Restructuration des branches : pas de négociation d’accords en l’absence d’un arrêté de représentativité syndicale dans le nouveau périmètre

03/06/2024

Si, dans le cadre d’une fusion volontaire de branches, les partenaires sociaux peuvent décider du périmètre de la commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation (CPPNI) et du champ d’application de la convention collective de branche correspondante, ils doivent obtenir, préalablement à la négociation d’accords au sein de cette CPPNI, un arrêté de représentativité des syndicats dans le périmètre de cette nouvelle branche.

L’arrêt publié du 15 mai 2024 intervient dans le contexte conflictuel de la restructuration conventionnelle du secteur du bâtiment. 

Fusion volontaire des branches du secteur du bâtiment : rappel du contexte conflictuel

Jusqu’ici divisé en quatre branches professionnelles, le secteur du bâtiment a fait l’objet de négociations sur la restructuration de ses conventions collectives nationales (CCN) en 2019.

La Fédération française du bâtiment (FFB), favorable à une CCN unique, avait conclu le 14 mai 2019, avec les organisations syndicales FO, CFTC et CGC, un accord prévoyant la mise en place d’une commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation (CPPNI) unique pour tout le secteur du bâtiment. Mais cet accord fut privé d’effet à la suite de l’opposition majoritaire des organisations syndicales CGT, CFDT et Unsa.

A la même date, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), favorable, elle, à la mise en place de deux CCN distinctes selon l’effectif des entreprises (jusqu’à 10 salariés et plus de 10 salariés), concluait, avec les organisations syndicales CFDT, CGT et Unsa, un accord prévoyant la mise en place de deux CPPNI (l’une pour les entreprises occupant jusqu’à 10 salariés, l’autre pour celles occupant plus de 10 salariés).

 Les organisations syndicales FO et CFTC ont fait opposition à cet accord, sans succès, dans la mesure où elles n’étaient pas majoritaires. Cet accord a également été contesté en justice mais dans un arrêt du 21 avril 2022, la Cour de cassation a admis que les partenaires sociaux sont libres de décider, pour la mise en place d’une CPPNI, du périmètre de cette commission et, dès lors, du champ d’application de la CCN de la branche correspondante.

En revanche, aucun arrêté de représentativité n’a été adopté dans le champ des deux périmètres privilégiés par la Capeb, malgré les demandes adressées en ce sens au ministre du travail par la Capeb et diverses organisations syndicales.

 Un arrêté du 22 décembre 2017 avait fixé la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans le secteur du bâtiment. Pour les organisations patronales, deux arrêtés (l’un du 12 juillet 2017,  l’autre du 21 décembre 2017) avaient reconnu la représentativité de la Capeb et de la FFB dans le secteur des entreprises du bâtiment employant jusqu’à 10 salariés et de celles occupant plus de 10 salariés.

Mais ces trois arrêtés ont été annulés le 12 juillet 2019 par la cour administrative d’appel de Paris car ils avaient été donnés pour un périmètre non reconnu comme une branche (en 2020, le Conseil d’Etat a toutefois reconnu le pouvoir ministériel d’arrêter la liste des organisations patronales et syndicales représentatives dans un champ ne correspondant pas à une branche professionnelle répertoriée – voir ci-après).

Le 8 janvier 2021, la Capeb a sollicité du ministre du travail qu’il prenne des arrêtés de représentativité dans le champ professionnel des deux CPPNI. En l’absence de réponse ministérielle, elle a saisi la juridiction administrative d’un recours pour excès de pouvoir (auquel se sont joints la CGT, la CFDT et l’Unsa) pour obtenir l’annulation de la décision ministérielle implicite de rejet. Cette décision a été annulée par la cour administrative d’appel de Paris, le 21 juillet 2023, qui a enjoint au ministre du travail de prendre l’arrêté sollicité dans le délai de trois mois à compter de la notification de l’arrêt.

Prenant en compte la décision de la CAA de Paris, un arrêté de représentativité des organisations syndicales a été pris le 19 février 2024 pour les seules entreprises occupant jusqu’à 10 salariés. Quatre pourvois formés contre cette décision sont actuellement pendants devant le Conseil d’Etat. 

Suite à la constitution de ces deux CPPNI, des négociations sont intervenues et deux accords promouvant la formation et l’apprentissage (l’un applicable dans les entreprises du bâtiment occupant jusqu’à 10 salariés, l’autre applicable dans celles occupant plus de 10 salariés) ont été signés le 22 novembre 2019 en leur sein, sans que les arrêtés de représentativité fixant la liste des organisations syndicales représentatives et leurs audiences respectives n’aient été adoptés.

La FFB s’est opposée à l’extension de ces accords, avec succès.

La FFB, FO et la CFE-CGC saisissent la justice pour obtenir leur suspension. A l’appui de leur demande, ils invoquent l’existence d’un trouble manifestement illicite et l’absence d’arrêté de représentativité et de mesure du poids de chaque organisation syndicale dans le périmètre des deux CPPNI.

Les juges d’appel n’ont pas fait droit à cette demande. Ils considèrent que les organisations signataires avaient été reconnues, en 2017, représentatives sur un champ professionnel plus large, ce qui leur permet nécessairement de signer des accords sur un champ plus étroit.

La FFB, la CFE-CGC et FO se pourvoient alors en cassation.

Application du principe de concordance : pas d’accords négociés dans le périmètre de la nouvelle branche tant que les arrêtés de représentativité ne sont pas publiés

Un accord collectif peut-il être valablement négocié et signé par des organisations syndicales alors qu’aucun arrêté fixant la liste des syndicats représentatifs dans le périmètre de cet accord n’a été adopté ? C’est, en résumé, la question posée à la Cour de cassation.

Dans un premier temps, elle rappelle que les partenaires peuvent négocier dans un champ professionnel nouveau. En effet, en application du principe de liberté contractuelle, les partenaires sociaux sont libres de négocier dans un champ qui n’est pas celui d’une convention collective existante et de négocier un nouveau périmètre d’une CPPNI, qui fonde alors une nouvelle convention collective de branche.

Elle considère toutefois qu’en vertu du principe de concordance, les partenaires sociaux doivent obtenir, préalablement à la négociation au sein de cette CPPNI d’une convention ou d’un accord collectif de branche, un arrêté de représentativité des organisations syndicales dans le périmètre de la nouvelle branche.

L’absence d’un tel arrêté constitue un trouble manifestement illicite.

Cette décision s’inscrit dans le droit fil de précédentes décisions judiciaires et administratives.

En effet, dans deux décisions du 4 novembre 2020 (n° 434518 et n° 434519), le Conseil d’Etat a jugé que “hors les cas des accords interbranches ou des accords de fusion de branches, relevant de régimes particuliers, le ministère du travail a compétence pour arrêter, s’il y a lieu, sous le contrôle du juge administratif, la liste des organisations patronales et syndicales représentatives dans un champ ne correspondant pas jusqu’alors à une branche professionnelle répertoriée, mais pouvant constituer un périmètre utile pour une négociation en cours ou à venir”.

La Cour de cassation en a déduit que “lorsque les partenaires sociaux décident de négocier dans un périmètre qui n’est pas celui d’une branche professionnelle déjà connue, il leur appartient au préalable, pour assurer la validité de leur négociation, de s’assurer de la représentativité des négociateurs en demandant au ministère du travail de fixer la liste de ces organisations représentatives par une enquête ou par un arrêté de représentativité” (arrêt du 10 février 2021).

Géraldine Anstett

Simplification : les précisions de Bercy avant les débats en séance publique

03/06/2024

Ce matin commencent en séance publique du Sénat les débats relatifs au projet de loi de simplification de la vie économique. Alors que la commission spéciale du Sénat a déjà remanié le texte sur le bulletin de paie et la cession d’entreprise, Bercy a apporté quelques précisions sur ses intentions :

  • les mentions du bulletin de paie étant prévues par voie réglementaire, des concertations seront menées “dans les prochains mois” avec les partenaires sociaux, et le débat “sera poursuivi avec les parlementaires” ;
  • le gouvernement entend réintroduire la version initiale de l’article 6 à savoir réduire de deux à un mois le délai d’information préalable des salariés en cas de vente de fonds de commerce, ces dispositions ayant été supprimées par la commission spéciale ;
  • les normes sociales feront partie de la mission de simplification lancée par le Premier ministre. Selon Bercy, “il y a ce que la mission propose, et il y a ce que le gouvernement décide. On verra si le champ social est concerné mais c’est un exercice plénier”.

Les débats au Sénat se poursuivront si nécessaire jusqu’au 11 juin.

Source : actuel CSE

Un guide pour les employeurs d’apprentis en situation de handicap

03/06/2024

Destiné aux apprentis, aux centres de formation d’apprentis (CFA) et aux employeurs privés ou publics, le Guide “apprentissage et handicap” publié, le 31 mai, par le ministère du travail, avec l’appui de l’Agefiph et du FIPHFP (Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique), vise à informer et sensibiliser sur l’opportunité que représente l’apprentissage aménagé. Cette voie de formation est accessible dès 16 ans pour les apprentis bénéficiaires d’une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), sans limite d’âge maximal.

Au sommaire de cet ouvrage, un focus sur le contrat d’apprentissage aménagé, les aides accordées par l’Agefiph aux employeurs, la formation des maîtres d’apprentissage, les interlocuteurs des apprentis ou encore le rôle et la formation des référents handicap au sein des centres de formation d’apprentis…

Source : actuel CSE

Le code du travail est-il adapté à l’essor de l’intelligence artificielle ?

04/06/2024

Le code du travail doit-il être modifié afin de tenir compte des enjeux liés à l’introduction de l’intelligence artificielle au travail ? C’est l’une des questions abordées mardi 21 mai lors d’une conférence organisée par les ministères de l’économie et du travail en présence de juristes et d’économistes.

Dans le cadre du séminaire sur les politiques de l’emploi, organisé par les ministères de l’économie et du travail mardi 21 mai 2024, juristes et économistes se sont penchés sur l’impact du développement de l’intelligence artificielle (IA) sur l’emploi. Parmi les questions abordées, celle de savoir s’il est nécessaire de modifier le code du travail afin de prendre en compte les nouvelles problématiques soulevées par l’IA. Grégoire Loiseau, professeur de droit à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, plaide plutôt pour une adaptation des outils existants. 

Adapter les emplois au développement de l’IA

En matière de protection de l’emploi – afin de prévenir et pallier les suppressions de postes qu’il est pour l’heure difficile de quantifier – il convient “d’adapter les emplois à l’évolution des tâches” et de “permettre l’évolution des travailleurs dans leur emploi via une appropriation des outils numériques”, insiste Grégoire Loiseau.

Le droit du travail comporte déjà les outils adéquats. Le professeur de droit cite par exemple la modification du contrat de travail pour adapter les tâches et le cas échéant les fonctions, ou bien encore, la gestion des emplois et des parcours professionnels, la GEPP (ex GPEC). Aux employeurs qui attendraient que les salariés mobilisent leurs droit à CPF pour se former à l’IA, Grégoire Loiseau tient à rappeler que “la formation des travailleurs est d’abord une obligation de l’employeur d’adapter les travailleurs à l’évolution de leurs tâches et des postes” et que “la formation professionnelle doit d’abord être internalisée comme une obligation des entreprises et non seulement externalisée [via le CPF]”. 

S’agissant de la protection au travail, l’employeur doit appréhender différemment son obligation de sécurité. “Le prisme aujourd’hui c’est la santé mentale”, prévient le professeur de droit. Là encore, les outils existent déjà dans le code du travail pour prévenir les risques professionnels. Il convient toutefois de “les actualiser pour ajouter les risques liés à l’économie numérique”, indique Grégoire Loiseau, à commencer par le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP), “un  outil extrêmement précieux pour la santé des travailleurs”. Il y a aussi la négociation obligatoire sur la qualité de vie et des conditions de travail, la QVCT – qui existe depuis 2021 – “qui intègre la négociation sur les risques professionnels et dans laquelle on peut y mettre les risques liés à l’IA”.

L’action du législateur encadrée par le droit européen

Les marges de manoeuvre du législateur national sont de toutes façons assez contraintes par le droit européen. “Il existe beaucoup d’instruments européens et le droit national doit se glisser dans les interstices laissés par [ce dernier]”, analyse Grégoire Loiseau. C’est notamment le cas du RGPD (règlement général de protection des données) qui constitue l’un des remparts de la protection des travailleurs face à l’IA. “Le RGPD interdit par exemple des décisions fondées uniquement sur un algorithme sauf si elles sont nécessaire à la conclusion ou à l’exécution d’un contrat. Ne peut-on pas, par la loi ou par un accord collectif, exiger une intervention humaine sur toutes les décisions algorithmiques qui ont un impact sur les salariés ?”, s’interroge l’universitaire. 

“La directive sur les travailleurs des plateformes en passe d’être adoptée contient aussi un volet sur la protection des données des travailleurs des plateformes, rappelle Grégoire Loiseau. Il y aura une place pour le droit national lorsque la directive sera transposée”.

En droit interne, c’est la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) qui pour l’heure joue ce rôle de garde-fou pour les travailleurs confrontés à l’intelligence artificielle. Grégoire Loiseau rappelle ainsi la décision par laquelle la commission a condamné Amazon à une amende de 32 millions d’euros, en décembre dernier, pour avoir mis en place un système de surveillance de l’activité et des performances des salariés excessivement intrusif. 

Identifier les problématiques relatives à l’IA

Mais si le droit du travail n’a pas besoin de mutations profondes pour s’adapter à l’IA, Grégoire Loiseau insiste sur la nécessité d’isoler la présence de l’IA dans le monde du travail. “Il est utile de pouvoir identifier les problématiques IA dans une logique d’acculturation”. 

Ainsi, par exemple, si “on peut déjà consulter les représentants du personnel [sur l’introduction de l’IA dans l’entreprise]”, il serait utile de “bien identifier les systèmes liés au développement de l’IA et de prévoir une expertise prise en charge à 100 % par l’employeur. La BDESE (base de données économiques, sociales et environnementales) mériterait d’avoir des rubriques consacrées aux systèmes d’IA comme elle a été enrichie de données environnementales en 2022. C’est un outil permettant aux élus de s’approprier ces problématiques”. 

Ce travail peut permettre “d’avoir une réflexion associant les élus ou les représentants syndicaux”, assure le professeur de droit.

Activer le levier de la négociation collective

De son côté, Gilbert Cette, président du Conseil d’orientation des retraites (COR) et professeur d’économie à la Neoma Business School, s’oppose à la création de nouvelles obligations à la charge de l’entreprise et suggère plutôt “de se tourner d’abord vers la négociation interprofessionnelle, puis de branche et d’entreprise. Les partenaires sociaux doivent être la réponse plutôt que la loi qui alourdirait les obligations des entreprises”. Un point de consensus avec Grégoire Loiseau, “fervent convaincu de l’utilité de la négociation” qui plaide ainsi pour la négociation d’un accord national interprofessionnel (ANI) sur le numérique et l’IA”. 

Pour l’heure, “en France, il n’y a pas d’accords collectifs sur ces sujets, ni de branche, ni d’entreprise”, déplore pourtant Francesca Salis-Madinier, secrétaire nationale de la CFDT Cadres et membre de la commission gouvernementale de l’intelligence artificielle. La syndicaliste identifie des “freins et des peurs qui peuvent ralentir, voire bloquer, le processus [de négociation]”. 

Elle cite notamment l’accord européen de 2020 sur les transitions numériques – avec un chapitre sur l’IA – qui “devrait être décliné dans les différents pays. En 2024, il n’y a toujours pas de déclinaison en France de cet accord”. 

Pourtant, elle voit les choses “bouger” au sein des entreprises. “Lorsque la direction introduit un outil, les élus demandent à être informés-consultés et obtiennent une in fine une expertise”. 

Vers un droit à “l’explicabilité”

L’introduction de l’intelligence artificielle dans le monde du travail nécessite aussi une certaine “transparence” de la part des entreprises. “L’appel aux notions “d’exactitude et d’infaillibilité” lorsqu’on parle de l’IA contribue à renforcer le pouvoir de direction de l’employeur” et reste “une boite noire pour les salariés”, explique Grégoire Loiseau. “Le droit du travail mérite d’aller plus loin et de consacrer des droits des travailleurs : en version basse, un droit à l’explicabilité, et en version haute, un droit à la contestabilité”. 

C’est aussi la position de Francesca Salis-Madinier. “Un DRH qui utiliserait cet outil doit pouvoir être en mesure d’expliquer pourquoi il prend cette décision. Il faut trouver un système qui peut permettre l’explicabilité dès la conception. Or, ni la direction ni les syndicalistes ne sont préparés. Les représentants du personnel doivent être impliqués : pourquoi on utilise cet outil, dans quelle finalité et quels en sont les usages ? Comment on l’expérimente ?”. L’utilisation de l’IA “doit répondre aux besoins de l’activité des travailleurs et non être un placement commercial”, met en garde la secrétaire national de la CFDT Cadres.

Florence Mehrez

LGBT+ : les politiques inclusives à la traîne

04/06/2024

Selon une étude de Randstad dévoilée hier, 39% des travailleurs français issus de la communauté LGBTQI+ (lesbiennes, gays, bi et transgenres) ont déjà été victimes de discrimination sur leur lieu de travail en France. Plus préoccupant : près d’un sur quatre se sent plus isolé au bureau qu’il y a cinq ans.

Ce malaise a, tout d’abord, un impact social : faute de politique inclusive, 41 % d’entre eux préfèrent travailler à distance plutôt qu’en présentiel. Mais les répercussions sont aussi personnelles puisque cet environnement hostile a aussi contraint un salarié sur trois (34 %) à quitter son emploi.

A noter : en France, la “génération Z” (personnes nées après 1995) est la première à revendiquer la mise en place d’une politique d’inclusion forte.

Source : actuel CSE

Le Cese appelle à la création d’un plan national pour le logement des travailleurs saisonniers

04/06/2024

Dans un avis adopté le 29 mai, le conseil économique, social et environnemental (CESE) formule une série de propositions pour faciliter l’accès au logement des salariés saisonniers. Il préconise ainsi de renforcer la cohérence des politiques publiques, en confiant au président du conseil régional et préfet de région un rôle de coordination pour organiser la synergie entre les différents acteurs institutionnels et les parties prenantes (employeurs, syndicats, association…).

Autre piste : créer un cadre d’action (législatif, réglementaire, fiscal…) qui donne accès aux propriétaires bailleurs qui passent un contrat de location avec un travailleur saisonnier ou en mobilité, aux mêmes aides et dispositifs publics que ceux ouverts aux propriétaires bailleurs d’un logement à titre d’habitation principale (comme Ma prime rénov). Il suggère également d’instaurer un dispositif fiscal en direction des employeurs individuels, TPE ou PME “pour acquérir, rénover, voire construire, des logements destinés à ses salariés saisonniers et actifs en mobilité”.

Le Cese se dit aussi favorable au développement des projets collectifs mutualisés, portés par des associations ou des groupements d’employeurs, multi-filières ou multi-publics.

Enfin, il insiste sur la nécessité de répondre aux attentes des travailleurs saisonniers. Avec à la clef, la réduction des taux de non-recours aux aides existantes et une diffusion en temps réel des offres de logements disponibles.

Source : actuel CSE

Salarié protégé : quel contrôle du motif économique en cas de PSE “mixte” ?

05/06/2024

L’inspecteur du travail n’a pas à contrôler la cause économique sur laquelle repose la rupture amiable du contrat de travail du salarié protégé intervenue dans le cadre d’un plan de départs volontaires inscrit dans un plan de sauvegarde de l’emploi.

Dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) mixte, l’employeur peut prévoir, en plus des licenciements économiques, un plan de départs volontaires aboutissant à la rupture d’un commun accord des contrats de travail des salariés éligibles. Lorsqu’un représentant du personnel, salarié protégé, est concerné par un tel dispositif de départ, l’employeur, s’il n’a pas à suivre la procédure légale de licenciement économique, doit en revanche respecter la procédure spéciale de rupture du contrat de travail des salariés protégés.

C’est dans ce contexte que le Conseil d’Etat se prononce sur la question du contrôle par l’inspecteur du travail, saisi d’une demande d’autorisation de rupture du contrat de travail d’un salarié protégé, du bien-fondé de la cause économique justifiant la mise en œuvre du PSE.

Des salariés protégés rompent d’un commun accord leur contrat de travail dans le cadre d’un PSE

Dans cette affaire, une entreprise a décidé de fermer l’un de ses sites dans le cadre d’un projet de restructuration entraînant la suppression de 543 postes. A cet effet, l’employeur a mis en œuvre un PSE incluant un plan de départs volontaires et des licenciements pour motif économique. L’homologation de ce PSE “mixte” par l’administration n’a pas été contestée.

Le contrat de travail de plusieurs salariés protégés a été rompu en application d’une convention de rupture amiable conforme au plan de départs volontaires inclus dans le PSE. L’employeur a donc sollicité auprès de l’inspecteur du travail l’autorisation de rompre les contrats des représentants du personnel concernés.

Si ces derniers n’ont pas saisi la juridiction administrative en vue de contester les décisions autorisant la rupture de leur contrat de travail, ils ont toutefois porté devant le conseil de prud’hommes de Grasse une action en contestation de ladite rupture. Le juge judiciaire a alors sursis à statuer en attendant que le juge administratif se prononce sur la légalité de ces décisions. Mais le tribunal administratif de Nice a débouté les salariés, estimant que les décisions de l’inspecteur du travail n’étaient pas illégales.

Finalement, les salariés ont formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat. À l’appui de leur demande, ils soutiennent qu’il appartient à l’inspecteur du travail saisi d’une demande tendant à autoriser la rupture amiable du contrat de travail conclue dans le cadre d’un plan de départs volontaires de contrôler le bien-fondé du motif économique invoqué.

Si l’inspecteur du travail doit contrôler la cause économique des licenciements…

Le Conseil d’Etat rappelle, tout d’abord, et ce point ne fait pas débat, que l’inspection du travail, saisi d’une demande d’autorisation de licenciement pour motif économique d’un représentant du personnel, doit contrôler ce motif, en recherchant, conformément à l’article L.1233-3 du code du travail, si la situation de l’entreprise ou, le cas échéant, celle du secteur d’activité commun à cette entreprise et aux entreprises, établies sur le territoire national, du groupe auquel elle appartient, justifie le licenciement du salarié protégé (Conseil d’Etat,  29 juin 2020 n° 423673 et n° 417940).

… il n’a pas à opérer ce contrôle pour les contrats de travail rompus à l’amiable

Mais il en va autrement en ce qui concerne les ruptures amiables conclues dans le cadre d’un plan de départs volontaires incorporé à un PSE, dont la cause économique n’a pas à être contrôlée par l’administration. Telle est la position du Conseil d’Etat, qui, par cette décision mentionnée aux tables du recueil Lebon, tente de mettre un terme aux divergences des juges du fond en la matière. En effet, certaines cours administratives d’appel ont déjà jugé qu’il incombe à l’inspecteur du travail de contrôler le bien-fondé du motif économique de la rupture amiable (CAA Nantes, 10 octobre 2013 ; CAA Douai, 11 juin 2015), d’autres non (CAA Lyon, 18 mai 2021).

Pour autant, la rupture amiable du contrat de travail du salarié protégé n’échappe pas à tout contrôle administratif. Comme le précise ici la Haute juridiction administrative, il appartient à l’inspecteur du travail de s’assurer que la rupture n’est pas affectée d’un vice du consentement du salarié ou d’une fraude de l’employeur. Et, bien évidemment, il doit également contrôler que la rupture du contrat de travail n’a pas de lien avec le mandat de représentant du personnel du salarié (articles R. 2421-7 et R. 2421-16 du code du travail).

Dans ses conclusions, le rapporteur public explique qu’il ne serait pas cohérent de juger que les ruptures conclues en application d’un plan de départs volontaires doivent être justifiées par un motif économique soumis au contrôle de l’administration ou du juge, alors que le législateur a consacré dans le code du travail la place de l’accord des volontés pour mettre fin au contrat de travail et n’a pas soumis les motifs d’un tel accord au contrôle du juge ou, pour les salariés protégés, de l’administration. Il relève en outre qu’il n’y a pas de raison de prévoir un tel contrôle du motif économique pour les seuls salariés protégés.

Ce faisant, le Conseil d’Etat se cale sur la jurisprudence de la Cour de cassation, qui est rappelée par l’administration dans son guide consacré aux décisions administratives en matière de licenciement des salariés protégés (Guide de la Direction générale du travail, la DGT, décembre 2021, point 1.3.2.2, p. 121). Ainsi, dès lors que la résiliation du contrat de travail résulte de la conclusion d’un accord de rupture amiable conforme aux prévisions d’un accord collectif soumis aux représentants du personnel, la cause de la rupture ne peut pas être contestée, sauf fraude ou vice du consentement (arrêt du 8 février 2012). Cette solution s’applique également lorsque la rupture amiable s’inscrit dans un plan de départs volontaires prévu par un PSE établi par l’employeur (arrêt du 12 février 2014 ; arrêt du 9 avril 2015).

Guilhem Possamaï

Un salarié peut refuser un changement d’horaire portant une atteinte excessive à sa vie personnelle

05/06/2024

Un salarié, père d’une enfant handicapée, ne commet pas de faute en refusant le passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour, s’il démontre qu’un tel changement de ses conditions de travail porterait une atteinte excessive à sa vie personnelle et familiale.

La Cour de cassation réaffirme le principe, classique, selon lequel un salarié peut légitimement refuser une modification de son contrat ou de ses conditions de travail qui porterait une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie personnelle et familiale (Cassation n° 22-21.814). Sans surprise, elle considère que la charge d’un enfant lourdement handicapé constitue une obligation familiale impérieuse, incompatible avec le changement d’horaire proposé par l’employeur.

Le passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour

Dans cette affaire, l’employeur – nouvel attributaire d’un marché de prestations de sécurité – notifie à un salarié, agent de sécurité incendie, son passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour. Le salarié refuse, en expliquant à son nouvel employeur que sa situation personnelle nécessite qu’il soit présent à son domicile en journée. Le salarié est en effet parent d’une enfant de 7 ans lourdement handicapée.

L’employeur, sourd à cette justification, licencie le salarié pour faute grave en raison de son refus de se plier à ce changement d’horaire. Le contrat de travail du salarié prévoit en effet qu’il pourra être amené à travailler de jour comme de nuit. L’employeur en conclut que le salarié, en refusant ce simple changement de ses conditions de travail, a commis une faute justifiant son licenciement disciplinaire.

La fixation des horaires de travail d’un salarié relève du pouvoir de direction de l’employeur. Ainsi, en principe, si la durée globale de travail et la rémunération du salarié restent identiques, l’employeur peut imposer au salarié un changement d’horaires (Cassation n° 97-44.339). Toutefois, une réorganisation complète des horaires de travail constitue, non pas un simple changement des conditions de travail, mais une véritable modification du contrat du travail qui nécessite l’accord du salarié.

Tel est le cas, notamment, en cas de passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit, ou inversement (Cassation n° 98-44.78198-44.782 et 17-11.757). Pour la Cour de cassation, cette modification des horaires est d’une telle ampleur qu’elle caractérise une modification du contrat, et non un simple changement des conditions de travail, même si une clause du contrat de travail ou de la convention collective prévoit cette possibilité (Cassation n° 19-14.314). Le refus du passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour ne peut donc pas justifier un licenciement pour faute (Cassation n° 00-44.134).

C’est donc à tort que l’employeur s’est placé, ici, sur le terrain disciplinaire pour licencier le salarié. Mais ce n’est pas pour cette raison que la Cour de cassation décide que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

A noter : En tout état de cause, une clause du contrat de travail relative à la modification des horaires de travail du salarié doit être mise en œuvre de bonne foi. Il semble qu’ici, l’employeur n’a à aucun moment tenu compte de la situation particulière du salarié, ni cherché à le conserver dans ses effectifs.

… incompatible avec les obligations du père d’un enfant handicapé

Pour décider que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, relèvent deux éléments. En premier lieu, le salarié apporte la preuve circonstanciée de ses contraintes familiales, justifiant le maintien de son horaire de nuit. Il produit en effet la décision de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) lui attribuant une allocation au titre de l’éducation de sa fille et reconnaissant expressément la prise en charge par les parents d’au moins 20 % des activités de l’enfant. Activités ayant lieu dans la journée et non la nuit.

Le deuxième élément retenu par les juges est la mauvaise foi de l’employeur. Celui-ci n’a en effet pas tenu compte de la situation particulière du salarié. Tenu à une obligation d’exécution de bonne foi du contrat de travail (article L 1222-1 du code du travail), il aurait dû rechercher s’il était en mesure de maintenir le salarié dans son emploi ou de lui proposer un autre poste de nuit. Or, devant le juge, l’employeur ne justifie d’aucune recherche.

La Cour de cassation approuve la solution retenue par les juges du fond et confirme sa jurisprudence : si les horaires de travail proposés au salarié portent une atteinte excessive au droit au respect de sa vie personnelle et familiale, ils caractérisent une modification du contrat de travail qui nécessite son accord préalable (à propos du passage d’un horaire continu à un horaire discontinu, Cassation n° 10-14.702 ; à propos du passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour, Cassation n° 00-44.134 précité ; Cassation n° 20-18.463).

En l’espèce, le salarié pouvait légitimement refuser le passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour. L’employeur aurait donc dû soit renoncer à cette modification et maintenir le salarié à son poste ou lui proposer un autre poste en horaires nocturnes, soit le licencier en motivant la rupture par la cause de la modification du contrat de travail – cause non disciplinaire, ici.

A noter : Rappelons que le même principe s’applique lorsque la modification des horaires envisagée porte une atteinte excessive au droit au repos du salarié.
La Cour de cassation a déjà retenu que le handicap de l’enfant du salarié est susceptible de légitimer le refus d’un changement des conditions de travail du salarié. Elle a ainsi admis qu’une salariée pouvait s’opposer à la mise en œuvre d’une clause de mobilité prévue par son contrat de travail car elle devait s’occuper de son enfant handicapé à l’heure du déjeuner, d’autant que le poste qu’elle occupait antérieurement était resté libre (Cassation n° 98-44.190).

La rédaction sociale

Un rapport formule des recommandations pour permettre l’intégration de l’intelligence artificielle sans heurts dans le monde du travail

05/06/2024

Dans un rapport publié le 17 mai, le laboratoire de recherche-action LaborIA Explorer, créé par le ministère du travail et l’Inria, présente ses travaux sur l’impact de l’intelligence artificielle sur le monde du travail et formule des recommandations pour alimenter le dialogue social sur le sujet. Parmi les pistes, intégrer les systèmes d’intelligence artificielle à partir du travail réel, c’est-à-dire impliquer les travailleurs au processus d’innovation ; garantir la co-conception des systèmes intégrant de l’IA ; prévoir des systèmes qui sécurisent les travailleurs ; rendre leur fonctionnement compréhensible par tous…

De fait, les chercheurs mettent en garde :  les échecs et réussite des projets d’IA sont tributaires des conflits de priorité dans le travail. “Il est fréquent que (….) les priorités des décideurs butent sur les préoccupations des travailleurs confrontés aux changements dans leurs tâches, compétences et conditions de travail”. Aussi, les SIA sont-ils aussi bien perçus comme des “assistants utiles (gain de temps, facilitation du travail)” que comme une “source de menaces (pour leur emploi ou le contenu du travail)”. De plus, le déploiement de l’IA dans les organisations peut avoir des effets inattendus dans l’organisation du travail et du management : reconfiguration des rôles professionnels et des référentiels de qualification, questionnement du rôle de manager intermédiaire, polarisation du travail…

Source : actuel CSE

Si l’employeur privé s’oppose au renouvellement du détachement d’un fonctionnaire salarié protégé, il doit saisir l’inspecteur du travail

06/06/2024

L’employeur privé n’est pas tenu à l’expiration du détachement à son terme normal de solliciter une autorisation administrative de mettre fin au contrat de travail le liant au fonctionnaire détaché bénéficiant du statut protecteur, sauf lorsqu’il s’est opposé au renouvellement du détachement demandé par le fonctionnaire, ou que ce non-renouvellement est dû à son fait.

Dans certains cas, un fonctionnaire peut être détaché auprès d’une entreprise privée. Les durées de détachement sont variables, mais cela peut être long, jusqu’à 5 ans, renouvelable parfois plusieurs fois. Or, les fonctionnaires en détachement sont liés à l’entreprise privée par un contrat de droit privé régi par les dispositions générales du code du travail, et notamment celles relatives à la protection des représentants du personnel (voir le Guide DGT sur les salariés protégés, 20 sept. 2019, fiche 1a).

Cela signifie que le fonctionnaire détaché est électeur et éligible dans son entreprise d’accueil, dès lors qu’il en remplit les conditions. Il bénéficie donc, le cas échéant, du statut protecteur. Mais sa situation reste particulière, car à l’issue de son détachement, lequel est forcément à durée déterminée, il est réintégré dans son corps d’origine. Concrètement, au moins 3 mois avant la fin du détachement, l’agent doit demander son renouvellement ou sa réintégration. Alors que doit faire son employeur de droit privé en cas de non-renouvellement du détachement ? Doit-il demander à l’inspecteur du travail une autorisation de licenciement ?

Fin du détachement d’une fonctionnaire auprès d’une association pour un an, renouvelé 3 fois

Dans cette affaire, un agent de la fonction publique hospitalière est détachée auprès d’une association à compter du 1er décembre 2013 pour une durée d’un an. Le détachement est renouvelé chaque année, et en dernier lieu en 2017. Lors de cette dernière année, la salariée est élue membre du CHSCT de l’association. Son détachement prend fin et elle est réintégrée dans son corps d’origine.

Mais la salariée saisit le conseil de prud’hommes : pour elle, c’est l’association qui a pris l’initiative du non-renouvellement de son détachement, et aurait donc dû solliciter l’autorisation de l’inspecteur du travail pour mettre fin à son contrat de travail. Elle demande en conséquence une indemnisation pour violation de son statut protecteur et des dommages et intérêts pour discrimination syndicale.
La cour d’appel lui donne gain de cause et condamne l’association, laquelle conteste. Pour elle, la salariée n’ayant pas demandé le renouvellement de son détachement, elle devait donc être réintégrée dans son corps d’origine, sans qu’il soit besoin de demander une autorisation à l’inspecteur du travail au titre de son statut protecteur.

Pas d’autorisation administrative…

La Cour de cassation est d’accord avec les juges du fond. Elle en profite pour rappeler sa jurisprudence à ce sujet. 

Elle explique ainsi que “selon l’article 55 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, alors applicable, à l’expiration de son détachement, le fonctionnaire est réaffecté dans l’emploi qu’il occupait antérieurement. Il en résulte que l’employeur privé n’est pas tenu à l’expiration du détachement à son terme normal de solliciter une autorisation administrative de mettre fin au contrat de travail le liant au fonctionnaire détaché bénéficiant du statut protecteur, sauf lorsqu’il s’est opposé au renouvellement du détachement demandé par le fonctionnaire, ou que ce non-renouvellement est dû à son fait”.
En d’autres termes, pas d’autorisation à demander à l’inspecteur du travail, sauf si c’est l’employeur qui s’oppose au renouvellement du détachement du fonctionnaire.

Remarque : cette solution a déjà été dégagée, en des termes identiques par la Cour de cassation concernant des agents de la fonction publique territoriale (Cass. soc., 23 sept. 2009, no 08-40.406Cass. soc., 8 juill. 2020, no 18-11.977). Elle est confirmée par cette décision pour les agents de la fonction publique hospitalière.

… sauf si le non-renouvellement du détachement est du fait de l’employeur privé 

La Cour de cassation examine ensuite ce qu’il s’est passé dans cette affaire.

En effet, quelques semaines après l’élection au CHSCT de la salariée, l’association a pris l’initiative d’adresser à la directrice de son établissement public d’origine, “une lettre demandant la réintégration de la salariée dans son corps d’origine à l’expiration de la période du détachement”.

En outre, “lors de son retour de congés, la salariée a été convoquée par l’employeur qui lui a annoncé la fin du détachement et son refus de le renouveler au-delà de la période courante”. Enfin, il “ressort des attestations versées aux débats que le détachement de la salariée n’a pas été renouvelé en raison du souhait de la direction de l’association d’instaurer une dynamique nouvelle au sein de l’équipe et du désaccord de l’intéressée sur les changements mis en place”.

Le non-renouvellement du détachement de la salariée était donc bien du fait de l’association, “en sorte qu’à défaut pour ce dernier d’avoir sollicité l’autorisation de l’inspecteur du travail de mettre fin au contrat de travail, la violation du statut protecteur de l’intéressée était établie”.

Remarque : à noter que, même si la décision de ne pas solliciter le renouvellement émane de l’organisme privé et qu’aucune autorisation administrative n’a été demandée, le juge judiciaire n’est pas compétent pour ordonner la réintégration d’un fonctionnaire salarié protégé au sein de l’organisme de droit privé auprès duquel il avait été mis à disposition (Cass. soc., 8 juill. 2020, no 18-11.977). Dans l’affaire du 29 mai 2024, la salariée n’avait pas demandé sa réintégration. En outre, l’employeur est dans l’obligation de saisir l’inspecteur du travail lorsque c’est lui qui prend l’initiative d’interrompre de façon anticipée le détachement du fonctionnaire. La jurisprudence considère en effet dans ce cas que la rupture s’analyse en un licenciement régi par le code du travail (Voir le Guide DGT, salariés protégés, 20 sept. 2019, fiche 1a).

Quid de l’entretien préalable ?

Il n’est question ici que de l’autorisation de l’inspecteur du travail, et pas de la procédure protectrice dans son ensemble. Aussi, on peut se demander si l’employeur doit également recevoir le salarié en entretien préalable et consulter le CSE, le cas échéant ? Il nous semble que non, sa situation étant, selon nous, assimilable à l’arrivée à échéance du terme d’un CDD ne comportant pas de clause de renouvellement (le renouvellement devant obligatoirement être demandé expressément, à l’échéance de chaque période de détachement).

Or, dans ce cas, la procédure de licenciement n’est pas applicable. Et s’il est tout de même obligatoire de saisir l’inspecteur du travail, son contrôle se limite à vérifier la réalité de la survenance du terme du contrat, et surtout à s’assurer qu’il n’y a aucun lien entre la demande et les fonctions représentatives du salarié (contrôle de la discrimination). Mais attention, la Cour de cassation ne se prononce pas sur ce point, lequel n’a jamais été tranché à notre connaissance.

Séverine Baudouin

Télétravail possible pour les salariés aidants dans tous les cabinets comptables

06/06/2024

Un arrêté, publié le week-end dernier,  porte extension de l’avenant du 2 février 2024 à l’accord de branche relatif à l’incitation au télétravail, dans le cadre de la convention collective nationale des cabinets d’experts-comptables et de commissaires aux comptes.

Cet avenant crée un nouvel article 17 de la CCN prévoyant qu’ “à l’occasion d’un entretien spécifique, l’employeur définit avec [le] salarié [aidant] les modalités possibles de mise en œuvre du télétravail”. Il fait suite à la loi du 19 juillet 2023 “visant à renforcer la protection des familles d’enfants atteints d’une maladie ou d’un handicap ou victimes d’un accident d’une particulière gravité” qui impose que tout accord collectif relatif au télétravail fixe “les modalités d’accès des salariés aidants d’un enfant, d’un parent ou d’un proche à une organisation en télétravail”.

L’arrêté d’extension rend ces stipulations obligatoires pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d’application de la convention collective des experts-comptables et des commissaires aux comptes. 

Source : actuel CSE

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : nominations, protection sociale, représentativité, santé sécurité

07/06/2024

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du vendredi 31 mai au jeudi 6 juin inclus, avec le cas échéant les liens vers les articles traitant ces nouveautés. Nous n’évoquons pas ici les très nombreux textes relatifs aux conventions collectives, que vous retrouvez dans notre baromètre des branches.

Nominations

  • Un arrêté du 27 mai 2024 porte nomination de membres du conseil de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Stéphane Carré pour Force Ouvrière, Christophe Vincent-Titéca pour la CFDT,  Sylvie Guérin pour la FNMF)
  • Un arrêté du 31 mai 2024 porte nomination (représentants de Force Ouvrière) à la sous-commission de la protection sociale complémentaire de la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle

Protection sociale

  • Un arrêté du 27 mai 2024 fixe les statuts types des unions pour la gestion des établissements des caisses d’assurance maladie
  • Un décret du 4 juin 2024 modifie la composition du conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie

Représentativité

  • Un arrêté du 30 mai 2024 précise les modalités de candidature des organisations professionnelles d’employeurs dans le cadre de l’établissement de leur représentativité en 2025

Santé sécurité

  • Un arrêté du 15 mai 2024 fixe les modalités relatives à la démarche de prévention du risque radon et à la mise en place d’une zone radon et des vérifications associées dans le cadre du dispositif renforcé pour la protection des travailleurs

Source : actuel CSE

Vie de bureau : les salariés ne veulent pas travailler n’importe où

07/06/2024

Selon une étude de l’EM Normandie et de Paris school of business, la localisation de l’entreprise est devenue la priorité des salariés, avec une moyenne de 3,64 sur 5 sur une échelle qui varie de 1 à 5. Parmi les critères, la facilité d’accès aux transports en commun est scrutée avec attention (69,4 %). De même, la présence de lieux pour des activités après le travail est perçue comme un avantage pour 55 % des personnes sondées. Notamment pour la jeune génération (62 % considèrent cet aspect “assez important ou très important” contre 35,9 % des baby-boomers).

A noter : les femmes vont privilégier une location proche des transports en commun et de leur domicile.

Source : actuel CSE