La Poste prévoit 32 CSE d’établissement en 2024
23/10/2023
Deux accords, signés le 28 septembre 2023 par la direction de la Poste et une partie des organisations syndicales (CFDT, CFE-CGC, CFTC, FO, UNSA, la CGT et SUD n’étant pas signataires) redéfinissent les comités sociaux économiques (CSE) et les moyens dévolus au dialogue social dans cet établissement public devenu société anonyme en 2010.
Ces deux accords tirent les conséquences de la loi du 22 novembre 2022 sur la Poste. Ils s’appliqueront au terme des élections professionnelles prévues en 2024 et sont à durée déterminée : ils ne s’appliqueront donc que pour la première mandature.
Le premier accord détermine le nombre d’établissements. Au-dessous du comité social et économique central (CSE-C) qui sera flanqué de 3 commissions santé, sécurité et conditions de travail centrale (CSSCT-C) afin de tenir compte de la diversité des activité, il y aura 32 CSE-E (CSE d’établissement) dans l’entreprise, dont 16 dans la branche services courrier colis, 13 dans la branche grand public et numérique (dont 5 Outre-Mer), 2 CSE dans la branche de la Banque Poste et un au siège du groupe.
Sont également prévus des représentants de proximité (RP) à raison d’un RP “par tranche de 100 postiers en moyenne”. Ils seront chargés des réclamations individuelles et collectives, des actions de proximité en matière de santé, sécurité et conditions de travail et joueront le rôle de relais pour les activités sociales et culturelles et les questions de logement.
Le second accord aligne l’effectif et le crédit d’heures de la délégation du personnel sur les niveaux prévus par le code du travail. Une plus grande souplesse d’utilisation individuelle du crédit d’heures est néanmoins prévue dans l’accord. Ainsi un membre d’un CSE-E pourra annualiser ses heures et prendre jusqu’à 48 heures sur un mois donné.
A noter que l’accord autorise les CSE à échanger des mails avec les postiers sur les messageries professionnelles.
Source : actuel CSE
Le nombre de déclarations d’embauche de plus d’un mois est stable au troisième trimestre 2023
23/10/2023
Au troisième trimestre 2023, le nombre de déclarations d’embauche de plus d’un mois hors intérim est stable (+ 0,1 %) après la progression de 0,8 % enregistrée au deuxième trimestre 2023. Ainsi, l’augmentation des embauches en CDD de plus d’un mois (+ 0,9 % après + 1,2 %) compense la diminution de celles en CDI (- 0,7 % après + 0,4 %).
Sur un an, les déclarations d’embauche de plus d’un mois diminuent de 2,8 % compte tenu du pic historique atteint au troisième trimestre 2022. Cette évolution résulte des baisses simultanées des embauches en CDD de plus d’un mois (- 2,9 %) et de celles en CDI (- 2,6 %). Le niveau des déclarations d’embauche de plus d’un mois reste néanmoins supérieur de 13,5 % à celui du dernier trimestre 2019, juste avant le déclenchement de la crise Covid.
Au troisième trimestre 2023, le nombre des déclarations d’embauche de plus d’un mois s’accroît encore dans les entreprises de moins de 20 salariés (+ 0,7 % après + 0,8 %) tandis qu’il diminue dans celles de plus grande taille (- 0,3 % après + 0,7 %).
Source : actuel CSE
PSE motivé par l’intelligence artificielle : l’entreprise reporte son plan social
23/10/2023
L’annonce avait défrayé la chronique : début septembre, l’entreprise Onclusive, spécialisée dans la veille (réalisation de revue de presse), avait annoncé son intention de supprimer, entre janvier et juin 2024, 217 de ses 383 emplois basés à Courbevoie, près de Paris, le travail des salariés devant être remplacé par l’automatisation des tâches avec l’intelligence artificielle. Jeudi 19 octobre, la direction a toutefois annoncé le report de son plan social, indique le quotidien Le Parisien. La procédure d’information-consultation du CSE sur ce PSE est donc interrompue. Cette décision fait suite aux réactions syndicales mais aussi aux observations critiques formulées par l’administration sur le projet de l’entreprise. Un nouveau projet devrait être présenté en décembre prochain.
Source : actuel CSE
“Les salariés des agences bancaires sont confrontés à des agressions verbales et physiques”
24/10/2023
Nathalie Vincent dit Mahaut, que nous avons rencontrée à l’occasion du salon Eluceo de Paris la semaine dernière, est la nouvelle secrétaire du CSE “GPSE” de LCL (ex-Crédit Lyonnais), qui représente 3 000 salariés travaillant sur plusieurs départements franciliens. Une des préoccupations des salariés concerne les incivilités dont ils sont victimes dans les agences bancaires. Interview.
Depuis quand êtes-vous secrétaire de votre CSE ?
Je suis secrétaire du CSE “GPSE” de LCL (ex-Crédit Lyonnais) depuis les dernières élections professionnelles, en juillet 2023. Le CSE représente 3 000 salariés qui travaillent sur les départements des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis, de l’Essonne, des Hauts-de-Seine et du Val-de-Marne. C’est mon premier mandat comme secrétaire du CSE, mais je n’ai pas d’appréhension particulière, je suis bien accompagnée par les autres élus et par mon organisation syndicale, le SNB (Ndlr : syndicat national bancaire, affilié à la CFE-CGC).
Quelles sont les préoccupations des salariés de votre entreprise ?
Notre CSE représente des salariés qui travaillent dans de nombreuses agences bancaires. Et ce qui nous remonte, ce sont de nombreuses incivilités de la part de la clientèle. Que ce soit par téléphone ou en présentiel dans les agences, il y a des agressions verbales, et parfois même physiques comme des projections d’objets sur les salariés.
Ces agressions sont-elles liées à des problèmes de pouvoir d’achat ?
C’est lié à plein de choses : un délai trop long, une non-réponse à une demande, un refus, etc. Au niveau du CSE, nous nous attachons à ce que toutes ces incivilités nous soient remontées rapidement, afin que nous puissions mettre en place des solutions pour éviter que cela se reproduise, dans la mesure du possible. Quand un agresseur est identifié, nous demandons à ce que des directives soient prises, et cela peut même aller jusqu’à la clôture du compte bancaire de la personne.
Le CSE ou sa commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) fait-il des enquêtes ou inspections suite à ces incivilités ?
Bien sûr ! Nous prenons contact avec les salariés concernés, nous voyons déjà comment ils ont perçu cette incivilité afin de quantifier le risque, nous faisons aussi appel à l’assistance sociale pour assurer un accompagnement, car il peut aussi y avoir des menaces et même des menaces de mort visant des salariés.
Votre travail modifie-t-il le plan de prévention des risques de l’entreprise ?
En effet. Par exemple, nous avons fait simplifier et améliorer le système de déclaration des incidents et violences afin que le salarié victime d’incivilités puisse rapidement faire une déclaration d’incidents.
Quelles sont les autres préoccupations des salariés que vous avez à traiter ?
Nous suivons des travaux effectués dans des bâtiments car ils peuvent avoir des effets sur les conditions de travail de nos collègues, sur le bruit comme sur le désamiantage, la propreté. Il faut dire que sur le périmètre de notre CSE, nous avons 280 sites différents avec les agences mais aussi les différents services.
Comment assurer une proximité entre les élus et les salariés sur 280 sites ?
Au niveau du SNB, nous nous organisons entre élus pour couvrir la totalité du périmètre du CSE, le but étant de passer au moins deux fois par an sur tous les sites. Chez nous, le climat social est assez tendu. Les raisons ? Le pouvoir d’achat, les salaires, la pression commerciale, et les conditions de travail bien sûr. Il y a une situation de sous-effectif, suite à des démissions, des départs non remplacés, et ce n’est pas normal alors que notre société dégage de bons résultats. Ca devient très problématique dans les petites structures : une agence qui tourne avec 4 personnes, dès que vous avez un arrêt maladie ou une démission, ça met le reste de l’équipe en difficulté. Tout cela engendre des risques psychosociaux. Nous avons déjà lancé des alertes sur ce sujet. Il est vrai qu’il y a des campagnes de recrutement mais c’est compliqué de recruter car les métiers de la banque sont plus difficiles qu’auparavant et les personnes qui arrivent chez nous le découvrent. Il faut faire en sorte que les personnes recrutées restent, ce qui passe par l’amélioration des conditions de travail.
Un conseil pour de nouveaux élus ?
Portez la parole des salariés, remontez les problèmes pour alerter la direction afin de tenter de trouver des solutions !
Bernard Domergue
“Indicateur climat” : la Banque de France recueillera les données liées à la durabilité des entreprises
24/10/2023
Définitivement adopté, le projet de loi Industrie verte habilite désormais la Banque de France à recueillir les données des entreprises liées aux enjeux de durabilité. L’objectif : faciliter la compréhension par les banques de l’impact des entreprises sur les enjeux environnementaux et climatiques. On fait le point sur ce nouveau dispositif.
Après 5 mois de négociations, le projet de loi Industrie verte a été définitivement adopté, après le vote à l’Assemblée nationale le 10 octobre, puis au Sénat le 11 octobre. Parmi les mesures prévues par le texte, le nouvel « indicateur climat », qui va autoriser la Banque de France à recueillir les données des entreprises qui sont liées aux enjeux de durabilité. Quelles seront les entreprises concernées ? Quelles données seront transmises à la Banque de France ? Explications.
L’objectif affiché par le gouvernement : « faciliter la compréhension par les banques de l’impact des entreprises sur les enjeux environnementaux ». En d’autres termes, il s’agira pour la Banque de France, de recueillir des données d’entreprises liées aux enjeux de durabilité, « en s’appuyant en particulier sur la directive CSRD relative aux informations de durabilité des entreprises, afin de réaliser des analyses utiles à la prise en compte par le secteur financier de ces enjeux », indique l’exposé des motifs. Cette prérogative permettra « de produire un indicateur fiable et facilitant la comparaison de l’exposition des entreprises aux enjeux climatiques, qu’elle mettrait à disposition des entreprises et des acteurs financiers ».
Or, dès l’origine, la disposition introduite dans le texte, en son article 15 bis, via un amendement déposé par le gouvernement, faisait débat.
A l’origine : une obligation pour toutes les entreprises
L’amendement qui prévoyait d’ajouter au code monétaire et financier de nouvelles dispositions, était ainsi rédigé : « Les entreprises non financières doivent communiquer à la Banque de France tous documents et renseignements, y compris les données nécessaires à la compréhension des impacts, risques et opportunités liés aux enjeux de durabilité, qui lui sont nécessaires pour l’exercice de ses missions mentionnées au premier alinéa du présent ». Ce faisant, cet ajout créait en effet une « obligation pour toutes les entreprises, de transmettre à la Banque de France des informations devant permettre l’établissement d’une cotation verte des entreprises », a rappelé lors des discussions Christine Lavarde, rapporteur pour le Sénat.
Afin de contenter l’ensemble des parties prenantes, les ambitions du dispositif ont donc été revues à la baisse dans la version finale du texte.
Il a en effet été proposé de supprimer cette obligation et seulement d’habiliter la Banque de France à recevoir les données des entreprises qui « souhaitent les lui transmettre » pour bénéficier de cette note « climat ».
Plus de 500 entreprises-tests en 2023
Pour construire cette note, la Banque de France s’appuiera « sur la méthodologie ACT de l’ADEME » et permettra de « mesurer l’exposition des entreprises aux risques climatiques ». Cet indicateur « aidera les entreprises à piloter leur stratégie de transition », « simplifiera et unifiera leur gestion des données climatiques », a déclaré François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France dans un communiqué publié en juillet.
A noter que ce nouvel indice climat est en cours de validation et fait déjà l’objet d’une expérimentation « avec plus de 500 entreprises-tests en 2023 sur l’ensemble du territoire. Il sera ensuite progressivement généralisé, d’abord à l’ensemble des grandes entreprises et ETI, puis aux PME ».
Leslie Brassac
Filière automobile : 135 000 personnes formées à la transition énergétique d’ici 2030
25/10/2023
Les ministres de l’économie et de l’industrie ont présenté hier un bilan du plan d’action du gouvernement (France 2030) à la filière automobile.
Ce plan comprend notamment la prolongation jusqu’au 30 juin 2024 du fonds exceptionnel d’accompagnement et de reconversion des salariés licenciés économiques par les sous-traitants en difficulté, un plan doté de 50 millions d’euros, financé par l’Etat et les constructeurs, pour “favoriser leur retour à l’emploi grâce à un accompagnement renforcé”.
Par ailleurs, l’Etat table sur la formation de 135 000 personnes d’ici 2030 via le soutien à des financements de formations aux métiers-clé pour la transition énergétique de la filière automobile : “L‘investissement public contribue aux financements de 7 projets à hauteur de près de 67M€ pour un total d’investissement de plus de 120M€. La filière automobile est également accompagnée sur les questions d’anticipation des besoins en emplois et compétences dans le cadre du dispositif d’Engagement de développement de l’emploi et des compétences (EDEC) de la filière automobile. Ce dispositif mis en place en 2019, pour une durée de 5 ans, accompagne les branches professionnelles et les entreprises dans leurs réflexions sur les évolutions des emplois et des compétences à travers des actions d’anticipation comme des études prospectives (fonderies, électronique de puissance…), des actions à visée territoriale répondant à des enjeux spécifiques en matière d’ingénierie de formation, de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ou encore pour répondre à des problématiques de métiers en tension. Ce dispositif pourra, le cas échéant, être mobilisé de nouveau à l’échéance de l’EDEC actuel en 2024”.
L’Etat estime par ailleurs que la montée en puissance du marché des véhicules zéro émissions, autonomes et connectés “devrait permettre au moins 245 000 créations d’emploi entre 2023 et 2035 en Europe”, le chef de l’Etat souhaitant que la France produise 1 million de véhicules électrifiés en 2027 et 2 millions en 2030.
Source : actuel CSE
L’employeur a 10 jours à compter de la délibération du CSE pour contester la nécessité de l’expertise
26/10/2023
L’employeur qui prétend que l’expertise décidée par le CSE est une expertise libre et non une expertise légale, qu’il lui reviendrait de payer, doit agir dans un délai de 10 jours à compter de la délibération du CSE.
A un mois d’intervalle, le CSE d’une grande enseigne de la distribution vote deux expertises.
Une première, par délibération du 28 février 2019, pour se faire assister par un expert-comptable dans le cadre de la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise.
Une seconde, par délibération du 21 mars 2019, en vue cette fois-ci de se faire assister par le même expert-comptable pour la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi.
Le code du travail donne en effet la possibilité au CSE de se faire assister par un expert-comptable dans le cadre d’une mission légale. C’est le cas pour la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise et pour la consultation sur la politique sociale, l’emploi et les conditions de travail. Ces deux expertises sont à la charge de l’employeur.
Facture reçue mais non acquittée
Après présentation de son rapport en réunion de CSE, l’expert adresse à l’employeur le 25 juillet 2019 sa facture définitive pour obtenir le paiement du solde d’honoraires.
Le 2 août suivant, l’affaire est portée en justice par l’employeur afin d’obtenir le remboursement de la somme déjà versée à l’expert et faire juger qu’il n’a pas à verser le solde. Son argument consiste à dire que ces deux expertises “constituaient des expertises libres” (…) décidées avant la transmission des comptes et le dépôt des documents d’information utiles à la base des données économiques et sociales”.
En conséquence, pour la direction, ces expertises n’avaient pas à être prises en charge par l’entreprise.
Les motifs de la décision du juge
Cette demande est rejetée : elle est jugée tardive au regard du délai de contestation de 10 jours prévu par le code du travail.
En effet, d’après les articles L. 2315-86 et R. 2315-49, l’employeur qui souhaite contester la nécessité de l’expertise doit agir dans un délai de 10 jours à compter de la délibération du CSE décidant le recours à l’expertise. Lorsqu’il conteste le coût final de l’expertise, il doit agir dans les 10 jours à compter de la notification du coût final.
Or, comme l’avaient constaté les juges dans cette affaire, l’employeur ne contestait ni le montant des factures adressées par l’expert, ni le coût final des expertises, mais bien “le principe de son paiement”. Il avait bel et bien été “informé des délibérations adoptées lors des séances du CSE des 28 février et 21 mars 2019 auxquelles il assistait et de leurs conséquences, notamment du fait qu’il devrait prendre en charge le montant des expertises ordonnées en vue de consultations récurrentes”.
Enfin, il avait “réglé, sans contestation, l’acompte réclamé par l’expert désigné par ces mêmes délibérations”.
En conséquence, pour les juges, il avait été “mis en mesure de connaître la nature et l’objet des expertises dès les délibérations du CSE”. La saisine tardive du 2 août 2019 aux fins de contester la nature des expertises litigieuses était donc irrecevable pour cause de forclusion.
Frédéric Aouate
Participation : la question prioritaire d’un CSE est transmise au Conseil constitutionnel
26/10/2023
Dans une décision du 25 octobre, la Cour de cassation a décidé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par un CSE, celui de Procter & Gamble Amiens, appuyé par les syndicats FO et CGT, au sujet du droit des salariés à percevoir une participation aux bénéfices de l’entreprise.
La question est formulée ainsi :
« L’article L. 3326-1 du code du travail méconnaît-il les droits et libertés que la Constitution garantit, notamment les articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 et les articles 6 et 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, en ce qu’il interdit de remettre en cause le bénéfice net d’une entreprise après l’attestation du commissaire aux comptes ou de l’inspecteur des impôts, même en cas de fraude, et qu’il prive ainsi les salariés ou leurs représentants de toute voie de recours permettant de contester utilement le calcul de la réserve de participation et qu’il conduit au surplus à neutraliser les accords passés au sein de l’entreprise dans le cadre de la détermination de la réserve de participation ? »
Le CSE estime que les clauses de rémunération des contrats de façonnage et de commissionnaire conclus par ces sociétés avec la société de droit suisse Procter & Gamble International Operations (P&G IO) permettent à cette dernière “de fixer de manière arbitraire les bénéfices revenant aux sociétés de façonnage et de distribution et que ces clauses, qui prédéterminaient le bénéfice de ces sociétés, avaient pour conséquence de réduire l’assiette de la participation des salariés aux résultats de l’entreprise”.
Or il s’avère impossible pour les représentants du personnel, en vertu de l’article cité du code du travail, de remettre en cause un montage préjudiciable aux intérêts des salariés et à leur droit de percevoir une participation.
Nous reviendrons sur cette QPC dans un prochain article.
Source : actuel CSE
Participation : un CSE pourra-t-il demain contester les prix de transfert ?
27/10/2023
Le comité social et économique (CSE) de Procter & Gamble à Amiens a posé une question prioritaire de constitutionnalité visant à remettre en cause un article du code du travail empêchant toute remise en cause de montants des bénéfices nets comptables d’une entreprise, quand bien même la faiblesse de ces bénéfices résulte d’un montage et d’échanges entre sociétés d’un même groupe ayant pour but de minorer le droit des salariés à bénéficier d’une participation aux résultats. Le juge constitutionnel devra trancher.
La Cour de cassation a jugé la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) suffisamment étayée et sérieuse pour la transmettre, le 25 octobre, au Conseil constitutionnel. Le juge constitutionnel devra donc se prononcer sur la conformité à la Constitution de l’article L. 3326-1 du code du travail. Cet article interdit en effet, à l’occasion d’un litige portant sur le calcul de la réserve de participation, toute remise en cause du bénéfice net d’une entreprise après l’attestation du commissaire aux comptes ou de l’inspecteur des impôts, même en cas de fraude.
Ce faisant, plaide le CSE de Procter & Gamble à Amiens (*) appuyé par les syndicats FO et CGT, cet article, tel qu’il est interprété par la jurisprudence de la Cour de cassation (**), prive les salariés ou leurs représentants de “toute voie de recours permettant de contester utilement le calcul de la réserve de participation” et il conduit de plus “à neutraliser les accords passés au sein de l’entreprise dans le cadre de la détermination de la réserve de participation”.
Deux principes en conflit
La Cour de cassation admet donc l’existence d’un conflit juridique entre deux principes : la non-remise en cause du bénéfice net après l’attestation du commissaire aux comptes tel qu’il est reconnu par la jurisprudence, et le droit à un recours juridictionnel effectif, qui ne peut donc pas s’exercer. La question n’est pas nouvelle mais elle va donc arriver, pour la première fois, devant le juge constitutionnel qui devra trancher. La plus haute juridiction judiciaire l’admet d’autant plus que…la plus haute juridiction de la justice administrative, le Conseil d’Etat, va dans son sens.
Le juge administratif a en effet considéré (voir notamment la décision du 5 décembre 1984) que l’attestation délivrée en application de l’article L. 3326-1 alinéa 1 du code du travail a “pour seul objet de garantir la concordance entre le montant du bénéfice net et des capitaux propres déclarés à l’administration et celui utilisé par l’entreprise pour le calcul de la réserve spéciale de participation des salariés aux résultats de l’entreprise”, en sorte que l’inspecteur des impôts ou le commissaire aux comptes qui établit cette attestation “n’exerce pas, dans le cadre de cette mission, un pouvoir de contrôle de la situation de l’entreprise”.
Il faut dire aussi qu’une précédente décision de la Cour de cassation à propos du non-versement de la participation dans la société Wolters Kluver France avait pour le moins suscité la controverse.
Un accord de participation et un montage en question
Dans cette affaire, plusieurs sociétés du groupe Procter & Gamble (P&G Amiens, P&G Blois, Ondal France, P&G France, P&G Pharmaceuticals France et P&G Holding France) ont signé en 2014 un accord de participation de groupe sur la participation des salariés aux résultats de l’entreprise.
Problème : selon le CSE (voir notre encadré) le groupe a mis en place des contrats de façonnage et de commissionnaire entre ces sociétés et la société de droit suisse Procter & Gamble International Operations, contrats qui permettent à cette société suisse de “fixer de manière arbitraire les bénéfices revenant aux sociétés (françaises, Ndlr) de façonnage et de distribution”. Autrement dit, les clauses de ces contrats ont pour conséquence de prédéterminer le bénéfice des sociétés françaises et donc de réduire l’assiette de la participation des salariés aux résultats de l’entreprise.
Le CSE et les syndicats FO et CGT ont bien tenté d’obtenir du juge judiciaire la nullité des attestations du commissaire aux comptes établies en vue du calcul de la réserve spéciale de participation, a minima faute de sincérité, et d’obtenir également la nullité des clauses de rémunération conclues entre la société suisse société Procter & Gamble International Opérations et les sociétés françaises du groupe. Tout cela afin de pouvoir désigner un expert afin de déterminer les sommes de participation dues aux salariés.
Mais la cour d’appel de Versailles a déclaré leur demande irrecevable dans un arrêt du 20 octobre 2022, fondé sur la lecture habituelle que fait la Cour de cassation de l’article L. 3326-1 du code du travail. D’où leur décision, pour contester l’arrêt de la cour d’appel, d’en appeler au juge constitutionnel.
(*) Fabriquant de produits ménagers et d’hygiène (couches Pampers par ex.), Procter & Gamble compte 110 000 salariés dans le monde.
(**) Voir les arrêts du 11 mars 2009, du 8 décembre 2010, du 10 janvier 2017, du 28 février 2018, du 6 juin 2018.
Au départ, une expertise du CSE |
Au départ, l’action en justice du CSE et des syndicats contre Procter & Gamble se fonde sur une expertise, réalisée par le cabinet Sacef, qui met en cause la politique de prix de transferts entre entreprises du même groupe. Comme on peut le lire dans l’arrêt de la cour d’appel du 20 octobre 2022, Procter & Gamble en Europe, qui comprend une holding en France, compte en effet 3 types de sociétés : une société entrepreneur établie en Suisse, Procter & Gamble International Operations SA, exerçant les fonctions stratégiques et détenant les actifs, des sociétés en charge d’activités de fabrication, agissant en tant que façonniers, comme par exemple en France, les sociétés Procter & Gamble Amiens, Procter & Gamble Blois; des sociétés en charge d’activités de distribution sur leur marché respectif, agissant en tant que commissionnaire, comme par exemple en France, les sociétés Procter & Gamble France et Procter & Gamble Pharmaceuticals France, devenue société P & G Health France. Certaines de ces sociétés (*) sont comprises dans le périmètre d’un accord de participation groupe. Mais pour l’expert du CSE et les représentants du personnel, il y a un problème dans la mesure où les prix de transferts entre les sociétés provoquent plusieurs effets : transfert des profits à la société suisse Procter & Gamble International Operations “sans fondement économique et sans justification”; non bénéfice de la participation aux salariés de la société Procter & Gamble Amiens, de la société Procter & Gamble Blois,de la société Ondal France et de la société Procter & Gamble France, “dans la mesure où les marges concernées sont imposées par la société suisse”; absence de marge dans les sociétés françaises, alors que leur activité de façonnage et de distribution devrait être bénéficiaire. Ce type de montage et ces prix de transfert, qui peuvent s’assimiler à une forme d’optimisation, sont assez répandus et ne sont pas en soi illégaux (lire notre article), le problème consistant pour les représentants à démontrer que cette organisation revient pour un groupe ou une entreprise à violer le droit des salariés à participer aux résultats de l’entreprise. (*) Procter & Gamble Holding France, Procter & Gamble France, Procter & Gamble Pharmaceuticals France, Procter & Gamble Amiens et Procter & Gamble Blois, la société Ondal France y ayant participé jusqu’en juillet 2016. |
Bernard Domergue
Le projet de loi de finances pour 2024 prolonge certaines mesures en raison de l’inflation
27/10/2023
Le texte de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 est considéré comme adoptée par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution le 20 octobre 2023. Détail des mesures qui intéressent les entreprises et les salariés, certaines dispositions étant prolongées en raison du contexte inflationniste.
Poursuite de la défiscalisation et de la désocialisation des pourboires en 2024
La loi de finances pour 2022 a défiscalisé et exonéré de cotisations sociales les pourboires du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023, qu’ils soient versés, directement aux salariés par la clientèle ou indirectement (remis à l’employeur qui leur reverse), en argent comptant ou par paiement électronique ou bancaire
L’article 3 tervicies du projet de loi de finances pour 2024 prolonge cette mesure pour l’année 2024.
Prolongation en 2024 des mesures relatives aux frais de transport
La loi de finances rectificative pour 2022 du 16 août 2022 a amélioré la prise en charge des frais de transport entre le domicile et le travail :
en supprimant les conditions à titre temporaire permettant potentiellement à l’ensemble du personnel d’en bénéficier (cette mesure reste facultative pour l’employeur) ;
en rehaussant les plafonds à 700 euros par an, dont 400 euros au maximum pour les frais de carburant au-delà desquels la prime n’est plus exonérée d’impôt sur le revenu, de CSG et de cotisations sociales ;
en exonérant d’impôt sur le revenu de la prise en charge par l’employeur du prix des titres d’abonnement aux transports publics excédant la prise en charge obligatoire de 50 %, dans la limite de 25 % du prix de ces titres d’abonnement ;
la possibilité de cumuler le forfait mobilités durables avec la prise en charge du coût des titres d’abonnement de transports publics, dans une certaine limite.
L’article 3 quatervicies du PLF pour 2024 proroge d’une année, soit jusqu’au 31 décembre 2024, ces dispositifs initialement applicables en 2022 et en 2023.
Par ailleurs, l’article 3 quater majore de façon pérenne, à compter de l’imposition des revenus 2025, les plafonds de droit commun de 100 euros. Le plafond annuel de l’exonération fiscale et sociale de la prime carburant sera ainsi porté de 200 euros à 300 euros et le plafond d’exonération fiscale et sociale commun au forfait mobilités durables et à la “prime de transport” de 500 euros à 600 euros. Corrélativement, le plafond d’exonération applicable en cas de cumul entre la prise en charge du forfait mobilités durables et du prix des titres d’abonnements aux transports publics serait porté de 800 euros à 900 euros.
Attributions aux salariés d’actions rachetées par la société
L’article 5 tertricies du projet de loi prévoit que les actions distribuées aux salariés à l’issue d’une opération de rachat bénéficient des dispositifs fiscaux de faveur prévus en matière d’actionnariat salarié. Il s’agit notamment des règles d’imposition prévues pour les options sur titres, les actions gratuites ainsi que les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise.
Partage de la valeur en cas de bénéfices exceptionnels
Le projet de loi reprend la mesure du projet de loi de transposition de l’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal. Il rappelle que lorsque qu’une entreprise qui est tenue de mettre en place un régime de participation et qui dispose d’un ou de plusieurs délégués syndicaux a ouvert une négociation pour mettre en œuvre un dispositif d’intéressement ou de participation, cette négociation porte également sur la définition d’une augmentation exceptionnelle de son bénéfice.
Il prévoit aussi une obligation pour les entreprises soumises à l’obligation de participation et pourvues d’au moins un délégué syndical, lorsqu’elles ouvrent une négociation sur un dispositif d’intéressement ou de participation, de négocier sur la définition d’une augmentation exceptionnelle de leur bénéfice et les conséquences d’une augmentation exceptionnelle de leur bénéfice, en matière de partage de la valeur dans l’entreprise. Le projet de loi de finances pour 2024 précise que l’un des critères de définition de l’augmentation exceptionnelle du bénéfice est la survenance d’une ou plusieurs opérations de rachat d’actions suivie de leur annulation sauf dans l’hypothèse où ces opérations sont précédées d’attribution gratuites d’actions aux salariés.
Le texte indique également que les conséquences d’un bénéfice exceptionnel sont :
soit le versement d’un supplément d’intéressement ou de participation – qui suit la fiscalité de droit commun de l’intéressement et de la participation, notamment les dispositions favorables prévues lors du versement de primes sur des plans d’épargne salariale ;
soit l’ouverture d’une négociation visant à mettre en place dans l’entreprise un dispositif de partage de la valeur (intéressement, abondement ou prime de partage de la valeur).
Les entreprises qui ont mis en place un accord de participation ou d’intéressement intégrant déjà une clause spécifique prenant en compte les bénéfices exceptionnels ou un régime de participation comportant une base de calcul telle que prévue à l’article L. 3324-2 du code du travail (une formule dérogatoire) plus favorable que la participation légale, ne sont pas soumises à cette obligation.
Enfin, les entreprises déjà couvertes par un accord d’intéressement ou de participation au moment de la promulgation de la présente loi doivent engager cette négociation avant le 30 juin 2024.
Développer le nombre de jeunes entreprises innovantes
L’article 5 decies abaisse le seuil de dépenses consacrées à la recherche et au développement prévu par le dispositif des jeunes entreprises innovantes de 15 % à 10 %. Cet abaissement devrait permettre de créer 1 600 jeunes entreprises innovantes par an, contre 1 000 actuellement.
Par ailleurs, l’article 5 septtricies supprime, dès 2024, l’exonération d’imposition sur les bénéfices associée au dispositif des JEI.
Les ZRR, BER et Zorcomir bientôt remplacés “France Ruralités Revitalisation”
L’article 7 du projet de loi prévoit la prorogation de six mois des régimes des zones de revitalisation rurale (ZRR), les bassins d’emploi à redynamiser (BER) et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (Zorcomir) qui arrivent à échéance au 31 décembre 2023, soit jusqu’au 30 juin 2024. Ils seront par la suite remplacés à compter du 1er juillet 2024 par un nouveau dispositif zoné nommé France Ruralités Revitalisation.
Contribution supplémentaire à la taxe d’apprentissage et GEIQ
L’article 28 bis prend en compte l’enjeu de l’adhésion des entreprises de plus de 250 salariés aux groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ). Ainsi ces entreprises pourront comptabiliser les effectifs des alternants (contrats d’apprentissage et contrats de professionnalisation) mis à leur disposition par le GEIQ dans le cadre de leurs déclarations d’assujettissement à la contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA).
► A noter : l’article 28 du PLF pour 2024 procède par ailleurs à la mise en conformité des affectations de la contribution conventionnelle de la branche du travail temporaire au fonds professionnel pour l’emploi dans le travail temporaire (FPE-TT) et de la contribution affectée au fonds pour le développement pour l’insertion professionnelle des handicapés.
Prolongation de la période transitoire pour les contributions formation à Saint-Pierre-et-Miquelon
L’article 28 ter du PLF pour 2024 prolonge la période transitoire relative au recouvrement des contributions de formation professionnelle et de l’alternance à Saint-Pierre-et-Miquelon jusque fin 2025.
Rappelons que l’article 121 de la loi de finances pour 2022 prévoit que le droit commun s’applique à Saint-Pierre-et-Miquelon, mais que, par dérogation, en 2022 et 2023 les employeurs ne sont redevables auprès de la Caisse de prévoyance sociale que d’une contribution unique de formation professionnelle à hauteur de 0,55 % de la masse salariale, alors que dans le droit commun, les entreprises doivent payer de 0,55 % à 1,68 % selon leur effectif et nature d’entreprise.
Constatant que de nombreuses difficultés persistent pour l’application du droit national à Saint-Pierre-et-Miquelon, cette prorogation a été décidée.
Augmentation du versement transport en Ile-de-France
L’article 27 bis prévoit pour les entreprises franciliennes de plus de 11 salariés situées au cœur de la région Île-de-France d’augmenter le taux plafond du versement mobilité de 0,25 point, passant de 2,95 % à 3,20 % de la masse salariale. Cette hausse est justifiée par “le service rendu aux entreprises qui seront les principales bénéficiaires de la mise en service des nouvelles lignes qui desserviront les quartiers d’affaire (le Grand Paris Express Eole vers La Défense, la Ligne 14 vers Orly et Saint-Denis-Pleyel, la ligne 17 vers Roissy)”.
Les nouveaux taux du versement mobilité applicables en 2024 seront fixés par délibération du conseil d’administration d’Île-de-France Mobilités lors de sa séance suivant la publication de la loi de finances pour 2024, avec prise d’effet le premier jour du deuxième mois qui suit cette délibération. Ainsi, si Ile-de France-Mobilités se réunit en janvier, le nouveau taux s’appliquera à compter du 1er mars 2024.
Florence Mehrez