NÉGOCIATION COLLECTIVE

Partage de la valeur : un projet d’accord ouvert à signature jusqu’au 22 février

13/02/2023

Lors de la séance conclusive, les partenaires sont parvenus, vendredi 10 février, à un projet d’accord national interprofessionnel (ANI). A la clef, une généralisation partielle d’un dispositif de partage de la valeur pour les entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et 50 salariés et l’obligation de négocier une clause en cas de de superprofits pour les sociétés de plus de 50 employés.

A l’issue d’une séance de travail de plus de 10 heures, entrecoupée de plusieurs interruptions, les partenaires sociaux, réunis au siège du Medef (à l’exception de la CGT qui assistait aux discussions en visioconférence), sont parvenus, vendredi 10 février dans la soirée, à un compromis sur le partage de la valeur. Plusieurs versions du texte ont circulé tout au long de la journée pour aboutir à un projet d’accord national interprofessionnel (ANI) dense et technique, comprenant 36 articles (lire le document en pièce jointe).

Le texte est désormais soumis à signature jusqu’au 22 février. Le temps que les différentes organisations syndicales consultent leurs instances dirigeantes pour arrêter leur décision.

“Un sujet majeur pour les salariés”

“On arrive à un document qui fait l’inventaire d’un certain nombre de solutions qui se veulent pragmatiques, adaptées réellement aux réalités économiques des entreprises sous toutes ses dimensions”, s’est félicité Hubert Mongon, chef de file de la délégation patronale, en fin de journée.

“Pour obtenir un accord sur un sujet aussi sensible, il fallait évidement que chacun arrive avec ses propositions et ses lignes rouges et que chacun puisse bouger”, a complété Eric Chevée, vice-président de la CPME.

Généralisation partielle de la participation

Pour déminer les obstacles, des concessions ont été faites dans les deux camps.

Le Medef a fait quelques avancées en direction des organisations syndicales, en acceptant, vendredi matin, le principe d’une généralisation partielle de l’épargne salariale dans les petites structures. Les structures d’au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés doivent mettre en place, avant le 1er janvier 2025, un dispositif légal de partage de la valeur dès lors qu’elles réalisent un bénéfice net fiscal positif au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant trois années consécutives. Ce dispositif peut prendre la forme d’une prime de participation, d’intéressement, de prime de partage de la valeur voire d’un abondement à un PEE (plan d’épargne entreprise), PEI (plan d’éparge interentreprises) ou PER (plan d’épargne retraite).

Selon le texte, les entreprises peuvent s’appuyer soit sur un accord de branche professionnelle – les branches ont l’obligation d’ouvrir une négociation ad hoc avant le 30 juin 2024 – ou négocier un accord d’entreprise, voire opter pour une décision unilatérale. Dans tous les cas, les employeurs peuvent déroger au calcul de la formule légale de participation, avec, à la clef, un “résultat inférieur”. Il s’agirait d’une expérimentation de cinq ans. Un bilan de mise en œuvre serait conduit avant la fin de cette échéance pour “mesurer l’impact de cette mesure”.

Les entreprises de moins de 11 salariés ne sont pas concernées par cette obligation mais peuvent s’appuyer sur l’accord de branche ou négocier leur propre accord.

Autre avancée : le Medef est revenu sur son idée d’abaisser le forfait social à 10 %. Un point dur pour les syndicats. Et appelle uniquement à le “simplifier”. Le texte ne fait plus état non plus d’un possible versement de trois primes de partage de la valeur par an mais de deux, pour “éviter de cannibaliser les augmentations salariales”, selon FO.

Nouveaux cas de déblocage de la participation

Enfin, le texte instaure de nouveaux cas de déblocage de la participation. Outre la rénovation énergétique de la résidence principale et les dépenses engagées en tant que proche aidant, le texte prévoit également la possibilité de débloquer l’épargne pour l’acquisition d’un véhicule “propre”, hybride ou électrique, neuf ou d’occasion.

Surtout le camp patronal a abattu une dernière carte, en début de séance, pour prendre en compte les “superprofits” en ajoutant dans l’avant-dernière version du texte, une clause spécifique, intégrée aux accords de participation et d’intéressement, visant à prendre en compte les résultats, réalisés en France et présentant un “caractère exceptionnel“. Lequel doit être défini par l’employeur. Une telle situation déclencherait soit un versement d’intéressement, de participation complémentaire, d’un abondement au PEE ou au PER.

Des avis contrastés

Des mesures suffisantes pour recueillir l’aval des partenaires sociaux ? “Les changements sont assez importants, note Karen Gournay (FO). A ce stade, on peut se satisfaire de l’évolution de cette dernière mouture. Le texte ne répond pas à l’intégralité des demandes de départ mais il remplit un rôle à condition qu’il soit repris par le travail parlementaire”.

Pour Luc Mathieu de la CFDT, l’avis n’est “pas défavorable” car il y a “quelques avancées”,à commencer par “un texte interprofessionnel normatif, une première depuis longtemps”. Mais il reste réservé sur l’absence de prise en compte de sa revendication principale, à savoir “limiter la propagation du virus de la prime de pouvoir d’achat” aux seules entreprises de moins de 11 salariés.

De même, la CFTC reste “mitigée”. Elle déplore le maintien des règles de franchissement du seuil de 50 salariés conduisant à la mise en place obligatoire de la participation. Actuellement, pour déclencher cette obligation, l’effectif de l’entreprise doit avoir été supérieur à 50 salariés chaque année sur cinq ans consécutifs. Autrement dit, une variation de l’effectif sur une année remet le compte des années à “zéro”. Pour Imane Harraoui, la cheffe de file CFTC, ce décompte est trop réducteur pour généraliser plus rapidement le dispositif de la participation dans les TPE. La confédération chrétienne demandait que le seuil des 50 salariés soit apprécié en moyenne sur cinq ans et non calculé sur cinq années consécutives.

La CFTC note toutefois des avancées, à l’instar de la prise en compte de nouveaux cas de déblocage anticipé de la participation, l’engagement inscrit “noir sur blanc” que le versement d’une prime d’intéressement ou de participation ou de PPV (prime de partage de la valeur) ne se substitue pas à des augmentations de salaire et l’intégration d’au moins un critère de RSE (responsabilité sociale et environnementale) dans le cadre d’un accord sur l’intéressement.

Selon le Medef, l’accord devrait toutefois être majoritaire. Au total, “la CFDT et FO ont donné un avis favorable” tandis que “la CFTC et la CFE -CGC ont émis des réserves”. La CGT, quant à elle, ne devrait pas signer.

“Démocratie sociale”

Au-delà, la signature d’un tel texte pourrait toutefois représenter une petite victoire pour les partenaires sociaux. “On était tous d’avis qu’on préférait traiter cette affaire entre nous”, a insisté Eric Chevée. D’ailleurs, ils ont évacué, dès le début des discussions, commencées en novembre, le principe d’un “dividende salarié”, une notion chère au gouvernement, mais jugés “inadaptée” voire “vaporeuse”, pour lui préférer l’expression de “dividende du travail”. Un terme qui désigne dans le code du travail “l’intéressement, la participation et l’épargne salariale”.

Plusieurs initiatives politiques ont, il est vrai, joué les trouble-fêtes. Et mis une pression supplémentaire sur les négociateurs. La commission des finances de l’Assemblée nationale avait annoncé, le 12 janvier, une mission d’information sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise. En parallèle, Renaissance, le parti présidentiel, avait indiqué qu’il prévoyait de faire voter une loi au printemps, qui imposerait une participation généralisée dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Au point que Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, a qualifié cette négociation “d’impossible” le 18 janvier, critiquant l’attitude du gouvernement et des membres du parti Renaissance qui ont annoncé “les résultats avant la fin”.

Pour déjouer ces pronostics, les organisations patronales et syndicales ont donc cherché à mener “jusqu’au bout” cette négociation.

“Le fait d’ouvrir à la signature cet accord avec un engagement favorable d’une majorité d’organisations démontre que nous avons repensé la façon dont on pilote la démocratie sociale dans notre pays depuis l’accord du 14 avril sur le paritarisme”, insiste Eric Chevée.

“Dans le contexte social particulièrement complexe de notre pays, cette négociation paritaire interprofessionnelle importante démontre l’efficacité du dialogue social (…) et témoigne de notre capacité à faire vivre cet accord sur paritarisme”, abonde Hubert Mongon.

Garde-fou en cas de transposition de l’accord

Le projet d’accord prévoit, à ce titre, un dernier garde-fou à l’attention des pouvoirs publics en cas de transposition de l’accord. L’article 35 insiste pour que dispositions réglementaires soient en ligne avec les dispositions du texte. “A cet effet un comité de suivi de la mise en œuvre du présent accord par les pouvoirs publics est constitué pour une durée de deux ans à compter de sa signature”.

Sans attendre toutefois le résultat de la consultation des partenaires sociaux, Renaissance a annoncé l’organisation d’une convention sur le partage de la valeur qui se déroulera le 20 février, mais dont les premières concertations commenceront dès lundi.

La balle est désormais dans le camp de l’exécutif.

Anne Bariet

Le baromètre des branches de janvier 2023

13/02/2023

Quelles ont été, en janvier 2023, les nouvelles dispositions applicables dans les branches professionnelles ? Notre tableau fait le point.

Grâce au travail de veille de l’équipe du Dictionnaire Permanent Conventions collectives des Éditions Législatives (Lefebvre Dalloz), société éditrice d’actuEL-CSE.fr, nous vous proposons chaque mois un rendez-vous thématique consacré aux branches professionnelles.

Il n’est pas question pour nous d’être exhaustif sur ce sujet, mais de vous signaler, au travers des arrêtés d’extension parus au Journal officiel qui rendent obligatoires des dispositions pour toutes les entreprises d’une branche, ainsi qu’au travers d’accords récents, quelques tendances dans l’activité conventionnelle.

► CCN : convention collective nationale

► IDCC : identifiant des conventions collective. C’est un numéro de 1 à 4 chiffres sous lequel une convention collective est enregistrée.

  Baromètre des branches de janvier 2023
Volume des textes parus au Journal officiel relatifs aux branches professionnelles  49 accords élargis/étendus, dont 24 au moins partiellement relatifs aux salaires, sont parus au Journal officiel du 1er au 31 janvier 2023. Une fois étendus ou élargis, les accords et avenants deviennent obligatoires pour tous les employeurs, généralement le lendemain de la date de la publication de l’arrêté au Journal officiel.  Exemples d’accords ou avenants étendus ou agréés : – un texte relatif à l’allongement de la durée d’application de l’activité partielle de longue durée (APLD) signé dans la branche des industries du cartonnage (IDCC 489, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à l’allongement de la durée d’application de l’APLD et à l’augmentation de l’indemnisation signé dans la branche des industries textiles (IDCC 18, voir l’arrêté) ; – un texte relatif à la modification du dispositif de cessation anticipée d’activité liée à la pénibilité dans les métiers portuaires signé dans la branche des ports et manutention (IDCC 3017, voir l’arrêté).
Activité partielle de longue durée (APLD)  Des mesures exceptionnelles ont été prises pour faire face à l’épidémie de Coronavirus, notamment l’activité partielle de longue durée (APLD). Les accords mettent en œuvre ou prolongent l’APLD. Elle permet, sous réserve notamment de la conclusion d’un accord d’entreprise, d’établissement ou de branche étendu, de diminuer l’horaire de travail des salariés. Ces derniers perçoivent une indemnité plafonnée à 4,5 SMIC et fixée en pourcentage de leur rémunération brute (lire notre article). Branche de la récupération : avenant n°1 du 21 novembre 2022 applicable à partir de cette date jusqu’au 31 décembre 2026. Les partenaires sociaux prévoient un allongement de la durée d’application du dispositif. Branche de l’habillement : avenant du 7 décembre 2022. Les partenaires sociaux prévoient un allongement de la durée d’application du dispositif. Branche de la charcuterie de détail : avenant n° 48 du 7 décembre 2022 applicable jusqu’au 31 décembre 2024. Les partenaires sociaux prévoient un allongement de la durée d’application du dispositif. Branche de la chimie : accord du 17 novembre 2022, applicable jusqu’au 31 décembre 2022. Les partenaires sociaux reconduisent le dispositif jusqu’au 30 juin 2023.
Congés exceptionnels  Branche des bureaux d’études techniques : accord du 13 décembre 2022 applicable à compter du 1er jour du mois civil suivant la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux prévoient un nouveau congé en cas d’interruption spontanée de grossesse. Branche de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie : avenant n°2 du 15 septembre 2022 applicable depuis le 1er janvier 2023. Les partenaires sociaux améliorent les congés exceptionnels pour événements familiaux (décès d’un enfant, annonce de la survenue d’un handicap chez l’enfant, mariage/naissance/adoption d’un enfant).
Durée du travail  Branche des bureaux d’études techniques : – avenant n° 2 du 13 décembre 2022 applicable à compter du 1er jour du mois suivant la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux étendent le bénéfice du forfait annuel en jours aux salariés relevant au minimum de la position 2.3 de la grille de classification ; – avenant n° 3 du 13 décembre 2022 applicable à compter du 1er jour du mois suivant la date de publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux complètent les dispositions sur le travail le dimanche et les jours fériés, et majorent le salaire applicable aux cadres sous forfait annuel en jours.   Branche des fleuristes, vente et services des animaux familiers : avenant du 3 novembre 2022 applicable à compter du 1er jour suivant la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux réécrivent les règles relatives à la contrepartie de la prise du repos hebdomadaire par roulement.   Branche de la récupération : accord du 29 septembre 2022 applicable à compter du 8 décembre 2022. Les partenaires sociaux mettent en œuvre le régime du forfait annuel en jours.  
Télétravail  Branche des bureaux d’études techniques : accord du 13 décembre 2022 applicable à compter du 1er jour du mois civil suivant la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux fixent le cadre du recours au télétravail dans les entreprises de la branche.
  CDI d’opération    Branche du tourisme : avenant n° 1 du 15 novembre 2022 applicable pour 5 ans à compter du lendemain de la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux renouvellent le dispositif du contrat à durée indéterminée d’opération.
Primes  Branche des centres de lutte contre le cancer : décision unilatérale de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer du 5 novembre 2021. La fédération instaure une indemnité forfaitaire mensuelle “Ségur 2” au 1er janvier 2022 au bénéfice des personnels non-praticiens par décision unilatérale applicable à ses seuls adhérents. Branche des industries et commerces en gros de viandes : avenant n° 95 du 29 novembre 2022 : Les partenaires sociaux instaurent une prime de panier.
  Abrogation de conventions collectives territoriales au profit d’une CCN unique  Branche de la métallurgie : les conventions collectives régionales, départementales ou territoriales suivantes sont abrogées :  – Drôme et Ardèche : avenant du 9 juin 2022 ; – Finistère : avenant du 26 avril 2022.
Elargissement de champ d’application de CCN  Branche du cartonnage : avenant n° 2 du 29 novembre 2022 applicable à compter du 1er jour du mois suivant la publication au Journal officiel de son arrêté d’extension. Les partenaires sociaux élargissent le champ d’application professionnel de la CCN.

Marie-Aude Grimont, avec l’équipe du Dictionnaire permanent Conventions collectives

Partage de la valeur : la mise en garde de la CPME

14/02/2023

Selon un communiqué publié hier, la CPME se “réjouit” de la conclusion positive de la négociation ouverte entre les partenaires sociaux sur le partage de la valeur dans l’entreprise.

“Les partenaires sociaux font ainsi la preuve de leur capacité à trouver des accords dans l’intérêt des entreprises et de leurs salariés, en se focalisant sur des enjeux fondamentaux pour tous”, y compris dans les entreprises employant entre 10 et 50 salariés.

La CPME, qui soumettra le texte cette semaine à ses instances, a d’ores et déjà donné un “avis favorable”. Elle précise toutefois que cet accord devra être “respecté tant par le gouvernement que par le Parlement”. “Dans le contexte de tension sociale que connait actuellement notre pays, ceux qui s’aviseraient de dénaturer cet accord prendraient une lourde responsabilité”.

Source : actuel CSE

Les 12 points clefs du projet d’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur

15/02/2023

Le projet d’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur vise notamment à généraliser les dispositifs tels que l’intéressement, la participation et les primes de partage de la valeur à toutes les entreprises de plus de 11 salariés et prévoit l’obligation pour les sociétés de plus de 50 employés de négocier une clause en cas de superprofits. Le détail des dispositions.

27 pages, 36 articles : le projet d’accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur, finalisé vendredi dernier et soumis à signature jusqu’au 22 février, tend à “rendre plus accessibles” les dispositifs d’épargne salariale et à “poursuivre la simplification des dispositifs d’intéressement, de participation et d’actionnariat salarié” tout en renforçant leur “attractivité”.  

Surtout, il prévoit des mesures coercitives. D’une part, pour les branches professionnelles, l’obligation d’ouvrir, d’ici le 30 juin 2024, une négociation permettant aux entreprises de moins de 50 salariés de mettre en place un dispositif de participation facultatif.

D’autre part, l’obligation pour les structures dont l’effectif est compris entre 11 et 50 salariés d’instaurer, avant le 1er janvier 2025, un dispositif légal de partage de la valeur dès lors qu’elles réalisent un bénéfice net fiscal positif au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant trois années consécutives. Et l’obligation de négocier une clause en cas de superprofits pour les sociétés de plus de 50 employés. Le détail de l’accord.

1- Le dividende salarié écarté

D’emblée, les parties signataires ont écarté la notion de “dividende salarié” jugée “inadaptée” et “source de confusions”, pour lui préférer le terme de “dividende du travail”. Une expression qui désigne dans le code du travail “l’intéressement, la participation et l’épargne salariale”.

2- La BDESE s’étoffe

Pour répondre à une demande de la CFE-CGC, la BDESE (base de données économiques, sociales et environnementales) s’enrichit d’informations sur la stratégie fiscale de l’entreprise, notamment la déclaration publique “pays par pays” telle que prévue par la directive (UE) n°2021/2101 du Parlement et du Conseil du 24 novembre 2021 sur la communication d’informations relatives à l’impôt sur les revenus des sociétés, pour certaines entreprises et succursales. Ces informations peuvent être transmises au comité de groupe et au comité d’entreprise européen.

3- Généralisation partielle de l’épargne salariale dans les entreprises de moins de 50 salariés

Ce sont deux points normatifs du projet d’accord. Pour encourager le développement de la participation dans les petites structures, le texte acte le principe d’une généralisation partielle de l’épargne salariale dans les petites entreprises. Les structures d’au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés doivent mettre en place, avant le 1er janvier 2025, un dispositif légal de partage de la valeur dès lors qu’elles réalisent un bénéfice net fiscal positif au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant trois années consécutives. Ce dispositif peut prendre la forme d’une prime de participation, d’intéressement, de prime de partage de la valeur voire d’un abondement à un PEE, PEI ou PER. Les sommes versées dans ce cadre ouvrent droit au régime social et fiscal de la participation.

Pour les y aider, elles peuvent s’appuyer soit sur un accord de branche professionnelle – les branches ont, à ce titre, l’obligation d’ouvrir une négociation ad hoc avant le 30 juin 2024 – ou négocier un accord d’entreprise, voire d’opter pour une décision unilatérale. Dans tous les cas, les employeurs peuvent déroger au calcul de la formule légale de participation, avec, à la clef, un “résultat inférieur”.

Il s’agirait d’une expérimentation de cinq ans. Un bilan de mise en œuvre serait conduit avant la fin de cette échéance pour “mesurer l’impact de cette mesure”. Le texte précise que le ministère du travail effectuera un suivi annuel des accords dans les entreprises de moins de 50 salariés.

À noter : les entreprises déjà couvertes par un accord de participation conclu au niveau de l’entreprise ne peuvent mettre en place une formule dérogatoire, sauf à négocier un nouvel accord.

4- Prendre en compte les superprofits

Autre mesure coercitive : le projet d’accord se penche sur les “superprofits” en ajoutant dans le texte, une clause spécifique, intégrée aux accords de participation et d’intéressement, visant à prendre en compte les résultats, réalisés en France et présentant un “caractère exceptionnel”. Lequel doit être défini par l’employeur. Une telle situation déclencherait soit un versement d’intéressement, de participation complémentaire, d’un abondement au PEE ou au PER.

Dans les entreprises déjà couvertes par un accord d’intéressement ou de participation, une négociation doit s’ouvrir avant le 30 juin 2024.

5- Le franchissement des seuils

Actuellement, pour déclencher la mise en place obligatoire de la participation, l’effectif de l’entreprise doit avoir été supérieur à 50 salariés chaque année sur cinq ans consécutifs. Autrement dit, une variation de l’effectif sur une année remet le compte des années à “zéro”. Les organisations syndicales, notamment la CFTC, voulait changer cette règle mais elles n’ont pas obtenu gain de cause. Les règles restent ici inchangées.

Seule concession du camp patronal : le texte prévoit de supprimer la règle reportant de trois ans l’obligation de participation en présence d’un accord d’intéressement.

6- Octroi d’au plus deux PPV chaque année

Plusieurs fois modifiées, l’article 10 envisage la pérennisation de la prime de partage de la valeur (PPV), en dessinant un nouveau cadre légal et réglementaire. Le texte donne la possibilité de placer la PPV dans un plan d’épargne salariale ou retraite et permet à l’employeur d’abonder le plan d’épargne, selon les modalités en vigueur pour l’intéressement. Par ailleurs, le texte fait état de l’octroi d’au plus deux PPV chaque année, dans la limite du plafond et du nombre de versements actuellement prévus. Et acte le maintien du régime fiscal et social en vigueur au 1er janvier 2023 pour les entreprises de moins de 50 salariés, à compter du 1er janvier 2024.

Pour les entreprises de plus de 50 employés, le cadre prévu par la loi Pacte du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est maintenu.

7- Simplification du forfait social

La baisse du forfait social était une ligne rouge pour l’ensemble des organisations syndicales ; le Medef a fait marche arrière et appelle uniquement à le “simplifier”.

8- Possibilité de verser des avances périodiques pour la participation

Actuellement, si l’employeur accepte, le salarié peut percevoir en cours d’année une avance sur son intéressement. Mais cette pratique n’est pas autorisée pour la participation. Les signataires souhaitent donc étendre cette option à la participation afin de “soutenir le pouvoir d’achat des salariés”.

9- Des critères RSE dans les accords d’intéressement

Sans l’imposer, le texte encourage l’introduction d’au moins un critère non financier dans les accords d’intéressement et invite le législateur à compléter l’article ad hoc du code du travail (L 3314-2). L’objectif est ici d’”utiliser l’intéressement comme un levier de performance sociale et environnementale”.

10- Promouvoir le dispositif d’intéressement de projet

Afin d’étendre le bénéfice des instruments de partage de la valeur au plus grand nombre de salariés, le texte ouvre la voie à un intéressement de projet qui doit permettre “aux entreprises faisant largement appel à la sous-traitance d’inclure l’ensemble des salariés des entreprises concernées dans leurs dispositifs”. Jusqu’ici, ce mécanisme existait, depuis 2006, mais uniquement sur un projet interne, sans intégrer des prestataires extérieurs.

11- Création de “plans de partage de la valorisation de l’entreprise”

Parmi les nouveautés, le projet d’accord se penche sur l’actionnariat salarié et donne la possibilité aux entreprises non cotées d’ouvrir “un plan dit Plan de partage de la valorisation avec les salariés” avec l’attribution d’un “montant indicatif” à l’embauche, avec au bout de trois ans, le versement “d’un montant correspondant au pourcentage de valorisation de l’entreprise appliqué à ce montant indicatif” pour permettre “au salarié d’être très directement intéressé à la valorisation de l’entreprise et pas seulement à ses résultats”.

Le texte précise que cette somme peut être versée en plusieurs fois et invite l’administration à effectuer un “bilan de mise en œuvre” dans les trois ans suivant la signature de cet accord.

En outre, les parties signataires préconisent d’ouvrir une plus grande portion du capital aux salariés, en augmentant “le plafond global d’attribution d’AGA (actions gratuites) lorsque le plan d’AGA est offert à tous les salariés : ce plafond serait ainsi désormais fixé à 40 % du total du capital de l’entreprise au lieu des 30 % actuellement en vigueur.

12. De nouveaux cas de déblocage anticipé pour la participation

Enfin, le texte instaure trois nouveaux cas de déblocage de la participation. Outre la rénovation énergétique de la résidence principale et les dépenses engagées en tant que proche aidant, le texte suggère également la possibilité de débloquer l’épargne pour l’acquisition d’un véhicule “propre”, hybride ou électrique, neuf ou d’occasion.

Anne Bariet

Partage de la valeur : la CFDT et la CFTC signent l’accord national interprofessionnel

16/02/2023

La CFDT et la CFTC ont annoncé, hier, qu’elles seraient signataires de l’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur, finalisé le 10 février.

Parmi les motifs de satisfecit, la CFDT met en avant l’obligation pour les branches professionnelles de négocier un dispositif de participation et pour les entreprises de 11 à 50 salariés d’instaurer un dispositif de partage de la valeur à partir d’un certain seuil de bénéfices.

La CFDT approuve également l’obligation pour les branches retardataires de réviser leurs systèmes de classification avant la fin de l’année 2023 et la volonté de valoriser les dispositifs de responsabilité sociale des entreprises, à travers deux fonds d’épargne responsables. L’article 32 de l’accord prévoyant que les “gestionnaires de fonds proposent dans les PEE et les PER au moins deux fonds qui prennent en compte des critères extra-financiers (par exemple, fonds labellisés ISR, Greenfin, Finansol, CIES ou France Relance)”.

Au-delà, pour la CFDT, “cet accord normatif démontre l’utilité du dialogue social et l’efficacité du paritarisme”. Les organisations patronales et syndicales ont jusqu’au 22 février pour se prononcer.

De son côté, tout en jugeant le texte “pas aussi ambitieux que la situation du pays ne l’exige”, la CFTC estime que l’accord “permettra de rendre obligatoire des négociations dans les branches pour mettre en place des dispositifs de participation dans les entreprises de moins de 50 salariés”. C’est pour le syndicat chrétien “une avancée non négligeable”.

La confédération rappelle que l’ANI précise que les dispositifs de partage de la valeur (prime, intéressement, participation) ne sont en aucun cas des “substituts au salaire”, et elle se réjouit de voir apparaitre dans le texte des points qu’elle a défendus, notamment sur “les conditions de déblocage de l’épargne salariale, afin que celle-ci s’adapte aux nouveaux défis (environnement, dépendance)”.

Enfin, “les personnes – souvent des femmes – en temps partiels pour des motifs familiaux (grossesse, parentalité, aidants) ou thérapeutiques pourront jouir également de ces dispositifs de partage de la valeur”.

Source : actuel CSE