L’essentiel à savoir pour cette rentrée

03/09/2024

Nous vous proposons une synthèse de l’actualité depuis la fin juillet, accompagnée des informations principales à connaître en cette rentrée 2024 : position de l’Urssaf sur les activités sociales et culturelles du CSE et le critère d’ancienneté, bons d’achat de rentrée, pouvoir d’achat et épargne salariale, assurance chômage, contexte économique, social et politique, compte professionnel de prévention, variole du singe, etc.

Du fait des élections législatives et de l’absence d’un nouveau gouvernement, aucun texte législatif – et même réglementaire – concernant directement ou indirectement le CSE n’a été publié depuis la fin juillet, c’est-à-dire depuis notre dernière édition estivale (voir dans cette édition notre récapitulatif des textes parus au Journal officiel en août). Mais certaines informations sont néanmoins à connaître. Nous vous proposons donc cette synthèse pour être à jour en cette rentrée particulière, jamais un président de la Ve République n’ayant autant pris autant de temps pour nommer un Premier ministre après des élections législatives. 

Activités sociales et culturelles : l’Urssaf donne  jusqu’au 31 décembre 2025 aux CSE pour respecter la nouvelle jurisprudence sur l’ancienneté

L’information a été publiée le 30 juillet sur le site internet des Urssaf : les CSE utilisant encore une condition d’ancienneté ont jusqu’au 31 décembre 2025 pour rentrer dans le rang. L’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) laisse en effet aux CSE qui continuent à utiliser une condition d’ancienneté pour l’accès à leurs activités sociales et culturelles un peu plus d’une année pour se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation, en changeant les critères de versement de leurs prestations.

En attendant cette date butoir du 31 décembre 2025, si le CSE fait l’objet d’un contrôle et si une condition d’ancienneté est constatée pour le bénéfice des prestations du CSE, il lui sera demandé de se mettre en conformité pour l’avenir. Si ce n’est pas fait, on comprend que l’Urssaf pourra, en cas de contrôle du CSE, constater l’existence d’une discrimination et priver les comités sociaux et économiques du bénéfice des exonérations de cotisations sociales.

En outre, indépendamment du risque Urssaf, le CSE qui continuerait d’utiliser un critère d’ancienneté pourrait se le voir reprocher une discrimination par un salarié ou même par une organisation syndicale.

Autant ne pas attendre, donc, cette date butoir pour vous conformer à ce qu’a décidé la Cour de cassation. Dans un arrêt du 3 avril 2024, la Cour a en effet décidé que les CSE n’ont plus le droit de subordonner l’accès aux activités sociales et culturelles (ASC) à une ancienneté minimale dans l’entreprise. Adieu donc la condition d’ancienneté de 1, 2, 3 voire parfois de 6 mois.

Rappel : le CSE peut distribuer des bons d’achat pour la rentrée scolaire

Les bons d’achat offerts par le CSE pour la rentrée scolaire sont exonérés de cotisations de sécurité sociale. A plusieurs conditions :

♦ D’abord, il faut que les bons d’achats (dont les scolaires) et les cadeaux attribués à un salarié pour l’année n’excèdent pas un montant de 193€ pour 2024.

♦ Ensuite, et sous réserve de la justification du suivi de scolarité, le bon d’achat rentrée scolaire doit respecter les conditions suivantes :

  • l’enfant du salarié doit être âgé de moins de 26 ans dans l’année de l’attribution du bon d’achat rentrée scolaire. Un salarié sans enfant ne peut donc pas recevoir un bon d’achat car il n’est pas concerné par la rentrée scolaire ;

► Remarque : il s’agit de toute rentrée de début d’année scolaire ou universitaire. Peu importe la nature de l’établissement (établissement scolaire, lycée professionnel, centre d’apprentissage…). Il faut veiller à ne pas trop tarder à distribuer les bons d’achat. En décembre, ce serait trop tard ! Ce qui pourrait amener l’Urssaf à priver le CSE du bénéfice de l’exonération de cotisations sociale.

  • le bon d’achat doit avoir une utilisation déterminée en lien avec la rentrée scolaire. Il doit mentionner soit la nature du bien qu’il permet d’acquérir, soit un ou plusieurs rayons de grand magasin, soit le nom d’un ou plusieurs magasins (bon multi-enseignes) ;

► Remarque : la mention des rayons doit être liée à l’événement. Un bon d’achat rentrée scolaire doit permettre l’accès à des biens tels que papeterie, livres, vêtements enfant, équipement informatique, etc.

  • le montant de chaque bon d’achat ne doit pas excéder 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale, soit 193 euros en 2024 par enfant. Le salarié qui a plusieurs enfants en âge d’être scolarisé peut donc recevoir autant de bons d’achat qu’il a d’enfants.

► Remarque : dans le cas particulier où deux conjoints travaillent dans la même entreprise, le seuil de 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale s’apprécie pour chacun d’eux. Ainsi, chaque parent pourra recevoir un bon d’achat pour la rentrée scolaire de l’enfant.

Assurance chômage : les règles actuelles à nouveau prolongées

Après avoir annoncé dans un premier temps vouloir publier un décret durcissant à nouveau, à compter du 1er décembre prochain, les règles d’indemnisation de l’assurance chômage, le gouvernement de Gabriel Attal a finalement décidé de proroger les règles actuelles, ce qui laisse le futur gouvernement davantage libre de sa décision sur le sujet, la droite réclamant ce durcissement tout comme l’ex-majorité présidentielle (avec toutefois des voix discordantes), la gauche s’y déclarant hostile. 

Un décret du 30 juillet 2024 prolonge donc les dispositions réglementaires relatives aux règles d’indemnisation et de contributions du régime d’assurance chômage jusqu’au 31 octobre 2024.

Un autre texte réglementaire, paru en août, modifie les critères d’application du bonus-malus. Ce système consiste à faire varier, de façon positive ou négative, les cotisations d’assurance chômage des entreprises selon qu’elles recourent plus ou moins que la moyenne des entreprises de leur secteur à des contrats de travail précaire (lire notre article dans cette même édition).

La préparation à l’emploi relancée…

La préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI) est une aide au financement d’une formation permettant à un demandeur d’acquérir les compétences nécessaires pour occuper un emploi. Un décret d’application de la loi Plein emploi du 18 décembre 2023 a fixé fixe une durée plus courte pour les contrats pouvant être conclus à l’issue de la POEI et encadre le tutorat mis en place pour assurer la formation.

France Travail, dans une délibération publiée cet été, précise les modalités de cette POEI “rénovée” concernant notamment les bénéficiaires et conditions d’attribution, le montant de l’aide et les modalités de versement. 

Compte professionnel de prévention : du nouveau !   

La loi de financement rectificative de la sécurité sociale (LFRSS) pour 2023 a institué une nouvelle possibilité d’utilisation du compte professionnel de prévention (C2P). En cas de reconversion professionnelle, les titulaires du C2P peuvent utiliser leurs points pour financer une formation, un bilan de compétences, des actions permettant de valider les acquis de l’expérience (VAE) en vue d’exercer un emploi non exposé aux différents facteurs de risques professionnels.

A compter du 1er septembre 2024, la demande d’utilisation des points inscrits sur le compte est effectuée en ligne par le titulaire du compte sur la plateforme du C2P, en vertu du décret du 10 août 2023. Les demandes par courrier auprès du gestionnaire local du C2P seront réservées aux financements d’une réduction d’une durée du travail et d’un départ en retraite anticipé.

A noter également : la Carsat informera désormais les salariés du nombre de points acquis au titre de l’année écoulée, au plus tard le 30 septembre, selon le décret du 25 juin 2024. Initialement, cette information était donnée au plus tard le 30 juin.

Retraite : certaines pensions revalorisées

Au 1er septembre, environ un million de salariés, commerçants ou artisans toucheront une majoration exceptionnelle de leur retraite. Selon la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la revalorisation oscillera en moyenne entre 50 et 60€ mensuels.

La grande majorité des retraités concernés sont ceux qui ont une rémunération proche du Smic durant toutes leurs années travaillées.

Seniors : le patronat propose aux syndicats de relancer des négociations

Lors de la “Rencontre des entrepreneurs de France”, les 26 et 27 août, le président du Medef a proposé aux organisations syndicales de relancer des discussions sur l’emploi des seniors, Patrick Martin rappelant à cette occasion l’opposition de l’organisation patronale à toute remise en cause de la récente réforme des retraites.

Cette initiative fait suite à l’échec de la négociation, en avril 2024 (notre article), du “pacte du travail”, qui répondait à un cadrage gouvernemental précis (emploi des seniors, parcours professionnels, usure professionnelle et reconversions, compte épargne-temps universel ou CETU). 

Cette proposition du Medef est assortie toutefois d’une condition, comme l’indique l’agence AEF : que le gouvernement reprenne la légère diminution des cotisations chômage des entreprises (-0,05 point) qui avait été prévue dans le projet d’accord des partenaires sociaux fin 2023.

Plusieurs syndicats ont réagi de façon positive mais prudente à cette proposition qui pourrait s’inscrire dans un agenda social autonome des partenaires sociaux. A suivre…

Bulletin de la Sécu : deux nouvelles rubriques

A compter du 1er septembre 2024, deux nouvelles rubriques prennent effet sur le Bulletin officiel de la sécurité sociale (Boss). Elles concernent :

  • L’exonération de cotisations applicable aux contrats d’apprentissage ;
  • Le régime social applicable aux rémunérations des stagiaires.

La rubrique “Exonération applicable aux contrats d’apprentissage” rappelle tout d’abord les dispositions du code du travail relatives au champ d’application du contrat d’apprentissage (employeurs concernés, travailleurs éligibles). Elle précise ensuite le régime applicable aux rémunérations versées aux apprentis.

La rubrique relative au régime social des sommes versées aux stagiaires de la formation professionnelle continue reprend les règles existantes quant au champ d’application du dispositif et au calcul des cotisations dues sur ces sommes.

Ces nouvelles rubriques sont opposables à l’administration à partir du 1er septembre 2024, date à laquelle les circulaires DSS (direction de la sécurité sociale) ayant le même objet seront abrogées. Tel est le cas notamment de la circulaire DSS n° 2007-236 du 14 juin 2007 relative à la protection sociale des stagiaires.

Variole du singe : le ministère du travail et de la santé préconise un isolement de trois semaines

Dans un questions-réponses publiée le 23 août, le ministère du travail et de la santé évoque la question du virus Mpox (“monkeypox”), souvent appelé en France la variole du singe. Il s’agit d’une maladie infectieuse provoquant une éruption cutanée, parfois accompagnée d’une fièvre ou de ganglions.

Lorsque le Mpox est diagnostiqué, et si son état ne nécessite pas une hospitalisation, explique le ministère, la personne malade doit respecter un isolement de 21 jours à compter de l’apparition des premiers signes cliniques, ce qui correspond généralement au temps de cicatrisation des lésions de la peau ou des muqueuses. Si la cicatrisation s’avère plus longue, la durée d’isolement doit être augmentée en conséquence.

Si leur état leur permet et si le télétravail est possible, les salariés concernés devront donc télétravailler tout le temps nécessaire à la cicatrisation. Si le télétravail est impossible, ou si leur état ne leur permet pas de travailler, ils seront placés en arrêt maladie.

Attention à l’ajustement du prélèvement à la source !

C’est une constante depuis janvier 2020, date du prélèvement à la source : le fisc actualise en septembre le taux de prélèvement à la source sur la base des revenus de l’année précédente. En clair, si les revenus du salarié ont bougé en 2023 (augmentation, situation familiale…), le taux sera ajusté. Avec, parmi les impacts, un salaire net qui pourrait varier à la hausse ou à la baisse sur la fiche de paie de septembre.

Croissance, inflation et emploi : les derniers chiffres

L’Institut national de la statistique (Insee) vient de publier des chiffres récents, pour le second trimestre 2024, sur la croissance, le taux de marge des entreprises, l’inflation et l’emploi. Des données que le futur gouvernement devra prendre en compte pour l’élaboration de sa politique budgétaire et sociale (voir ci-dessous). 

Croissance : le produit intérieur brut (PIB) progresse de 0,2% au deuxième trimestre, tandis que le pouvoir d’achat des ménages ralentit (+0,2% contre +0,4% au trimestre précédent). Les ménages continuent cependant d’épargner.

Taux de marge des entreprises : avec 30,8% de la valeur ajoutée, ce taux recule par rapport au précédent trimestre (31,7%).

Inflation : avec 1,9% en août (après 2,3% en juillet), l’inflation passe sous la barre des 2% en rythme annuel. 

Emploi salarié privé : le deuxième trimestre montre une tendance à la baisse de l’emploi, avec – 0,1% (soit 28 500 emplois détruits), mais l’emploi reste positif sur un an (+ 60 700 emplois par rapport au deuxième trimestre 2023).

► Dans l’actualité de l’été, signalons plusieurs plans sociaux et emplois menacés, les défaillances d’entreprise étant de plus en plus nombreuses : la fermeture, en Nouvelle Calédonie, de l’usine de nickel Konimabo Nickel SAS (1 200 salariés se retrouvent au chômage), la perspective de l’arrêt de l’activité salades en sachet de Bonduelle (159 emplois menacés à Saint Mihiel dans la Meuse), la poursuite du chômage partiel chez le fabriquant de bateaux Beneteau (300 salariés à Cholet notamment), l’interrogation sur l’avenir du site Poulain à Blois et celui de l’équipementier automobile Dumarey Powerglide à Strasbourg (591 emplois), l’appel au tribunal de commerce du CSE du club de foot des girondins de Bordeaux, etc. A l’inverse, une bonne nouvelle : le tribunal d’Orléans a accepté le projet de société coopérative de production présenté par les 228 salariés de Duralex pour reprendre leur activité. 

La rentrée politique 

L’incertitude politique créée par la dissolution de l’Assemblée et le résultat des élections législatives du 7 juillet, avec une Assemblée nationale où aucune formation politique ne dispose de la majorité absolue, n’est toujours pas dissipée (*). Près de deux mois après ce scrutin qui a vu la coalition de gauche du Nouveau Front populaire (NFP) recueillir le plus grand nombre de députés, le président de la République n’a toujours pas nommé de Premier ministre, le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal ayant donc expédié durant tout l’été les affaires courantes. Difficile donc pour l’heure d’y voir clair sur la nature de la politique et des textes législatifs qui sortiront du Parlement…

Hier, Emmanuel Macron, qui ne souhaite visiblement pas voir sa politique économique et sociale remise en cause par un nouvel exécutif, a consulté des personnalités comme l’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, l’ancien ministre du travail LR Xavier Bertrand et les anciens présidents Nicolas Sarkozy et François Hollande. Fin août, après avoir reçu les formations politiques, le président avait clairement exclu de nommer à Matignon la candidate du NFP, Lucie Castets, au motif que son gouvernement pourrait être censuré par les autres forces politiques.  

Le temps presse cependant et la pause politique souhaitée par le président de la République à l’occasion des Jeux olympiques ne saurait durer, à la fois pour des raisons démocratiques (le camp présidentiel sort perdant du scrutin qu’il a lui-même provoqué et un gouvernement démissionnaire ne peut pas s’engager sur l’avenir) mais aussi pratiques. Le Parlement doit en effet examiner à partir d’octobre, et adopter avant la fin de l’année, les grands textes politiques que sont les budgets de l’Etat (la loi de financement définit la politique fiscale de l’Etat) et de la Sécurité sociale (la loi de financement de la Sécu prévoit les recettes et dépenses de chaque branche de la Sécu : assurance maladie, accidents du travail et maladies professionnelles, familles, retraite, autonomie).

L’Assemblée devrait donc poursuivre en septembre ses travaux préparatoires commencés en juillet mais en l’absence d’un véritable projet budgétaire établi par un gouvernement, ces travaux restent à l’état d’ébauche. Une session extraordinaire de l’Assemblée devrait se tenir en septembre, dès lors qu’un Premier ministre est nommé, a déclaré la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, plusieurs formations réclamant cette session extraordinaire (PCF, RN, groupe écologiste et social) alors que la session normale ne doit reprendre que début octobre.

Rappelons que la division en quatre grands blocs de l’Assemblée (Nouveau Front populaire, Rassemblement national, Droite, ex-majorité présidentielle) correspond à des approches très différentes sur le plan de la politique économique et sociale (comme sur les retraites, la pénibilité, le conditionnement des aides aux entreprises, le salaire minimum et le pouvoir d’achat, la fiscalité, la formation et le chômage).

Fin août, Gabriel Attal a ainsi transmis aux différents ministères des lettres plafonds de cadrage budgétaire qui comportent des coupes importantes. Le ministère du travail se verrait amputé de 11% de ses crédits en matière d’emploi et de travail pour 2024, selon le journal Le Monde. En tant que chef de groupe parlementaire, le Premier ministre avait également écrit, le 13 août, aux autres formations politiques pour leur proposer de s’entendre sur plusieurs projets : le rétablissement des comptes publics, la laïcité, le pouvoir d’achat et le travail, etc.

La droite avait auparavant proposé aux macronistes un “pacte législatif” comprenant des économies budgétaires, un refus de toute hausse d’impôt, des textes sur l’immigration, le chômage et une aide sociale unique, etc.

A l’inverse, le Nouveau Front populaire, qui a le premier écrit aux autres formations pour trouver des majorités texte par texte notamment sur la question des services publics et du pouvoir d’achat, préconise une forte augmentation du Smic et une conférence sociale sur les salaires, l’abrogation de la dernière réforme des retraites, une augmentation des impôts des plus riches, mais aussi le rétablissement du CHSCT, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. 

Une coalition peut-elle surmonter ces différences et ne pas être censurée à l’Assemblée ? Telle est la question. Hier, le nom du président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), Thierry Baudet, circulait comme un possible Premier ministre, une hypothèse qui pourrait diviser la gauche et le monde syndical, ce dernier ayant été élu au CESE avec le soutien des syndicats dits réformistes.

La rentrée politique s’annonce donc tendue, d’autant plus que la France insoumise a annoncé son intention de lancer une procédure de destitution visant Emmanuel Macron au cas où ce dernier ne nommerait pas à Matignon la candidate désignée par le Nouveau Front populaire. La procédure semble avoir peu de chances d’aller au bout, mais elle s’ajoute aux autres pressions esquissées par la gauche et le monde syndical. 

La rentrée sociale 

Les organisations syndicales ne s’associent pas à la manifestation organisée par la France insoumise le 7 septembre visant à faire pression sur Emmanuel Macron pour qu’il nomme à Matignon Lucie Castets.

En revanche, la CGT et Solidaires appellent les salariés à manifester le 1er octobre, date prévue pour la reprise des travaux parlementaires, afin de réclamer “l’abrogation de la réforme des retraites, l’augmentation des salaires et pensions, l’égalité entre les femmes et les hommes, le financement des services publics, le développement de l’emploi industriel en lien avec les enjeux environnementaux”.

La CGT a expliqué son initiative dans un communiqué : “Seule la mobilisation permettra que nos revendications soient enfin attendues. Le mardi 1er octobre est le premier jour de débat sur le débat du budget à l’Assemblée nationale. La CGT décide d’inviter l’ensemble des organisations syndicales à s’en emparer pour construire une puissante journée de grève et de manifestations interprofessionnelles. Pour que cette journée soit massive, il faut que toutes les professions, tous les syndicats dans les entreprises et les services publics appellent à la grève à partir de leurs revendications professionnelles”.

Les autres syndicats ne sont pas associés à cette manifestation, alors qu’ils avaient tous appelé, en octobre 2023, à une manifestation pour l’égalité entre femmes et hommes.

“La CGT a décidé un mot d’ordre avec des thèmes de mobilisation, une date et une forme de mobilisation et l’a proposé aux autres une fois que c’était décidé. Or ce n’est pas le mode opératoire de l’intersyndicale depuis pas mal de temps”, a commenté auprès de l’AFP Yvan Ricordeau, le numéro 2 de la CFDT.

“Nous ne faisons pas de politique, a réagi auprès du Monde Cyril Chabanier, le président de la CFTC. Ce qui nous importe, c’est qu’il y ait un gouvernement, avec une personnalité placée à sa tête, et qu’ils nous écoutent”.

Frédéric Souillot, le secrétaire général de FO, a annoncé qu’il serait reçu à l’Elysée vendredi 6 septembre.

(*) La composition de la nouvelle Assemblée (la majorité absolue est de 289 députés sur 577) est la suivante:

  • le NFP totalise 193 députés (72 LFI, 66 PS, 38 Écologistes, 17 Gauche démocrate et républicaine, communistes) ;
  • Ensemble et ses alliées 176 députés, (99 Ensemble, 36 Démocrates, 31 Horizons) ;
  • L’extrême droite 142 députés (126 RN et 16 À droite) ; 
  • La Droite républicaine 47 députés ;
  • Le groupe indépendant Liot 17 députés.
Pouvoir d’achat : le levier de l’épargne salariale
Ce n’est pas à proprement parler nouveau, puisque les décrets parus en juillet 2024 de la loi sur l’épargne salariale de 2023 découlent de l’accord des partenaires sociaux signé l’an dernier. Mais il appartient aux CSE et aux délégués syndicaux de connaître et éventuellement de se saisir de ces outils et possibilités pour tenter de négocier des bonus pour les salariés. 

► Trois nouveaux cas de déblocage de l’épargne salariale sont rendus possible : 

– l’affectation à des travaux de rénovation énergétique de la résidence principale ;
– l’achat d’un véhicule utilisant l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux comme source exclusive d’énergie ;
– l’activité de proche aidant exercée par l’intéressé, son conjoint ou son partenaire de Pacs auprès d’un proche.

► De nouvelles modalités pour la prime de partage de valeur (PPV) sont précisées par décret : 
– l’affectation de la PPV à un plan d’épargne salariale ou de retraite est possible ; 
– certains plafonds d’abondement de versements aux plans d’épargne salariale sont relevés

► Les possibilités de négocier en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal d’une entreprise sont explicitées par le ministère du travail dans un questions-réponses qui précise : 

– la définition de l’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal ;
– les entreprises concernées ;
– le niveau de la négociation ;
– les engagements possibles pour le partage de la valeur

► Le plan de partage de la valorisation de l’entreprise, applicable depuis le 1er juillet, peut intéresser les CSE d’entreprises sont la valeur de l’entreprise augmente sur 3 ans  

► Rappelons enfin que la base de données économiques, sociales et environnementales du CSE s’enrichit de nouvelles données sur l’épargne salariale

Bernard Domergue, avec Frédéric Aouate et actuEL-RH

[Veille JO] Les textes parus cet été

03/09/2024

Même si aucun nouveau gouvernement n’a été nommé depuis les législatives, l’exécutif “démissionnaire” de Gabriel Attal chargé de la continuité des affaires courantes a continué à faire paraître quelques textes réglementaires cet été. Voici donc un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du vendredi 26 juillet au lundi 2 septembre, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous n’évoquons pas ici les très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, que vous retrouvez dans notre baromètre des branches de cette édition.

Assurance chômage

  • Un arrêté du 22 août 2024 porte publication des taux de séparation médians par secteur pris en compte pour le calcul du bonus-malus (rectificatif de l’arrêté précédent)
  • Un arrêté du 22 août 2024 porte publication des taux de séparation médians par secteur pris en compte pour le calcul du bonus-malus
  • Un décret du 30 juillet 2024 relatif au régime d’assurance chômage (rectificatif sur la période de référence)
  • Un décret du 30 juillet 2024 prolonge les dispositions réglementaires relatives aux règles d’indemnisation et de contributions du régime d’assurance chômage jusqu’au 31 octobre 2024, le gouvernement n’ayant dans un premier temps prorogé ces règles que jusqu’au 31 juillet 

► Rappel : après avoir annoncé dans un premier temps vouloir publier un décret durcissant à nouveau, à compter du 1er décembre prochain, les règles d’indemnisation de l’assurance chômage, le gouvernement de Gabriel Attal a finalement décidé de proroger les règles actuelles, ce qui laisse le futur gouvernement davantage libre de sa décision sur le sujet, la droite réclamant ce durcissement, la gauche s’y déclarant hostile (lire notre article dans cette même édition). 

Avocat et Conseil constitutionnel

  • Un décret du 14 août 2024 définit les modalités d’exercice sous forme de société civile professionnelle ou sous forme de société d’exercice libéral de la profession d’avocat
  • Un décret du 14 août 2024 définit les modalités d’exercice en société de la profession de commissaire de justice
  • Un décret du 14 août 2024 définit les modalités d’exercice en société de la profession d’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation
  • Au JO du 1er août 2024 est publiée la décision du Conseil constitutionnel rejetant la demande de statuer sur l’élection à la présidence de l’Assemblée nationale, après les législatives, de Yaël Braun-Pivet

Coopératives de production

  • Au JO du 21 août 2024 est parue la liste des sociétés coopératives de production pour l’année 2024 (Ndlr : le personnel de l’usine Duralex de la Chapelle-Saint-Mesmin, dans le Loiret (230 salariés) entend sauver ce site en constituant une société coopérative de production, grâce au soutien des collectivités locales, un projet qui a été mis en avant cet été à l’occasion d’une visite du site des personnalités du Nouveau Front populaire)

Élections professionnelles et dialogue social

  • Un arrêté du 9 août 2024 traite de l’utilisation du téléservice “FranceConnect” pour la mise en œuvre du vote électronique à distance en vue de la mesure en 2024 de l’audience des organisations syndicales concernant les entreprises de moins de onze salariés
  • Un arrêté du 5 août 2024 fixe le nombre de voix des membres du conseil d’administration de l’établissement public Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (Arpe)

Fonction publique

  • Un arrêté du 5 août 2024 porte application pour l’Institut national du service public (INSP) de l’article 7 du décret n° 2016-1073 du 3 août 2016 relatif à la mise à disposition et à la conservation sur support électronique des bulletins de paye et de solde des agents publics

Formation

  • Une décision du 30 juillet 2024 porte enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles et au répertoire spécifique (consultant Green IT, expert des marchés, manager en stratégie et développement des RH, acheteur, designer, etc.) 

Ministère du travail

  • Un arrêté du 6 août 2024 désigne une opération de restructuration de services au sein du ministère du travail, de la santé et des solidarités (regroupement sur un site unique des différents sites constitutifs de l’unité de contrôle Rhône-Nord Agriculture (UC 5) au sein de la direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités du Rhône)
  • Un décret du 7 août 2024 modifie le décret du 5 mai 2011 relatif à la maîtrise des risques et à l’audit interne au sein des ministères chargés des affaires sociales

Santé

  • Un arrêté du 6 novembre 2021 modifie l’arrêté du 14 novembre 2017 fixant la liste des personnes pouvant bénéficier de l’injection du vaccin antigrippal saisonnier pratiquée par un infirmier ou une infirmière (rectificatif)
  • Un arrêté du 6 août 2024 traite de la formation des médecins du travail et des autres professionnels de santé au travail assurant le suivi individuel renforcé d’un travailleur exposé aux rayonnements ionisants et aux conditions de délivrance de l’agrément complémentaire des services de santé au travail

Nominations

  • Un arrêté du 26 juillet 2024 porte nomination au conseil d’administration de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact)
  • Un arrêté du 21 août 2024 porte nomination d’un nouveau membre suppléant à la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle et des sous-commissions constituées en son sein
  • Un arrêté du 16 juillet 2024 porte nomination au conseil d’administration de France Travail
  • Un arrêté du 2 août 2024 porte nomination d’administrateurs au conseil d’administration de la Caisse nationale des industries électriques et gazières
  • Un arrêté du 7 août 2024 porte nomination à la commission prévue à l’article R. 123-51 du code de la sécurité sociale pour les agents de direction des organismes du régime général de sécurité sociale

Source : actuel CSE

La DGT dresse son bilan pour 2023

03/09/2024

Chiffres clefs, chantiers prioritaires, état des lieux… La Direction générale du travail (DGT) vient de publier son rapport d’activité pour 2023. Parmi les faits marquants, les sujets d’actualité en faveur du pouvoir d’achat, de la prévention des accidents du travail graves et mortels, les questions portées dans le cadre des Assises du Travail, lors de la Conférence sociale ou bien encore du nouveau pacte de la vie au travail et la réforme des retraites… Pour chacun des sujets, la DGT liste les axes de travail de l’année 2024.

Source : actuel CSE

L’avocat Henri Leclerc est mort

03/09/2024

Figure du barreau, ancien président de la Ligue des droits de l’homme et grand défenseur des libertés publiques, l’avocat Henri Leclerc est décédé samedi 31 août à l’âge de 90 ans. Les avocats du barreau de Paris sont invités à lui rendre hommage lors d’une minute de silence, ce mardi 3 septembre devant la Maison des Avocats, sur le parvis du tribunal judiciaire de Paris. 

Engagé à gauche, Henri Leclerc avait laissé, comme le dit Le Monde dans sa nécrologie, un message puissant en concluant les 100 ans de la Ligue des Droits de l’homme en 1998 : “Ils sont toujours là, nos vieux adversaires. Nous les connaissons bien. Ils s’appellent l’arbitraire qui menace les libertés, l’intolérance qui détruit la fraternité, le racisme qui nie l’égalité, l’individualisme qui tue le citoyen. Elle est toujours présente, la misère, cette insulte à la dignité. Et devant nous, dressés, tous les pouvoirs dont on abuse”. Des mots dignes du grand Hugo.

Source : actuel CSE

Perte de droits chômage en cas de refus d’un CDI : le Conseil d’Etat refuse de transmettre la QPC de FO

03/09/2024

Dans une décision du 24 juillet, le Conseil d’Etat refuse de transmettre au Conseil constitutionnel, comme le lui demandait FO, une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au sujet des articles L. 1243-11-1 et L. 1251-33-1 du code du travail résultant de la loi du 21 décembre 2022. Ces articles prévoient l’obligation pour l’entreprise d’un demandeur d’emploi en contrat à durée déterminée (CDD), lorsque ce dernier refuse une proposition de CDI, d’en notifier Pôle emploi, l’organisme gestionnaire de l’assurance chômage pouvant alors décider, si cela arrive deux fois au cours des 12 derniers mois, de priver le demandeur de ses droits à allocation chômage.

Pour FO, cette obligation de notification porte atteinte à la liberté des salariés de choisir leur contrat de travail.

Tel n’est pas l’avis des magistrats administratifs : “Bien qu’un tel refus (Ndlr : de la part du salarié) puisse avoir pour conséquence (…) qu’il ne pourra se voir ouvrir le bénéfice de l’allocation chômage, l’obligation de notification qui incombe à l’employeur est, par elle-même, sans effet sur les droits du salarié. Le syndicat requérant ne peut donc utilement soutenir que les deux articles législatifs contestés (…) méconnaîtraient l’égalité des salariés devant la loi ou porteraient une atteinte excessive à la liberté d’entreprendre ou à la liberté contractuelle des salariés”. 

Source : actuel CSE

La IVe République, régime parlementaire instable mais au bilan économique et social indéniable

05/09/2024

Trois des ministres du travail de la IVe Rep. : A. Croizat, D. Mayer, P. Baron

Fustigée pour son instabilité gouvernementale du fait de son régime parlementaire, la IVe République (1946-1958) a néanmoins permis à la France de se redresser après la seconde guerre mondiale. Ses gouvernements auront aussi créé le comité d’hygiène et de sécurité, le salaire minimum, la troisième semaine de congés.

Instaurée à la suite du gouvernement provisoire de De Gaulle qui lança en 1945 de grandes réformes par ordonnances, parmi lesquelles la création de la sécurité sociale et du comité d’entreprise (*), la IVe République, du fait de son régime parlementaire permettant aux députés de faire et défaire les exécutifs, aura connu pas moins de 24 gouvernements entre 1946 et 1958.

L’instabilité qui est actuellement crainte du fait de l’absence de majorité absolue à l’Assemblée après les législatives du 7 juillet, la France l’a donc connue bien avant 2024 ! La durée des gouvernements n’était, en moyenne, que de 7 mois.

Est-ce à dire que cette instabilité a interdit toute action ? Sur le plan économique et social, le bilan qu’on peut faire de l’action publique sous la IVe République invite à la nuance.

Certes, ce régime n’a pas survécu à la guerre d’Algérie, mise à profit par de Gaulle pour revenir au pouvoir en changeant la Constitution, l’élection au suffrage universel du président, modification apportée en 1962, renforçant le poids de l’exécutif. Et les combinaisons politiques ont parfois tourné au vaudeville. Mais si la IVe est tombée sur le dossier colonial, alors qu’un Pierre Mendès-France avait réussir à tourner la page de “l’Indochine”, ce régime parlementaire a quand même accompagné, durant ses douze ans d’existence, le redressement économique et social d’une France ruinée par la guerre et l’occupation. Il faut en effet rappeler que les tickets de rationnement nécessaires pour se procurer de quoi s’alimenter ne disparaîtront qu’en 1949 !

Des conflits sociaux

Ce redressement est bien sûr d’abord à mettre à l’actif des Français eux-mêmes.

Après-guerre, il faut faire repartir mines et usines, et la durée de travail peut alors attendre 45 voire 48 heures…

Le Parti communiste et la CGT participent dans un premier temps à cette union sacrée du redressement de la production nationale, avant le tournant de la guerre froide de 1947, qui voit les ministres communistes être exclus du gouvernement. Les conditions de vie difficiles, avec une inflation très forte (de l’ordre de 50% par an jusqu’en 1949) et ce que certains historiens appellent les “émeutes de la faim”, provoquent des conflits sociaux (grèves à Renault, par exemple). Ces conflits culmineront en 1948 avec les grandes grèves conduites par la CGT dans les bassins houillers afin de protester contre des décrets baissant les salaires et réduisant le pouvoir des délégués mineurs. Ces grèves sont très durement réprimées par le gouvernement avec l’aide de la police et de l’armée. Six mineurs sont tués, une centaine sont licenciés, d’autres condamnés.

Un redressement, une modernisation et des progrès sociaux

En dépit de ces événements dramatiques et du naufrage moral de la fin de ce régime (qui laissa se développer la torture en Algérie), les parlementaires et les gouvernements de la IVe, tout comme un appareil d’Etat rénové par la création de l’Ecole nationale de l’administration, auront dont permis ce redressement économique et assuré malgré tout une forme paradoxale de stabilité : tous les gouvernements de la IVe connaîtront le même secrétaire général, comme le relève le Figaro dans un article sur la IVe République.

En faisant le choix politique de bénéficier du plan Marshall et donc de l’aide des Etats Unis (un choix fustigé par la CGT, et qui explique aussi la session du premier syndicat français avec la création de FO), la IVe République accélère le redémarrage industriel et la modernisation du monde agricole, une véritable révolution.

La production repart, le niveau de vie augmente (on parlera ensuite des “Trente glorieuses”), et le pays modernise sa fiscalité en créant, en 1954, la TVA, un outil défendu par un président de commission des finances nommé Pierre Mendès-France. Signalons au passage que si la taxe à la valeur ajoutée est alors créée, c’est pour que cet impôt sur la consommation se substitue à une taxe sur la production, dans le but d’éviter une hausse des coûts pour les entreprises, ce qui n’est pas sans rappeler notre actualité fiscale… 

Certains progrès sociaux, qui s’expliquent par le poids alors très important des forces de gauche et de la CGT, accompagnent ce redressement. Soulignons d’ailleurs, en contraste avec l’actuel paysage politique, le profil des titulaires du poste de ministre du travail et de la sécurité sociale, souvent occupé par syndicalistes (***).

Le décret de 1947 sur le comité d’hygiène

Le décret instaurant le comité d’hygiène et de sécurité (le CHSCT prendra sa force véritable avec les lois Auroux de 1983) date de 1947 : il est donc l’œuvre de la IVe République. Ce décret, qui reprend en l’améliorant un texte du régime de Vichy, précise alors que le comité d’hygiène, lorsque le CE existe, est une commission de ce comité, comme l’est aujourd’hui la CSSCT avec le CSE.

Mais ce qui sera développé lors du retour de la gauche en 1981 est déjà bien présent. Le comité d’hygiène, dit le texte de 1947, peut :

  • “procéder lui-même ou faire procéder par un de ses membres à une enquête à l’occasion de chaque accident ou de chaque maladie professionnelle grave, c’est-à-dire ayant entraîné mort d’homme ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou qui aura révélé l’existence d’un danger grave, même si les conséquences ont pu en être évitées ;
  • procéder à l’inspection de l’établissement en vue de s’assurer de l’application des prescriptions législatives et réglementaires et des consignes concernant l’hygiène et la sécurité, de s’assurer du bon entretien des dispositifs de protection ;
  • organiser l’instruction des équipes chargées des services d’incendie et de sauvetage et de veiller à l’observation des consignes de ces services;
  • développer par tous les moyens efficaces le sens du risque professionnel”.

Quelques exemples : conventions collectives, salaire minimum, congés payés

Parmi d’autres innovations de ce régime, signalons : 

  • en 1950, la loi relative aux conventions collectives et aux procédures de règlement des conflits collectifs de travail, qui instaure la libre négociation des salaires (“La loi du 11 février 1950, relative aux conventions collectives et aux procédures de règlement des conflits collectifs de travail, a marqué le passage d’un régime de salaires réglementés par les pouvoirs publics à un régime de salaires résultant de la libre discussion entre les parties”, peut-on lire dans le Journal officiel du 23 août 1950). Cette loi, qui s’inscrit dans le prolongement du principe des conventions collectives créé en 1936, privilégie la négociation de branche, avec des échelons territoriaux ;
  • en 1950 toujours, le décret sur le salaire minimum interprofessionnel garanti (le “SMIG”, qui deviendra SMIC en 1970). A noter que le décret crée alors non pas un seul SMIG mais 5 SMIG différents par zone géographique; 
  • en 1952, la loi “relative à la variation du SMIG en fonction du coût de la vie” (qui permet une forme d’indexation a minima) ;
  • en 1956, la loi sur la troisième semaine de congés payés (la 4e semaine viendra avec Mai 68 et la 5e en 1982) ;
  • En 1956 toujours, la création du fonds national de la vieillesse. Le minimum vieillesse, financé par le Fonds national de solidarité (FNS), est instauré : toute personne de plus de 65 ans a droit à un montant minimum de ressources (Ndlr : rappelons qu’en 1947, les partenaires sociaux avaient créé l’Agirc, un régime de retraite complémentaire pour les salariés cadres de l’industrie et du commerce).

Le parallèle entre IVe et Ve République

Mais c’est peut-être le juriste Frédéric Rolin, dans un point de vue publié par le Monde, qui établit le parallèle le plus éclairant entre notre situation et l’histoire de la IVe République : “A bien y regarder, écrit ce professeur de droit public, sous cette IVe République réputée si fragile, avec ses faibles majorités prises en tenaille entre un bloc communiste, à gauche, et un bloc gaulliste puis poujadiste, à droite, bien des œuvres majeures ont été accomplies. Celles-ci constituent, peut-être davantage que l’héritage du Général, le socle sur lequel s’est construite la France moderne. A commencer évidemment par l’Europe : c’est bien sous la IVe République que la Communauté européenne du charbon et de l’acier, en 1954, et la Communauté économique européenne, en 1957, ancêtres de notre Union européenne, ont été établies. Mais c’est aussi durant la IVe République, modeste sur le plan normatif, qu’ont été menés les programmes nucléaires français, civils et militaires : le premier essai nucléaire dans le Sahara, dont la Ve République naissante récolte tous les lauriers, n’aurait pas pu avoir lieu sans l’œuvre discrète mais efficace de Pierre Mendès France et Félix Gaillard”.

Autrement dit, l’action publique ne passe pas forcément par de grands textes normatifs décidés à l’initiative d’un gouvernement puissant : “Même avec des gouvernements faibles, minoritaires, démissionnaires, même avec des assemblées instables et fragmentées, la France est en état d’être gouvernée. Il y aura moins de lois, il y aura moins de décrets, il y aura moins de “plans”, de “Grenelle”, de ceci ou de cela. Il y aura, peut-être même, des budgets votés en retard, avec les reconductions mensuelles de l’année antérieure, pour faire fonctionner les services publics et payer les fonctionnaires. Mais cela ne signifiera pas que notre pays ira à sa ruine ou à son effondrement. Les discours millénaristes sur le déclin de la France qui découlerait d’un blocage des institutions n’ont pas lieu d’être”.

(*) Le but de la création du comité d’entreprise est présentée ainsi dans l’ordonnance du 23 février 1945 : “Ces comités, dont les attributions dans le domaine social seront définies par un décret ultérieur, ne sont pas, dans le domaine économique, des organismes de décision : il a semblé Indispensable de laisser au chef d’entreprise, qui a, devant la nation, la responsabilité de l’affaire qu’il dirige, une autorité correspondant à cette responsabilité. Les comités d’entreprises seront donc consultatifs, sauf en ce qui concerne la gestion des institutions sociales de l’entreprise. Mais le champ laissé à leur compétence est vaste. Ils n’ont pas seulement le droit de proposer les mesures tendant à améliorer le rendement et à accroître la production : ils doivent aussi être tenus informés de tous les éléments concernant la marche de l’entreprise. Le chef d’entreprise devra faire, au moins une fois par an, un rapport d’ensemble sur la situation et l’activité de l’entreprise. Dans celles qui revêtent la forme de société anonyme, les comités auront le pouvoir d’obtenir des commissaires aux comptes tous éclaircissements sur la situation financière de l’entreprise et de présenter à l’assemblée générale des actionnaires toutes observations utiles. Ainsi l’autorité de la direction sera maintenue intacte et en même temps, par l’intermédiaire de ses représentants, le personnel pourra être étroitement associé à la marche générale de l’entreprise dans laquelle il travaille (..)”. Ce principe est repris dans le préambule de la Constitution de la IV République : “Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises”.

(**) Le résistant Daniel Mayer, secrétaire général de la SFIO de 1943 à 1946 (il sera président du Conseil constitutionnel dans les années 1980), a été à de nombreuses reprises ministre du travail et de la sécurité sociale sous la IVe et soutint le développement de la sécurité sociale, tout comme le MRP Paul Baron (dessinateur en ameublement, et syndicaliste CFTC) qui œuvra pour le SMIG, l’ouvrier CGT et communiste Ambroise Croizat ayant occupé le poste en 1947 en mettant en place la sécurité sociale créée par le gouvernement provisoire de la Libération. 

Bernard Domergue

Alternance : baisse des aides de l’Agefiph

05/09/2024

Pour l’embauche d’une personne en situation de handicap en contrat de professionnalisation ou en contrat d’apprentissage, l’Agefiph verse une aide financière à l’employeur. 

Sur son site internet, l’Agefiph annonce qu’à compter du 1er août 2024 “en raison d’un imprévu budgétaire”, ses modalités d’intervention sur ces aides sont “temporairement ajustées jusqu’à la fin de l’année 2024”.
Ainsi, le montant maximum de ces aides est de 3 000 euros pour l’embauche en contrat d’apprentissage ou en contrat de professionnalisation d’une personne en situation de handicap. Ce montant est attribué du 1er août 2024 au 31 décembre 2024.  Il était auparavant fixé à 4 000 euros. 
A noter que le montant est fonction de la durée du contrat. Il est proratisé au nombre de mois et à compter du 6è mois.

► L’Association nationale de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapée (Agefiph) est chargée de soutenir le développement de l’emploi des personnes handicapées. Pour cela, elle propose des services et aides financières pour les entreprises et les personnes. 

Source : actuel CSE

Michel Barnier est nommé Premier ministre

06/09/2024

Emmanuel Macron a finalement choisi une personnalité de droite expérimentée, Michel Barnier, pour succéder à Gabriel Attal au poste de Premier ministre. Ancien commissaire européen ayant négocié le Brexit, ce Savoyard, député dès 1978, a été plusieurs fois ministre.

Quasiment deux mois après les élections législatives qui n’ont dégagé aucune majorité absolue mais ont donné le plus grand nombre de députés à la coalition de gauche (*), le président de la République a nommé hier au poste de Premier ministre Michel Barnier, une personnalité expérimentée dont le parcours politique s’inscrit clairement à droite et au sein de l’Union européenne.

“Cette nomination intervient après un cycle inédit de consultations au cours duquel, conformément à son devoir constitutionnel, le Président s’est assuré que le Premier ministre et le gouvernement à venir réuniraient les conditions pour être les plus stables possibles et se donner les chances de rassembler le plus largement”, indique le communiqué de l’Élysée. Emmanuel Macron estime donc que Michel Barnier pourrait faire consensus et trouver des majorités pour conduire sa politique en échappant à la censure.

La passation de pouvoirs

Âgé de 73 ans, Michel Barnier devient donc le Premier ministre le plus âgé de la Ve République, en succédant à Gabriel Attal, qui était à 35 ans le plus jeune chef de gouvernement. Ce dernier, lors de la passation de pouvoirs hier soir sur le perron de Matignon, a indiqué avoir préparé plusieurs projets, comme sur la “désmicardisation”, en regrettant d’avoir manqué de temps pour les mettre en œuvre, comme pour prendre date pour la suite : “Ces textes sont sur votre bureau, monsieur le Premier ministre”. 

Michel Barnier a répondu à cet assez long plaidoyer du Premier ministre sortant avec humour : “J’ai trouvé le bureau un peu vide, mais je suis sûr qu’il y a plein de projets de loi à reprendre”.

Assurant aborder sa fonction “avec beaucoup d’humilité”, Michel Barnier annonce vouloir répondre “aux défis, aux colères et aux souffrances et au sentiment d’abandon et d’injustice qui traversent nos villes et nos campagnes”.

Le nouveau Premier ministre indique qu’il dira la vérité sur “la dette financière et la dette écologique”, et qu’il fera preuve de “persévérance” pour poursuivre la politique en faveur de l’emploi et de l’attractivité de la France, mais qu’il incarnera aussi des “changements”. Michel Barnier promet ainsi “du respect” pour toutes les forces politiques et “les partenaires sociaux”, afin de “trouver des solutions qui marchent avec toutes les personnes de bonne volonté”.

Négociateur du Brexit, organisateur des JO

Le nouveau Premier ministre, qui a été membre du RPR, de l’UMP et de LR, a négocié de 2016 à 2021 la sortie de l’Union européenne du Royaume Uni lors du Brexit (il a été commissaire européen de 1999 à 2004), et il a organisé les Jeux olympiques d’Albertville en 1992. Il avait aussi défendu, après la crise financière de 2008, des mesures de régulation des marchés financiers. 

Cette personnalité de LR a été plusieurs fois ministre, dans les gouvernements de François Fillon, Jean-Pierre Raffarin, d’Alain Juppé et Edouard Balladur : il a occupé les portefeuilles de l’agriculture (2007-2009), des affaires étrangères (2004-2005) et européennes (1995-1997), de l’environnement (1993-1995).

Candidat à la primaire LR

Diplômé d’une école de commerce, longtemps président du conseil général de Savoie (1982-1999), Michel Barnier, plus jeune député lors de sa première élection en 1978 (il avait voté contre la dépénalisation de l’homosexualité en 1981), avait voulu être candidat à l’élection présidentielle de 2022.

Mais il avait été battu lors de la primaire de la droite en finissant troisième (avec 24% des voix), et il avait ensuite soutenu Valérie Pécresse.

Lors de cette primaire, celui qui s’est toujours présenté comme un “gaulliste social” attaché au dialogue social avait avancé l’idée d’un “gel de l’immigration” et d’une France qui devait ne plus être soumise “aux arrêts de la CJUE (Cour de Justice de l’Union européenne) et de la CEDH (Cour européenne des droits de l’homme)”.

Michel Barnier avait également avancé comme priorités la décarbonation de l’économie et la nécessité de redonner toute sa place “à la valeur travail”, “contre l’assistanat”, pour “encourager ceux qui ne travaillent pas à le faire”, en augmentant le nombre d’heures travaillées dans le secteur privé.

Il préconisait de repousser l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans, de baisser les cotisations sociales sur les salaires intermédiaires et de réduire les impôts de production sur les entreprises, un chantier largement engagé, depuis, par le président de la République. 

Cet échec à la primaire ouvre donc à Michel Barnier, paradoxalement, la voie de Matignon, tout comme la défaite de Bruno Le Maire à la primaire l’avait conduit à devenir 7 ans durant ministre de l’Economie d’Emmanuel Macron.

Une session en septembre ?

Michel Barnier va donc former son gouvernement. Le président de la République pourrait ensuite décréter la tenue d’une session extraordinaire de l’Assemblée en septembre (Ndlr : la demande peut être faite par le Premier ministre ou par une majorité des membres de l’Assemblée). Devant des députés très divisés (*), le nouveau Premier ministre devrait rapidement évaluer ses chances d’échapper à une censure, notamment grâce à une abstention du Rassemblement national.

Sur le fond, le nouveau Premier ministre va devoir arbitrer les questions budgétaires rapidement pour les projets de loi de finances et de sécurité sociale, alors que Bercy vient de signaler une dégradation des comptes publics avec de moindres rentrées fiscales que prévu et que le gouvernement démissionnaire a déjà programmé des coupes de crédits dans le budget du ministère du travail (-11% de crédits en matière d’emploi et de travail pour 2024).

Avec une gauche s’estimant flouée par le choix du président (**), et des organisations syndicales toujours remontées contre la réforme des retraites (la CGT et Solidaires organisent une journée d’action le 1er octobre), la bataille politique s’annonce rude au Parlement autour des questions du pouvoir d’achat et du Smic, des retraites, du chômage, de la politique sociale, du maintien d’une politique dite de l’offre favorable aux entreprises, de la fiscalité, etc. 

(*) La composition de la nouvelle Assemblée (la majorité absolue est de 289 députés sur 577) est la suivante:

  • le NFP totalise 193 députés (72 LFI, 66 PS, 38 Écologistes, 17 Gauche démocrate et républicaine, communistes) ;
  • Ensemble et ses alliées 176 députés, (99 Ensemble, 36 Démocrates, 31 Horizons) ;
  • L’extrême droite 142 députés (126 RN et 16 À Droite) ; 
  • La Droite républicaine (ex-LR) 47 députés ;
  • Le groupe indépendant Liot 22 députés, etc. 

(**) La candidate avancée pour Matignon par le Nouveau Front populaire, Lucie Castets, a déclaré dans une interview à Mediapart : “Cet aboutissement (..) s’explique très difficilement au regard des résultats des législatives (..) Toute poursuite de la politique menée depuis sept ans, même avec quelques atténuations de façade, donnera un boulevard au RN , car la politique qu’il est en train de conduire, prétendument au-dessus du clivage droite-gauche, ne prend pas en compte la vie des gens”. A l’inverse, les dirigeants de LR et de l’ancienne majorité présidentielle ont réagi positivement au choix de Michel Barnier. “C’est un homme de grande qualité qui a tous les atouts pour réussir dans cette difficile mission qui lui est confiée”, a réagi, sur le réseau social X, Laurent Wauquiez, président du groupe LR à l’Assemblée.

Bernard Domergue

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : Gouvernement, Parlement

06/09/2024

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du mardi 3 septembre au vendredi 6 septembre inclus. Une semaine particulièrement calme en raison de l’absence d’activité du gouvernement démissionnaire qui s’est limité aux affaires courantes. 

Activité parlementaire

Gouvernement

  • Décret de nomination du Premier ministre Michel Barnier Nominations
  • Un arrêté du 3 septembre 2024 modifie l’arrêté du 18 juin 2021 portant nomination à la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle et des sous-commissions constituées en son sein

Source : actuel CSE