Un guide sur l’IA pour les CSE
16/06/2025
Le cabinet d’expertise DTR conseil, spécialisé dans la prévention des risques professionnels, propose pour les CSE un guide sur l’intelligence artificielle.
Téléchargeable sur le site, ce document présente sur 24 pages des définitions de ces technologies (“machine learning”, “deep learning”, “IA générative”, etc.). Il offre un panorama des impacts de l’IA sur les conditions de travail et de ses possibles risques psychosociaux. Le guide énumère ensuite des pistes d’action pour le CSE assorties d’exemples : information-consultation, recours à une expertise pour projet important, recours à l’expertise risque grave, etc.
Source : actuel CSE
L’inflation ralentit, tout comme le montant des primes de partage de la valeur
16/06/2025
En mai 2025, les prix à la consommation baissent de 0,1 % sur un mois (après +0,6 % en avril), et augmentent de 0,7 % sur un an, selon les derniers chiffres de l’Insee.
Cette évolution s’explique par la quatrième baisse consécutive des prix de l’énergie (- 1,4 %) et notamment ceux du pétrole (- 1,7 %), tandis que les prix de l’alimentation augmentent moins fortement (+ 0,5 % en mai après + 0,7% en avril). Cependant, sur un an, les prix de l’alimentation augmentent de + 1,3 %.
Autre chiffre publié par l’Insee le 13 juin : l’évolution des salaires. Les salaires horaires augmentent de 0,1 % au premier trimestre 2025, soit 2,5 % sur un an. L’Insee explique ce ralentissement trimestriel par la baisse des versements de primes de partage de la valeur (PPV) : “520 millions d’euros ont été versés sous forme de PPV aux salariés au premier trimestre 2025, après 1,8 milliard d’euros au trimestre précédent et 500 millions d’euros début 2024”.
Pour sa part, le coût horaire du travail augmente de 0,5 % sur le trimestre et de 2,7 % sur un an.
Source : actuel CSE
Guerre commerciale : le conseil national de l’industrie demande une préférence européenne renforcée
16/06/2025
Instance de concertation qui associe représentants des industriels, des salariés et des personnalités qualifiées, le Conseil national de l’industrie (CNI) a adopté, lors de son comité exécutif vendredi 13 juin, un avis demandant aux pouvoirs publics de développer “la préférence européenne dans la commande publique et les dispositifs publics”.
Face au retour de la guerre commerciale qui avive la concurrence internationale, le CNI demande que le principe de préférence européenne dans les marchés publics, “acté par la commission européenne à la suite du rapport de Mario Draghi”, se base sur “l’origine des produits et pas seulement sur la nationalité des entreprises”.
L’avis du CNI suggère aussi de considérer comme “interdit par principe” l’accès aux marchés publics européens des industriels des pays tiers “avec lesquels nous n’avons pas conclu d’accord d’accès réciproque”.
Le Conseil recommande, en vue de la révision de la directive sur les marchés publics, de recourir plus systématiquement aux critères “hors-prix” comme par exemple la qualité des emplois, le pays d’origine de la propriété intellectuelle ou le recyclage des produits.
Source : actuel CSE
Bastien Berthier, élu au CSE de la RATP : “La pollution de l’air dans le métro est un nouveau scandale sanitaire comme l’amiante”
17/06/2025

Bastien Berthier
Secrétaire de FO Pôle Traction et premier secrétaire adjoint du CSE MTS (Métro services transports) à la RATP, Bastien Berthier a lancé pour le CSE des conducteurs de métro une demande d’expertise sur la pollution de l’air aux particules fines. Cette demande a été contestée en justice par la direction de la RATP. L’élu au CSE nous explique les enjeux de ce dossier.
Pourquoi avoir demandé une expertise sur la pollution de l’air aux particules fines à la RATP ?
En 2015, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a rendu un rapport sur la pollution et la morbidité des agents entre 2000 et 2010. Elle indiquait que les stations et les voies de la RATP étaient bien concernées. A l’époque, les conducteurs du métro partaient en retraite à 50 ans, mais depuis la réforme de 2023, ils ne peuvent plus partir avant 64 ans. Ce qui signifie exposer les agents de la RATP pendant 14 années supplémentaires à ce danger chimique. De plus, en 2016, j’ai déclenché de graves problèmes de santé respiratoire. Je me suis donc penché sur le sujet. La lutte contre la pollution de l’air et les particules fines est devenue mon cheval de bataille. J’ai d’ailleurs participé à l’émission « Vert de rage » diffusée sur France TV, mais comme par hasard elle a été supprimée, il est devenu impossible de la visionner en ligne.
Quel est le contexte de cette demande d’expertise ?
Nous avons écrit au ministère du Travail et aux députés de l’Assemblée nationale il y a un an, en mars 2024, mais à chaque fois que l’on s’adresse au monde politique, on nous répond qu’il n’existe pas d’études ni de chiffres corroborant nos positions. Nous nous adressons donc désormais à notre avocat et notre expert afin de rassembler des preuves, de monter un dossier. Il est temps de demander cette expertise et d’avoir enfin une véritable étude qui analyse l’impact de la pollution de l’air sur la santé des salariés.
N’y a-t-il jamais eu d’études sur la pollution de l’air dans les stations, couloirs ou rames de transport ?
Si mais elles affirment que le danger ne se présente qu’au-delà d’une heure d’exposition, donc Airparif et la RATP se félicitent de savoir que respirer l’air du métro pendant une heure n’expose pas à un danger. Sauf que les salariés de la RATP restent plus de sept heures au travail et les voyageurs sont souvent exposés pendant plus d’une heure, ne serait-ce qu’à l’aller et au retour de leur trajet.
Qu’attendez-vous de cette expertise ?
Nous avons choisi le cabinet spécialisé Aderiss. Il nous a trouvé un laboratoire d’analyses situé à Marseille qui a déjà mené des études dans le métro marseillais RTM et est donc en capacité d’expertiser le métro parisien. En France, il n’existe que trois laboratoires susceptibles d’y parvenir, dont Airparif mais il travaille avec la direction de la RATP et Île-de-France Mobilités. Nous en attendons une étude sur les effets des particules fines sur les conducteurs pendant 6h30 d’exposition. Il est aussi temps d’arrêter de mentir aux gens.
Cette demande d’expertise est-elle partagée par les autres syndicats de la RATP ?
Non, c’est une initiative FO seulement. Je dois préciser que nous sommes majoritaires à 72 % sur le périmètre des conducteurs de métro et premier syndicat chez les opérateurs en bus et en stations. Nous sommes aussi représentatifs à 70 % auprès du personnel de sûreté de la RATP. Lors des dernières élections, en 2021, sommes arrivés en deuxième place au global sur toute la RATP après la CGT. Les prochaines élections auront lieu en 2026. Mais dans le cadre du CSE MTS, la CGT et Solidaires n’ont pas participé au vote.
Aujourd’hui, la direction de la RATP conteste en justice votre demande d’expertise. Savez-vous pour quel motifs
La direction ne conteste pas le choix du cabinet Aderiss, elle conteste le recours même à l’expertise. Dans le dossier, elle s’appuie sur des jurisprudences ayant refusé leur droit d’expertise à des CSE, sans aucun rapport avec des situations sanitaires liées à des pollutions. Donc elle veut tout simplement que l’expertise n’ait pas lieu ! Elle veut l’empêcher mais pour moi, la question de la pollution de l’air à la RATP est un nouveau scandale de type amiante.
Est-ce que votre CSE dispose d’une commission santé ?
Oui mas on préférait le CHSCT ! Notre commission santé a déposé un droit d’alerte le 13 septembre 2022, et il n’a jamais été levé depuis. Nous avions demandé que la direction nous dise que les salariés ne couraient aucun risque, mais elle n’a jamais pu nous le garantir.
En réunion de CSE, que vous répond la direction de la RATP sur ce dossier ?
La direction se cache derrière l’absence de législation sur les particules fines. Elle nous dit qu’elle respecte la loi puisque cette loi n’existe pas. Elle a mis en place des campagnes de ventilation mais la première a pris fin en 2016 et a coûté 96 millions d’euros. On sait aujourd’hui que l’air de certaines stations est quand même sur-pollué, comme à Oberkampf, Jaurès ou Belleville. La RATP s’abrite aussi derrière la rénovation du matériel comme l’amélioration des caténaires.
Quelles sont selon vous les sources des pollutions et combien de salariés concernent-t-elles ?
Les particules fines viennent en partie de la pollution de l’air en surface, c’est-à-dire du trafic routier. Grâce à l’étude réalisée pour le documentaire « Vert de rage », on sait qu’une autre partie vient des systèmes de freinage et du matériel ferré numéro 1, le MF01. Ces rames sont ce que l’on appelle des boas, elles n’ont pas de wagons séparés. Le problème, c’est qu’elles sont plus larges et plus lourdes, elles attaquent directement le rail et produisent ainsi des particules. On les trouve sur les lignes 2, 5 et 9. Quant aux salariés concernés par l’expertise, on dénombre 3 065 conducteurs de métro, 1 224 agents d’encadrement, et une quarantaine d’autres personnels comme des agents de manœuvre.
Qu’en est-il aujourd’hui de l’état de santé de ces salariés aujourd’hui ?
73 salariés m’ont interpellé pour me dire qu’ils rencontrent des problèmes respiratoires. J’en reçois encore aujourd’hui. L’autre problème, c’est leur inquiétude. La pollution de l’air de la RATP leur cause de réels risques psychosociaux en plus de leur santé physique.
Quelle est la prochaine étape pour vous dans ce dossier ?
Le tribunal judiciaire de Paris doit se prononcer sur la contestation de l’expertise par la direction le 3 juillet. En matière d’expertise, on ne passe pas par la Cour d’appel donc en fonction du jugement, nous verrons si nous formons un pourvoi en cassation ou pas.
L’avis d’Arnaud Mocquelet, secrétaire du syndicat CGT RATP |
La CGT est le premier syndicat représentatif sur l’ensemble de la RATP et deuxième syndicat sur le périmètre des conducteurs de métro et RER. Nous avons demandé au secrétaire du syndicat CGT RATP son avis sur la demande d’expertise. “La consigne était de soutenir l’initiative de FO sur la demande d’expertise. Nous soutenons totalement, d’ailleurs nous sommes engagés depuis 2015 sur le sujet. Nous avons écrit à Valérie Pécresse, la présidente de la région Île-de-France, ainsi qu’aux ministres de la Santé et du Travail et relancé nos courriers en 2022 et 2023. La grosse difficulté, c’est qu’il n’existe pas de norme sur les particules fines. Nous avons fait une déclaration au CSE pour dénoncer l’attitude de la direction. Notez qu’elle s’oppose à l’expertise tout en disant que tout va bien. Si tout allait bien, elle n’aurait pas besoin de s’y opposer ! Nous demandons donc l’établissement d’une norme, un suivi médical des salariés et une réduction du temps d’exposition aux particules fines car en matière de pollution, la durée et la répétition font qu’on a plus ou moins de risques de développer des maladies”. |
Marie-Aude Grimont
Les députés veulent créer un examen de conformité sociale
19/06/2025

L’Assemblée nationale a adopté hier, à une courte majorité, le projet de loi de simplification de la vie économique
L’Assemblée nationale a adopté le mardi 17 juin le projet de loi de simplification de la vie économique. Parmi les mesures votées figurent la création d’un examen de conformité sociale et le rejet du bulletin de paie soi-disant simplifié. Le texte réduit aussi, en l’absence de CSE, le délai d’information des salariés en cas de cession de leur entreprise.
Pour 275, contre 252. C’est avec une petite majorité (264 voix favorables étaient requises) que l’Assemblée nationale a adopté, mardi 17 juin en 1ère lecture, le projet de loi de simplification de la vie économique. Un texte “fortement attendu par le monde économique”, a commenté Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des PME et de l’économie sociale et solidaire, citant, entre autres sujets, celui du test PME.
C’est en effet l’une des mesures souhaitées par la chambre basse. Figurant à l’article 27 du texte, elle prévoit que “les travaux du comité interministériel de la transformation publique comportent notamment une analyse de l’impact attendu des normes sur les petites et moyennes entreprises ainsi que sur les autoentrepreneurs, appelée “test TPE-PME”. Le Sénat y est également favorable avec toutefois une divergence importante, celle de l’organe chargé des travaux d’évaluation. Le chambre haute veut en allouer la compétence non pas au comité interministériel de la transformation publique mais à un organe spécifique à créer, le haut Conseil à la simplification pour les entreprises.
Un examen de conformité sociale
L’un des apports de l’Assemblée nationale sur ce projet de loi est sa volonté de créer un examen de conformité sociale. “Cet examen, accessible à toutes les entreprises, permet de vérifier la conformité de leurs pratiques en matière sociale, notamment en ce qui concerne le respect des obligations liées à la sécurité sociale, aux cotisations, aux déclarations sociales et aux autres règles applicables”, prévoit l’article 3 ter A qui indique qu’il faudrait s’inspirer de l’examen de conformité fiscale.
Un décret et un arrêté viendraient apporter les précisions nécessaires à sa mise en œuvre. Toutefois, des indications figurent dans l’exposé des motifs de l’amendement adopté par l’Assemblée nationale. Le dispositif, qui aurait pour but de détecter et de corriger en amont des anomalies, serait facultatif, mis en œuvre par un prestataire agréé et ne conduirait pas à une exonération systématique des sanctions en cas de contrôle.
Rejet du bulletin de paie dit simplifié
Tout comme le Sénat, l’Assemblée nationale a supprimé l’article 7 qui voulait instaurer un bulletin de paie dit simplifié.
L’idée sous-jacente, portée en 2024 par Bruno Le Maire lorsqu’il était ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, est de supprimer l’affichage obligatoire de nombreuses lignes du bulletin. L’une des critiques est que cela ne simplifierait pas la charge au niveau des entreprises. Bien au contraire, “la suppression des lignes du bulletin de paie s’accompagne d’une nouvelle obligation pour l’employeur qui devrait continuer à collecter ces éléments, les conserver et les mettre à disposition de manière sécurisée pour les salariés. La mise en place de cette nouvelle modalité d’information du salarié constitue une nouvelle charge administrative pour l’employeur, qui semble contradictoire avec la volonté affichée de simplification”, pointait l’année dernière la commission sénatoriale spéciale chargée d’examiner ce texte.
En cas de cession, l’employeur n’aurait qu’un mois pour informer les salariés dépourvus de CSE |
La version votée par les députés ne comprend plus la suppression de l’Ires (Institut de recherches économiques et sociales, au service des syndicats) et elle ne reprend pas non plus l’idée de supprimer les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER). En revanche, le texte abaisse le délai d’information des salariés en cas de cession d’entreprise, mais seulement dans les entreprises dépourvues de CSE (art. 6 du projet de loi). Ce délai passe de 2 à 1 mois. La modification touche les articles L. 141-23 et L. 23-10-1 du code du commerce, qui traitent de l’information sur la cession donnée aux salariés dans les entreprises “n’ayant pas l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise”. Ces derniers mots, obsolètes, sont remplacés par cette formule : “dans les entreprises ne disposant pas d’un comité social et économique exerçant les attributions mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 2312-1 du code du travail”. Cette dernière modification vise aussi l’article du code du commerce (art. L.23-10.7) traitant de l’information donnée, en cas de cession de l’entreprise, au CSE, afin de remplacer la mention obsolète du CE par la formule : “comité social et économique exerçant les attributions mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 2312-1” (Ndlr : cet article renvoie aux attributions des CSE de moins de 50 et d’au moins 50 salariés). Rappelons que l’art. L. 23-10-7 prévoit l’obligation pour le chef d’entreprise envisageant la cession de la société de procéder à l’information des salariés en même temps que celle des CSE, cette information devant préciser que les salariés peuvent présenter eux-mêmes une offre de reprise. La réduction du délai d’information pour les salariés sans CSE est critiquée par la CGT : “Au moment où nous recensons de très importantes suppressions d’emplois, il est au contraire crucial de l’augmenter et de consolider les aspects de financement liés à une reprise de l’entreprise par les salariés”. Ajoutons, à l’inverse, qu’un amendement du groupe LFI a été voté (art. 6 bis A) pour que “la Nation se fixe pour objectif la création d’un fonds dédié à la reprise d’entreprises par les salariés et d’une garantie sur les prêts personnels contractés par les salariés”. Bernard Domergue |
Ludovic Arbelet
Conjoncture : 90 000 emplois salariés pourraient être supprimés d’ici fin 2025
19/06/2025
Selon les dernières estimations de l’Insee, publiées hier, la conjoncture économique en France se tend : les investissements peinent à repartir tandis que le commerce extérieur ne soutient plus la croissance. Si bien que l’Institut ne prévoit que + 0,6 % de croissance pour 2025, après +1,1 % en 2024.
De ce fait, les effets sur l’emploi et le chômage se font plus nettement sentir.
L’Institut national de la statistique estime que le climat de l’emploi “est inférieur à sa moyenne de longue période depuis l’été 2024 et qu’il s’est à nouveau dégradé depuis le début 2025”. Les entreprises, confrontées “à la compression des aides à l’apprentissage et des enveloppes d’emplois aidés”, cherchent à rétablir leur productivité. Conséquence : depuis deux trimestres, l’économie française a détruit 120 000 postes de salariés et 90 000 postes supplémentaires pourraient être supprimés d’ici la fin de l’année, dont deux tiers d’alternants. Soit, au total, environ 210 000 emplois salariés de perdus en cinq trimestres.
“Conjuguée à l’augmentation de la population active engendrée par la montée en charge de la réforme des retraites, cette baisse de l’emploi pousserait le taux de chômage à la hausse à 7,7 % fin 2025”, estime l’Insee.
Source : actuel CSE
Cybersécurité : les suggestions de la Cour des comptes
19/06/2025
Le 16 juin, la Cour des comptes a publié un rapport sur la cybersécurité (“la réponse de l’Etat aux cybermenaces sur les systèmes d’information civils”).
Face à la forte croissance des cybermenaces, “une nouvelle stratégie nationale de cybersécurité, qui met en œuvre le cadre européen récemment adopté” est justifiée, précise-t-elle dans son communiqué.
À ses yeux, ces évolutions nécessitent :
- d’adapter les missions de l’ANSSI (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information), de renforcer ses moyens et changer sa culture ;
- d’accompagner le développement de l’écosystème cyber ;
- et de diffuser la culture de la sécurité numérique dans la société.
Source : actuel CSE
Un accord de dialogue social peut confier au seul CSE central le recours à l’expertise sur la politique sociale
20/06/2025
La Cour de cassation décide que les partenaires sociaux peuvent librement choisir par accord de réserver l’expertise portant sur la politique sociale au seul CSE central, quand bien même les CSE d’établissements sont aussi consultés sur cette politique sociale. Au grand dam de la CFE-CGC d’Orange qui contestait cette disposition, ainsi que d’autres points (rôle des représentants de proximité et de la CSSCT), de l’accord de l’entreprise sur le dialogue social.
Le 13 mai 2019, un accord sur le dialogue social (lire le document en pièce jointe) est signé par la direction d’Orange d’un côté, et par SUD-PTT, la CFDT, FO et la CGT d’autre part, pour la mise en place et le fonctionnement des comités sociaux et économiques d’établissement (CSEE) et du comité social et économique central (CSEC).
Non signataire de l’accord, le syndicat CFE-CGC conteste en justice plusieurs dispositions du texte et demande au juge d’annuler ces dispositions et d’enjoindre aux parties de renégocier ces points. Dans cet article, nous abordons ces différents points traités par l’arrêt du 18 juin de la Cour de cassation.
Le recours à l’expert par le CSE sur la politique sociale
⇒ L’un de ces points concerne le recours par un CSE d’établissement à un expert.
Dans son article 8.1.2, l’accord prévoit en effet que, si les CSE d’établissements de l’Unité économique et sociale d’Orange sont bien consultés sur la politique sociale, les conditions de travail et d’emploi au sein de leur périmètre, en revanche, ces CSE d’établissement ne peuvent pas recourir à un expert à l’occasion de cette consultation, ce droit étant réservé au CSE central.
Pour la CFE-CGC d’Orange, la possibilité du CSE de recourir à un expert dès lors qu’il est compétent pour le faire revêt un caractère d’ordre public et ne faire l’objet d’une disposition dérogatoire dans un accord collectif. L’articulation de l’accord peut en effet poser question : pourquoi conserver une consultation du CSE d’établissement si celui-ci est privé du droit d’expertise ? Pourquoi n’avoir pas tout centralisé au niveau du CSE central ? La Cour de cassation, en 2022, a en effet décidé qu’un accord collectif pouvait centraliser la consultation en matière économique et en matière sociale au niveau du CSE central.
Extrait de l’accord (art. 8.1.2) “Il n’est pas prévu de droit d’expertise au niveau des CSEE concernant l’information-consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et d’emploi au sein de l’établissement distinct. Le recours à l’expert dans le cadre de l’information-consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et d’emploi, les orientations PPEC et la formation relèvent de la compétence exclusive du CSEC“. |
► La décision de la Cour : Certes, admet la Cour de cassation, le CSE d’établissement a un droit d’expertise reconnu par le code du travail (art. L. 2316-21). Mais selon un autre article du code (art. L. 2312-19, 3e), un accord d’entreprise peut également définir les niveaux auxquels les consultations sont conduites ainsi que leur articulation. Cet article n’aborde cependant pas la question des expertises que peut conduire le CSE. L’on pourrait en rester à la logique de compétence : si le CSE est compétent dans tel domaine, alors il a le droit de lancer une expertise sur ce domaine, à moins que l’accord de dialogue social ne transfère au CSE central la consultation à laquelle est rattachée l’expertise.
Mais la Cour de cassation se fonde ici sur la directive européenne 2002/14/CE du 11 mars 2002 pour affirmer que les partenaires sociaux “peuvent définir librement, par voie d’accord, les modalités d’information et de consultation des travailleurs qu’ils jugent plus conformes à leurs besoins et à leurs souhaits”. De ce considérant 23 de la directive européenne, la Cour de cassation déduit que les signataires d’un accord collectif “peuvent réserver au CSE central le droit à expertise portant sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, quand bien même l’accord collectif prévoit que l’information-consultation sur certains thèmes de la politique sociale, des conditions de travail et de l’emploi est menée au niveau des comités sociaux et économiques d’établissement”.
Autrement dit, les signataires de l’accord de l’UES Orange étaient bien fondés à réserver au CSE central le droit à expertise pour la politique sociale et la Cour d’appel avait eu raison de rejeter la demande de la CFE-CGC d’annuler l’article 8.1.2 de l’accord collectif.
► Remarque Cette jurisprudence interroge par rapport à d’autres arrêts de la Cour de cassation. Pour résumer, on peut dire que jusqu’à présent, la Cour établissait un lien fort entre droit à consultation et droit à expertise. Autrement dit, un accord collectif pouvait priver le droit à expertise d’un CSE d’établissement dès lors que la consultation liée à ce droit était prévue par accord au niveau du CSE central (voir par exemple l’arrêt n°21-25.233 du 20 septembre 2023). Or tel n’est pas le cas chez Orange.
Les autres points contestés
La Cour de cassation rejette aussi toutes les autres demandes de la CFE-CGC tendant à faire annuler d’autres points de l’accord social d’Orange. Voyons les articles qui étaient visés.
⇒ L’article 18 traitant des réclamations individuelles et collectives des salariés.
Cette disposition réserve aux représentants de proximité (RP) la prise en charge de ces réclamations. La CFE-CGC soutient que le CSE ne peut pas être privé d’une attribution qui est d’ordre public (art. 2312-5 du code du travail), d’autant que les dispositions conventionnelles décidées ici ne sont pas plus favorables.
Extrait de l’accord (art. 18) “Les RP sont désignés et interviennent dans le cadre du périmètre de chaque CSSCT permanentes, constituées au sein des établissements (..) Le/la RP se voit confier les missions suivantes aux bornes de son périmètre d’intervention : prendre en charge, de manière exclusive, des réclamations individuelles et collectives ; prendre en charge les actions de proximité en matière de santé, sécurité, conditions de travail et de qualité de vie au travail (..) ; être un relais d’information local entre le CSEE, les salariés et les représentants de l’entreprise” |
► La décision de la Cour : en l’absence de disposition législative contraire, et au regard de la volonté du législateur ayant prévu l’institution de représentants de proximité ayant vocation à représenter les salariés sur le périmètre d’un site selon des modalités définies par accord (art. L.2313-7 du code du travail), “un accord d’entreprise peut confier aux représentants de proximité la mission de présenter à l’employeur les réclamations individuelles ou collectives de salariés de manière exclusive”. D’autant, ajoute l’arrêt, que les salariés conservent en tout état de cause, “le droit de présenter eux-mêmes leurs observations à l’employeur ou à ses représentants au sein de chaque établissement” (art. L.2312-7 du code du travail).
► Remarque Notons que dans un arrêt du 21 avril 2022, la Cour d’appel de Paris a jugé que le CSE restait compétent pour présenter des réclamations individuelles et collectives, l’accord collectif prévoyant que les représentants de proximité agissaient “sur délégation du CSE, notamment pour présenter les réclamations.
⇒ L’article 11.3.1.1 traitant des réunions du CSE prévues en cas d’accident grave.
Par cet article, l’accord confie à la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) les réunions que peut organiser le CSE en cas d’accident grave ayant entraîné (ou ayant pu le faire) des conséquences graves et en cas d’événement grave lié à l’activité de l’entreprise ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l’environnement. Le syndicat soutient que ces réunions ne peuvent être déléguées par accord à la CSSCT. De fait, ces réunions du CSE en matière d’accident grave sont d’ordre public et ne peuvent donc pas être écartées l’objet d’aménagements par accord. Mais sont-elles transférables à la CSSCT ?
Extrait de l’accord (art. 11.3.1.1) “La CSSCT tient au minimum une réunion par trimestre (..). Par délégation du CSEE, la CSSCT est également réunie à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves, ainsi qu’en cas d’événement grave lié à l’activité de l’établissement distinct, ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l’environnement”. |
► La décision de la Cour : au moins 4 réunions par an du CSE doivent être consacrées aux questions de santé, sécurité et conditions de travail et le CSE doit être en effet réuni à la suite de tout accident grave, rappelle l’arrêt. Mais les attributions du CSE sur ce point, à l’exception du recours à l’expert, peuvent être confiées à la CSSCT par un accord d’entreprise.
► Remarque : la question se pose de la nature du travail de la CSSCT si le CSE lui délègue la réunion en cas d’accident grave. La CSSCT reste en effet une commission qui ne peut émettre un avis ni lancer une expertise, ce qui suppose de faire remonter ces projets au CSE.
⇒ L’article 13.1.1.1 sur le rapport annuel sur l’organisation et la gestion du service de santé au travail.
Ce point prévoit que ce rapport est mis à disposition dans la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) mais qu’il ne fait pas l’objet d’une présentation en réunion CSE. La CFE-CGC soutient que cela viole l’art. D. 4622-54 du code du travail.
Extrait de l’accord (art. 13.1.1.1) “13.1 Informations et informations-consultations récurrentes du CSEC. 13.1.1.1 Principes généraux (..) Par ailleurs, les parties conviennent que le rapport administratif et financier du service de santé au travail (RAF) est mis à la disposition des élus dans la BDES. Ce rapport ne fait pas l’objet d’une présentation en réunion”. |
► La décision de la Cour : Certes, l’art. D. 4622-54 prévoit que l’employeur ou le président du service de santé présente le rapport annuel du service de santé au travail soit au CSE, soit au comité interentreprises, soit à la commission de contrôle et au conseil d’administration. Mais, raisonne la Cour de cassation, un accord d’entreprise, selon l’art. L.2312-9, peut définir la périodicité et le contenu des consultations récurrentes du CSE, tout comme l’organisation, l’architecture et le contenu de la BDESE (art. L.2312-21). Déduction de la Cour de cassation : un accord collectif peut donc prévoir que le rapport administratif et financier du service de santé soit mis à disposition des élus dans la BDESE.
⇒ Plusieurs articles (21.3.6.1, 21.3.6.2, 21.3.6.3 et 21.4) traitant des organisations syndicales.
Ces dispositions prévoient la prise en charge par l’employeur des frais de déplacement des délégués syndicaux, mais pas celle des représentants de section syndicale (RSS). Pour le syndicat CFE-CGC, cette différence de traitement entre organisations syndicales représentatives et non-représentatives n’est pas conforme.
Extrait de l’accord (art 21.3.6.1) “En dehors des déplacements réalisés dans le cadre d’une invitation de l’employeur, l’entreprise prend en charge les frais de déplacement et d’hébergement réalisés les jours ouvrables : dans la limite de 12 déplacements par trimestre par DS au niveau de l’établissement distinct (..)”. (art. 21.4) “Il est rappelé que le RSS (..) ne bénéficie pas de la prise en charge de ses déplacements, sauf pour une réunion convoquée par l’entreprise”. |
► La décision de la Cour : “Si le représentant de section syndicale a le droit de circuler librement dans l’entreprise, un accord peut réserver le remboursement par l’employeur, selon certaines modalités, des frais de déplacements aux seuls délégués syndicaux”. Cette différence ne prive d’ailleurs pas les RSS de l’exercice de leurs prérogatives légales, ajoute l’arrêt, les frais dont il est question ne portant pas sur les réunions convoquées par l’entreprise.
⇒ L’article 38 réservant aux seuls signataires de l’accord l’accès à la commission de suivi de l’accord.
Cette disposition nuit à l’identification de points pouvant justifier une renégociation de l’accord, plaide la CFE-CGC.
Extrait de l’accord (art. 38) “Une commission de suivi de l’accord est constituée, composée de : 2 représentants par OS signataire (prioritairement choisis parmi les négociateurs de l’accord) ; représentants de l’entreprise dont le nombre ne peut être supérieur à celui des représentants des OS. Cette commission (..) aura également pour attribution d’identifier, le cas échéant, les éléments pouvant justifier un avenant correctif à l’accord”. |
► La décision de la Cour : dès lors que la commission de suivi n’a pas pour mission d’engager des négociations en vue de la révision de l’accord, ses membres peuvent être désignés par les seules organisations syndicales de l’accord.
Bernard Domergue