Absence ou insuffisance d’accord ou de plan sur l’égalité professionnelle : gare à la pénalité !

03/11/2025

Rendant pour la première fois, à notre connaissance, une décision relative à l’absence ou l’insuffisance de plan d’action sur l’égalité professionnelle, le Conseil d’État précise que ce plan est obligatoire même en l’absence de section syndicale et que l’administration ne vérifie que la complétude de l’accord ou du plan, sans se prononcer sur l’opportunité des choix opérés par l’employeur.

Le Conseil d’État a rendu, pour la première fois à notre connaissance, un arrêt relatif à la pénalité financière due en l’absence ou en l’insuffisance d’accord ou de plan d’action relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, qui a vocation à être mentionné dans les tables du recueil Lebon.

Les faits

Dans cette affaire, une société de prêt-à-porter demande l’annulation de la pénalité financière infligée par la Direccte (Dreets) d’Ile-de-France par décision du 17 mai 2017.

La société invoque l’absence de section syndicale au sein de l’entreprise pour justifier de l’absence d’obligation d’établir un plan d’action. Un tel raisonnement semble résulter de l’articulation de l’article L.2242-1 du code du travail, selon lequel seules les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives sont soumises aux obligations de négociation, parmi lesquelles celle sur l’égalité professionnelle, et de l’article L.2242-3 du code du travail, qui dispose que l’employeur établit un plan d’action en l’absence d’accord relatif à l’égalité professionnelle à l’issue de la négociation obligatoire.

En d’autres termes, le plan d’action n’étant prévu qu’à défaut d’accord, s’il n’y a pas d’obligation de négocier un tel accord, il n’y a pas d’obligation d’établir un plan d’action.

L’entreprise s’appuie sur l’instruction DGT n° 124 du 4 avril 2017 qui énonce qu’en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, le dialogue social prime sur la démarche unilatérale de l’employeur, et celui-ci doit en premier lieu ouvrir la négociation collective sur le sujet. Que ce n’est qu’à défaut d’accord que l’employeur pourra établir unilatéralement un plan d’action en la matière. Que toutefois seule la négociation d’un accord avec un délégué syndical doit être engagée en préalable à l’élaboration d’un plan d’action unilatéral : la négociation en l’absence de délégué syndical avec un élu (mandaté ou non) ou un salarié mandaté est une possibilité offerte à l’employeur, jamais une obligation.

L’obligation d’établir un plan d’action s’applique à toutes les entreprises d’au moins 50 salariés

L’argument est balayé par la cour administrative d’appel, approuvée par le Conseil d’État.

L’obligation d’établir un plan d’action s’applique à toutes les entreprises d’au moins 50 salariés, y compris celles qui ne sont pas soumises à l’obligation de négocier. Si le plan d’action est supplétif pour les entreprises soumises à l’obligation de négocier, il reste obligatoire dans les autres. En effet, l’article L.2242-8 du code du travail dispose que les entreprises d’au moins 50 salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur en l’absence d’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes à l’issue de la négociation obligatoire sur le sujet ou, à défaut d’accord, par un plan d’action.

L’office de l’administration et du juge sur le contenu des accords ou plans d’action

Le Conseil d’État précise également l’office de l’administration et du juge sur le contenu des accords ou plans d’action, qui se limite à vérifier la complétude formelle mais ne doit pas porter sur l’appréciation de l’opportunité des choix opérés par l’entreprise.

Les juges rappellent qu’il ne suffit pas de transmettre un plan pour échapper à la pénalité, il faut également que celui-ci soit conforme aux exigences de l’article R.2242-2 du code du travail. C’est-à-dire, pour les entreprises de moins de 300 salariés, fixer des objectifs de progression et les actions permettant de les atteindre sur au moins trois des domaines d’action qu’il cite, accompagnés d’indicateurs chiffrés, et comprenant obligatoirement la rémunération effective.

Or, en l’espèce, le premier plan d’action, transmis par la société le 26 décembre 2016, ne portait que sur deux domaines d’action et ne comportait pas d’actions spécifiques en matière de rémunération.

L’administration était donc fondée à infliger une pénalité. En revanche, le plan transmis le 29 juin 2017 mentionnant bien les objectifs de progression, des actions et des indicateurs dans au moins trois domaines d’action, la pénalité n’était plus due. Dès lors, le titre de perception ne pouvait couvrir une période ultérieure au 29 juin 2017. L’arrêt de la cour administrative d’appel est donc annulé sur ce point.

Enfin, le Conseil d’État rappelle que lorsque l’entreprise ne communique pas sa masse salariale, la pénalité (en l’espèce de 0,5 %) est assise sur une base forfaitaire égale à deux fois la valeur du plafond mensuel de la sécurité sociale, conformément à l’article R.2242-8 du code du travail.

Violaine Magnier

Les augmentations de salaires devraient se limiter à 1,95 % en 2026

04/11/2025

Selon une étude du cabinet People Base CBM (Compensations and benefits management) publiée hier, les augmentations salariales devraient s’établir à 1,95 % en moyenne en 2026, après 2,43 % en 2025 et 3,63 % en 2024. Cette enquête, menée du 1er au 16 octobre 2025 auprès de 568 entreprises représentant plus de 650 000 salariés, illustre un “retour à la normale” après trois années de hausses tirées par l’inflation et les tensions sur le marché de l’emploi.

L’individualisation des augmentations se confirme : 99,2 % des entreprises interrogées prévoient d’accorder des hausses au mérite en 2026, contre seulement 48 % pour des augmentations générales. Les premières devraient atteindre 1,79 % en moyenne, contre 0,91 % pour les secondes. Cette évolution traduit, selon le cabinet, une “orientation vers la performance et la reconnaissance individuelle”.

Par ailleurs, 70,5 % des sociétés envisagent des enveloppes de “rattrapage” pour corriger certains écarts, notamment en matière d’égalité femmes-hommes. “Nous prévoyons une stabilisation durable autour de 2 % dans les prochaines années”, estime Cyril Brégou, associé au sein du cabinet

Source : actuel CSE

Les augmentations de salaires devraient se limiter à 1,95 % en 2026

04/11/2025

Selon une étude du cabinet People Base CBM (Compensations and benefits management) publiée hier, les augmentations salariales devraient s’établir à 1,95 % en moyenne en 2026, après 2,43 % en 2025 et 3,63 % en 2024. Cette enquête, menée du 1er au 16 octobre 2025 auprès de 568 entreprises représentant plus de 650 000 salariés, illustre un “retour à la normale” après trois années de hausses tirées par l’inflation et les tensions sur le marché de l’emploi.

L’individualisation des augmentations se confirme : 99,2 % des entreprises interrogées prévoient d’accorder des hausses au mérite en 2026, contre seulement 48 % pour des augmentations générales. Les premières devraient atteindre 1,79 % en moyenne, contre 0,91 % pour les secondes. Cette évolution traduit, selon le cabinet, une “orientation vers la performance et la reconnaissance individuelle”.

Par ailleurs, 70,5 % des sociétés envisagent des enveloppes de “rattrapage” pour corriger certains écarts, notamment en matière d’égalité femmes-hommes. “Nous prévoyons une stabilisation durable autour de 2 % dans les prochaines années”, estime Cyril Brégou, associé au sein du cabinet.

Source : actuel CSE

Une conférence sur le travail et les retraites pour nourrir la campagne de la prochaine présidentielle

05/11/2025

Jean-Pierre Farandou, hier, au ministère de la santé et des solidarités

Le ministre du travail, Jean-Pierre Farandou, a lancé hier matin la conférence sur le travail et les retraites. Les discussions, articulées autour de trois ateliers thématiques, devront s’achever par une grande conférence de clôture à l’été 2026.

Après les conférences sociales du quinquennat Hollande, les Assises du travail en 2022, le “conclave” de François Bayrou, c’est au tour de la “conférence sur le travail et les retraites” de Jean-Pierre Farandou de s’atteler à relancer la mobilisation des partenaires sociaux sur les sujets sociaux. Pas de feuille de route à l’issue, ni d’accord national interprofessionnel. En ligne de mire plutôt, la prochaine présidentielle de 2027. “Nous ferons œuvre utile car ce matériau classé, organisé, avec des scenarios cohérents sera versé au débat démocratique, assure le ministre du travail et des solidarités. On ne sera pas loin de la rentrée 2026, à quelques mois d’une échéance majeure pour notre pays. Si dans la prochaine campagne présidentielle les thématiques sociales du travail, de l’emploi, des retraites sont au cœur des débats, je pense que nous aurions vraiment bien travaillé pour les Françaises et pour les Français”.

Le travail et les retraites “deux sujets intimement liés”

Cette conférence se veut “un lieu apaisé, de dialogue social où les partenaires sociaux pourront développer leurs échanges sur deux sujets fondamentaux, le travail dans notre pays, les conditions de travail, la rémunération”, détaille Jean-Pierre Farandou, sujets qui seront articulés avec celui des retraites, “qui est toujours d’actualité dans notre pays avec cette conviction chevillée au corps que ces deux sujets sont intimement liés”. 

Trois ateliers thématiques

La première conférence devrait se tenir d’ici la fin de l’année avec comme objectif de clôturer les travaux à l’été 2026. Les débats seront encadrés par trois “garants” : Jean-Denis Combrexelle, ancien directeur général du travail de 2001 à 2014, Anne-Marie Couderc qui a notamment dirigé Air France KLM, et Pierre Ferracci, un fin connaisseur du dialogue social qui était président du Groupe Alpha jusqu’en juin 2025. 

Jean-Pierre Farandou a bien insisté sur le fait que cette conférence “n’est pas un lieu de négociation. La négociation appartient aux partenaires sociaux, ils ont leur agenda social autonome sur lequel ils peuvent travailler (…). Il sera toujours possible que certaines composantes soient reprises par les partenaires sociaux pour venir alimenter leur dialogue social interne, ce sera à eux de le décider”, concède-t-il tout de même.

Les échanges se dérouleront au Conseil social, économique et environnemental (CESE), place d’Iéna à Paris, autour de trois ateliers.

Le premier “Travailler mieux” permettra d’aborder les questions de l’amélioration de la prévention, des conditions et de la qualité du travail “dans une logique de performance sociale et économique, dans un contexte où le rapport au travail change”. 

Le deuxième s’interrogera sur la manière de “favoriser l’emploi qualifié et la construction de réels parcours professionnels, adaptés tant aux besoins en compétences des entreprises, singulièrement dans l’industrie, qu’offrant une réelle progression tout au long de la carrière”. 

Le troisième devra permettre de “penser l’avenir des retraites” en interrogeant “les évolutions du système de retraite, y compris dans sa gouvernance et le besoin de maintenir en emploi les salariés expérimentés, avec des transitions professionnelles adaptées et l’encouragement de la poursuite d’activité pour les salariés qui le souhaitent”.

Des conférences plénières et des ateliers auront lieu régulièrement “qui permettront de faire la synthèse et de voir quelles sont les avancées des travaux”, a indiqué Jean-Denis Combrexelle, avant de s’achever par une grande conférence de clôture. Des premières restitutions seront présentées lors d’une réunion intermédiaire au printemps 2026.

La fonction publique intégrée dans les discussions

La fonction publique ne sera pas en reste comme s’en est félicité le ministre délégué de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, David Amiel.

“Beaucoup des problèmes qui se posent dans le secteur privé se posent aussi dans le secteur public qu’il s’agisse des retraites, des conditions de travail, de la progression professionnelle, de la mobilité professionnelle, de la lutte contre l’usure pour les métiers pénibles. Il est important qu’il n’y ait pas un dialogue social à deux vitesses, la conférence d’aujourd’hui le garantit”. 

Etablir un pont entre le travail et les retraites

Mais faut-il vraiment remettre sur la table le sujet des retraites sur lequel les discussions ont achoppé lors du conclave ? “Nous pensons qu’il faut reprendre le débat. Et que ce débat doit être éclairé par un débat concomitant sur le travail et sur l’emploi, estime Jean-Pierre Farandou. Tous les partenaires sociaux nous disent que le grand oubli des dernières réformes est de ne pas avoir pris le temps nécessaire pour échanger sur le parcours de vie au travail avant d’arriver à la retraite (…). C’est comme en montagne quand vous êtes un peu perdus vous remontez le chemin vous revoyez tout le paysage et vous empruntez le bon itinéraire”.

Florence Mehrez

La conférence sociale démarre sans le Medef et dans le flou

05/11/2025

Marylise Léon, Patricia Drevon, Michel Picon, Éric Chevée, Cyril Chabanier, Christelle Thieffine, Dominique Corona

Réunis hier au ministère du Travail et des Solidarités à Paris, les partenaires sociaux ont assisté à une réunion de méthode. A l’issue, le Medef s’est illustré par son refus de participer à cette conférence sociale consacrée au travail et aux retraites. Une décision parfois vivement critiquée par les organisations syndicales, certaines d’entre elles réservant encore leur position.

L’avenue Duquesne avait des allures de conclave, mardi 4 novembre au matin : partenaires sociaux en file, caméras sur les trottoirs, micros tendus. Pendant que le ministre du travail déroulait sa conférence de presse à l’intérieur, syndicats et patronat ont livré leurs premières impressions sur cette réunion. Si la nomination de l’animateur Jean-Denis Combrexelle, ancien directeur général du travail, ne fait pas débat, l’annonce de l’absence du Medef a parfois suscité l’indignation. De plus, les thèmes abordés restent pour l’instant très larges. En l’absence de la CGT, certaines organisations réservent encore leur réponse.

Le Medef quitte d’emblée les discussions

À la suite d’une réunion de bureau lundi soir, où la décision a été prise à l’unanimité, le Medef a annoncé pendant la réunion que sa participation se terminait puis a refusé d’expliquer son choix à la presse, se contentant d’une déclaration lapidaire (et à distance) à l’AFP : “Le Medef a signifié qu’il ne participerait pas. Il y a un agenda social autonome qui a été défini par les partenaires sociaux. Dans ce cadre, on souhaite traiter de sujets comme le financement de la protection sociale ou du modèle productif. Cet agenda n’est pas indexé sur des échéances politiques”. Côté CPME, on s’est abstenu de tout commentaire. A l’U2P, le président Michel Picon a lancé avec malice un mystérieux “Les voies du Seigneur sont impénétrables”.

La critique fut bien plus vive chez les organisations syndicales. Hormis FO qui n’a pas voulu commenter “une décision patronale qui leur appartient”, le mécontentement transparaissait clairement à la CFE-CGC. Pour Christelle Thieffinne, le Medef “a fait un refus d’obstacle. J’ai l’impression de revivre le conclave où ils ne participaient pas, ne voulaient pas échanger (…). On voit vraiment un Medef qui refuse de prendre de la hauteur”.

À la CFDT, Marylise Léon a aussi critiqué cette position : “Cela fait des années que le Medef n’a rien à dire sur le travail. Je trouve cela incompréhensible car il y a des vrais sujets, et ne pas participer revient à ajouter un problème dans une période de crise. Je ne pense pas que ce soit responsable”. Cyril Chabanier (CFTC) interprète ce départ comme la conséquence du budget et d’une “grande colère sur le PLF et le PLFSS avec la taxation des entreprises. C’est dommage car il faut pouvoir séparer ce sujet d’une discussion sur le travail et les retraites”.

L’initiative de la conférence reste appréciée par certaines organisations

L’organisation de la conférence sociale a en tout cas satisfait la plupart des organisations présentes. Côté patronal, Éric Chevée a assuré que “la CPME défendra les entreprises et les entrepreneurs partout où c’est nécessaire (…) car plus personne ne défend le travail alors que c’est une valeur émancipatrice”. Même s’il juge que la conférence “était inscrite dans l’échec du conclave de juin”, il se dit résolu à aborder le sujet de la démographie, la retraite par capitalisation et l’usure professionnelle.

Michel Picon (U2P) a également salué “la capacité du ministre à reprendre le chantier avec un courage assez fort” et compte bien revenir lui aussi sur la démographie et l’endettement du pays.

La participation ne fait par ailleurs aucun doute pour la CFDT, Marylise Léon souhaitant pousser son projet de retraite par points et affirmant : “On a besoin de parler du travail. Cela vaut le coup d’utiliser cet espace pour pouvoir parler des vrais problèmes”. Elle attend cependant des “réponses concrètes” et concède qu’elle n’a “aucune garantie que tous les acteurs seront force de proposition, ni qu’on soit à l’abri d’un nouvel épisode politique qui va tout bouleverser”. La secrétaire générale de la CFDT compte aussi porter la question du travail des “invisibles” et le temps partiel subi par les femmes, sujet issu de la conférence sociale d’Elisabeth Borne en 2023 mais jamais abordé.

Sur la retraite par points, il faudra cependant éviter que la tentative de réforme systémique ne s’englue comme début 2020, lorsque l’exécutif a tenté d’y ajouter un élément paramétrique : un âge pivot fixé à … 64 ans. A ce sujet, Marylise Léon répond : “Il faut pour éviter l’échec que tous les participants viennent de bonne volonté et qu’ils aient envie d’aller au bout, qu’on soit raccords sur ce qu’on fait et pourquoi on est là, même si l’on n’est pas d’accord sur tout”.

La CFE-CGC a aussi confirmé sa volonté de poursuivre dans ce cadre : “On ne refuse jamais le débat. Le format nous va bien même si cette conférence aurait dû avoir lieu avant la réforme des retraites de 2023, et à condition de bien traiter les sujets dans l’ordre, d’abord le travail et l’emploi, ensuite la retraite”.

Un ordre nécessaire, une manière de prendre les choses par le bon bout, indispensable également pour le président de la CFTC, Cyril Chabanier qui a salué l’absence de tabous, en particulier sur un régime universel de retraites par points qu’il partage avec la CFDT. L’absence d’accord final ne constitue pas selon lui un obstacle : “On n’est pas dans des discussions avec des signatures à la fin, c’est une discussion et l’important pour nous est que les sujets soient étudiés jusqu’au bout”. La conférence est enfin saluée par l’Unsa : “Il est utile, dans la période démocratique où nous sommes, de pouvoir éclairer le débat public. D’autant qu’on se trouve dans les conséquences de 2023, les retraites forment aujourd’hui le nœud démocratique du pays”, a affirmé Dominique Corona.

FO reste dubitative

Patricia Drevon (FO) a dénoncé “ne pas en savoir plus” sur les thèmes abordés, ainsi que des sujets abordés en ateliers qui “restent sombres”. De ce fait, la représentante de Force Ouvrière concède “qu’on s’interroge beaucoup”, d’autant que l’issue ne figurera ni dans un accord national interprofessionnel ni dans une loi. La secrétaire confédérale ajoute : “On ne comprend pas trop comment les sujets public et privé seront dissociés en séances plénières, et surtout si cela pourra déboucher sur quelque chose d’intéressant”.

L’organisation consultera donc ses instances dans les prochaines semaines sur la poursuite de sa participation. Pour l’heure, cette conférence ne fait pas l’objet d’une lettre de cadrage, méthode qui avait bloqué la participation de FO au conclave. Frédéric Souillot a d’ailleurs averti en début de semaine qu’une conférence sociale trop proche d’un conclave ne recueillerait pas son approbation.

Les représentantes de Solidaires restent également dubitatives : “Parler de retraites par capitalisation sera une ligne rouge pour nous. Dans ce cas, on réinterrogera nos instances pour savoir si on continue ou pas à participer”, nous a indiqué Julie Ferrua avant d’ajouter “il faudra des luttes assez rapidement”. Muriel Guilbert ne se montre pas plus enthousiaste : “On a dit à Jean-Pierre Farandou qu’on attend toujours la rupture annoncée par Sébastien Lecornu, pour l’instant on ne l’a pas vue”.

Rappelons enfin que la CGT n’a pas envoyé de représentants en raison de la tenue de son comité confédéral national pendant deux jours. L’organisation n’avait pas participé au conclave et il lui faudra sans doute réunir ses instances pour se prononcer sur cette conférence sociale.

Assurance chômage : la lettre de cadrage retirée, pas la proposition de loi

Après avoir assuré dans une interview au quotidien régional Ouest France que le sujet de l’assurance chômage est en train de décanter, le ministre du Travail Jean-Pierre Farandou a évité de développer sa position lors de la conférence de presse qui a suivi la réunion.

Selon Patricia Drevon (FO), il a cependant été assuré aux syndicats que la lettre de cadrage de François Bayrou sur l’assurance chômage serait abandonnée. Rien n’est moins sûr en revanche du projet de décret de Gabriel Attal, combattu pendant de longs mois par les syndicats et repris sous la forme d’une proposition de loi déposée par la députée Ensemble Stéphanie Rist.

Un conclave bis ?

La séquence présente en tout cas plusieurs similitudes avec le “conclave” organisé par François Bayrou. D’une part, il permet à Sébastien Lecornu de donner des gages à sa gauche et de sortir les syndicats des journées de manifestation. D’autre part, l’issue de la conférence semble tout aussi incertaine que celle du conclave : l’échéance de l’été 2026 est lointaine compte tenu de la grande instabilité politique. De plus, le début du conclave avait été marqué par le départ de FO, suivie de près par la CGT puis l’U2P. Cette fois-ci, le Medef fera défaut et la participation de Force Ouvrière est à confirmer…

Quelle articulation avec l’agenda social autonome ?
Le Medef quittant ces discussions, il devrait cependant, en principe, poursuivre avec les syndicats l’agenda social autonome. Il avait d’ailleurs envoyé aux syndicats un courrier dans ce sens en septembre dernier, afin de négocier ensemble sur le financement de la protection sociale, le modèle productif et l’emploi des jeunes.

En réponse, Marylise Léon attend un bilan des accords déjà conclus. Elle souligne que les organisations patronales s’étaient engagées à mener des négociations dans les branches sur le partage de la valeur sans que cela soit suivi des faits. “Il faut que le patronat s’en explique car négocier des accords interprofessionnels qui renvoient à des branches dans lesquelles personne ne veut discuter, ça n’a aucun intérêt pour la CFDT”, a-t-elle tranché.

Pour FO, très attachée à la pratique contractuelle et conventionnelle, “c’est dans les ANI et l’agenda autonome “qu’on produit du droit pour les salariés”. Patricia Drevon assure que “l’agenda autonome n’est pas remis en cause, il va suivre son cours et des négociations seront ouvertes dans les prochaines semaines”. On a plus de doutes à la CFE-CGC : “La participation du Medef à l’agenda social autonome est très compromise”, a jugé Christelle Thieffinne.

Ajoutons que les relations se sont tendues depuis que le patronat a refusé de revaloriser les retraites complémentaires Agirc-Arrco le 17 octobre dernier. Le Medef va donc devoir clarifier ses positions pour relancer cet agenda partagé. Il a en tout cas mis en avant l’agenda autonome auprès du ministre du Travail pour justifier son départ de la conférence. Il est donc encore possible d’y croire…

Marie-Aude Grimont

L’Assemblée adopte un amendement imposant un malus en cas d’absence de négociation sur les seniors

06/11/2025

En dépit de l’avis défavorable du rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, les députés ont adopté en séance hier un amendement au sujet de l’emploi des seniors, alors que la loi résultant des accords nationaux interprofessionnels sur le sujet vient d’être publiée. 

Déjà adopté en commission, l’amendement (n° 1349) vise à imposer un malus pour les cotisations d’assurance vieillesse des entreprises de plus de 300 salariés qui n’auraient pas négocié sur le thème de l’emploi des seniors. “Une pénalité sous la forme d’un malus sur les cotisations patronales vieillesses serait imposée en cas d’absence d’accord collectif ou de plan d’action, déterminé en fonction des efforts constatés dans l’entreprise en faveur de l’emploi des seniors ainsi que des motifs de sa défaillance”, explique l’exposé des motifs de l’amendement.

Ont également été adopté hier plusieurs amendements supprimant le gel du barème de la CSG sur certains revenus de remplacement (pensions de retraite, pensions d’invalidité, allocations d’assurance chômage) afin de ne pas pénaliser le pouvoir d’achat de ces catégories (voir par exemple le n° 122).

Source : actuel CSE