Allégements de cotisation sociales, apprentissage : les principales mesures du budget pour 2025

14/10/2024

Bercy a dévoilé le 10 octobre le contenu des projets de loi de finances (PLF) et de financement de la sécurité sociale (PFLSS) pour 2025. Les restrictions budgétaires rendues nécessaires par l’aggravation du déficit public entraîneront une baisse de certaines aides aux entreprises, notamment celles liées à l’apprentissage et des allègements de cotisations sociales qui seront rationalisés.

On pourra dire que ce budget aura été attendu. Ficelé en deux semaines par le nouveau gouvernement, en “un temps record” selon les propos mêmes du ministre de l’économie, Antoine Armand, il est amené à évoluer. “Le projet de loi de finances est évidemment perfectible et aux mains des parlementaires” dans le cadre d’un débat que le ministre de l’économie “espère sincère et constructif”. Le gouvernement lui-même le complètera par le dépôt d’amendements. Il faut dire que le défi est de taille pour le gouvernement Barnier : “La dette publique [est] colossale”, reconnaît Antoine Armand. Et elle “n’est pas seulement une question financière mais aussi politique qui concerne tous les Français”, la France étant “le troisième pays le plus endetté de la zone euro”. 

Des prélèvements exceptionnels sur les entreprises

L’effort demandé sera partagé par tous, insiste-t-on à Bercy. Aux entreprises d’abord qui “ont été soutenues pendant les crises et au cours des sept dernières années”, comme le rappelle Antoine Armand. Le projet de loi de finances prévoit ainsi un prélèvement exceptionnel temporaire en 2025 pour les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 1Md€. Le texte prévoit deux niveaux d’imposition : 

  • pour un chiffre d’affaires compris entre 1 et 3 Md€ : 20,6 % de l’impôt sur les sociétés (IS) dû au titre de 2024 ; 
  • pour un chiffre d’affaires supérieur à 3Md€ : 41,2 % de l’IS dû au titre de 2024.

Cette contribution exceptionnelle sera réduite de moitié en 2026 et prendra fin en 2027.

L’Etat participera également à cet effort qui doit conduire à un redressement de 60 milliards d’euros, soit 2 points de PIB pour ramener le déficit à 5 % l’an prochain. Cet effort sur les dépenses publiques sera partagé entre les ministères à hauteur de 40Md€, et 20Md€ porté par les contributions fiscales (sur ces estimations, lire notre encadré).

Sur les 2 200 suppressions de postes annoncées, environ 1 000 concerneront le ministère du travail dont 500 équivalents temps plein (ETP) chez France Travail. “La politique de l’offre a porté ses fruits et le chômage a beaucoup baissé donc France Travail a besoin de moins de personnes pour les accompagner”, explique le locataire de Bercy. Ce qui n’est pas sans poser question alors que les bénéficiaires du RSA seront tous inscrits à France Travail à compter du 1er janvier 2025. L’organisme bénéficiera toutefois “d’une stabilisation de la subvention pour charge de service public à 1,35 Md€ et d’un accroissement de + 0,16 Md€ de la contribution de l’Unédic”, précise le dossier de presse de Bercy.

Les primes à l’apprentissage révisées

Côté social, plusieurs mesures sont envisagées dans le projet de loi de finances (PLF) et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. A commencer par les aides à l’apprentissage. Ces dernières “seront ajustées” sans toutefois “grever la dynamique”, assure Laurent Saint-Martin, le ministre délégué au budget. Elles feront l’objet d’adaptations par la voie réglementaire, pour des économies de l’ordre de 1,2Md€, estime la ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet.

Si aucune décision n’est encore arbitrée, la prime pourrait passer de 6 000 à 4 500 euros. Une enveloppe de 3,5 Md€ est d’ores et déjà prévue à cet effet. Reste à savoir si le bénéfice de la prime tiendra compte du critère du niveau de qualification, de celui la taille de l’entreprise ou du critère de simplicité. Là encore, rien n’est décidé.

Comme nous l’avions indiqué, le seuil d’exonération de cotisations sociales des apprentis passera de 79 % à 50 % du Smic et ces derniers seront assujettis à la CSG et à la CRDS dès lors que leur rémunération se situe au-delà de 50 % du Smic. Pour éviter “une perte de rémunération nette” notamment pour les salaires les plus bas, le ministère du travail assure que le barème de rémunération sera réévalué. 

Les allègements de cotisations sociales rationalisés

S’agissant des allégements généraux de cotisations, Bercy confirme nos informations. Les allègements de cotisations sociales seront révisés afin d’éviter l’effet “trappes à bas salaire”. L’objectif est “d’inciter les employeurs à rehausser les salaires” et d’aller vers une “désmicardisation”, thème cher à l’ancien Premier ministre, Gabriel Attal. Cette révision se fera en deux temps afin “de permettre aux entreprises de s’adapter”, indique la ministre du travail. 

Les exonérations de cotisations patronales baisseront ainsi au niveau du Smic, de 2 points en 2025 et de 2 points supplémentaires en 2026 jusqu’à 1,3 Smic. Elles seront ensuite renforcées entre 1,3 et 1,8 Smic et baisseront ensuite jusqu’à 3 Smic.

Avant la fusion des trois dispositifs de réduction de cotisations, des modifications sont envisagées à compter de 2025 :

  • le montant maximal d’exonération de la réduction générale serait diminué de 2 points ;
  • la réduction du taux de cotisations patronales maladie visera les salariés dont la rémunération ne dépasse pas 2,2 Smic, contre 2,5 actuellement ;
  • la réduction du taux de cotisations patronales allocations familiales concernera les salariés dont la rémunération ne dépasse pas 3,2 Smic, contre 3,5 actuellement.

Par ailleurs, la prime de partage de la valeur (PPV) sera prise en compte dans l’assiette de calcul de la réduction générale de cotisations sociales. Cette intégration s’appliquera aux primes versées à compter du 10 octobre 2024, indique le dossier de presse de Bercy.

La suppression des emplois francs

Toujours dans un souci d’économies budgétaire, les emplois francs vont être supprimés faute d’avoir fait leurs preuves. L‘évaluation par la Dares en 2023 avait mis en lumière “des effets d’aubaine dans 80% des cas”, explique-t-on au ministère du travail. Ce dispositif avait été prolongé jusqu’au 31 décembre 2024. Il s’éteindra donc à cette date.

Une baisse du plafond des indemnités journalières de sécurité sociale

Le montant du plafond pour le calcul des indemnités journalières est actuellement de 1,8 Smic. Il sera abaissé à 1,4 Smic. Astrid Panosyan-Bouvet n’entend pas se contenter de cette mesure technique et veut “mettre sur la table les conditions de travail, l’absentéisme…”.

L’incertitude sur les évolutions en matière de retraite

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 ne contient actuellement aucune disposition sur les retraites. Et pour cause, la balle est pour l’heure dans le camp des partenaires sociaux à qui la ministre du travail vient d’adresser un courrier pour une réouverture de la négociation sur l’assurance chômage et l’emploi des seniors (lire notre article dans l’édition du jour). Des mesures pourront toutefois être introduites dans le PLFSS par la voie d’amendements. 

Une certitude toutefois, comme précédemment annoncé, les pensions de retraite resteront indexées sur l’inflation mais avec un décalage de six mois (soit une revalorisation en juillet au lieu de janvier).

Davantage d’impôts que de réduction de dépenses ?
Le gouvernement soutient qu’il va réduire le déficit public de 60 Md€, pour deux-tiers grâce à des économies de dépenses (40 Md€) et pour un tiers grâce à des recettes nouvelles (20 Md€).

Dans son avis sur les projets de loi de finances (PLF) et de financement de la sécurité sociale (PLFSS), le Haut Conseil des finances publiques se montre critique, tant sur le montant total de l’effort annoncé de réduction du déficit en 2025, que de sa répartition affichée. 

Selon ses calculs, les ajustements prévus par le Gouvernement reposeront à 70 % sur des hausses de prélèvements obligatoires (30 Md€, soit un point de PIB) et à 30 % sur les dépenses (12 Md€, soit 0,4 point de PIB), pour un montant total de 42 Md€. Explication de cette différence : “Le chiffre de 40 Md€ représente l’effort de réduction des dépenses par rapport à une évolution tendancielle estimée à un niveau très élevé de + 2,8 % en volume, soit bien au-dessus de la croissance potentielle (+ 1,2 %) comme de la croissance effective (+ 1,1 %)”.

Le HCFP observe encore les 20 Md€ de prélèvements obligatoires affichés par le gouvernement ne tiennent pas compte de certaines mesures figurant dans le projet de budget (une partie de l’augmentation de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité par exemple), et, par ailleurs, que “la réduction des exonérations de cotisations employeurs, ordinairement classifiée en hausse de recettes et de prélèvements obligatoires, est ici affichée comme une réduction de dépenses”.

Enfin, le Haut Conseil souligne les effets récessifs des mesures annoncées par le gouvernement, qui pourraient donc entraîner une moindre croissance que celle qui est prévue dans le budget (+1,1%) et qui paraît déjà faible. A l’inverse, le Haut Conseil estime “un peu élevée” la prévision d’inflation du gouvernement en 2025 (+ 1,8 %), “au regard de l’ampleur du mouvement de désinflation observé depuis le début de cette année”.

Florence Mehrez (encadré : BD)

Congé maternité : le dispositif légal de rattrapage salarial ne s’applique qu’à l’issue du congé

14/10/2024

Sauf accord collectif plus favorable, une salariée en congé de maternité ne bénéficie du dispositif légal de garantie d’évolution salariale qu’à l’issue de ce congé. C’est ce que précise la Cour de cassation dans un arrêt du 2 octobre 2024.

Par un arrêt du 2 octobre 2024, la Cour de cassation se prononce sur l’application du dispositif légal de garantie d’évolution salariale prévu au bénéfice des salariées reprenant le travail après un congé de maternité.

Un dispositif visant à neutraliser les conséquences financières du congé maternité

Ce dispositif, instauré par la loi du 23 mars 2006, est inscrit à l’article L.1225-26 du code du travail. Il vise à neutraliser les conséquences financières pour la salariée du congé de maternité. Il s’applique dans les conditions définies par un accord collectif de branche ou d’entreprise conclu à compter du 25 mars 2006 et au moins aussi favorables que le dispositif légal. A défaut, ce sont les modalités fixées par la loi qui s’appliquent.

Le dispositif prévu par l’article L. 1225-26 consiste à majorer la rémunération de la salariée des augmentations générales ainsi que de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant la durée du congé de maternité par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l’entreprise.

Dans cette affaire, en l’absence d’accord collectif applicable, les juges étaient saisis d’un litige relatif à l’application du dispositif légal.

Une augmentation générale accordée pendant le congé de maternité

En l’espèce, la salariée, estimant avoir été privée pendant son congé de maternité d’une augmentation de salaire de 300 euros accordée à l’ensemble des salariés dès février 2015, saisit la juridiction prud’homale afin de demander le paiement d’un rappel de salaire au titre de l’égalité de traitement et des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant d’une discrimination en raison de sa maternité. Elle reproche en effet à son employeur ne pas l’avoir augmentée de 300 euros pendant son congé de maternité, comme il le lui avait promis, et de ne lui avoir accordé cette augmentation qu’à l’issue de son congé de maternité.

La cour d’appel la déboute de sa demande. Elle retient que l’augmentation de 300 euros par mois promise par l’employeur lui a été accordée à l’issue de son congé de maternité, ce qui contredit son accusation d’inégalité salariale ou de discrimination en raison de sa maternité.

Une application stricte de la loi

La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir débouté la salariée de ses demandes.

Après avoir rappelé les termes de l’article L. 1225-26 du code du travail, la Haute Juridiction en déduit que, sauf accord collectif plus favorable, la majoration de la rémunération de la salariée qui en résulte n’est pas due pour la période du congé de maternité, durant laquelle le contrat de travail est suspendu. L’employeur n’est tenu de la verser qu’à l’issue de ce congé et pour la période postérieure à celui-ci.

La Cour de cassation, qui fait ici une application stricte des dispositions de l’article L. 1225-26 du code du travail qui sont d’ordre public (arrêt du 14 février 2018), rejoint la position retenue par l’administration dans une circulaire du 19 avril 2007 concernant l’application de la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes. Selon la circulaire, le rattrapage salarial est dû à compter du retour de la personne salariée dans l’entreprise après son congé de maternité ou d’adoption et doit être versé à la suite de ce congé. Lorsque la personne salariée concernée enchaîne un congé de maternité puis un congé parental d’éducation, ce n’est qu’à son retour dans l’entreprise que le rattrapage salarial pourra être appliqué. La question reste toutefois en suspens lorsque la salariée enchaîne un congé de maternité puis des congés payés.

Valérie Dubois

Top départ pour l’examen du PLF et du PLFSS pour 2025

14/10/2024

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 ont été mis en ligne.

Parmi les mesures annoncées jeudi 10 octobre : 

  • les modifications qui seront apportées aux exonérations de cotisations sociales à compter de 2025 figurent à l’article 6 du PLFSS pour 2025 ;
  • les mesures relatives à l’exonération de cotisations sociales et à la CSG/CRDS applicables aux apprentis sont prévues à l’article 7 du PLFSS ;
  • l’article 24 introduit des dispositions relatives à la réparation de AT/MP dans la foulée de l’accord des partenaires sociaux de juin 2024.

De nombreuses autres mesures annoncées jeudi seront prises par la voie réglementaire car ne supposant pas de modifications législatives préalable. 

La première partie du PLF pour 2025 sera examiné par la commission des finances de l’assemblée nationale du 16 au 21 octobre

L’examen du PLFSS pour 2025 débutera en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale le 21 octobre après l’audition des ministres concernés le 16 octobre.

Source : actuel CSE

Les attributions d’Astrid Panosyan-Bouvet sont précisées par décret

14/10/2024

Les décrets d’attribution des différents ministères ont été publiés vendredi 11 octobre au Journal officiel. 

Ainsi, en application du décret du 10 octobre 2024, Astrid Panosyan-Bouvet, la ministre du travail “prépare et met en œuvre la politique du gouvernement dans les domaines du travail, de l’emploi, de l’insertion professionnelle et économique, de l’apprentissage, de la formation professionnelle, du dialogue social et de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, ainsi que de l’assurance vieillesse”.

À ce titre, elle :

  • “prépare et met en œuvre les règles relatives aux conditions de travail, à la négociation collective et aux droits des salariés ;
  • est compétente pour la formation professionnelle des jeunes et des adultes, ainsi que pour la défense et la promotion de l’emploi, y compris la politique de retour à l’emploi et de l’insertion professionnelle et économique, notamment en matière de revenu de solidarité active. Il est chargé de la promotion et du suivi de l’innovation sociale en matière d’emploi ;
  • prépare et met en œuvre, conjointement avec le ministre de la santé et de l’accès aux soins, les règles relatives aux régimes et à la gestion des organismes de sécurité sociale, en matière d’accidents du travail et de maladie professionnelle ;
  • prépare et met en œuvre, en lien avec les autres ministres intéressés, la politique en matière de retraites. Il prépare et met en œuvre, conjointement avec le ministre de la santé et de l’accès aux soins, les règles relatives, en matière d’assurance vieillesse, aux régimes et à la gestion des organismes de sécurité sociale, ainsi qu’aux régimes complémentaires ;
  • est associée à l’élaboration et à la mise en œuvre des programmes de prévention et de lutte contre la pauvreté par le ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, pour les mesures concourant à l’insertion professionnelle et économique. Il participe, en lien avec les autres ministres intéressés, à l’action du Gouvernement en matière de minima sociaux, d’insertion sociale et d’innovation sociale ;
  • participe à l’action du gouvernement en matière de lutte contre la fraude”.

La ministre du travail et de l’emploi a autorité sur :

  • la direction générale du travail (DGT) ;
  • la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) ;
  • la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP).

Elle a également autorité, conjointement :

  • avec le ministre de la santé et de l’accès aux soins et le ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, sur le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales ; 
  • conjointement avec le ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, sur la direction générale de la cohésion sociale pour l’exercice de ses attributions relatives à l’insertion professionnelle et économique ;  
  • sur la direction de la sécurité sociale et la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, conjointement avec le ministre de la santé et de l’accès aux soins, le ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes et le ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.

La ministre du travail peut également solliciter, pour l’exercice de ses attributions, la direction générale de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), de la direction générale de l’enseignement scolaire et de la direction générale des collectivités locales, de la mission interministérielle de coordination anti-fraude, du secrétariat général et de la direction des affaires juridiques des ministères économiques et financiers ainsi que de la direction générale du Trésor, de la direction du budget pour ses attributions en matière de retraite et du secrétariat général du conseil d’orientation des retraites.

A noter, que le ministre des solidarités, Paul Christophe, est “chargé de promouvoir les mesures destinées à accroître les garanties d’égalité entre les femmes et les hommes dans les domaines politique, économique, professionnel, éducatif, social, sanitaire et culturel. A ce titre, il est associé, par les ministres compétents, à la préparation des mesures visant notamment à assurer l’égalité professionnelle et des rémunérations, et à lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Il coordonne et assure le suivi de la politique de lutte contre les violences conjugales, la prostitution et la traite des humains”.

Source : actuel CSE

CCFD Terre Solidaire et Sherpa publient la mise à jour du Radar devoir de vigilance

14/10/2024

Le 10 octobre, CCFD Terre Solidaire et Sherpa ont annoncé la mise à jour du Radar devoir de vigilance.

Ces deux organisations dénoncent “une opacité persistante” car aucune base de données publique ne permet d’accéder à des informations sur la structuration des groupes français et sur leurs effectifs salariés en France et dans le monde. Il n’est donc pas possible de savoir avec exactitude le nombre d’entreprises soumises à la loi sur le devoir de vigilance (*).

Selon les recherches menées par Datactivist, 279 entreprises au moins y seraient soumises. Dans leur communiqué, les associations indique que 57 n’auraient toujours pas publié le plan de vigilance exigé par la loi.

Par ailleurs, elles ont répertorié 7 nouvelles affaires cette année. Au total, 13 actions en justice ont été introduites depuis l’adoption de la loi en mars 2017 et 30 mises en demeures ont été envoyées.

 (*) Le devoir de vigilance oblige les entreprises donneuses d’ordre à prévenir les risques sociaux, environnementaux et de gouvernance liés à leurs opérations et aux activités de leurs filiales et de leurs sous-traitants et fournisseurs. 

Source : actuel CSE

Partage de la valeur : un “questions-réponses” sur les trois nouveaux cas de déblocage anticipé du PEE

15/10/2024

Depuis le 7 juillet 2024, les adhérents à un plan d’épargne entreprise (PEE) peuvent débloquer leur avoirs de façon anticipée grâce à trois nouveaux cas. Le ministère du travail en précise les contours dans un “questions-réponses” daté du 9 octobre 2024.

En principe, les avoirs acquis par les bénéficiaires d’un plan d’épargne entreprise (PEE) ne peuvent leur être délivrés avant l’expiration d’un délai minimum de cinq ans courant à compter de la date d’acquisition des titres (article L.3332-25 du code du travail).

A ce principe, quelques exceptions : quelle que soit leur origine (participation, intéressement, prime de partage de la valeur, versements volontaires, abondement de l’entreprise), les sommes affectées à un PEE peuvent être débloquées par anticipation dans les mêmes cas que la participation.

Jusqu’au 7 juillet 2024, il existait 10 cas de déblocage anticipé. Depuis cette date, trois nouveaux cas de déblocage viennent enrichir la liste réglementaire (articles R. 3332-28 et R. 3324-22 du code du travail) :

  • l’affectation à des travaux de rénovation énergétique de la résidence principale ;
  • l’achat d’un véhicule “propre” ;
  • l’activité de proche aidant exercée par le salarié, son conjoint ou son partenaire de Pacs auprès d’un proche.

► Finalisant la transposition de l’Accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur en entreprise conclu entre les partenaires sociaux le 10 février 2023, le décret du 5 juillet 2024 a créé ces trois nouveaux cas de déblocage anticipé.

Dans un “questions-réponses” diffusé sur son site internet le 9 octobre, le ministère du travail explicite ces nouvelles situations.

Les travaux de rénovation énergétique de la résidence principale

Le bénéficiaire d’un PEE peut solliciter le déblocage anticipé de ses avoirs lorsqu’il justifie de travaux de rénovation énergétique éligibles à l’éco-PTZ listés aux articles D.319-16 et D.319-17 du code de la construction et de l’habitation. Cette nouvelle possibilité de déblocage est ouverte aux travaux survenus à compter du 7 juillet 2024. La demande de déblocage doit être faite dans les six mois à compter de la survenance du fait générateur.

► En principe, le fait générateur pour la réalisation de travaux de rénovation énergétique de la résidence principale est la date de la facture des travaux. Mais l’administration admet que cela puisse être la date de l’acceptation du devis (QR n° 5), afin d’éviter à l’intéressé de faire l’avance des frais.

Quels travaux sont précisément visés, pour quels types de frais ? Faut-il faire appel à un professionnel ou le bénéficiaire peut-il solliciter ce déblocage lorsqu’il réalise lui-même ces travaux de rénovation ? L’administration répond à ces interrogations.

Travaux et frais visés

Les  types de travaux (au nombre de quatre) et les frais ouvrant droit à ce cas de déblocage anticipé des avoirs d’un PEE (QR n° 1 et n° 4) sont récapitulés dans le tableau suivant.

Attention ! La liste des travaux de rénovation énergétique éligibles au déblocage anticipé est limitative (QR n° 1).

Travaux de rénovation énergétique éligibles au déblocage anticipé (QR n° 1)
Types de travaux visésPrécisions
Travaux de rénovation permettant au logement d’améliorer sa performance énergétiqueIls doivent être fixés parmi les actions suivantes : isolation thermique de la toiture ;  isolation thermique des murs donnant sur l’extérieur ;  remplacement d’au moins la moitié des fenêtres en simple vitrage par du double vitrage et remplacement des portes donnant sur l’extérieur ;  isolation des planchers bas ;  installation ou remplacement d’un système de chauffage utilisant une source d’énergie renouvelable ;  installation d’équipements de production d’eau chaude sanitaire utilisant une source d’énergie renouvelable. 
Travaux ouvrant droit à une aide accordée par l’Agence nationale de l’habitat au titre de la lutte contre la précarité énergétiqueLes aides de l’Etat visées ici sont de deux types : MaPrimeRénov’ Parcours accompagné : cette aide, accessible quelle que soit l’étiquette énergétique du logement et quels que soient les revenus de l’intéressé, permet d’envisager des travaux de rénovation d’ampleur de la résidence principale ; MaPrimeRénov’ Parcours par gestes qui est attribuée, sous conditions de revenus, pour certains travaux réalisés dans des résidences principales occupées au moins huit mois par an et achevées depuis au moins 15 ans en métropole et deux ans en Outre-mer : attention, cette aide est également ouverte aux propriétaires bailleurs mais ils ne peuvent débloquer leurs avoirs à ce titre puisque leur logement n’est pas leur résidence principale.
Travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale du logementCes travaux doivent permettre d’atteindre une étiquette après travaux inférieure à 331 kWh/m2 par an sur les usages chauffage, refroidissement et production d’eau chaude sanitaire (étiquette E du DPE), et un gain énergétique d’au moins 35 %. Un audit énergétique réalisé par un diagnostiqueur qualifié doit être effectué au préalable pour déterminer les travaux nécessaires.
Travaux de réhabilitation de l’installation d’assainissement non collectifLe nouveau système ne doit pas consommer d’énergie et se conformer à des prescriptions techniques spécifiques.
Dépenses éligibles au déblocage anticipé (QR n° 4)
Frais visésPrécisions
Coût de la fourniture et de la pose des équipements, produits et ouvrages nécessaires à la réalisation des travaux d’économie d’énergie_
Coût de la dépose et de la mise en décharge des ouvrages, produits et équipements existants_
Frais de maîtrise d’œuvre et des études relatives aux travaux ou autres études techniques nécessaires_
Frais de l’assurance maître d’ouvrage éventuellement souscrite par l’emprunteur_
Coût des travaux nécessaires, indissociablement liés aux travaux d’économie d’énergie, précisés par l’arrêté du 30 mars 2009 relatif aux conditions d’application de dispositions concernant les avances remboursables sans intérêt destinées au financement de travaux de rénovation afin d’améliorer la performance énergétique des logements anciens_

Les travaux doivent obligatoirement être réalisés par des professionnels qualifiés “Reconnus garants de l’environnement” (RGE) qui doivent également fournir les matériaux, précise l’administration dans la QR n° 3.

► Un annuaire est mis à la disposition des personnes souhaitant faire réaliser des travaux de rénovation énergétique sur le site France-renov.gouv.fr. Il permet notamment de trouver un professionnel RGE.

Ainsi des travaux de rénovation réalisés par le bénéficiaire du PEE lui-même n’ouvrent pas droit à déblocage anticipé. Idem lorsqu’il fournit les matériaux au professionnel.

Justificatifs à produire

A titre liminaire, précisons que le code du travail ne comporte pas de liste exhaustive des documents à produire à l’appui de la demande de déblocage anticipé. Dès lors, les justificatifs mentionnés par le ministère du travail dans ce “questions-réponses” n’ont qu’une valeur indicative.

► Les justificatifs mentionnés par l’administration correspondent aux justificatifs les plus habituels.

L’intéressé peut donc produire à l’appui de sa demande, tout autre document de référence permettant d’attester de la situation au titre de laquelle il sollicite un déblocage.

Remarque : pour éviter tout contentieux, mieux vaut demander à l’organisme gestionnaire du PEE quels sont les justificatifs requis.

Pour l’administration, la demande de déblocage anticipé est accompagnée des justificatifs suivants (QR n° 9) :

Une attestation sur l’honneur du salarié indiquant que les sommes débloquées sont destinées au financement de travaux énergétiques de sa résidence principale est également requise (QR n° 9).

► Sur les justificatifs à fournir en cas de prêt, voir ci-après.

Sommes et montant susceptibles d’être débloqués

Fort logiquement, seuls les droits constitués avant le fait générateur, à savoir avant la date de la facture des travaux ou avant la date du devis accepté, sont concernés par le déblocage anticipé (QR n° 6).

Si deux conjoints bénéficiaires d’un PEE réalisent les travaux de rénovation de leur résidence principale, chacun d’eux peut obtenir simultanément le déblocage de leurs avoirs, sous réserve que ces déblocages n’entraînent pas un surfinancement des travaux (QR n° 8).

Les avoirs du PEE dont l’intéressé demande le déblocage doivent intégralement servir à la réalisation de travaux de rénovation énergétique de la résidence principale (QR n° 7).

Particularités à prendre en compte en cas de prêt finançant les travaux

En cas de prêt, un plan de financement émanant de l’établissement de crédit doit être joint à la demande de déblocage.

Il doit faire apparaître (QR n° 7 et n° 9) :

  • l’objet du prêt ; 
  • le montant du prêt ; 
  • le montant des aides publiques ; 
  • le lieu des travaux ; 
  • le montant de l’apport personnel de l’intéressé ; 
  • et le montant des avoirs du PEE devant être intégré au calcul de l’apport personnel : le montant du déblocage anticipé est au plus égal à celui de l’apport personnel.

 Ainsi, le salarié peut intégralement financer son apport personnel par son épargne salariale. Si le plan de financement ne peut être fourni, l’administration semble admettre qu’il puisse être remplacé par une offre de prêt (QR n° 9).

Si, à la date de la demande de déblocage, le montant des avoirs ne peut pas être déterminé ou individualisé afin d’être intégré dans l’apport personnel figurant dans le plan de financement, l’absence de surfinancement est réputée vérifiée si le montant des avoirs débloqués n’excède pas le montant de l’apport personnel (QR n° 7).

► Ce montant est égal à la différence entre le coût total de l’opération et le montant des prêts et des aides publiques. Notons que les frais supportés liés à l’opération peuvent être pris en compte dans l’évaluation du montant de la réalisation des travaux de rénovation énergétique.

Dernière précision de l’administration : si la demande de déblocage est faite sur présentation du plan de financement des travaux émis par l’établissement de crédit, les fonds sont susceptibles d’être débloqués avant l’intervention du fait générateur lui-même (date de la facture des travaux ou du devis accepté). Dans ce cas, le bénéficiaire du PEE doit joindre à sa demande une déclaration sur l’honneur par laquelle il s’engage à fournir les pièces justificatives mentionnées ci-avant et à restituer, le cas échéant, les sommes débloquées si les travaux ne sont pas réalisés.

Particularités applicables au logement en copropriété

La rénovation énergétique d’un logement appartenant à une copropriété est également éligible au déblocage anticipé si ce logement est la résidence principale de l’intéressé (QR n° 2). Dans ce cas, l’intéressé doit :

  • demander le déblocage de ses avoirs une seule fois, pour la globalité de la somme nécessaire aux travaux de rénovation : peu importe que les fonds soient appelés en une ou plusieurs fois par le syndic de copropriété ;
  • joindre à sa demande la copie du procès-verbal de l’assemblée générale des copropriétaires validant les travaux et l’appel de fonds du syndic de copropriété.

L’achat d’un véhicule “propre” 

Le déblocage anticipé des sommes épargnées sur un PEE est également possible pour l’achat :

  • d’un véhicule utilisant l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux comme source exclusive d’énergie (camionnette, voiture, deux ou trois roues, quadricycle à moteur) ;
  • d’un cycle à pédalage assisté neuf.

La demande de déblocage doit être présentée dans un délai de 6 mois à compter de la survenance du fait générateur survenu après le 7 juillet 2024.

L’administration donne des précisions sur les véhicules concernés, sur le fait générateur et sur les pièces justificatives à fournir.

Précisions sur véhicules concernés

Les véhicules visés par ce cas de déblocage sont (QR n° 17) :

  • les vélos et vélos-cargos électriques neufs ;
  • les voitures particulières, les camionnettes, les motos, les scooters, neufs ou d’occasion, qui n’émettent pas de CO2, c’est-à-dire les seuls véhicules électriques et/ou hydrogènes : l’administration précise que les véhicules d’occasion vendus entre particuliers appartenant à cette catégorie sont éligibles au déblocage anticipé mais quid des véhicules “propres” d’occasion vendus par un professionnel ? L’administration semble les exclure du dispositif.

 Cette exclusion laisse perplexe, surtout lorsqu’on compare ce cas de déblocage à celui ouvert aux travaux de rénovation énergétique qui est subordonné à la réalisation des travaux par un professionnel RGE.

L’acquisition d’un véhicule « propre » à l’issue de sa location est éligible au déblocage. En revanche, la location du véhicule n’y ouvre pas droit (QR n° 18).

Attention ! L’achat du véhicule doit être fait au nom de l’intéressé. Le déblocage de ses avoirs n’est pas permis s’il acquiert le véhicule au profit de son seul conjoint ou de son partenaire de Pacs (QR n° 19).

Les sommes épargnées dont le déblocage est demandé doivent être intégralement employées à l’achat du véhicule propre (QR n° 22).

Fait générateur

En l’absence de précision sur le fait générateur de ce cas de déblocage, l’on pouvait supposer qu’il s’agissait de la date d’achat ou de signature du bon de commande.

L’administration est plus restrictive (QR n° 20). Pour elle, le fait générateur pour l’achat d’un véhicule “propre” est :

  • soit la date de la facture d’achat : notons que, si la date de facturation constitue le fait générateur, le bon de commande est admis comme justificatif ;
  • soit celle de la levée d’option à l’issue d’une location ;
  • soit la date de cession dans le cas d’une cession entre particuliers.

Justificatifs à produire

A titre liminaire, précisons que la liste des pièces justificatives mentionnées par l’administration dans ce « Questions-réponses » n’est, comme pour le cas de déblocage ouvert aux travaux de rénovation énergétique, qu’indicative.

L’administration indique, à la question n° 22, que la demande de déblocage est accompagnée :

du bon de commande ou de la facture du véhicule ou du vélo ;
pour les véhicules d’occasion vendus entre particuliers, d’une déclaration sur l’honneur attestant du prix d’achat du véhicule, par laquelle le bénéficiaire s’engage à fournir la copie de la carte grise barrée du vendeur (carte grise ou certificat d’immatriculation) et de la carte grise nouvelle à son nom (carte grise ou certificat d’immatriculation) et à restituer, le cas échéant, les sommes débloquées si l’achat n’est finalement pas réalisé.

Remarque : en cas de prêt, l’intéressé doit joindre un plan de financement émanant de l’établissement de crédit répondant aux mêmes caractéristiques que celui requis pour le déblocage des avoirs en cas de travaux de rénovation énergétique. À noter également que, dans ce cas, les mêmes particularités que celles applicables au déblocage pour rénovation énergétique doivent être respectées (QR n° 22).

L’intéressé doit également justifier du caractère « propre » du véhicule. Le type d’énergie du véhicule apparaît sur le bon de commande et, pour les véhicules d’occasion, sur la carte grise dans le champ P.3 renseigné par le code EL ou H2 (QR n° 23).

L’activité de proche aidant

Enfin, le déblocage anticipé des avoirs en compte dans le PEE est possible, depuis le 7 juillet 2024, lorsque le salarié, son conjoint ou son partenaire de Pacs exerce l’activité de proche aidant auprès d’un proche tel que défini aux articles L.3142-16 et L.3142-17 du code du travail relatifs au congé de proche aidant. Reprenant ces articles, l’administration énumère les proches aidés ouvrant droit au déblocage.

► Il peut s’agir du conjoint du demandeur, de son concubin, de son partenaire de Pacs, d’un ascendant, d’un descendant, d’un enfant dont il assume la charge au sens de l’article L. 512-1 du code de la sécurité sociale, d’un collatéral jusqu’au 4e degré, d’un ascendant, descendant, collatéral jusqu’au 4e degré de son conjoint, concubin ou partenaire de Pacs, d’une personne âgée ou handicapée avec laquelle il réside ou avec laquelle il entretient des liens étroits et stables, à qui il vient en aide de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne.

Rappelons que la demande de déblocage peut être faite à tout moment et que la personne aidée doit résider en France de façon stable et régulière.

Précision importante donnée par l’administration : ce motif de déblocage peut être utilisé une fois par année civile pour le même fait générateur (QR n° 15).

Un déblocage non conditionné à la prise d’un congé de proche aidant

Le renvoi aux dispositions relatives au congé de proche aidant n’implique pas que le salarié, son conjoint ou son partenaire de Pacs soit effectivement en congé de proche aidant. Ce renvoi n’est limité qu’à la définition des proches pouvant être aidés dans le cadre d’un tel congé. Cette interprétation est corroborée par le fait que la demande de déblocage anticipé à ce titre peut être faite à tout moment et pas seulement au moment du congé (article R.3324-23 du code du travail). 

Une interprétation confirmée par l’administration (QR n° 10) : le déblocage anticipé n’est pas conditionné par la prise d’un congé de proche aidant.

Justificatifs à produire

Les justificatifs à fournir pour ce cas de déblocage sont récapitulés dans le tableau suivant.

Notons que les mêmes remarques liminaires que celles signalées pour les deux premiers cas de déblocage anticipé doivent être faites.

Déblocage anticipé pour l’activité de proche aidant : pièces justificatives (QR n° 13)
Dans tous les cas, déclaration sur l’honneur de l’aide apportée et :
Pour une personne aidée apparentée au demandeurLivret de famille ou déclaration sur l’honneur du lien familial du demandeur avec la personne aidée
Pour une personne aidée non apparentée au demandeurDéclaration sur l’honneur des liens étroits et stables avec la personne âgée ou handicapée avec laquelle le demandeur réside ou entretient des liens étroits et stables
Selon les cas :
Pour un enfant handicapé qui vit au foyer du demandeur ou un adulte handicapéCopie de la décision prise en application de la législation de la Sécurité sociale ou d’aide sociale subordonnée à la justification d’un taux d’incapacité permanente au moins égal à 80 %
En cas de perte d’autonomie de la personne aidéeCopie de la décision d’attribution de l’APA (C. action soc. et fam., art. L. 232-2)

En outre, lorsque la personne aidée en bénéficie, une copie de la décision d’attribution des prestations suivantes peut être requise (QR n° 13) :

  • majoration d’une tierce personne pour aide constante ;
  • prestation complémentaire pour recours à tierce personne ;
  • majoration spéciale pour assistance d’une tierce personne relevant de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ;
  • majoration attribuée aux fonctionnaires et aux magistrats invalides dans l’obligation d’avoir recours à l’assistance d’une tierce personne pour les actes ordinaires de la vie ;
  • majoration pour tierce personne pour les militaires et victimes de guerre.

L’attestation de l’employeur du bénéficiaire (ou de celui de son conjoint ou partenaire de Pacs) indiquant que celui-ci bénéficie d’un congé de proche aidant peut également permettre de justifier la demande de déblocage.

En revanche, le demandeur n’a pas à fournir des justificatifs de dépenses : le cas de déblocage est lié à sa situation (être proche aidant) et n’est pas conditionné à un niveau de dépenses (QR n° 14).

Lorsque la demande de déblocage est faite plusieurs fois pour le même fait générateur, le demandeur reste tenu de fournir les justificatifs (en cours de validité) et les attestations sur l’honneur susvisées à chaque demande (QR n° 16).

Géraldine Anstett

Soins, handicap, garde d’enfants : la santé n’échappe pas à la rigueur budgétaire

16/10/2024

Les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale fixent les crédits de l’État dans le domaine de la santé. Ces textes affectent donc les tarifs et l’accès aux soins de l’ensemble des Français. Les tendances du PLF et PLFSS 2025 suivent l’axe fixé par Michel Barnier lors de son discours de politique générale : réduire les déficits. Au premier chef, la part restant à charge des malades en cas de consultation médicale va augmenter.

Le dossier de presse du PLFSS annonce la couleur : “La Sécurité sociale, qui représente près de la moitié de la dépense publique prendra nécessairement sa part dans l’effort de redressement des finances publiques entrepris pour ramener le déficit de 6,1 % en 2024 à 5 % en 2025”. Dans ce contexte, plusieurs mesures du PLFSS piocheront dans le porte-monnaie des salariés en 2025. À la CFDT, on juge que “l’ampleur des efforts demandés en matière de baisse du budget de l’Etat et de la protection sociale ne peut se faire sans une dégradation importante des services publics comme l’éducation par exemple, et une fragilisation encore accrue de notre système de santé”.

La consultation médicale sera plus chère

Dans un but “d’amélioration de l’organisation du système de santé” et de renforcement du rôle du médecin, le tarif de la consultation médicale passera de 26,50 euros à 30 euros dès décembre 2024. Cet objectif s’accompagne d’une hausse du ticket modérateur. La part de la consultation prise en charge par l’assurance maladie (70% actuellement) reculera dans la même proportion que le reste à charge pour le patient. Elle passera à 60 % et le reste à charge progressera de 30 à 40 %. Certes, les assurés qui en disposent pourront bénéficier de la participation de leur mutuelle, mais celles-ci pourraient bien augmenter leurs tarifs afin de limiter le coût de cette mesure.

Pour la CGT, ces nouveaux tarifs, accompagnés de la baisse du plafond d’indemnisation des arrêts de travail par la Sécurité sociale de 1,8 Smic à 1,4 Smic, constituent “des mesures dont les salariés et les retraités vont être les premières victimes”. La confédération pointe que “l’accès au soin et à la santé est de plus en plus difficile et coûteux, le gouvernement s’attaque de plein fouet aux dépenses de sécurité sociale”.

Le financement insuffisant des dépenses de santé

Chaque année, le gouvernement fixe l’Ondam, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, dans le PLFSS. Ce chiffre est scruté par les professionnels du financement de la santé. Il organise ainsi les prévisions de recettes et l’objectif de dépenses à ne pas dépasser en matière de soins de ville, d’établissements médico-sociaux et d’hospitalisation publique et privée. L’Ondam est ensuite suivi par un Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie qui rend, chaque année en juin, un avis sur le respect de l’objectif. Ce comité d’alerte est placé sous l’autorité de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS).

Dans le PLFSS 2025, l’Ondam est fixé à + 2,8 % par rapport à son montant rectifié pour 2024. En effet, l’article 2 du PLFSS 2025 revoit à la hausse l’Ondam prévu dans la LFSS 2024 en le passant de 254,9 à 256,1 milliards d’euros.

Eric Gautron, secrétaire confédéral en charge de la protection sociale collective chez Force Ouvrière, dénonce la fixation de l’Ondam à + 2,8 % “alors que celui de l’an dernier à 3,2% s’est avéré nettement insuffisant au regard (entre autres) de l’inflation”. Dans sa déclaration à la CCSS, il ajoute : ” Comment penser que la situation des offreurs de soins et du secteur médico-social va pouvoir s’améliorer alors que leur avenir est déjà obéré par des dettes et qu’ils ont besoin d’investissements pour aborder l’avenir plus sereinement et réaliser de véritables gains médicaux, sans parler d’éviter les catastrophes que nous voyons surgir dans les urgences ? “

De son côté, le Haut Conseil des finances publiques a jugé cette trajectoire des dépenses peu fiable, notamment parce qu’il intègre des économies de 4,9 milliards d’euros. Dans son rapport, le HCFP conclut : “La difficulté à générer des économies de cette ampleur, sur lesquelles le Haut Conseil ne dispose que de peu d’information, le conduit à considérer que la trajectoire d’Ondam pour 2025 apparaît très optimiste.”

Des gardes d’enfants aux soins palliatifs

Alors qu’une nouvelle enquête du journaliste Victor Castanet a dénoncé il y a quelques semaines les questions de sous-financement et de maltraitances dans les crèches, le PLFSS 2025 annonce la création d’un service public de la petite enfance au 1er janvier 2025. Il doit permettre “d’accroître et de diversifier l’offre à destination des familles pour mieux répondre à leurs besoins et leur faciliter l’accès à un mode d’accueil”.

“Le lancement de ce service public avait déjà été annoncé pour les villes de plus de 10 000 habitants, observe Pascale Coton, vice-présidente de la CFTC. Le PLFSS vient l’officialiser au niveau national, ce qui va enfin poser des obligations. Avec Cyril Chabanier, nous avons rencontré le Premier ministre et rappelé que 75 000 femmes ne peuvent pas travailler à cause d’un manque de modes de garde de leur enfant”. Attention, le PLFSS prévoit que le service public s’appuiera sur les communes, celles-ci devront donc être dotées des ressources financières suffisantes…

Le sujet est par ailleurs crucial pour les familles monoparentales qui ne peuvent s’appuyer sur les disponibilités de leur conjoint. Sur ce point, le PLFSS 2025 prévoit un complément au libre choix du mode de garde, une prestation versée par l’Urssaf, jusqu’aux 12 ans de l’enfant au lieu de 6 ans actuellement.

Le PLFSS consacre également 100 millions d’euros aux soins palliatifs. Il fixe un objectif d’accès à une unité de soins palliatifs sur tout le territoire d’ici la fin de 2025, le développement d’équipes mobiles, la mise en place d’équipes rapides d’intervention en hospitalisation à domicile et la création d’une unité de soins palliatifs pédiatriques par région d’ici 2034.

Une rationalisation des tarifs de transport médical

Le budget réagit aussi à une “croissance alarmante” de la facture du transport médical (6,32 milliards financés par la Caisse nationale d’assurance maladie, la Cnam, en 2023). Ambulanciers et taxis ont été accusés de gonfler leurs grilles tarifaires. Ils se défendent en accusant à leur tour les nombreuses fermetures de lits en milieu rural et l’éloignement des centres de soins qui augmentent la longueur des parcours. Quoi qu’il en soit, le PLFSS entend rationaliser les tarifs entre les transporteurs et soumettre le remboursement du transport au remplissage d’un formulaire dédié remis par le médecin au patient.

Santé psychologique et psychiatrique

Sur la santé mentale, le projet de loi supprime la condition d’être adressé par un médecin ou une sage-femme pour l’accès au dispositif “MonSoutienPsy“, une prise en charge pour toute personne de plus de 3 ans aux difficultés psychologiques “légères à modérées”. Le système “Vigilans” pour la prévention du suicide serait par ailleurs ouvert aux mineurs. Les équipes mobiles de psychiatrie dédiées aux personnes en situation de précarité seraient renforcées de coordonnateurs grâce à un fléchage de crédits.

Parce qu’il vaut toujours mieux prévenir que guérir, le Bilan de prévention serait élargi à tous les Français. 75 millions d’euros seraient consacrés à la poursuite de la campagne de vaccination des élèves de 5e contre les infections au papillomavirus. Enfin, le gouvernement souhaite ouvrir la possibilité de dispenser les médicaments à l’unité afin de limiter les pénuries de médicaments de plus en plus fréquentes en France, alors que Sanofi vient d’annoncer la vente de sa filiale de médicaments grand public (Doliprane notamment) à un fonds d’investissement américain.

Le PLFSS permettrait également au pharmacien de remplacer un médicament en risque de rupture de stock par un autre. La mesure ne semble pas s’attaquer aux causes des pénuries mais plutôt tenter d’en gérer les effets. En revanche, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a annoncé le 24 septembre dernier avoir sanctionné onze laboratoires pharmaceutiques pour non-respect de leur obligation de constituer des stocks de sécurité de médicaments, et ce pour un montant de 8 millions d’euros. Reste à voir si la menace de sanctions financières désormais concrétisée mobilisera l’ensemble des laboratoires.

Handicap : les crédits de l’Agefiph malmenés

Lors de la formation du gouvernement Barnier, les représentants des associations et organismes de soutien aux personnes en situation de handicap avaient déploré l’absence de ministère dédié. Le handicap se trouvait inclus dans le ministère des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes de Paul Christophe. Face à l’insistance du secteur, Michel Barnier avait finalement nommé Charlotte Parmentier-Lecocq ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap.

Nouveau coup dur cette fois lors de la publication du PLF : son article 33 prévoit que les crédits de l’Agefiph, association paritaire d’inclusion les personnes handicapées dans l’emploi, seraient réduits de près de 20 % par rapport aux recettes initialement prévues pour 2025. Une chute liée au plafonnement à 507 millions des contributions versées par les entreprises qui ne respectent pas le quota légal de 6% d’emploi de travailleurs handicapés. Selon Christian Ploton, “cela représenterait un cinquième de notre budget. C’est une réduction sans précédent des actions d’accompagnement du travail handicapé”. Le nouveau président de l’Agefiph pensait au contraire bénéficier d’un effet Jeux Paralympiques… Il sera soutenu par les trois amendements (n° 16271628 et 1665) déposés par le groupe Ensemble pour la République destinés à rétablir la ligne budgétaire à hauteur de 555 millions d’euros.

Le coup de rabot est également critiqué par Christophe Roth, ex-président de l’Agefiph et secrétaire national CFE-CGC à l’accessibilité. “Cette réduction de budget risque de limiter gravement les ressources de l’Agefiph, mettant ainsi en péril certaines de ses missions vitales, dénonce-t-il. Si ce plafonnement est maintenu, la capacité de l’Agefiph à lutter contre les discriminations à l’embauche et à soutenir l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap sera sévèrement compromise”. Il a déjà activé divers réseaux de lobbying auprès des parlementaires et entend bien “ne rien lâcher” : “Il est quand même question de 100 millions d’euros : 50 millions seront fléchés vers les entreprises adaptées et le surplus du plafonnement issu de la contribution des entreprises sera directement ponctionné par l’État”.

Pluie de critiques syndicales

Quels que soient les thèmes abordés dans ce budget de la Sécu 2025, les syndicats en ont unanimement critiqué les aspects. La CGT doit y consacrer une conférence de presse vendredi 18 octobre. Dans un communiqué de presse diffusé hier, Hélène Fauvel, secrétaire confédérale FO dénonce “un budget d’austérité qui risque de plonger l’économie dans la stagnation voire la récession avec en ligne de mire des pertes de pouvoir d’achat immédiates pour tous les retraités et les consommateurs”.

À l’Unsa, on considère que le PLFSS va creuser les inégalités. Le secrétaire général adjoint Dominique Corona nous a aussi indiqué son inquiétude : “Certes, il y a une inflexion intéressante sur le fait qu’on se pose enfin la question des recettes mais plusieurs éléments nous inquiètent au sens politique et j’ai posé la question aux ministres lors de la réunion de la CCSS : souhaitez-vous transformer le modèle français de protection sociale en système beveridgien qui remplace les cotisations par l’impôt et pour le reste fait appel aux marchés ? “. Les débats parlementaires qui commenceront à l’Assemblée nationale le 28 octobre permettront peut-être de répondre à cette question.

Indemnisation des accidents du travail : une transposition de l’accord national interprofessionnel
L’article 24 du PLFSS 2025 prévoit la transposition de l’accord national interprofessionnel du 15 mai 2023 sur la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). A la suite d’un désaccord entre partenaires sociaux, le ministre du Travail Olivier Dussopt avait finalement suspendu l’article 39 du PLFSS 2024 relatif à la rente AT-MP. Les organisations syndicales avaient salué cette décision et reporté la responsabilité du blocage sur les organisations patronales.

Selon Éric Gautron (FO), l’article 39 reconnaissait certes le caractère dual de la rente (une part fonctionnelle et une part professionnelle d’autre part), mais le projet d’article 39 déterminait des modes de calcul conduisant à ne réparer intégralement que les souffrances vécues avant la consolidation, c’est-à-dire la période entre l’accident et la stabilisation de santé.

En juin 2024, un relevé de décision du comité de suivi de l’accord avait réaffirmé le caractère dual de la rente et revu ses modalités de calcul à la fois hors et en cas de faute inexcusable de l’employeur, avec une indemnisation spécifique de la part fonctionnelle distincte du préjudice professionnel. Selon l’exposé des motifs de l’article 24 du PLFSS, la mesure s’appliquera aux assurés dont l’état de santé est consolidé à partir du 1er juin 2026.  

Marie-Aude Grimont

Des précisions sur les avances sur participation et intéressement

16/10/2024

Trois mois après la publication des décrets d’application de la loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 dite “Partage de la valeur”, le ministère du travail publie un questions-réponses sur la mise en place d’avances sur les sommes dues au titre de l’intéressement ou de la réserve spéciale de participation.

La loi sur le partage de la valeur du 29 novembre 2023 permet aux salariés de bénéficier d’avances sur participation ou sur intéressement si l’accord le prévoit (article L.3348-1 du code du travail).

► En matière de participation, cette possibilité était jusqu’alors exclue par la jurisprudence, faute d’être consacrée par la loi (arrêt du 23 mai 2007). En matière d’intéressement, jusqu’au 30 novembre 2023, même en l’absence de dispositions légales les autorisant, les entreprises ont pu recourir aux avances car l’administration l’admettait, sous réserve de certaines garanties.

Outre le fait d’être prévues par l’accord, les avances nécessitent l’autorisation expresse du bénéficiaire. Les salariés doivent donc être informés de l’existence d’un dispositif d’avances sur participation ou d’intéressement, dans des conditions qui ont été fixées par deux décrets du 29 juin et du 5 juillet 2024.

Le ministère du travail a publié le 9 octobre 2024 un questions-réponses visant à préciser certains points en la matière.

Un système d’avances à prévoir dans l’accord

L’accord doit indiquer, en cas de versement d’avances, les modalités de recueil de l’accord du salarié (parmi lesquelles le délai dont le salarié dispose pour donner son accord) et l’impossibilité de débloquer le trop-perçu s’il a été affecté à un plan d’épargne salariale ou son reversement intégral sous la forme d’une retenue sur salaire, en l’absence d’une telle affectation (article R.3313-12 du code du travail).

Les accords d’intéressement qui prévoyaient déjà la possibilité, pour les salariés, de bénéficier d’avances sur intéressement, doivent-ils être modifiés ? Selon le ministère, en l’absence de stipulation conventionnelle relative aux modalités de recueil de l’accord des salariés, la disposition supplétive prévue à l’article D.3348-1 du code du travail s’applique en attendant la modification des accords d’intéressement.

► Selon cet article, le salarié dispose d’un délai de 15 jours à compter de la réception de la lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé l’informant de cette possibilité, pour donner son accord.

Une périodicité de versement ne pouvant pas être inférieure au trimestre

La loi sur le partage de la valeur prévoit que la périodicité des avances sur participation ou intéressement ne peut pas être inférieure au trimestre.

Ainsi, que deviennent les accords d’intéressement prévoyant déjà le versement d’avances dont la périodicité était inférieure ? Doivent-ils être modifiés ? Non, répond le questions-réponses. Ce n’est pas nécessaire dans la mesure où la nouvelle disposition relative à la périodicité s’applique de plein droit car d’ordre public. Les avances ne peuvent plus être inférieures au trimestre.

L’accord exprès du salarié doit être recueilli dans un certain délai

Si l’accord d’intéressement ou de participation prévoit le versement d’avances, l’employeur informe chaque salarié de cette possibilité et du délai dont il dispose pour donner son accord.

En l’absence de stipulation dans l’accord, ce délai est de 15 jours à compter de la réception de la lettre recommandée avec avis de réception ou de la remise contre récépissé l’informant de cette possibilité.

► À défaut d’accord exprès du salarié sur le principe du versement d’une avance au titre de la participation ou de l’intéressement, aucune avance ne lui est versée (article D.3348-1 du code du travail).

Le ministère rappelle que l’article L.3348-1 du code du travail permet le versement de plusieurs avances par exercice mais dont la périodicité ne peut être inférieure au trimestre. 

Il précise que, dans la mesure où le versement de plusieurs avances dans l’exercice a été retenu, les salariés doivent être interrogés avant chaque versement de l’avance afin de donner leur accord sur son principe. Mais il admet que l’interrogation n’ait lieu qu’une fois par exercice, lors du premier versement. 

La réponse du salarié pourra être considérée comme valable non seulement pour le premier versement mais aussi pour les suivants. Après chaque versement, le salarié aura la possibilité, pour le versement suivant, de revenir sur son choix initial ; il devra être informé de cette possibilité lors de l’interrogation au titre du premier versement. Sans initiative de sa part, son choix initial l’engagera pour l’ensemble des versements au titre des avances de l’exercice.

Une fiche distincte du bulletin de salaire doit être établie

Cette fiche doit mentionner (article D.3348-2 du code du travail) :

  • le montant des droits attribués à l’intéressé au titre de l’avance ;
  • la retenue opérée au titre de la CSG/CRDS ;
  • l’obligation et les modalités de reversement par le bénéficiaire à l’employeur lorsque ses droits définitifs sont inférieurs à la somme des avances reçues (situation de trop-perçu) ;
  • l’impossibilité de débloquer le trop-perçu lorsqu’il a été affecté à un plan d’épargne salariale ou retraite : il constitue donc un versement volontaire du bénéficiaire et n’ouvre pas droit aux exonérations fiscales et sociales ;
  • lorsque l’avance est investie sur un plan d’épargne salariale ou retraite, le délai à partir duquel les droits nés de cet investissement seront disponibles et les cas de déblocage anticipé ;
  • les modalités d’affectation par défaut au PEE des sommes attribuées au titre de l’avance sur intéressement, conformément aux dispositions de l’article L. 3315-2 du code du travail ; 
  • les modalités d’affectation par défaut au Perco ou au Pereco des sommes attribuées au titre de l’avance sur participation, conformément aux dispositions de l’article L.3324-12 du code du travail ;
  • l’accord du bénéficiaire sur le principe de l’avance.

Sauf opposition du salarié, la remise de cette fiche peut être faite par voie électronique, dans des conditions de nature à garantir l’intégrité des données.

► Le contenu de la fiche individuelle de versement de la prime d’intéressement ou de participation doit aussi mentionner d’une part le montant total des droits attribués à l’intéressé et, d’autre part, le cas échéant, le montant des sommes reçues au titre des avances ainsi que le montant des droits restant à percevoir ou à reverser à l’employeur (articles D.3313-9 et D.3323-16 du code du travail).

Selon le questions-réponses du ministère, une fiche distincte du bulletin de salaire doit obligatoirement être remise au salarié à chaque versement d’avance au cours de l’exercice.

Récupération du trop-perçu éventuel

Si les droits définitifs attribués au bénéficiaire s’avèrent inférieurs à la somme des avances reçues, le trop-perçu est récupéré par retenue sur salaire dans les conditions prévues à l’article L.3251-3 du code du travail (système de la compensation).

► Rappelons que, selon cet article, pour les avances en espèces, l’employeur peut pratiquer une retenue sur salaire dans la limite du dixième du montant des salaires exigibles.

Le ministère rappelle que, dans l’hypothèse où le salarié a bénéficié d’avances supérieures aux droits définitifs qui lui ont été par la suite attribués mais que ce dernier ne peut pas être joint, le trop-perçu perd sa qualité d’intéressement ou de participation et devient du salaire. Il suit donc les règles des trop-perçus sur salaires prévues à l’article précité.

Delphine de Saint Remy

Le cabinet d’Astrid Panosyan-Bouvet s’étoffe

16/10/2024

Par arrêté du 11 octobre 2024, sont nommés au cabinet de la ministre du travail et de l’emploi, Astrid Panosyan-Bouvet : 

  • Aurore Vitou, directrice du cabinet adjointe ;
  • Alexandra Rivalain, conseillère auprès de la ministre ;
  • Grégoire Jayot, conseiller auprès de la ministre, chef du pôle stratégie, communication et prospective ;
  • Hélène Vignolles, cheffe de cabinet adjointe ;
  • Guillaume Jollet, conseiller parlementaire ;
  • Léon Rangier, conseiller budgétaire ;
  • Audrey Pérocheau, conseillère en charge de la formation et des mutations économiques ;
  • Mikael Charbit, conseiller en charge de l’apprentissage, de la certification et de la qualité de la formation ;
  • Jean Galve, conseiller en charge du droit du travail ;
  • Pierre Desjonqueres, conseiller en charge de l’insertion, de l’accompagnement vers l’emploi et de France Travail ;
  • Giuliano de Franchis, conseiller en charge de la protection sociale et de l’assurance chômage, à compter du 23 septembre 2024.

Source : actuel CSE

Frédéric Lerais : “Inciter les entreprises à augmenter les salaires en modifiant les exonérations, c’est bien mais ça reste un pari !”

17/10/2024

Coauteur d’une étude sur l’effet des exonérations de cotisations sociales, l’économiste Frédéric Lerais dirige l’Ires (*). Nous lui avons demandé quels pouvaient être les impacts des modifications envisagées par le gouvernement, à l’occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), concernant les exonérations de cotisation autour du Smic. Peut-on craindre un effet sur l’emploi ? Le salaire net de certaines classes moyennes serait-il valorisé ? Interview.

Si le Parlement vote en l’état le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2025, les employeurs devront payer, dès le 1er janvier 2025, davantage de cotisations sociales (maladie et famille) pour de nombreux salariés, ceux dont les salaires sont compris entre 1 et 1,3 Smic, 2,2 et 2,5 Smic, et 3,2 à 3,5 Smic. L’étude d’impact du projet de loi de financement de la sécurité sociale semble considérer qu’il n’y aura pas d’effet négatif pour l’emploi, les entreprises qui emploient les salariés payés dans ces tranches se trouvant dans des secteurs peu soumis à la concurrence internationale. Les renforcements des exonérations dans certaines tranches juste au-dessus du Smic (1,3 à 1,8 Smic) n’auront lieu, elles, qu’en 2026. Quels effets sur l’emploi et le salaire ces changements peuvent-ils produire ? L’avis de Frédéric Lerais, économiste et directeur de l’Ires (*).

Quelle est votre analyse du PLFSS s’agissant des cotisations sociales ?

Nous devrions donc avoir en 2025 une augmentation des cotisations sociales employeurs, ce qui constitue une première depuis très longtemps ! Nous avions depuis 1993, sinon une idéologie, du moins une doctrine affirmant qu’il fallait à tout prix baisser le coût du travail, et en particulier le coût du travail peu qualifié, ou les bas salaires, afin de favoriser l’emploi. C’est donc un changement majeur sur le plan politique.

Ce changement s’explique-t-il par le contexte budgétaire ?

C’est un peu plus compliqué, me semble-t-il. D’abord, depuis deux ans, les exonérations des cotisations sociales ont énormément augmenté du fait des revalorisations du Smic en raison de l’inflation. Or chaque fois que vous revalorisez le salaire minimum, cela compresse la distribution des salaires vers le bas et vous bonifiez les exonérations sociales.

Pas seulement, il y a aussi un malaise dans le monde salarial 

Par ailleurs, des personnes se trouvent bloquées longtemps au niveau du Smic, et cela provoque un malaise dans le monde salarial, avec un sentiment d’injustice devant l’absence d’évolution. Donc ce sujet a fini par être appréhendé par les politiques, avec notamment la conférence sociale lancée par Élisabeth Borne quand elle était Première ministre. C’est elle qui a demandé aux économistes Bozio et Wasmer de faire un rapport sur ce sujet, rapport qui est d’ailleurs à mon sens excellent. Ils ont eu notamment le mérite d’écouter toutes les parties, de consulter des gens très différents – c’est suffisamment rare pour être souligné. Et leur message, même s’il ne fait pas l’unanimité parmi les économistes, est très fort. 

Quel est le message du rapport Bozio Wasmer ?

Leur conclusion, pour résumer, consiste à dire qu’il faut en finir avec la politique d’emploi peu qualifié et réviser cette politique d’exonérations de cotisations sociales ciblée sur les bas salaires. Car un employeur qui entend augmenter les salaires, actuellement, paie très cher le fait de sortir des tranches de forte exonération des cotisations : le coût marginal d’une telle augmentation, pour reprendre le jargon des économistes, est trop élevé. L’idée centrale du rapport Bozio Wasmer est donc de dire qu’il faut reprofiler les allègements de cotisation pour qu’ils aient moins d’effet négatif sur les progressions salariales. Autrement dit, éviter qu’une perte d’exonérations sociales dissuade un employeur d’augmenter les salariés, ce qui suppose d’en diminuer le montant sur certaines tranches et d’en augmenter le montant sur d’autres.

Les deux économistes proposent un changement à coût constant, ce qui n’est pas le choix de l’Etat pour 2025 

La proposition des deux économistes se fait d’ailleurs à coût constant pour l’État, et ils insistent sur le fait que l’État ne devrait pas chercher à gagner de l’argent à l’occasion de ces changements dont le but est de casser la spirale des compressions salariales en incitant au dynamisme salarial. Quelques jours après la remise de ce rapport, le gouvernement a présenté son projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) en disant qu’il s’inspire de ces travaux. Mais son projet est sensiblement différent. Que voit-on ? Une baisse du taux d’allègements des cotisations sociales au niveau du Smic de 2 points en 2025 et 2 autres points en 2026, avec un reprofilage des tranches avec une réduction des seuils d’exonération concernant les cotisations famille et maladie (**), ce qui rapporterait à l’État de l’ordre de 5 milliards d’euros. À court terme, l’État cherche d’abord à réaliser des économies, ce qui n’est pas ce que recommandait le rapport. La hausse des exonérations sur certaines tranches salariales et le reprofilage ne sont prévus qu’en 2026. Pour 2025, je ne vois aucun renforcement des exonérations de 1,2 à 1,6 Smic qui serait susceptible d’inciter à une augmentation salariale des personnes au Smic. 

Prenons la hausse des cotisations prévue en 2025. Est-elle de nature à détruire des emplois ?

Mis à part des effets négatifs sur l’emploi dans certains secteurs qui emploient massivement des Smicards, comme le nettoyage par exemple, il me semble qu’il ne devrait pas y avoir d’impact important sur l’emploi. D’une part, parce qu’il s’agit de mesures de court terme, et que ce sont de grosses évolutions structurelles dans le temps qui ont des effets sur l’emploi. D’autre part, parce que dans de nombreux secteurs les salaires sont assez diversifiés, et que les entreprises bénéficieront en 2026 d’un renforcement des allègements pour ces tranches.

Il ne devrait pas y avoir d’impact important 

Les entreprises vont appréhender tout cela dans une logique globale de gestion de la masse salariale, et non pas en se focalisant individu par individu ou sur tel ou tel niveau de salaire. Elles ne vont pas se dire : “Je vais arrêter d’embaucher des Smicards parce qu’ils vont me coûter plus cher”, mais plutôt réfléchir de façon globale aux conséquences de l’évolution des cotisations et des exonérations sur le coût du travail. Certaines études montrent d’ailleurs que les exonérations de cotisations sociales ne se sont pas toujours traduites par des hausses d’emplois de personnes à bas salaire. Ces baisses de cotisation ont parfois servi à augmenter les rémunérations des hauts salaires, à augmenter l’emploi des hauts salaires, à faire de l’investissement, etc.

En 2026, un renforcement des exonérations sur certaines tranches est prévu. Cela  entraînerait-il une hausse des salaires ?

Sur ce point, le projet du gouvernement rejoint les préconisations du rapport avec une augmentation des exonérations sur certaines tranches (entre 1,3 à 1,8 Smic). Cela provoquera-t-il une hausse des salaires nets dans ces tranches ?  

Cela n’a rien d’automatique 

Les entreprises confrontées à des difficultés de recrutement pourront en effet utiliser ces exonérations pour augmenter un peu les rémunérations et retrouver de l’attractivité, mais cela n’a rien d’automatique ! Les études, comme celle que nous avons menée avec Jérôme Gautié (voir notre encadré), montrent qu’il n’y a pas une seule stratégie pour utiliser les sommes dégagées par les exonérations. Les entreprises peuvent les réinjecter dans les salaires concernés ou dans des salaires plus élevés, elles peuvent choisir de renforcer leurs investissements ou l’emploi, ou préférer utiliser ces nouvelles marges pour réduire leurs prix si elles sont dans un marché très concurrentiel, certaines vont même les utiliser pour les dividendes, même si c’est interdit ! Éviter de décourager les augmentations salariales avec des taux marginaux excessifs, en réduisant le coût excessif d’une augmentation, me semble une bonne idée, mais cela reste un pari. Hormis deux ou trois études (***), les économistes ont d’ailleurs du mal à démontrer l’existence de trappes à bas salaires…mais cela ne signifie pas qu’elles n’existent pas ! Le pilotage par les seuils de la part des entreprises me semble une réalité lorsqu’on interroge le terrain…

Qu’est-ce que ce “pilotage par les seuils” ?

Piloter par les seuils, c’est avoir conscience des seuils et en tenir compte : puisque l’exonération devient plus basse au-dessus d’1,6 Smic, et qu’elle décroche ensuite par palier à 2,2, 2,5 et à 3, nous allons éviter de franchir ces seuils. Comment ? En embauchant des personnes dont les salaires sont sous ces seuils, en évitant des augmentations salariales pour des catégories précises qui feraient franchir un seuil, en évitant sinon de former les salariés du moins de reconnaître leurs qualifications, etc. Sur les exonérations de cotisations, il y a un débat entre économistes, certains soutenant toujours qu’il faut cibler les bas salaires au nom de l’emploi. Mais le politique doit faire des arbitrages en tenant compte des enjeux sur l’emploi, mais aussi de la dynamique des salaires, sans oublier bien sûr les contraintes budgétaires. 

La prime de partage de la valeur (PPV) serait prise en compte dans l’assiette du calcul de la réduction générale de cotisations sociales, et ce dès le 10 octobre 2024. Avec quel effet ? 

Dès lors qu’une prime totalement exonérée de cotisations sociales n’entre pas dans la base de calcul des exonérations sociales, cela crée une incitation à privilégier cette prime plutôt qu’à augmenter le salaire de base, et c’est une forme d’optimisation fiscale, quasiment un double dividende. Donc cela me semble normal qu’une forme de rémunération telle que la PPV rentre dans l’assiette du calcul de la réduction générale des cotisations sociales. Je ne pense d’ailleurs pas que ce changement va provoquer moins de primes de partage de la valeur, mais cela va créer davantage de rentrées sociales et fiscales. 

Il reste difficile pour les représentants du personnel de questionner l’usage par l’entreprise des exonérations de cotisations….

C’est un vrai problème. L’expérience du CICE (crédit d’impôt compétitivité emploi), avec une restitution devant le CE (devenu le CSE) de l’utilisation prévue du CICE, nous montre que cela n’a pas très bien marché, pour de multiples raisons, qui tiennent tant au manque de transparence des entreprises qu’à la faible appétence des organisations syndicales pour ce type de dispositif très complexe. De plus, il y avait une difficulté technique réelle pour restituer cette information car pour le faire, il faut imaginer ce qui se serait passé sans ces exonérations, sachant que les entreprises sont peu souvent mono-établissement, qu’elles font partie d’un groupe qui fait remonter le montant de ces exonérations pour le gérer de façon centralisé, etc.

Le CSE peut mobiliser son expert sur le sujet 

Maintenant, c’est aussi un sujet dont les CSE peuvent s’emparer en mobilisant leurs experts. Lors des relèvements de Smic, nous avons vu des experts signaler au CSE que ces augmentations du salaire minimum allaient entraîner des exonérations de cotisations supplémentaires et donc donner des marges de manœuvre supplémentaires pour la politique salariale, et donc à utiliser pour négocier des augmentations. A mon sens, c’est une question qui doit être abordée dans le dialogue social et lors des négociations salariales.

Des exonérations plus fortes en 2026 devraient ouvrir des marges de manœuvre salariale 

En 2026, la perspective d’une plus forte exonération pour certains salaires va donner des arguments aux représentants du personnel pour demander des augmentations salariales. J’observe qu’une question est absente de ces débats, c’est celle de la négociation de branche. Dans notre étude, nous avons bien vu le discours tenu par le patronat dans certaines branches, comme l’agriculture ou l’agroalimentaire : “Nous n’allons pas augmenter les salaires alors que nous demandons justement le renforcement des exonérations des cotisations sociales”. Et dans des branches il y a aussi des postures très particulières, par exemple lorsqu’une grande entreprise est mieux-disante au niveau de l’entreprise (afin notamment de recruter plus facilement), mais moins-disante au niveau de la branche, afin de s’assurer que ses sous-traitants ne leur coûtent pas trop cher…

(*) L’Ires est l’Institut de recherches économiques et sociales dont les travaux sont réalisés pour les organisations syndicales. Frédéric Lerais (Ires) et Jérôme Gautié (Université Paris 1) ont mené une étude, pour la CFDT, intitulée : “Politiques d’exonération sur les bas salaires : usages et effets potentiels“, en janvier 2024.

(**) En 2025, le plafond de revenus d’activités pour les exonérations de cotisation assurance maladie (pour bénéficier de la réduction de 6 points de la cotisation) passerait de 2,5 Smic à 2,2 Smic et celui des exonérations de cotisation d’allocations familiales pour bénéficier de la réduction de 1,8 point de la cotisation) de 3,5 Smic à 3,2.En 2026, outre la réduction de 2 points du coefficient de réduction générale des cotisations (mais avec un plafond des rémunérations éligibles porté de 1,6 Smic à 3 Smic), le gouvernement prévoit de supprimer la réduction de 6 points de la cotisation d’assurance maladie et de supprimer la réduction de 1,8 point de la cotisations d’allocations familiales.

(***) Voir par exemple le rapport parlementaire de septembre 2023 de Marc Ferracci et Jérôme Guedj : “Une autre question essentielle est celle de la possibilité de trappes à bas salaires liées aux allègements. Sur ce sujet, les auditions et la recension des travaux scientifiques n’ont pas mis en évidence de telles trappes. Toutefois nous avons souhaité soulever lors des auditions l’hypothèse selon laquelle les exonérations sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic, combinées à la prime d’activité dont le point de sortie est proche – 1,5 Smic – pourraient générer malgré tout des phénomènes de trappes, ou tout du moins, de ralentissement des augmentations salariales vers 1,5‑1,6 Smic. En l’absence de données exploitables pour répondre à cette question dans les délais impartis au présent rapport, nous recommandons de poursuivre la réflexion sur ce point”.

Exonérations de cotisations sociales  : les représentants syndicaux et les élus de CSE manquent d’information
Dans leur étude, réalisée en janvier 2024 pour la CFDT, portant sur les effets des politiques d’exonération sur les bas salaires, Frédéric Lerais et Jérôme Gautié soulignent que dans certains secteurs et dans certaines entreprises, ces exonérations sont appréhendées de façon très précises afin d’être optimisées sur le plan social et fiscal, avec par exemple “un pilotage des seuls”. Ces exonérations ont donc des effets sur les stratégies de rémunération.

Par exemple, les exonérations, peut-on lire dans l’étude, peuvent jouer comme une incitation supplémentaire “à substituer des éléments de rémunération défiscalisés à des augmentations du salaire de base, donnant lieu à une forme de « double dividende » : d’une part, le montant accordé est exonéré de cotisations sociales et d’autre part il est exclu de la base de calcul pour les exonérations bas salaire – même si ce phénomène a été atténué par la mise en place du forfait social”. Les exonérations peuvent aussi jouer “comme une incitation au développement du « gris » dans certains secteurs – pratique consistant à ne déclarer qu’une partie de la rémunération, pour rester en dessous du seuil d’exonération”. 

Pour autant, que ce soit dans la branche ou dans l’entreprise, les négociations syndicaux et les élus de CSE n’ont que peu d’informations sur la réalité de ces exonérations, la stratégie des employeurs et leurs effets. Lors de la création du CICE, une consultation du CSE avait été imposée aux employeurs sur l’utilisation de ce crédit d’impôt compétitivité emploi, fondu depuis dans la baisse générale des cotisations employeurs, consultation qui n’existe plus : “La consultation sur le CICE était imparfaite mais la disparition de l’obligation d’information-consultation au niveau des entreprises, et de l’instance dédiée au niveau national (le Cosape, comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements), laisse les syndicats assez démunis face à la question des exonérations et aux aides publiques en général”.

Bernard Domergue

Une ordonnance modifie les dispositions applicables aux représentants des salariés dans les organes de gouvernance

17/10/2024

Une ordonnance du 15 octobre 2024 transpose la directive UE 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes. 

Ce texte modifie certaines règles applicables aux représentants salariés :

  • l’article L.225-23 du code du commerce, relatif aux modalités de désignation des administrateurs représentants des salariés. Les administrateurs représentants des salariés actionnaires (ARSA) sont à nouveau rattachés à la catégorie des administrateurs représentants des actionnaires visés par l’article L. 225-18, comme il résultait du régime antérieur à la loi du 22 mai 2019. La règle d’équilibre entre les femmes et les hommes de l’article L.225-18-1 s’applique ainsi à la catégorie des administrateurs représentants des actionnaires, en ce compris les actionnaires représentants des salariés. Par ailleurs, les conditions du droit de proposition conféré aux salariés actionnaires sont déterminées par les statuts, qui peuvent prévoir des modalités de sélection destinées à contribuer à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein du conseil d’administration ; 
  • un article L.225-27-2 du code du commerce est créé. Il prévoit, pour les administrateurs représentants des salariés (ARS), qu’ils soient facultatifs (L. 225-27) ou obligatoires (L. 225-27-1), le respect de la règle de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes ; 
  • l’article L. 225-80 du code du commerce qui renvoie au dispositif applicable aux administrateurs représentant des salariés, est modifié afin d’y inscrire la nécessité de respecter la règle de représentation équilibrée des femmes et des hommes ; 
  • l’article L. 22-10-21 du code du commerce est modifié afin d’étendre, sans condition de seuil, le dispositif prévu pour les représentants des salariés et salariés actionnaires à toutes les sociétés anonymes cotées avec conseil de surveillance ; 
  • l’article L. 22-10-74 du code du commerce est modifié afin d’étendre sans condition de seuil, le dispositif prévu pour les représentants des salariés à toutes les sociétés en commandite par actions cotées ; 
  • l’article 8 de l’ordonnance du 20 août 2014 est modifié afin de prévoir l’application d’une règle d’équilibre entre les femmes et les hommes s’agissant des administrateurs et membres de conseils de surveillance des sociétés représentants des salariés dans les sociétés qui sont dans le champ d’application de la loi “Copé-Zimmermann” ; 
  • des dispositifs sont créés afin de permettre aux sociétés dont la conformité des organes d’administration aux exigences de la règle d’équilibre entre les femmes et les hommes serait compromise par la durée des mandats des administrateurs représentants des salariés et salariés actionnaires, de procéder à leur remplacement selon les modalités prévues en cas de vacances.

Source : actuel CSE

Sans réponse de l’employeur, le congé sabbatique, même demandé trop tard, est forcément accepté

17/10/2024

Il résulte des articles L.3142-28 et suivants et D.3142-14 et suivants du code du travail que, sauf modalités différentes prévues par un accord collectif d’entreprise ou de branche, le salarié informe son employeur au moins trois mois à l’avance de la date et de la durée de son congé sabbatique. L’employeur y répond dans un délai de 30 jours à compter de la présentation de la demande du salarié. À défaut, son accord est réputé acquis.

La Cour de cassation confirme ici que l’employeur qui ne répond pas à une demande de congé sabbatique est réputé accepter tacitement le congé, même dans le cas où le salarié a formulé cette demande hors délai (arrêt du 12 mars 2008 ; arrêt du 14 décembre 2017). Il en résulte que l’absence du salarié, dans ces conditions, n’est pas fautive et ne peut pas justifier son licenciement.

La décision de la Cour de cassation est rendue en application de l’article L.3142-98 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur avant sa modification par la loi Travail du 8 août 2016. Ce texte prévoyait expressément que l’accord de l’employeur au départ du salarié en congé sabbatique était réputé acquis à défaut de réponse de sa part. Mais cette précision a été supprimée par la loi Travail. Cette suppression résultait manifestement d’une erreur de plume du législateur, puisqu’elle a été réintroduite par l’ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, à l’article L.3142-30, alinéa 2 du code du travail.

Source : actuel CSE

Non-concurrence et délais de prescription : le point par la Cour de cassation

18/10/2024

La Cour de cassation précise les points de départ des délais de prescription applicables à trois types d’ actions en justice à l’encontre de la clause de non-concurrence : l’action en dommages-intérêts pour illicéité de la clause, l’action en paiement de la contrepartie financière et enfin l’action en dommages-intérêts pour non-application de la clause.

Les faits

Un salarié consultant manager est engagé en avril 2010. Son contrat de travail comportait d’une part, une clause de non-concurrence de deux ans et, d’autre part, une clause de non-sollicitation de clientèle.

► Pour rappel la clause de non-sollicitation (ou de non-détournement) de clientèle a pour objet d’interdire à un salarié, suite à la rupture de son contrat de travail, de démarcher ou de détourner la clientèle de son employeur. La jurisprudence se montre vigilante sur l’application de ce type de clause. Elle a, à plusieurs reprises, requalifié certaines d’entre elles en clause de non-concurrence au motif qu’elles constituaient une atteinte à la liberté du travail du salarié (arrêt du 2 juillet 2008 ; arrêt du 27 oct. 2009 arrêt du 3 février 2010).

Le 23 octobre 2014, il a donné sa démission avec effet au 26 février 2015. Il conteste la régularité des clauses de non-concurrence et de non-sollicitation de clientèle prévues à son contrat de travail et entame une procédure de conciliation auprès du président de la compagnie nationale des conseils en propriété industrielle le 9 septembre 2015, procédure qui prend fin le 9 mars 2016 sans qu’il y ait accord. Il porte alors l’affaire devant la juridiction prud’homale le 26 février 2018. Il demande des dommages-intérêts arguant de la nullité de la clause de non-concurrence et de la clause de non-sollicitation de clientèle mais aussi le paiement de la contrepartie financière par versements mensuels et enfin des dommages-intérêts pour violation de la clause de non-concurrence et atteinte à la liberté du travail.

La cour d’appel ayant déclaré ses demandes irrecevables car prescrites, le salarié forme un pourvoi en cassation.

C’est l’occasion pour la Cour de cassation de passer en revue les délais de prescription applicables aux trois actions que le salarié a introduites à propos de sa clause de non-concurrence et de sa clause de non-sollicitation.

Délai de prescription de l’action en responsabilité civile pour nullité de la clause de non-concurrence et de la clause de non-sollicitation de clientèle

La prescription d’une action en responsabilité civile court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas précédemment eu connaissance. C’est ce que rappelle la Cour de cassation.

Elle en déduit que le dommage causé par la stipulation d’une clause de non-concurrence illicite ou d’une clause de non-sollicitation de clientèle, qui s’analyse en une clause de non-concurrence, ne se réalise pas au moment de la stipulation de la clause mais se révèle au moment de sa mise en œuvre.

En l’espèce, comme le contrat de travail avait été rompu le 26 février 2015 et qu’une procédure de conciliation était intervenue et avait suspendu le délai de prescription pendant six mois (soit jusqu’au 9 mars 2016), la cour d’appel a pu, à juste titre, considérer que les actions en nullité des clauses et en paiement de dommages-intérêts en résultant étaient prescrites lorsque le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 26 février 2018.

Plus précisément, la cour d’appel avait jugé que le point de départ de la prescription de deux ans était fixé au 26 novembre 2014 (soit à l’issue du délai de 30 jours suivant la réception de la démission du salarié en date du 27 octobre 2014), dans la mesure où l’employeur n’avait pas fait usage de sa faculté de lever la clause de non-concurrence durant le délai imparti par la clause du contrat.

L’argument du salarié selon lequel à la date du 26 novembre 2014, le délai de prescription n’avait pas pu commencer à courir puisque la clause de non-concurrence n’avait pas encore été mise en œuvre, a été rejeté.

Délai de prescription de l’action en paiement de l’indemnité de non-concurrence

Le délai de prescription applicable à une demande en paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence est le délai de prescription applicable aux salaires.
Or selon l’article L.3245-1 du code du travail, le délai de prescription de l’action en paiement des salaires de 3 ans commence à compter du jour où celui qui exerce l’action en justice a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des 3 dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

La Cour de cassation en déduit que le délai de prescription de l’action en paiement de la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence, court à compter de la date à laquelle cette créance est devenue exigible. Et ce quelle que soit la qualification contractuelle que lui donnent les parties.

Pour les salariés payés au mois, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise et concerne l’intégralité du salaire afférent au mois considéré en application de l’article L.3242-1 du code du travail.

En l’espèce, la cour d’appel avait rejeté la demande en paiement de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence considérant que celle-ci était prescrite le 29 octobre 2018 (date où le salarié a saisi la juridiction prud’homale). Elle avait retenu, comme point de départ de cette action, la date du 27 février 2015 (soit le lendemain du départ effectif du salarié et la date d’issue de son préavis), considérant que c’est à cette date que le salarié était tenu de respecter son obligation de non-concurrence et pouvait donc prétendre au versement de la contrepartie financière.

Or, la contrepartie aurait dû être versée mensuellement. Par conséquent, la cour d’appel ne pouvait pas fixer le point de départ du délai de prescription au 27 février 2015. L’action en paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence n’était pas prescrite lorsque le salarié avait présenté sa demande le 29 octobre 2018.

Action en dommages-intérêts pour violation et non-application de la clause de non-concurrence

La Cour de cassation rappelle, tout d’abord, qu’en application de l’article L.1471-1, alinéa 1 du code du travail toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

En l’espèce, la Cour de cassation reproche à la cour d’appel d’avoir considéré l’action en dommages-intérêts pour violation et non application de la clause de non-concurrence et atteinte à la liberté du travail comme prescrite. La cour d’appel ne pouvait pas faire débuter le délai de prescription à partir du 26 février 2015 (date de la fin du préavis) alors que comme l’invoque le salarié, à cette date il ne pouvait pas encore savoir que l’employeur ne lui paierait pas la contrepartie financière de sa clause de non-concurrence.

Le point de départ du délai de prescription est le 26 février 2017, date à laquelle le salarié n’était plus tenu de respecter la clause de non-concurrence. L’action en justice n’était donc pas prescrite.

Françoise Andrieu

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : budget, égalité femmes hommes, formation, gouvernement, nominations, santé

18/10/2024

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO] du vendredi 11 octobre au jeudi 17 octobre inclus.

Budget

Égalité femmes hommes

Formation

  • Un arrêté du 1er octobre 2024 modifie l’arrêté du 21 juillet 2016 relatif aux modalités d’agrément des organismes visés à l’article R. 338-8 du code de l’éducation
  • Une décision du 1er octobre 2024 porte enregistrement au Répertoire national des certifications professionnelles et au répertoire spécifique

Gouvernement

  • Un décret n° 2024-921 du 10 octobre 2024 précise les attributions du ministre du travail et de l’emploi (lire notre brève)
  • Un décret n° 2024-916 du 10 octobre 2024 précise les attributions du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie
  • Un décret n° 2024-918 du 10 octobre 2024 précise les attributions du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes

Nominations

  • Un arrêté du 10 octobre 2024 porte nomination au cabinet de la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée des personnes en situation de handicap
  • Un arrêté du 9 octobre 2024 porte nomination au cabinet de la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques, chargée de l’énergie
  • Un arrêté du 11 octobre 2024 porte nomination au cabinet de la ministre du travail et de l’emploi
  • Un arrêté du 8 octobre 2024 porte nomination au cabinet du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes
  • Un arrêté du 9 octobre 2024 porte nomination au Comité national pour l’emploi
  • Un arrêté du 14 octobre 2024 porte nomination au cabinet du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes
  • Un arrêté du 15 octobre 2024 précise la composition du cabinet du Premier ministre 

Santé sécurité

  • Un arrêté du 26 septembre 2024 fixe le coût moyen national de l’ensemble socle de services des services de prévention et de santé au travail interentreprises

Source : actuel CSE

Les travailleurs de deuxième ligne ont davantage pâti de l’inflation

18/10/2024

Les travailleurs dits “de deuxième ligne” ont été salués pour le maintien de leur activité pendant la crise sanitaire. Mais ont-ils pour autant vu leur salaire progresser ? Une étude de l’Insee, publiée le 16 octobre 2024, montre qu’il y a encore du chemin à faire pour la revalorisation de ces métiers. 

Si ces salariés “ont davantage bénéficié de primes exceptionnelles en 2020, année de la crise sanitaire”, tel n’a pas été le cas pour les années suivantes (2021 et 2022).

Par ailleurs, “entre 2019 et 2022, leur salaire moyen a davantage baissé (-0,7 % en euros constants) que celui des autres employés et ouvriers (-0,2 %), dans un contexte de forte inflation (+8,6 % sur la période)”.

“Parmi les salariés de deuxième ligne présents en 2019, 65 % continuent d’exercer le même métier en 2022”. Pour ces salariés restés en place, le salaire a toutefois été revalorisé de 2,5 % en euros constants.

► En 2022, ces salariés de la deuxième ligne percevaient en moyenne 1 830 euros nets mensuels pour un équivalent temps plein (EQTP), soit légèrement moins que les autres employés et ouvriers du privé.

Source : actuel CSE