril 2024 précise le jury et les modalités du congé de validation des acquis de l’expérience
  • Une décision du 5 avril 2024 porte enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles et au répertoire spécifique
  • Un arrêté du 15 mars 2024 précise les diplômes professionnels relevant des dispositions du code du travail relatives à l’utilisation des équipements de travail mis à disposition pour des travaux temporaires en hauteur

Intelligence artificielle

  • Une délibération de la Cnil du 18 janvier 2024 porte adoption d’une recommandation sur l’application du règlement général sur la protection des données au développement des systèmes d’intelligence artificielle
  • Un arrêté du 11 avril 2024 approuve du cahier des charges de l’appel à projet “Accélérer l’usage de l’intelligence artificielle générative dans l’économie”

Jeux olympiques et paralympiques

  • Un décret du 12 avril 2024 prévoit les modalités de la dérogation au repos dominical prévue par l’article 25 de la loi n° 2023-380 du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions 

Nominations

  • Un arrêté du 10 avril 2024 modifie l’arrêté du 18 juin 2021 portant nomination à la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle et des sous-commissions constituées en son sein
  • Un arrêté du 2 avril 2024 porte nomination de Thomas Urdy conseiller chargé de la lutte contre l’antisémitisme et le racisme et de la défense des droits LGBT au cabinet de la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations
  • Un arrêté du 3 avril 2024 porte nomination au conseil d’administration de la caisse centrale d’activités sociales des industries électriques et gazières

Protection sociale

  • Un décret du 12 avril 2024 revalorise l’allocation de solidarité spécifique, l’allocation temporaire d’attente et l’allocation équivalent retraite
  • Un arrêté du 12 avril 2024 fixe pour l’année 2024 l’objectif des dépenses d’assurance maladie mentionné à l’article L. 174-1 du code de la sécurité sociale
  • Un arrêté du 15 avril 2024 prévoit l’extension et l’élargissement de l’avenant n° 16 du 22 novembre 2023 à l’accord national interprofessionnel instituant le régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco

Source : actuel CSE

Annoncer oralement le licenciement avant l’envoi de la lettre le rend injustifié

19/04/2024

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation dans cet arrêt du 3 avril 2024, un salarié est licencié pour faute grave. La directrice des ressources humaines lui fait part de la rupture de son contrat de travail par téléphone, avant de lui adresser le même jour la lettre de licenciement. 

Le salarié conteste alors son licenciement estimant que ce dernier est sans cause réelle et sérieuse car annoncé oralement. La cour d’appel lui donne raison. L’employeur conteste la chronologie des faits et reproche à la cour d’appel de n’avoir pas “[distingué] entre l’expédition et la réception de la lettre de licenciement, ni a fortiori [caractérisé] qu’au cours de la journée du 7 février l’appel téléphonique de l’employeur avait précédé l’expédition de la lettre de licenciement, le salarié n’apportant aucun élément de preuve quant à l’heure de l’un ou de l’autre”.

Mais la Cour de cassation rejette le pourvoi et se prononce dans le même sens que la cour d’appel. Elle constate d’une part que “le salarié rapportait la preuve qu’il avait été informé verbalement de son licenciement, à l’occasion d’une conversation téléphonique avec la directrice des ressources humaines de l’entreprise, tandis que l’employeur faisait valoir qu’il était convenable pour la société de prévenir l’intéressé de son licenciement par téléphone le jour même de l’envoi de la lettre de licenciement, aux fins de lui éviter de se présenter à une réunion et de se voir congédier devant ses collègues de travail”.

D’autre part, la Cour de cassation retient le fait souligné par les juges du fond selon lequel “cet appel téléphonique ne pouvait suppléer la lettre de licenciement adressée ultérieurement, même si elle avait été adressée le même jour, sous la signature de l’auteur de l’appel téléphonique”.

Elle en déduit alors que ce licenciement verbal était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Source : actuel CSE