Le gouvernement lance un vaste plan interministériel en faveur de la qualité des formations

28/07/2025

Jeudi 24 juillet, le gouvernement a présenté, au ministère de l’éducation nationale, un plan en faveur de la qualité de la formation et de lutte contre les fraudes. Enrichissement de Qualiopi, mise en œuvre de la loi Cazenave, lutte contre les emprises sectaires, renforcement du rôle des CFA en matière de santé et de sécurité, autant de réformes à venir.

Le gouvernement a présenté jeudi 24 juillet un plan d’amélioration de la qualité de la formation professionnelle et de lutte contre la fraude, lors d’une réunion interministérielle en présence d’Elisabeth Borne, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, de Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche, d’Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du travail et de l’emploi, et de Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

Ce plan répond à un double défi : garantir des formations de qualité, sûres et encadrées par des règles claires et partagées et lutter contre les dérives et les fraudes constatées dans certaines filières. “La diversité accrue de la pluralité des acteurs pose des exigences de régulation plus rigoureuse”, explique-t-on au gouvernement.

Les quatre principaux constats de départ sont les suivants :

  • certaines formations font preuve d’une qualité insuffisante dans une logique de baisse des coûts ; 
  • il existe un manque d’harmonisation des processus entre les différents organismes de formation qui empêche un socle de qualité commun ; 
  • des pratiques frauduleuses ou le non-respect des obligations légales sont observées ; 
  • on constate un manque d’informations fiables pour les utilisateurs – notamment les jeunes – pour choisir la formation qui leur convient.

Renforcer la qualité des formations

Le  premier axe consiste à renforcer les obligations qui incombent aux organismes préparant à des certifications professionnelles. Rappelons qu’un décret du 6 juin 2025 relatif à la certification professionnelle précise la forme juridique et le contenu des habilitations à former et à évaluer octroyés par un ministère ou un organisme certificateur, en particulier la mention des moyens techniques, pédagogiques et d’encadrement devant être mis en œuvre par l’organisme habilité.

Les organismes habilités à former, au même titre que les organismes de formation qui ont eux-mêmes déposé une certification, devront tous réaliser des actions préparant à l’ensemble des compétences et des connaissances identifiées dans le référentiel de compétences de la certification. 

En outre, les organismes de formation devront veiller à présenter de manière fidèle les débouchés professionnels réels/post-formation, à préciser les conditions d’inscription aux examens et à utiliser l’intitulé exact des certifications.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 2e semestre 2025.

Par ailleurs, les organismes de formation devront être habilités pour former aux diplômes du CAP au BTS relevant du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. 

► Date d’entrée en vigueur prévue : 2e semestre 2026.

Lutter contre les dérives sectaires

Afin de lutter contre les phénomènes sectaires et d’emprise, les actions de formation devront faire l’objet d’un contrôle renforcé des services régionaux de contrôle de la formation professionnelle, avec une attention particulière :

  • sur les prérequis à l’entrée en formation afin de s’assurer que le métier et les activités professionnelles associées soient bien accessibles au bénéficiaire de la formation et de ne pas contrevenir à un possible exercice illicite d’une activité professionnelle réglementée ;
  • sur les conditions de déroulement de la formation qui doivent assurer l’égalité entre les apprenants ;
  • sur l’objet réel des formations, les finalités d’emprise ou d’entrisme pouvant être plus facilement caractérisées et sanctionnées.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 2e semestre 2025.

Enrichir les missions des CFA à la prévention des accidents du travail

Le gouvernement souhaite enrichir les missions des CFA (centres de formation des apprentis) sur la prévention des risques professionnels en intégrant dans la loi que les CFA ont un rôle dans la prévention des risques professionnels dès le début de la formation, sans pour autant minorer le rôle des employeurs.

Les CFA seront également mobilisés dans la prévention et la lutte contre l’illettrisme des apprentis.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 1er semestre 2026.

Intégrer de nouveaux indicateurs à Qualiopi

Autre axe central du plan : enrichir le référentiel de Qualiopi afin d’améliorer la transparence des informations dans la communication des organismes. “Trop souvent, les jeunes sont induits en erreur, notamment sur les débouchés d’emploi”, note le gouvernement.

Le nouveau Qualiopi exigera pour les CFA :

  • de clarifier leurs missions, notamment dans l’accompagnement pédagogique et l’alternance des temps entre formation théorique et pratique en entreprise ;
  • de permettre une évaluation de la qualité de l’organisation pédagogique et du dispositif de formation (renforcement de l’accompagnement du jeune dans la recherche d’entreprise, présentation plus lisible des méthodes de calculs des indicateurs et des taux de rupture) ;
  • de disposer de pratiques déontologiques dans l’affichage de la formation et de sa reconnaissance par l’Etat, de la possibilité d’une poursuite d’études et de la réalité des débouchés ; 
  • de s’assurer de la bonne prise en compte dans la formation des compétences permettant l’exercice en sécurité du métier afin de prévenir les accidents du travail, notamment graves et mortels, dans le cadre du temps en entreprise.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 2e semestre 2025.

Par ailleurs, les modalités des audits qualité de Qualiopi seront renforcés. Les contrôles sur place seront systématisés et la présence du dirigeant de l’organisme de formation lors de l’audit sera obligatoire. La certification des auditeurs Qualiopi sera obligatoire et les conditions déontologiques seront renforcées.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 2e semestre 2025.

Il sera confié à France compétences un rôle d’appui du Comité français d’accréditation (Cofrac) pour mieux réguler les pratiques des organismes certificateurs Qualiopi.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 1er semestre 2026.

Enfin, le projet de loi modernisation et régulation de l’enseignement supérieur déposé au Sénat le 26 juin 2025 propose d’étendre l’obligation de détenir Qualiopi pour :

  • tous les organismes de formation préparant à des certifications professionnelles : actuellement les organismes de formation qui réalisent des actions de formation permettant l’acquisition d’une certification professionnelle n’ont pas l’obligation de disposer de Qualiopi s’ils se financent uniquement par des frais de scolarité ; il est prévu d’exiger qu’ils soient certifiés Qualiopi s’ils veulent mettre en œuvre ces formations ;
  • les organismes de formation qui sont financés par les Fonds d’assurance formation des non-salariés (FAF).

► Date d’entrée en vigueur prévue : 1er semestre 2026.

Renforcer la lutte contre les fraudes

La loi du 30 juin 2025 contre toutes les fraudes aux aides publiques vise à renforcer les prérogatives de contrôle et de suspension des déclarations d’activités des organismes de formation. Il s’agit d’empêcher l’accès ou le maintien de fraudeurs dans le secteur de la formation. Les services de l’Etat pourront dorénavant suspendre la déclaration d’activité d’un organisme en cas de suspicion de fraude.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 2e semestre 2025.

Des mesures complèteront ce cadre afin :

  • de refuser ou d’annuler la déclaration d’activité d’organismes ne disposant pas de locaux ou ayant présenté à l’appui de leur demande des documents frauduleux ou obtenus frauduleusement ;
  • de refuser d’octroyer une déclaration d’activité durant un délai de carence à des organismes ou des dirigeants ayant déjà été sanctionnés pour fraude.

Un décret en Conseil d’Etat prévoira plusieurs mesures visant à simplifier et à renforcer le cadre procédural des contrôles des services régionaux de contrôle de la formation professionnelle afin :

  • que le système d’information “Mon Activité Formation”, qui porte la procédure de déclaration d’activité des organismes de formation devienne un système permettant un échange direct et sécurisé entre le service instructeur et le demandeur (“zéro papier”) ;
  • l’abrogation de l’obligation d’un recours administratif préalable obligatoire avant tout contentieux. Cette étape est ainsi supprimée afin d’accélérer la décision et d’améliorer son effectivité

Des dispositions législatives complémentaires seront prochainement proposées au parlement afin de permettre l’anonymisation de certains contrôles et de renforcer les mécanismes de sanction administrative.

La loi du 30 juin 2025 a également introduit une disposition permettant la communication d’informations entre tous les acteurs permettant la mise en place d’un véritable système d’alerte de nature à adapter les plans annuels de contrôles des différents acteurs en fonction des signalements et des investigations réalisés.

► Date d’entrée en vigueur prévue : 2e semestre 2026.

Bercy via la DGCCRF va lancer une nouvelle vague de contrôles dès l’été 2025 dans l’enseignement supérieur. Seront notamment ciblées :

  • les formations aux professions réglementées, notamment dans le secteur de la santé (psychologue ou auxiliaire de puériculture) et du droit (avocats, notaires, greffiers). En effet, dans certaines cas, le diplôme obtenu ne permet pas aux étudiants d’accéder à l’examen final ou d’exercer en pratique la profession qu’ils pensaient obtenir ; 
  • les allégations sur la reconnaissance du diplôme (BTS, Licence, Master) et les termes créant une confusion avec ces diplômes. 

Améliorer les indicateurs de l’insertion professionnelle

Enfin, les indicateurs d’Inserjeunes et d’InserSup qui mesurent le niveau de l’insertion professionnelle et de la rémunération en sortie de formation pour toutes les formations professionnelles initiales, ainsi que le taux de rupture pour les formations en apprentissage seront complétés.

► Rappelons que ces indicateurs utilisés notamment au sein de Parcoursup et Affelnet permettent de porter à la connaissance de chacun les débouchés réels de chaque formation.

Ils devront également prendre en compte l’insertion à l’étranger, l’occupation d’un emploi non salarié, les données relatives aux formations dispensées par les organismes de formation non accréditées par le ministère chargé de l’enseignement supérieur, principalement l’enseignement supérieur privé lucratif, formant sur les niveaux 6 et 7 de qualification.

► Ces évolutions devraient être intégrées avant la fin de l’année 2026. 

Florence Mehrez

Validation des acquis du mandat : l’expérience toulousaine

29/07/2025

Thomas Sommer-Houdeville, en charge de la VAE à l’IRT de Toulouse

Le parcours n’est pas aisé, mais les représentants du personnel peuvent faire valider les compétences acquises lors de leur mandat. À Toulouse, l’Institut régional du travail (IRT) a lancé un centre de ressources unique en France sur le sujet. Les explications de Thomas Sommer-Houdeville, chargé de mission à l’IRT de Toulouse, qui pilote la validation des acquis de l’expérience militante

Peu de représentants du personnel cherchent à faire valider les compétences acquises pendant un mandat au CSE ou au mandat syndical. Comment l’expliquez-vous, vous qui pilotez ce dossier au sein de l’Institut régional du travail d’Occitanie ?

Je vois plusieurs raisons. La première, évidente, est que dispositif de validation des acquis de l’expérience (VAE), bien qu’il existe depuis vingt ans, reste largement méconnu et donc encore sous-utilisé. C’est un dispositif encore complexe, même si les démarches ont été un peu simplifiées.

Il y a un frein culturel et psychologique 

Nous sommes en France, un pays où les diplômes s’acquièrent à l’école : il y a comme un obstacle culturel ou psychologique pour les salariés. Il faut d’abord qu’ils soient eux-mêmes conscients que leur expérience mérite une certification et donc vaut un diplôme. Même si des progrès ont été réalisés depuis cinq à six ans, le monde universitaire reste encore un peu réticent à l’égard de cette voie. L’autre grande raison tient à l’idée qu’on se fait de la VAE, souvent limitée aux compétences professionnelles.

La VAE, ce n’est pas seulement l’expérience professionnelle ? 

La loi reconnaît l’expérience syndicale, l’expérience de représentant du personnel, mais aussi le bénévolat associatif, les responsabilités associatives, l’expérience d’élu territorial (conseiller municipal, départemental, etc.),. Mais peu de responsables associatifs et de délégués syndicaux s’imaginent que leur expérience peut être reconnue par la VAE par un diplôme. Prenons des militants syndicaux qui sont conseiller prud’homme depuis dix ans, élus au CSE de leur entreprise ou au CSE central, qui suivent parfois les questions de santé, de sécurité et de conditions de travail : vous avez des personnes qui pendant dix ans se sont spécialisées dans le droit du travail, ils en ont une connaissance fine, profonde, comme d’ailleurs sur le sujet des risques psychosociaux.

Une expérience d’élu du personnel, de militant syndical ou de bénévole associatif apporte des compétences 

Ces militants sont tout à fait qualifiés pour viser en VAE une licence ou un master en droit. D’autres personnes gèrent, comme président bénévole, toute une série d’activités employant des dizaines de salariés, ils sont en situation de manager des équipes, un projet, un budget, cela leur ouvre la voie à une reconnaissance de formations de gestion. Mais beaucoup ne se rendent pas compte de la richesse de leur expérience : comme il s’agit d’une expérience en dehors de la vie professionnelle, c’est comme si elle n’était pas légitime, comme si elle n’avait pas de valeur. 

Comment se passe un projet VAE ?

Au départ, vous repérez un projet de certification pour un diplôme qui vous semble le plus en lien avec votre expérience et aussi avec votre projet d’évolution professionnelle. Vous choisissez l’institution qui délivre ce diplôme et vous leur adressez un premier “livret”. Dans ce CV argumenté, vous essayez de montrer que votre expérience, via les postes que vous avez occupés et les responsabilités que vous avez eues, correspondent à des blocs de compétences, des savoirs et des pratiques acquises qu’on peut attendre aux attendus pédagogiques du diplôme visé.

Vous devez choisir un projet de certification pour un diplôme qui vous paraît le plus en lien avec votre expérience 

Parfois le certificateur va vous demander aussi des pièces attestant de ce que vous écrivez. Le certificateur a deux mois pour étudier votre dossier et pour vous répondre : il peut vous dire “non, votre dossier ne correspondant pas aux prérequis” du diplôme envisagé ; il peut vous dire “oui, on vous prend en VAE pour le diplôme complet” ; et il peut aussi vous dire “oui, mais partiellement”, autrement dit vous n’aurez pas tel et tel module via la VAE (par exemple, l’anglais) et il vous faudra l’acquérir autrement, en formation continue. Au bout du parcours, vous passerez devant un jury qui vous reconnaîtra l’ensemble de la VAE, ou bien seulement 80 % en vous suggèrent de compléter par de la formation continue ou en revenant dans trois mois avec un nouvel écrit sur telle ou telle partie manquante.

Que sont les certifications de compétences professionnelles ? 

Attention, les certificats de compétences professionnelles (CCP), qui ont récemment fait l’objet de textes au Journal officiel, ce n’est pas la VAE au sens global. Cela ne vous permet d’obtenir qu’un module d’un diplôme professionnel comme médiateur social et accès au droit et aux services, soit seulement un quart de la certification. C’est pourquoi je ne conseille pas aux militants syndicaux et aux représentants du personnel qui ont une expérience importante de s’engager dans ces CCP car cela reste une démarche assez longue (avec des écrits à produire et un passage devant un jury) mais au final limitée, contrairement à une VAE entière qui va déboucher sur la reconnaissance totale du diplôme. 

A Toulouse, vous avez mis en place un centre de ressources “unique en France” sur la “VAE mlitante (VAEM). De quoi s’agit-il ? 

Nous dépendons de l’Institut régional du travail d’Occitanie. Ces instituts – il y en a onze en France – ont pour mission la formation universitaire des militants syndicaux et des représentants du personnel, ils conduisent aussi des recherches sur le travail. En Occitanie, nous avons décidé en 2018 de mener une autre action : faire la promotion, en direction des militants syndicaux, des représentants du personnel, des responsables associatifs et élus territoriaux, de la validation des acquis de l’expérience, en assurant l’accompagnement et le soutien des candidats.

Nous accompagnons les représentants du personnel et les militants syndicaux, des bénévoles associatifs 

Nous sommes donc un centre d’accompagnement à “la validation des acquis de l’expérience militante”. Nous avons ajouté le mot “militante”, qui n’existe pas dans la loi sur la VAE ni à l’université, pour bien montrer le public que nous visons. Ce centre a été créé avec le soutien de la Région Occitanie et la Dreets (direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), un soutien qui permet de rendre cet accompagnement gratuit.

Qu’apportez-vous aux salariés ? 

Lors d’une VAE, le certificateur vous accompagne sur le plan pédagogique : il vous donne une méthodologie, il vous précise ce qu’il attend, et il vous aide à construire votre dossier. Ce que nous essayons de faire de notre côté, c’est de suivre du début à la fin le candidat ou la candidate en l’accompagnant le plus possible. Comme nous sommes en lien avec la plupart des acteurs de la VAE, nous aiguillons le candidat dès le départ dans le parcours administratif : à quel certificateur s’adresser ? Comment rechercher le bon diplôme ? Etc.

 Nous aidons les candidats à trouver un certificateur, nous vérifions que le livret est bien rempli

Ensuite, nous vérifions que le livret est rempli correctement, en cohérence avec ce qui est attendu, nous nous assurons que le financement de la VAE est bien sur les rails, car il peut arriver qu’il faille résoudre un problème, type déblocage du compte personnel de formation (CPF), etc. Nous suivons les personnes jusqu’au bout, en les aidant à dépasser le syndrome de l’imposteur. Nous organisons aussi des rencontres de candidats à différentes étapes de leur projet VAE pour favoriser le partage d’expériences et de ressources. Il nous arrive aussi d’aider sur le plan logistique des candidats qui doivent se déplacer parfois loin pour passer devant le jury.

Combien de personnes avez-vous accompagnées ?

Sachant qu’en moyenne, une VAE demande deux à trois ans, depuis fin 2018 nous avons accompagné une vingtaine de candidats diplômés. La majorité sont des militants syndicaux, mais nous avons aussi des militants associatifs, des élus territoriaux. Les diplômes obtenus sont très variés : médiateur social, master de politique sociale, master en communication, licence de droit, brevet d’accompagnateur sportif, BTS de comptabilité, master de management des organisations, etc. Mais nous n’avons pas assez de recul pour voir les retombées de ces VAE.

Que dites-vous à un élu ou un délégué syndical pour l’inciter à se lancer dans une VAE ? 

Nous faisons beaucoup de choses pour faire connaître la VAE, nous allons dans les salons, nous faisons des événements publics, des webinaires. Il faut arriver à convaincre l’autre que son expérience constitue une somme de connaissances et de pratiques pouvant former l’ossature d’une certification et d’un diplôme.

Il faut les convaincre qu’ils sont légitimes, dépasser le syndrome de l’imposteur 

Le plus dur est de conduire les salariés à dépasser le syndrome de l’imposteur, de les amener à se considérer comme légitimes à prétendre à tel ou tel diplôme au vu de leur expérience. Et on sait bien que plus vous avez un diplôme de départ élevé, plus vous aurez de facilité à conduire une VAE. Vous aurez davantage de faculté à écrire, ce qui est indispensable pour réussir une VAE, et vous aurez moins ce qu’on appelle le syndrome de l’imposteur. Le syndrome de l’imposteur en VAE, c’est de penser qu’il faut avoir eu une formation initiale pour mériter un diplôme, c’est de se dire que ce que j’ai fait en apprenant sur le tas, en apprenant avec les collègues, par la formation professionnelle ou syndicale, cela ne compte pas pareil ! Vos avez des salariés qui gèrent depuis une dizaine d’années un budget de 150 000€ et qui continuent de penser qu’ils n’ont pas de connaissances comptables ! Ce qui est dur avec la VAE, c’est que vous allez devoir travailleur seul, le week-end et le soir après le boulot et les réunions syndicales. Ce n’est pas impossible mais c’est long. Il faut tenir de manière un peu obstinée, sur le temps long, à son projet. Il faut avancer progressivement, et écrire son livret 1 et 2. 

Que pensez-vous des annonces récentes du gouvernement sur la VAE ?

La réforme d’il y a deux ans est restée inachevée. Encore aujourd’hui, la procédure n’est pas la même si votre diplôme est présent ou non sur la plateforme France VAE. Les processus manquent toujours de visibilité, il faut en effet les simplifier. Pouvoir mobiliser son compte personnel de formation (CPF) pour une validation est une bonne chose mais encore faut-il être bien accompagné. Pour changer les choses, il me semble qu’il faudrait une mobilisation de tous les acteurs, accompagnée par des moyens, afin de tisser un maillage territorial qui permette réellement d’informer les salariés et de leur proposer un accompagnement personnalisé, comme nous le faisons ici. 

La suppression de la limite des trois mandats au CSE peut-elle avoir un effet sur la VAE ? 

Peut-être aura-t-on des militants avec encore plus d’expérience à valoriser par la VAE. Mais aujourd’hui déjà, quand des représentants du personnel viennent nous voir, ils n’ont pas vécu qu’un mandat, ils ont souvent multiplié les mandats et les responsabilités, dans l’entreprise comme dans une union territoriale ou un syndicat de branche. 

(*) L’Institut régional du travail d’Occitanie, qui dépend du ministère du travail et de l’université, contribue à la formation supérieure des militants des confédérations CFDT, CGT et FO, en leur permettant de compléter les acquis de leur expérience par des formations universitaires pluridisciplinaires. L’IRT conduit également des recherches en sciences humaines et sociales du travail et gère un centre d’information et de documentation. L’institut régional, actuellement sans direction depuis le départ en retraite de son ancienne directrice Yannick Lequentrec, est actuellement en difficulté en raison d’un conflit l’opposant à l’université, notamment sur une question statutaire. 

(** )  S’il justifie de l’exercice d’un mandat de représentant du personnel ou d’un mandat syndicat au cours des 5 années précédentes, un salarié peut se présenter aux sessions d’examen en vue de l’obtention d’un certificat de compétences professionnelles (CCP). Les sessions sont organisées par les centres de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa). Ces CCP peuvent, par équivalence, permettre la délivrance de titres professionnels, à condition de valider d’autres CCP nécessaires pour chaque titre. Les équivalences sont les suivantes :

  • CCP encadrement et animation d’équipe  : responsable de petite et moyenne structure (niveau II, bac + 2)
  • CCP gestion et traitement de l’information : assistant de direction (niveau III, CAP-BEP)
  • CCP assistance dans la prise en charge d’un projet : assistant de direction (niveau III)
  • CCP mise en œuvre d’un service de médiation sociale : médiateur social pour l’accès aux droits et services (niveau IV, c’est-à-dire niveau bac) ;
  • CCP prospection et négociation commerciale : négociateur technico-commercial (niveau III)
  • CCP suivi de dossier social d’entreprise : gestionnaire de paie (niveau III). 

Bernard Domergue

Participation des employeurs au financement des contrats d’apprentissage : les précisions du ministère du travail

31/07/2025

Pour tout contrat d’apprentissage conclu depuis le 1er juillet 2025, l’employeur d’un apprenti préparant un diplôme de niveau bac + 3 et plus doit verser une participation financière de 750 euros. Le ministère du travail précise, avec des exemples, les conditions d’application de cette participation financière en cas de rupture du contrat pendant la période probatoire, de changement de CFA ou de changement de certification.

Prévue par la loi de finances pour 2025, la participation financière de l’employeur au financement des contrats d’apprentissage préparant un diplôme de niveau Bac + 3 et plus s’applique aux contrats conclus depuis le 1er juillet 2025. Les modalités d’application de cette prise en charge de 750 euros pour la première année du contrat ont été fixées par un décret du 27 juin 2025. Dans une publication sur son site internet sur les modalités du financement des contrats d’apprentissage depuis le 1er juillet 2025, datée du 30 juin 2025, le ministère du travail détaille au moyen d’exemples l’application de cette nouvelle participation financière de l’employeur.

Participation financière de 750 euros pour la première année du contrat d’apprentissage

Le ministère du travail rappelle que depuis le 1er juillet 2025, les employeurs doivent s’acquitter d’une participation obligatoire de 750 euros pour tout contrat d’apprentissage conclu à compter de cette date, pour les formations à partir de bac + 3 (niveaux 6 et 7).

► En cas de nouveau contrat à la suite d’une rupture du contrat initial, une participation réduite à 200 euros est prévue pour le nouvel employeur.

Elle est due par l’employeur pour chaque contrat, quelle que soit sa durée pour la seule première année d’exécution du contrat. En pratique, elle est déduite du montant pris en charge par l’Opco et est imputée sur le premier versement au CFA.

Elle est facturée par le CFA à l’employeur, à l’issue de la période probatoire prévue par l’article L.6222-18 du code du travail (article R.6332-25-2 du code du travail). Cet article permet la rupture du contrat “jusqu’à l’échéance des quarante-cinq premiers jours, consécutifs ou non, de formation pratique en entreprise effectuée par l’apprenti”. Le ministère du travail souligne que la date à laquelle prend fin la période probatoire n’est pas mentionnée dans le Cerfa, c’est une question de fait qui dépend de l’exécution effective du contrat d’apprentissage compte tenu de l’alternance CFA/entreprise.

Or, cette date est importante car en cas de rupture de contrat au cours de la période probatoire, la participation obligatoire de l’employeur sera de 50 % du niveau de prise en charge pour la période considérée, dans la limite de 750 euros.

De même, si l’employeur conclut un avenant pour changement de CFA alors que la période probatoire n’est pas terminée à la date de ce changement, il doit informer les deux CFA concernés et l’Opco. A défaut d’information par l’employeur, le changement sera présumé se faire après la fin de la période probatoire et la participation incombera au premier CFA, précise le ministère du travail.

Exemples en cas de rupture du contrat d’apprentissage pendant la période probatoire

Le ministère du travail propose plusieurs exemples de rupture du contrat d’apprentissage pendant la période probatoire.

Dans tous ces exemples le niveau de prise en charge est de 8 000 euros.

Rupture du contrat pendant la période probatoire

Le contrat débute le 1er septembre, il est rompu le 15 octobre, soit 45 jours.

Prise en charge sur la durée du contrat = 8 000 / 365 x 45 = 986 euros.

Participation obligatoire de l’employeur plafonnée à 986 x 50 % = 493 euros.

Rupture du contrat pendant la période probatoire lorsque la formation a commencé avant la conclusion du contrat d’apprentissage

Le cycle de formation débute le 1er septembre, mais le contrat d’apprentissage débute postérieurement le 16 octobre et est rompu le 10 novembre.

► Rappelons que cette situation est prévue par l’article L.6222-12-1 du code du travail. Elle permet à un futur apprenti qui n’a pas encore trouvé d’entreprise pour conclure un contrat d’apprentissage de débuter un cycle de formation en apprentissage dans la limite d’une durée de trois mois. Pendant cette période, le futur apprenti bénéficie du statut de stagiaire de la formation professionnelle.

La période préalable au contrat du 1er septembre au 15 octobre n’est pas prise en compte pour calculer l’assiette de la participation de l’employeur. Seule est prise en compte la période d’exécution du contrat d’apprentissage.

Dans cet exemple, la durée d’exécution du contrat d’apprentissage est de 26 jours (du 16 octobre au 10 novembre).

Prise en charge sur la durée du contrat = 8 000 / 365 x 26 = 570 euros.

Participation obligatoire de l’employeur plafonnée : 570 x 50 % = 285 euros.

Exemples en cas de changement de CFA

Changement de CFA au cours de la période probatoire

Le contrat d’apprentissage débute le 1er septembre, la formation en CFA commence le 15 septembre et la date de fin de la période probatoire est le 10 novembre.

Le 8 octobre il est mis fin à la convention de formation avec le premier CFA, le 9 octobre le deuxième CFA prend le relais dans le cadre d’un avenant au contrat et d’une nouvelle convention de formation. Le deuxième CFA assure la formation sur la durée restante du contrat.

Aucune participation obligatoire n’est réclamée à l’employeur par le premier CFA car la période probatoire n’est pas terminée au moment où il est mis fin à la convention de formation.

La participation obligatoire est versée au deuxième CFA à hauteur de 750 euros.

Changement de CFA après la période probatoire

Un contrat d’apprentissage est conclu du 1er septembre N au 31 août N + 2.

Par un avenant, il est acté un changement de CFA à compter du 30 novembre N + 1.

La participation obligatoire de 750 euros a été facturée et payée par l’employeur au premier CFA.

Aucune participation obligatoire n’est versée par l’employeur au deuxième CFA car l’employeur a déjà versé sa participation obligatoire.

Détermination de la participation obligatoire en cas de changement de certification

Cas général

Le ministère du travail rappelle que le changement de certification implique de rompre le premier contrat d’apprentissage et d’en conclure un second visant la nouvelle certification.

Si la nouvelle certification visée prépare un diplôme de niveau bac + 3 ou plus, la participation obligatoire est donc due au titre de ce second contrat au taux plein. En effet, le taux réduit (200 euros) n’est pas applicable car il ne s’agit pas d’un “autre employeur” et il ne s’agit pas de permettre à l’apprenti d’achever son cycle de formation.

Cas particulier des bachelors universitaires de technologie (BUT)

Par exception, en cas de changement de parcours au sein d’une même mention d’un BUT s’inscrivant dans le cadre d’un seul et même cycle de formation, il n’est pas demandé à l’employeur de participer une seconde fois à la prise en charge lorsqu’un nouveau contrat d’apprentissage est conclu :

  • à la suite immédiate de la rupture d’un premier contrat ;
  • entre le même employeur et l’apprenti ;
  • dont la formation est préparée par le même CFA ;
  • lorsque la rupture a été motivée par un changement de parcours au sein d’une même mention d’un BUT.

Dans ces conditions, la participation obligatoire ayant déjà été facturée à l’employeur à l’issue de la période probatoire, il n’est pas exigé une nouvelle contribution au titre du second contrat conclu à la suite du premier qui vient d’être rompu. 

Contrat d’apprentissage saisonnier

Lorsqu’un contrat d’apprentissage saisonnier prévu par l’article L.6222-5-1 du code du travail est conclu conjointement par deux employeurs avec un apprenti. S’il vise deux qualifications professionnelles, le passage de l’une à l’autre n’impose pas de rompre le contrat.

Si la participation obligatoire est applicable du fait de l’une ou l’autre des certifications visées, elle n’est due qu’une fois au titre de cet unique contrat.

Eléonore Barriot