NAO : deux fois plus d’accords revalorisent les primes que les augmentations individuelles

11/12/2024

Lors d’un webinaire hier, le cabinet Syndex a restitué les résultats d’une étude portant sur 1 159 accords salariaux signés dans les entreprises entre le 30 juin 2023 et le 1er juillet 2024. Une présentation d’autant plus intéressante qu’elle différencie les mesures selon la taille de l’entreprise et le secteur d’activité.

Premier constat de cette étude réalisée par Syndex avec SIA-Partners : 63 % de ces accords prévoient des augmentations générales, contre 80 % en 2022-2023 et 90 % en 2021-2022, une baisse qui semble épouser la décrue inflationniste (*).

Parmi ces accords, 9% mettent en place des mesures planchers avec en moyenne 72€ par mois (43€ en moyenne pour les entreprises de moins de 50 salariés et 74€ par mois pour les entreprises à partir de 50 salariés). Des mesures planchers toujours présentes donc, mais moins marquées que lors de la période précédente où il s’agissait de préserver le pouvoir d’achat face à la hausse des prix, nous fait observer Christelle Prévitali, de Syndex. 

► Remarquons au passage la quasi absence dans ces accords (seulement 0,8 % de mentions), d’une définition de la masse salariale de référence pour le calcul des mesures négociées. 

2,82% en moyenne

L’enveloppe moyenne attribuée pour les augmentations générales atteint 2,82%, avec 2,2% pour les cadres et 2,99% pour les non cadres. Les écarts sont là aussi importants selon l’effectif, l’enveloppe moyenne allant de 1,6% jusqu’à 49 salariés, 2,35 % de 50 à 249 salariés, et 2,03 % à partir de 250 salariés.

Un cinquième des accords prévoyant des augmentations les formulent en euros :

  • 78€ en moyenne pour l’ensemble du panel (71€ pour les cadres et 76€ pour les non-cadres);
  • 80€ en moyenne de 0 à 49 salariés ((70€ cadres et 80€ non-cadres) ;
  • 81€ de 50 à 249 salariés (69€ cadres et 74€ non-cadres) ;
  • 50€ à partir de 250 salariés (75€ cadres et 81€ non-cadres).

36 % des accords prévoient des augmentations individuelles

Deuxième constat : 36 % des accords actent des augmentations individuelles, avec une moyenne de 2,09 % et un écart allant de +0,3 % à 6,1 %.

Ces chiffres sont plus élevés pour les cadres (2,76 % en moyenne, avec un écart de 0,4 % à 5,5 %) que pour les autres salariés (1,21 % en moyenne, avec un écart allant de 0,2 % à 4,2 %). Cela étant, la rémunération variable individuelle reste un sujet peu négocié, observe Julien Gournay, de Syndex.

La proportion des accords prévoyant des augmentations générales et individuelles diffère fortement selon le secteur  : 

  • 82 % des accords de la métallurgie comportent des AG, des augmentations générales, et 63 % des augmentations individuelles (AI) ;
  • 80 % des accords des industries chimiques ont des AG et 60 % des AI ;
  • 56 % des accords des bureaux d’études techniques ont des AG et 53 % des AI ;
  • 16 % des accords de l’hospitalisation privée ont des AG et 3 % des AI, etc.

Troisième constat : la part des accords prévoyant des augmentations générales est en baisse par rapport à l’année précédente, et il en va de même pour les augmentations générales, une tendance également notée dans une étude menée sur des accords récents par le groupe Alpha (Ndlr : article à lire dans une prochaine édition).

L’enjeu de l’égalité entre les femmes et les hommes

Quatrième constat : si 70 % des accords mentionnent l’enjeu de l’égalité entre femmes et hommes, “seuls 12,7 % des textes précisent le montant du budget pour cette politique, souligne Christelle Prévitali, et seuls 1,5 % des accords indiquent le pourcentage de la masse salariale dédiée aux enjeux d’égalité F/H”, avec un minima de 0,1 % et un maximum de 0,3 %.

Julien Gournay conseille aux élus d’imposer ce thème de discussion dans les NAO en fixant des “objectifs atteignables et mesurables”. “Faites le lien avec la négociation de l’égalité professionnelle qui vous permettra de vous attaquer aux racines profondes de cette situation d’inégalité. On sait que c’est souvent au départ que les salaires d’embauche sont défavorables pour les femmes, et que c’est difficile à résorber ensuite. Il faut donc travailler sur les causes”, complète Christelle Prévitali.

La prime de partage de la valeur

Cinquième constat : la prime de partage de valeur, la PPV, est présente dans 21% des accords (voir les montants moyens ci-dessous). Elle est davantage utilisée dans les entreprises d’Ile-de-France et dans les sociétés de petite taille (21,7 % des accords NAO des entreprises de 50 à 249 salariés la mentionnent, contre 17 % au -delà de 200 salariés).

Et c’est un peu l’inverse pour les suppléments d’intéressement et de participation, très présents au-delà de 1 000 salariés (30,8 % des accords), un peu moins de 50 à 259 salariés (27, 8 % ) et de 250 à 999 salariés (26,4 %).

Les primes sont privilégiées par les entreprises

Sixième constat : les primes sont très présentes, puisque 72 % des accords prévoient leur revalorisation (soit 822 accords), une situation jugée assez nouvelle par les experts de Syndex : “Nous avons donc deux fois plus d’accords prévoyant une revalorisation des primes que d’accords prévoyant des augmentations individuelles (417 accords). Cela traduit la volonté des entreprises de flexibiliser la donne salariale”, commente Christelle Prévitali.

Les primes les plus mentionnées ont trait à l’ancienneté (20,9 %), les transports (10 %), les vacances (9,5 %), la prime panier (7,9 %), le 13e mois (5,8%) et la nuit (5,2 %). A noter que certaines conventions collectives traitent plus que d’autres ces primes, comme les industries chimiques, les transports routiers, la métallurgie et l’hospitalisation privée.

D’autre part, 21 % des accords (37 % en Ile-de-France) traitent des dispositifs de mobilité durable (remboursement d’abonnement, forfait mobilité durable, covoiturage, achat et usage de vélo, etc.)

Au sujet des primes, Julien Gournay rappelle aux élus qu’il s’agit souvent de dispositifs non pérennes, que certaines sont exonérations de cotisations sociales privant ainsi le salarié d’une forme de rémunération différée (protection sociale, retraite, etc.). 

Un conseil : négociez la négociation !

En conclusion, Syndex a délivré quelques conseils essentiels sur la façon de préparer et mener ses négociations salariales, conseils résumés dans le graphique ci-dessous. “Commencez par identifier la santé économique de votre entreprise pour estimer la marge de manœuvre dont elle dispose”, explique Christelle Prévitali.

À ces conseils, l’experte de Syndex en ajoute un autre : “C’est très rare de trouver un accord de méthode pour ces négociations salariales et c’est presque dommage, car les entreprises considèrent qu’il s’agit de discussions récurrentes et elles veulent aller vite. Mais nous conseillons aux organisations syndicales de demander une première réunion consacrée à l’examen des moyens de cette négociation : le calendrier, les informations mises à disposition, etc. Les délégués syndicaux ont aussi intérêt à se rapprocher des CSE pour bénéficier des données du comité”. 

Prévoyez une clause de revoyure 

Ajoutons pour finir que 17 % des accords analysés dans cette étude prévoient une clause de revoyure, une proportion jugée assez faible par Christelle Prévitali : “Il faut d’autant plus prévoir, outre la rétroactivité des mesures décidées, une date pour rediscuter de l’accord que le contexte politique est incertain. A l’heure actuelle, nous ne savons pas quelles dispositions sociales et fiscales s’appliqueront pour 2025”. 

(*) Cette étude repose sur l’analyse de 1 159 accords collectifs passés entre le 30 juin 2023 et le 1er jullet 2024, des accords répartis dans 6 branches professionnelles (26 % dans la métallurgie, 26 % dans les transports routiers, 18 % dans les industries chimiques,  12 % dans les bureaux d’études, 10 % dans le commerce de détail et de gros, 8 % dans l’hospitalisation privée).

Bernard Domergue

Transfert d’entreprise : un accord prolongeant temporairement la survie du statut collectif antérieur n’est pas un accord de substitution

11/12/2024

La Cour de cassation clarifie pour la première fois la nature d’un accord de substitution dit “de transition” dans le cadre de transferts d’entreprise. Un accord prolongeant temporairement le statut collectif antérieur sans mesures transitoires spécifiques aux salariés transférés ne constitue pas un accord de substitution.

En principe, en cas de modification de la situation juridique de l’employeur, le nouvel employeur n’est pas tenu par les accords collectifs qui liaient le précédent employeur. Le législateur a toutefois atténué les effets de cette règle en préconisant l’ouverture de négociations soit pour adapter les anciens textes aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables, soit pour élaborer une nouvelle convention ou de nouveaux accords.

Ainsi, lorsque l’application d’une convention ou d’un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d’une fusion, d’une cession, d’une scission ou d’un changement d’activité, la convention ou l’accord continue de produire effet jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention ou de l’accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d’un an à compter de l’expiration du délai de préavis, sauf clause prévoyant une durée déterminée supérieure.

► À défaut d’une nouvelle convention ou d’un nouvel accord dans le délai d’un an, les salariés des entreprises concernées bénéficient d’une garantie de rémunération dont le montant annuel ne peut être inférieur à la rémunération versée lors des 12 derniers mois.

Une nouvelle négociation doit s’engager dans l’entreprise, à la demande d’une des parties intéressées, dans les trois mois suivant la date de mise en cause de l’accord, soit pour l’adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables, soit pour l’élaboration de nouvelles dispositions, selon le cas. 
La loi autorise les parties à engager la négociation et à conclure un accord de substitution avant la réalisation de l’événement entraînant la mise en cause. Deux types de négociation anticipée sont autorisés :

  • la négociation anticipée d’accords dits “de transition” dont l’application est limitée aux seuls salariés de l’entreprise dont la convention ou l’accord est mis(e) en cause et dont la durée est limitée à trois ans ;
  • la négociation anticipée d’accords dits “d’adaptation” applicables aux salariés des deux entreprises [entreprise dont la convention ou l’accord est mis(e) en cause et entreprise d’accueil].

Dans un arrêt du 27 novembre 2024, qui sera publié au Bulletin, la Cour de cassation se prononce, pour la première fois à notre connaissance, sur la nature d’un accord dit “de transition”.

Quel est l’objectif d’une négociation anticipée d’accords “de transition” ?

Dès lors qu’est envisagée une fusion, une cession, une scission ou toute autre modification juridique qui aurait pour effet la mise en cause d’une convention ou d’un accord, les employeurs des entreprises concernées et les organisations syndicales de salariés représentatives de l’entreprise qui emploie les salariés dont les contrats de travail sont susceptibles d’être transférés peuvent négocier la convention ou l’accord de substitution prévu(e) à l’article L. 2261-14 du code du travail.

Cet accord, dont la durée ne peut excéder trois ans, a vocation à assurer la transition avec le statut de l’entreprise d’accueil ; il s’agit donc d’une étape vers l’élaboration d’un statut collectif commun. Il entre en vigueur à la date de réalisation de l’événement ayant entraîné la mise en cause (date du transfert) et s’applique à l’exclusion des stipulations portant sur le même objet des conventions et accords applicables dans l’entreprise d’accueil. A l’expiration de cet accord, ces derniers deviennent applicables aux salariés transférés.

Un accord organisant l’existence d’accords collectifs applicables à tous les salariés n’est pas un accord de substitution

Dans cette affaire, un grand groupe avait engagé un processus de simplification de ses différentes structures juridiques en France par la fusion de sociétés spécialisées dans le même type d’activité ou dans des activités connexes. Ce processus avait conduit au regroupement de 13 entités en trois sociétés, le 1er janvier 2018. 
Afin d’organiser, dans les 16 mois à venir, les négociations nécessaires à l’élaboration des accords applicables, in fine, à l’ensemble des salariés du nouveau périmètre créé par ces opérations de restructuration, un accord de groupe dit “de méthode” avait été conclu le 23 octobre 2017.

Compte tenu notamment des effets de la crise sanitaire liés au Covid-19, une des trois sociétés issues de la restructuration éprouvait cependant des difficultés à harmoniser le statut social des salariés appartenant à son périmètre. Le 28 janvier 2021, elle avait alors conclu, avec deux des trois organisations syndicales représentatives, un accord intitulé “sur la poursuite des négociations au sein de la société […] liées au projet de simplification des structures juridiques du groupe en France”. Cet accord prolongeait jusqu’au 31 décembre 2022 les dispositions conventionnelles applicables avant l’opération de fusion et n’ayant pas encore fait l’objet d’une harmonisation. Ces dispositions s’appliquaient “pour tous les salariés des nouveaux établissements des sociétés issues de la fusion”.

La troisième organisation syndicale représentative, non-signataire de cet accord, avait saisi la justice aux fins d’annulation et, à titre subsidiaire, d’inopposabilité de l’accord.
Cet accord, qu’elle qualifiait d’accord de substitution dit “de transition” prolongeait les dispositions conventionnelles mises en cause depuis le 1er janvier 2018 jusqu’au 31 janvier 2022, soit au-delà du délai maximal légal de trois ans fixé pour ce type d’accord.
Toute la question était donc de déterminer la nature de cet accord. S’agissait-il d’un accord de droit commun ou d’un accord de substitution conclu en vertu de l’article L. 2261-14-2 du code du travail ?

Les juges du fond considèrent que cet accord ne relève pas de l’article L. 2261-14-2.
En effet :

  • d’une part, l’accord avait seulement pour objet d’organiser la poursuite des discussions liées au projet de restructuration et, pour ce faire, prévoyait la prolongation des dispositions conventionnelles antérieures à la fusion et n’ayant pas encore fait l’objet d’une harmonisation ;
  • d’autre part, le statut collectif antérieur temporairement prolongé s’appliquait à tous les salariés des anciennes sociétés du groupe, y compris à ceux embauchés depuis la fusion réalisée le 1er janvier 2018.

L’accord n’avait pas pour objet de mettre en place des mesures transitoires applicables uniquement aux salariés transférés, dans l’attente d’une harmonisation des statuts collectifs. Il ne s’agissait donc pas d’un accord de substitution “de transition”.
La Cour de cassation partage ce raisonnement : visant essentiellement à organiser l’existence d’accords collectifs applicables à tous les salariés de chacun des établissements composant la société, cet accord ne relevait pas de l’article L. 2261-14-2 du code du travail. La période maximale d’application de trois ans instituée par ce texte ne lui était donc pas applicable.

Géraldine Anstett

Industries pharmaceutiques : un accord revalorise les minima conventionnels de 1,8 % en moyenne pour 2025

11/12/2024

L’organisation patronale, Le Leem, a signé, le 14 novembre 2024, avec cinq organisations syndicales (CFDT, CFTC, CFE-CGC, FO et Unsa), un accord de branche revalorisant les salaires minima conventionnels, à hauteur de 1,8 % en moyenne à partir du 1er janvier 2025. Une grille spécifique s’applique aux salariés ayant au moins 18 mois d’ancienneté.

Le texte prévoit, en outre, une clause de revalorisation automatique. Laquelle permettra, comme pour l’année 2024, que les premiers échelons soient automatiquement revalorisés en cas d’augmentation du Smic.

Source : actuel CSE

Groupes de protection sociale : les moyens des administrateurs restent une ligne de friction

12/12/2024

Les chefs de file des organisations syndicales et patronales se sont retrouvés hier au Medef dans le cadre de la négociation relative aux groupes de protection sociale.

Au cœur de cette séance, les moyens dont disposent les administrateurs pour remplir leur mandat. Pour mémoire, ils sont désignés par les confédérations, siègent dans les conseils d’administration et participent à la gouvernance des groupes de protection sociale. Ces “GPS” assurent à la fois une mise en œuvre des régimes de retraite complémentaire Agirc-Arrco et proposent des solutions de protection sociale (santé, retraite, prévoyance) grâce aux mutuelles, institutions de prévoyance et sociétés d’assurance qui leur sont affiliées. Parmi les plus célèbres, on peut citer Malakoff HumanisAG2R La Mondiale ou encore l’Ircem.

Pour renforcer l’attractivité des mandats des administrateurs, les organisations syndicales souhaitent développer leurs moyens individuels dans la préparation des réunions et leurs autorisations d’absence. Il n’est en revanche pas question de les rémunérer.

Selon Jocelyne Cabanal (CFDT), la réunion d’hier a acté une prise en charge de leur temps d’absence pour participer aux instances, se préparer aux réunions et se former. Les temps de préparation collectifs sont déjà pris en charge dans le règlement de l’Agirc-Arrco.

À la CGT, Denis Gravouil souhaite également une prise en charge pour tous les types de mandats et des frais de garde d’enfant : “Ils n’en ont pas voulu mais ils reviennent vers nous la prochaine fois”. L’espoir persiste donc.

Éric Gautron (FO) déplore le manque d’empressement des organisations patronales : “Les moyens des administrateurs restent le dernier grand sujet. Or, certaines organisations ont fait mine de se fâcher pour mettre la pression et la CPME joue une carte restrictive : elle refuse d’aborder la question du statut protecteur”. Il souligne également que le temps de préparation est souvent pris sur le temps personnel des administrateurs ou pendant leurs déplacements.

À la CFTC, Frédéric Romain inclut également les heures de garde de nuit pour les administrateurs ayant un enfant en bas âge.

Côté Medef, Jean-Eudes Tesson tente de mettre en avant les points de consensus : “Nous sommes d’accord sur le principe de donner aux administrateurs les moyens d’exercer leurs mandat. Mais nous n’avons pas tranché par exemple les autorisations d’absence. Chez AG2R, les administrateurs peuvent représenter jusqu’à 20 % de l’effectif. Leur absence représente donc une contrainte d’organisation pour l’entreprise”. Le Medef propose deux heures par chef de file et par réunion (avec la possibilité de forfaitiser par trimestre ou par mois), les syndicats en voudraient trente par administrateur…

Deux prochaines réunions ont été prévues les 5 et 18 février 2025.

Source : actuel CSE

NAO 2025 : ces entreprises qui pourraient faire l’impasse sur les augmentations de salaire

13/12/2024

Alice Rustique, chargée d’études économiques au sein du Centre Etudes & Data du Groupe Alpha

Faute de marges de manœuvre budgétaires, 43 % accords d’entreprise analysés par le groupe Alpha ne prévoient pas de revalorisation salariale l’année prochaine, selon son enquête “flash”. Les entreprises devraient se tourner vers des mesures “accessoires”, avec des leviers monétaires et non-monétaires.

C’est une première tendance mais qui pourrait bien dessiner les orientations 2025 en matière de négociations annuelles obligatoires (NAO). A partir de l’analyse de 108 accords publiés sur Legifrance, à mi-novembre, de différents secteurs d’activité, le Centre Etudes & Data du groupe Alpha, a décrypté, dans une enquête “flash” publiée le 5 décembre, les décisions arrêtées par ces entreprises pionnières.

Une dynamique de négociation plus modérée

Premier constat : la dynamique de signature des accords d’évolution des salaires ralentit. A mi-novembre, 242 accords ont été signés depuis septembre, contre 262 l’année précédente. “Les entreprises ont joué le jeu de la prudence, dans un contexte économique incertain”, indique Alice Rustique, chargée d’études économiques au sein du Centre Etudes & Data du groupe Alpha. 

Le ralentissement de l’inflation n’est pas étranger à cet attentisme. Mais d’autres facteurs ont également pesé, notamment “la faiblesse des carnets de commandes, le manque de trésorerie, les difficultés à rembourser les prêts garantis par l’Etat, l’incertitude politique ainsi que la multiplication des plans sociaux”.

Conséquence ? Les NAO prennent une tournure inédite pour 2025 : 43 % des entreprises de l’échantillon ne prévoient aucun budget de revalorisation l’année prochaine, que ce soit pour les augmentations générales ou individuelles. Elles ont opté uniquement pour des primes et des éléments périphériques. Elles étaient 23 % dans ce cas en 2024.

Les salariés du secteur de l’économie sociale et solidaire seront les premiers concernés. Mais également ceux du commerce et des transports. De même, les collaborateurs des petites et moyennes entreprises ne sont pas à la fête : 29 % de ces structures coupent court aux augmentations salariales.

“Les entreprises prévoient moins souvent des augmentations pérennes de salaires. Faute de marges de manœuvre, elles se reportent sur des mesures accessoires”, insiste Alice Rustique.

Les périphériques de rémunération ont le vent en poupe

Parmi les leviers actionnés, 56 % d’entre elles feront la part belle aux primes diverses, mensuelles (52 euros) ou ponctuelles (528 euros). Par ailleurs, 25 % vont faire un geste en faveur des titres restaurant avec une montant moyen de 8,7 euros. En outre, 10 % vont accorder une aide supplémentaire pour les transports (489 euros). En revanche, le forfait mobilité a peu la cote, seuls 8 % des accords prévoient cette mesure.  

Les DRH actionnent aussi des leviers non-monétaires : 19 % d’entre eux prévoient des mesures sur le temps de travail. “L’entreprise peut accorder des jours supplémentaires (1,25 jour en moyenne), par exemple, en cas de paternité, d’enfants malades, pour aider un proche en perte d’autonomie voire offrir les ponts de 2025”. D’autres optent pour des congés supplémentaires liés à l’ancienneté (2,1 jours en moyenne).

Les AG restent la norme mais sont en diminution

Pour les autres, les budgets sont réduits. Les montants négociés s’élèvent à 2, 23 % pour les cadres et à 2,36 % pour les professions intermédiaires et à 2,41 % pour les ouvriers et employés. Toutes catégories confondues le budget moyen est de 2,33 %, contre 3,5 % l’an passé.

À noter : parmi celles qui augmentent les rémunérations, 11,3 % prévoient des augmentations minimales, le montant moyen de ce plancher est de 54 euros brut/par mois.

Montants moyens d’augmentations totales parmi les entreprises qui augmentent les salaires (Source : groupe Alpha)

Dans le détail, les augmentations générales restent la norme : 77 % des non-cadres et 66 % des cols blancs recevront ce coup de pouce.

Mais l’enveloppe est moins généreuse que l’année précédente : les revalorisations moyennes se situent à 1,62% pour les cadres, à 1,84% pour les professions intermédiaires et à 1 ,96% pour les ouvriers et employés. Soit un recul d’un point par rapport à 2024 pour les cadres et de 1,1 point pour les non-cadres.

Montants moyens d’augmentations générales par CSP parmi les entreprises qui augmentent les salaires (Source : groupe Alpha)  

Et les budgets des AI ciblent les cadres comme les non-cadres

En 2025, les budgets d’augmentations individuelles seront supérieurs aux augmentations générales : avec des montants moyens de 2,24 % pour les cadres et de 1,98 % pour les professions intermédiaires, les ouvriers et employés.

Une tendance qui traduit un “changement de priorité”, selon Alice Rustique. “Même si les entreprises sont nombreuses à maintenir une part d’augmentation collective, les entreprises vont principalement chercher à rémunérer la performance de chaque salarié, cadre et non-cadre, pour favoriser la motivation”. 45,2 % des non-cadres et 51,8 % des cols blancs perçoivent ces coups de pouce.

Dans un tiers des cas, cette enveloppe est combinée avec une augmentation individuelle. Mais 22 % des non-cadres et 33,9 % des cadres ne percevront qu’une augmentation individuelle.

Montants moyens d’augmentations individuelles par CSP parmi les entreprises qui augmentent les salaires (Source : groupe Alpha)

Au global, en tenant compte des entreprises qui ne feront aucun geste sur les salaires, les budgets globaux d’augmentation s’élèvent ainsi à 1,23% pour les cadres, à 1,34% pour les professions intermédiaires et à 1,38% pour les ouvriers et employés. L’augmentation moyenne étant toutes catégories confondues à 1,32%. 2025, une année de diète pour les rémunérations ?

Prime de partage de la valeur : “Une baisse mais en aucun cas un effondrement”
Sans surprise, la prime de partage de la valeur fait moins recette. 19 % des entreprises de l’échantillon des 108  accords ont intégré ce bonus, contre 30 % lors des NAO 2024. De plus, les montants sont plus faibles : 714 euros en 2025, contre 862 euros en 2025. “Il s’agit certes d’une baisse mais en aucun cas d’un effondrement”, précise Alice Rustique, chargée d’études économiques au sein du Centre Etudes & Data du groupe Alpha.

Anne Bariet

Le baromètre des branches de novembre 2024

13/12/2024

Quelles ont été, en novembre 2024, les nouvelles dispositions applicables dans les branches professionnelles ? Notre tableau fait le point.

Grâce à la veille de l’équipe du Dictionnaire Permanent Conventions collectives, nous vous proposons chaque mois un rendez-vous consacré aux branches professionnelles. Pas question d’être exhaustif sur ce sujet mais de vous signaler quelques tendances dans l’activité conventionnelle. Nous nous appuyons ainsi sur des accords récents et les arrêtés d’extension parus au Journal officiel qui rendent obligatoires des dispositions pour toutes les entreprises d’une branche.

Ce baromètre nous semble d’autant plus intéressant que la loi Travail, puis les ordonnances Macron, ont redéfini les possibilités de négociation données aux branches par rapport aux niveaux de la loi et de la négociation d’entreprise. En outre, une vaste opération de fusion des branches existantes est en cours, le gouvernement souhaitant en réduire fortement le nombre. La Conférence sociale d’octobre 2023 a d’ailleurs relancé ce chantier.

► CCN : convention collective nationale

► IDCC : identifiant des conventions collectives (numéro de 1 à 4 chiffres sous lequel une convention collective est enregistrée).

  Baromètre des branches de novembre 2024
Volume des textes parus au Journal officiel relatifs aux branches professionnelles24 accords élargis/étendus, dont 3 au moins partiellement relatifs aux salaires, sont parus au Journal officiel du 1er au 30 novembre 2024. Une fois étendus ou élargis, les accords et avenants deviennent obligatoires pour tous les employeurs, généralement le lendemain de la date de la publication de l’arrêté au Journal officiel.  Exemples d’accords ou avenants étendus ou agréés : Un texte relatif au congé de paternité et d’accueil de l’enfant signé dans la branche de l’aide à domicile (IDCC 2941, lire l’arrêté) ; Un texte relatif à l’actualisation des congés exceptionnels pour événements familiaux signé dans la branche de l’automobile (IDCC 1090, lire l’arrêté) ; Un texte relatif à la reconduction du dispositif conventionnel d’activité partielle signé dans la branche des industries chimiques (IDCC 44, lire l’arrêté) ; Un texte relatif à l’autorisation d’absence rémunérée lors de la rentrée scolaire signé dans la branche des fleuristes, vente et services d’animaux familiers (IDCC 1978, lire l’arrêté) ; Un texte relatif au nouveau congé rémunéré en cas de maladie ou d’hospitalisation de l’enfant signé dans la branche des hôtels cafés restaurant (IDCC 1979, lire l’arrêté) ; Un texte relatif à la prorogation des dispositifs d’aménagement de fins de carrières et de garantie de rémunération en cas de déclassement pour pénibilité signé dans les branches du lait (coopératives agricoles) (IDCC 7004) et des industries laitières (IDCC 20166, lire l’arrêté) ; Un texte relatif à la révision de la CCN telle que modifiée par l’avenant correctif du 15 février 2024 signé dans la branche des carrières et métaux (IDCC 3249, lire l’arrêté) ; Un texte relatif au compte épargne temps et à la révision de la durée du travail signé dans les branches des marchés financiers (IDCC 2931, lire l’arrêté) ; Un texte relatif à l’indemnité conventionnelle de départ volontaire à la retraite signé dans la branche des particuliers employeurs (IDCC 3239, lire l’arrêté) ; Un texte relatif à des modifications de diverses dispositions de la CCN, aux congés payés annuels et au télétravail régulier signé dans la branche des opérateurs et guides de voyage (IDCC 3245, lire l’arrêté).  
Congés exceptionnelsBranches de l’alimentation : avenant n° 25 du 27 septembre 2024 applicable depuis le 18 novembre 2024. Les partenaires sociaux fixent le régime du congé de proche aidant pour les entreprises de la branche pour une durée de 3 ans et créent des autorisations d’absence pour le salarié reconnu travailleur handicapé. Branche des entreprises de bureau et numérique : avenant du 28 août 2024 applicable compter du lendemain de la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux actualisent et améliorent les congés exceptionnels pour événements familiaux et créent un congé exceptionnel en cas d’interruption spontanée de grossesse. Branche de l’industrie des ciments : accord du 1er juillet 2024 applicable à compter du 1er jour du mois suivant la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux améliorent les droits relatifs aux congés exceptionnels pour événements familiaux et fixent les règles relatives aux congés de présence parentale, de solidarité familiale et de proche aidant.
TélétravailBranche des assurances : avenant du 3 octobre 2024 applicable à compter du 22 octobre 2024. Les partenaires sociaux prorogent le dispositif de télétravail régulier. Branche des organismes de formation : accord du 11 septembre 2024 applicable à partir de cette même date. Les partenaires sociaux encadrent le recours au télétravail régulier dans les entreprises de la branche. Branche des organismes de tourisme : accord n° 44 du 13 septembre 2024 applicable depuis le 13 octobre 2024. Les partenaires sociaux fixent les règles encadrant le recours au télétravail régulier, occasionnel ou à destination de certaines catégories de salariés dans les entreprises de la branche.
Indemnités de licenciementBranche du commerce à distance : avenant du 24 juin 2024 applicable à compter du lendemain de la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux modifient le montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement des ouvriers et des employés.
Champ d’application professionnel Branches des entreprises de transport en navigation intérieure : avenant n° 1 du 3 octobre 2024 applicable à compter de sa signature. Les partenaires sociaux réécrivent le champ d’application professionnel de la convention collective nationale.  
  Durée du travail  Branche du commerce à distance : avenant du 24 juin 2024 applicable depuis le 1er novembre 2024. Les partenaires sociaux définissent les règles relatives à l’aménagement du temps de travail sur l’année. Branche des organismes de tourisme : avenant n° 1 du 17 septembre 2024 applicable à compter du 1er jour ouvrable suivant la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux précisent la durée minimale quotidienne de travail effectif.  
  Statut particulierBranche des centres sociaux et socioculturels : avenant n° 04-24 du 24 septembre 2024 applicable à compter du 1er janvier 2025, sous réserve de son extension. Les partenaires sociaux créent un statut particulier pour les assistants maternels.

Marie-Aude Grimont avec l’équipe du Dictionnaire permanent Conventions collectives