Élections professionnelles : panorama des décisions récentes (septembre 2024 à janvier 2025)
03/03/2025
Plusieurs arrêts rendus ces derniers mois apportent des précisions ou rappellent des règles relatives aux élections professionnelles. Voici notre tableau récapitulatif de jurisprudence.
Les élections professionnelles donnent lieu à de nombreuses décisions de jurisprudence. Certaines de ces solutions ne tranchent pas une incertitude ou n’élaborent une règle, mais rappellent le droit applicable, précisent certains cas particuliers ou encore fournissent des illustrations intéressantes.
Nous vous présentons sous forme de tableau une sélection de ces arrêts de septembre 2024 à janvier 2025.
Thème | Contenu | Solution |
Unité économique et sociale (UES) | Si une UES regroupant au moins 11 salariés est reconnue par convention ou décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, la mise en place d’un CSE commun est obligatoire (C. trav., art. L. 2313-8). L’UES se caractérise par la réunion de critères d’unité économique d’une part, et de critères d’unité sociale d’autre part (jurisprudence). | Ne constituent pas une UES les sociétés appartenant à un même groupe dont les sociétés holding gèrent des participations dans les sociétés relevant des mêmes secteurs d’activité, dont la structuration transversale conduit au renforcement des liens économiques existants entre les différentes sociétés dans les branches où elles ont été regroupées et entre ces branches et la holding de tête, avec des synergies entre les deux holdings et avec chacune des entités : ces éléments font ressortir l’appartenance des sociétés concernées à un même groupe, mais sont impropres à caractériser une similarité et une complémentarité des activités effectivement déployées (Cass. soc., 11 déc. 2024, n° 23-22.680) (Illustration). |
Effectif | Dans la mesure où c’est l’employeur qui est tenu d’établir la liste électorale, il lui appartient, en cas de contestation, de fournir les éléments nécessaires au contrôle de sa régularité (jurisprudence). | Une liste électorale provisoire n’est pas nécessaire aux fins de permettre aux organisations syndicales de contrôler les effectifs de l’entreprise et de négocier utilement le protocole préélectoral (Cass. soc., 14 nov. 2024, n° 23-20.551). |
Candidature | L’annulation des élections ne prive pas les candidats de leur statut protecteur et ceux-ci demeurent protégés pendant les 6 mois qui suivent le dépôt de leur candidature (jurisprudence). | Mais attention ! En cas d’annulation de sa candidature, le salarié perd sa qualité de salarié protégé à la date à laquelle le jugement annule cette candidature (Cass. soc., 22 janv. 2025, n° 23-15.302). |
Le principe est que l’employeur ne peut se faire juge de la validité des candidatures. Cependant, les modalités d’organisation du scrutin, fixées par un protocole d’accord préélectoral conclu à la condition de double majorité, et dont la régularité n’est pas contestée, s’imposent à tous. Sauf abus, l’employeur ne commet donc aucune irrégularité en refusant de tenir compte d’une liste déposée en contravention avec ces modalités (jurisprudence). | Lorsque le salarié bénéficiaire d’un mandat exprès du syndicat dépose les listes de candidatures avant l’expiration du délai prévu par le protocole d’accord préélectoral, et en mains propres auprès du représentant de la société désigné pour les réceptionner, lequel connaissait ce salarié et en avait accusé réception, peut constituer un abus, le refus de l’employeur d’accepter le dépôt des listes au motif que le protocole préélectoral prévoyait que celles-ci devaient contenir la signature identifiable (nom et prénom) de celui qui déposait ces listes (ce qui n’était pas le cas pour les listes en question) (Cass. soc., 9 oct. 2024, n° 23-17.638). | |
Vote électronique | L’employeur est et demeure, quelles que soient les modalités d’organisation du vote électronique, le seul responsable de traitement (jurisprudence). | Lorsqu’il est établi que 5 électeurs n’ont pu voter au motif qu’un vote avait déjà été enregistré en leur nom dans le cadre d’un vote électronique, une faille du système de vote est démontrée. Dans ce cas, même si l’employeur a bien pris toutes les mesures pour garantir la confidentialité des votes et des données transmises, il y a atteinte à la sincérité et au secret du vote, principe général du droit électoral, de sorte que la nullité des élections est encourue (Cass. soc., 11 sept. 2024, n° 23-16.209). |
Contentieux électoral | Une des missions du bureau de vote et de procéder au dépouillement après avoir proclamé la clôture du scrutin. Dans ce cadre, il est chargé notamment d’ouvrir chaque urne et compter les enveloppes trouvées dans cette urne, puis de vérifier que le nombre des enveloppes correspond au total des votants cochés sur les listes d’émargement. | La différence entre le nombre de bulletins de vote et le nombre de votant ne constitue pas une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections. Ainsi, lorsque le juge constate que le nombre d’enveloppes comptabilisées lors du dépouillement correspondait au nombre de votants et que lors du décompte, les bulletins étaient en nombre supérieur au nombre de votants mais que ces bulletins supplémentaires n’avaient eu aucun impact sur le résultat des élections au regard des suffrages obtenus par les deux listes en présence, l’annulation de l’élection n’est alors pas encourue (Cass. soc., 9 oct. 2024, n° 23-14.585). |
La saisine du tribunal par toute partie recevable à agir aux fins d’annulation des élections interrompt le délai de forclusion au bénéfice des autres parties à l’instance dont les demandes tendent aux mêmes fins (jurisprudence). | Cependant, si la première saisine a été déclarée irrecevable, elle n’a pu interrompre le délai de forclusion de l’article R. 2314-24 au bénéfice d’une autre partie dont la demande faite hors délai tendait aux mêmes fins (Cass. soc., 14 nov. 2024, n° 23-21.801). |
Séverine Baudouin