Nouvelle obligation de traçabilité de l’exposition des travailleurs aux CMR

29/04/2024

D’ici le 5 juillet 2024, les employeurs devront établir une liste actualisée des travailleurs susceptibles d’être exposés aux agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR). En parallèle, la VLEP relative au benzène est modifiée et deux nouvelles valeurs limites sont créées pour l’acrylonitrile et les composés du nickel.

La prévention du risque d’exposition à des agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) relève de dispositions particulières fixées par le code du travail (articles R. 4412-59 à R. 4412-93) et s’inscrit dans la prévention du risque chimique. Afin de la renforcer, un décret du 4 avril 2024 ajoute une nouvelle section dans ce code afin d’imposer une nouvelle obligation de traçabilité de ces substances (articles R. 4412-93-1 à R. 4412-93-4 du code du travail) et met à jour la liste des valeurs limites d’exposition professionnelle.
Il transpose ainsi la directive (UE) 2022/431 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2022 modifiant la directive 2004/37/CE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition aux agents cancérigènes ou mutagènes au travail qui avait mis à jour les règles de protection des travailleurs contre les risques d’exposition aux substances CMR.
Le décret n°88-448 du 26 avril 1988 relatif à la protection des travailleurs exposés aux gaz destinés aux opérations de fumigation est abrogé.

Modalités de la traçabilité aux agents CMR

En tenant compte de l’évaluation des risques transcrite dans le document unique, les employeurs doivent désormais établir une liste actualisée des travailleurs susceptibles d’être exposés aux agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction sur leurs lieux de travail.
Cette liste doit :

  • indiquer pour chaque travailleur, les substances auxquelles il est susceptible d’être exposé ainsi que, lorsqu’elles sont connues, les informations sur la nature, la durée et le degré de son exposition ;
  • être mise à disposition des salariés concernés personnellement par les agents CMR ;
  • être mise à disposition de manière anonyme à la disposition des travailleurs et des membres de la délégation du personnel du comité social et économique (CSE) ;
  • être communiquée, et ce à chaque actualisation, aux services de prévention et de santé au travail et aux services de santé au travail en agriculture qui devront la conserver au moins quarante ans. Les informations de la liste sont versées dans le dossier médical en santé au travail.

Concernant les travailleurs temporaires, l’entreprise utilisatrice doit communiquer à l’entreprise de travail temporaire les informations de la liste ainsi que leurs actualisations concernant le ou les travailleurs concernés. L’entreprise de travail temporaire devra ensuite communiquer ces informations à son service de prévention et de santé au travail ou son service de santé au travail en agriculture, en vue de compléter le dossier médical en santé au travail.
Si les dispositions de ce décret entrent en vigueur le 5 avril 2024, les employeurs disposent toutefois d’un délai de 3 mois à compter de cette date pour établir la liste actualisée des travailleurs susceptibles d’être exposés aux agents CMR.

Renforcement de la VLEP pour le benzène

Le décret abaisse fortement et donc renforce la valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP) au benzène. Actuellement elle est fixée à 1 ppm soit 3,25 mg/m3 d’air sur 8 heures. A compter du 5 avril 2024 et pour 2 ans à titre transitoire, elle sera abaissée à 0,5 ppm soit 1,65 mg/ m3 d’air sur 8 heures. A compter du 6 avril 2026 elle sera de 0.66 mg/m3 d’air sur 8 heures et de 0,2 ppm.

Fixation de deux nouvelles VLEP

De plus, des VLPE sont créés pour :

  • l’acrylonitrile : 1 mg/m3 d’air sur 8 heures, et à 4 mg/m3 sur 15 minutes à compter du 5 avril 2026 ;
  • les composés du nickel : 0,01 mg/m3 d’air sur 8 heures pour la fraction alvéolaire et à 0,05 mg/m3 d’air sur 8 heures pour la fraction inhalable à compter du 18 janvier 2025. Concernant la fraction inhalable, une valeur limite de 0,1 mg/ m3 s’applique du 5 avril 2024 au 17 janvier 2025.

Anne-Laure Tulpain, Code permanent Environnement et nuisances

Morts au travail : la CGT réclame une loi pour “mettre fin à l’hécatombe”

30/04/2024

Rétablir les CHSCT, limiter la sous-traitance en cascade, renforcer l’obligation légale du DUERP : dénonçant la dégradation des conditions de travail et la multiplication des accidents graves et mortels au travail en France, la CGT a lancé le 25 avril plusieurs pistes pour “en finir avec les morts et blessés au travail” depuis le siège parisien de l’INRS et le parvis de l’Hôtel de ville de la capitale.

“Vous avez des chiffres, nous avons des noms, des fils, des frères, des êtres chers, des compagnons, des maris, des amis, des pères”. C’est avec une émotion contenue que Caroline Dilly, co-fondatrice du Collectif Famille stop à la mort au travail, évoque au pupitre de la CGT, la chute mortelle de son fils le 28 avril 2022. Car la mère endeuillée, rompue à l’exercice, n’en est plus à son premier cri d’alarme “pour faire entendre leur voix, pour que leur mémoire ne soit pas oubliée et que leur sacrifice ne soit pas vain”.

Ces chiffres, la secrétaire générale de la confédération générale du travail (CGT), Sophie Binet, les répète pour la presse : “1 227 morts au travail en 2022, dont 738 personnes mortes sur leur lieu de travail, 286 accidents mortels sur les trajets domicile-travail et 203 morts consécutives à des maladies professionnelles reconnues”. Des chiffres qui concernent uniquement le régime général. “Ils n’intègrent pas ceux de la fonction publique ou des régimes spéciaux, comme ceux des marins qui détiennent le record de la mortalité au travail”, précise-t-elle.

Pour des raisons pratiques et venteuses, les 450 silhouettes noires en carton qui jonchent l’esplanade de la Libération (au lieu des 738 souhaitées) resteront à terre. À l’exception de quelques-unes tenues debout par des militants.

En 2023, le chiffre non-consolidé dépasserait la barre des 900 morts au travail, selon le syndicat, qui déplore une envolée morbide depuis la disparition des CHSCT en 2019 (autour de 560 morts au travail voire moins comptabilisées entre 2012 et 2018 contre 733 en 2019 et 645 en 2021). C’est d’ailleurs l’une des premières revendications de l’organisation (dossier de presse), que Sophie Binet souhaite voir compilées dans une loi, “pour mettre fin à l’hécatombe” au travail : “Rétablir des instances de représentation collective des salariés de proximité”.

« 2/3 des entreprises n’ont pas de représentants du personnel »

“Les ordonnances Macron de 2017 ont supprimé deux acteurs majeurs de la prévention (les délégués du personnel et les CHSCT) qui faisaient tout le travail quotidien et individuel d’accompagnement et de remontée des risques”, poursuit la syndicaliste, qui ne se satisfait pas des “CSE fourre-tout avec moins d’élus” venus combler les trous.

“Le résultat, on le connaît maintenant : une explosion des déserts syndicaux”. Selon elle, “deux tiers des entreprises n’ont pas aujourd’hui de représentants du personnel”. Ainsi, “les lieux où l’on parlait de santé et de sécurité et où l’on pouvait mettre en place des mesures de prévention ont disparu”, s’alarme-t-elle.

Le droit d’enquête, il est là. Mais on n’y arrive pas 

“Si vous prenez les Carrefour Market, on avait un CE de Lille à Brest et un CHSCT par magasin [entre 30 et 50] avec des délégués du personnel, illustre Gérald Le Corre, inspecteur du travail et militant CGT basé en Normandie. Maintenant, on a un CSE de Lille à Brest et des CSSCT qui font des réunions de travail en visio mais pas d’enquête de terrain. S’il y a un burn-out, un accident, une chute de hauteur, que voulez-vous faire ? Vous n’avez pas le temps de vous déplacer, réaliser une enquête impliquant une dizaine d’entretiens, etc.”

Surtout que la santé et la sécurité étaient loin d’intéresser tous les représentants du personnel. “Pour être élu au CSE, il faut notamment faire des actions sociales (chèque vacances, etc.) et s’occuper de la demande individuelle, poursuit l’inspecteur. Or, la demande individuelle des collègues n’est pas la santé-sécurité mais le salaire, la prime, les horaires, etc. À partir du moment où l’on cumule tous les mandats dans le CSE, la partie qui tombe inévitablement aux oubliettes sont les enquêtes longues en SST. Le droit d’enquête, il est là. Mais on n’y arrive pas”.

L’ex-secrétaire du CHSCT de la DIREECTE Normandie, militant de la première heure, témoigne même ne pas s’être déplacé à Cherbourg depuis Rouen. “Vous ne pouvez pas représenter à plus de trois heures de route”, coupe-t-il court.

« Un agent de contrôle pour environ 1 100 entreprises »

Un manque de temps et de moyens dont souffre aussi l’inspection du travail, pour laquelle la CGT demande le doublement des effectifs. “On a aujourd’hui un agent de contrôle pour environ 1 100 entreprises, évalue Gérald Le Corre. Et cette année, Bercy a choisi de supprimer 100 recrutements prévus pour 2024”.

Selon Agathe Le Berder, secrétaire générale adjointe de la CGT des ingénieurs cadre et techniciens (Ugict), plus de 370 postes d’inspecteurs du travail sont aujourd’hui vacants sur les 2 000 que devrait compter le pays. “Concrètement, 4 millions de salariés en France sont dans une zone de non-droit social”, calcule-t-elle.

Des procédures sur des accidents mortels ne sont jamais finies 

Résultats : “Des procédures sur des accidents mortels ne sont jamais finies, révèle l’inspecteur du travail normand. Les collègues n’y arrivent pas, certains ont changé de secteurs, il y a un gros turn-over… Il y a même des collègues qui renoncent. Ils me disent : “Gérald, pourquoi faire un PV ? La famille ne sera pas partie civile, la victime n’avait pas d’enfants, il n’y a pas de syndicat, sa boîte se trouve en Roumanie, etc. Certains ne savent pas ce que deviennent leurs procédures et ne veulent pas bosser pour rien. Le ministère demande d’être nickel au moins sur les accidents mortels. Ce n’est pas le cas. La réalité du travail quotidien est celle-là : il y a des urgences et des gens en souffrance”.

À ces déserts syndicaux et ces zones de non-droit social s’ajoute le désert médical. “Moins de 5 000 médecins du travail aujourd’hui en France peinent à répondre aux besoins des 20 millions salariés du privé”, résume Agathe Le Berder qui insiste sur le fléau des “risques socio-organisationnels”, terme qu’elle préfère à celui de risque psychosocial (RPS).

L’Ugict, le syndicat techniciens et cadres de la CGT, met à la disposition des travailleurs et préventeurs un “sociomètre inspiré par l’outil développé par les féministes pour permettre aux salariés de se situer et lutter contre l’invisibilisation de leur situation et un guide à l’usage de nos organisations syndicales pour mener des enquêtes sur les tentatives de suicides et les suicides”.

« Le Code du travail ne fait plus peur à personne »

Conséquence directe du manque d’inspecteurs du travail : plus de la moitié des entreprises n’ont pas de document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). “Aujourd’hui, le code du travail est un code de papier qui ne fait plus peur à personne, estime Sophie Binet. Toutes les entreprises doivent faire un DUERP. Or, plus de la moitié n’en ont pas parce qu’il n’y a pas d’inspecteurs du travail en nombre suffisant pour venir sanctionner les entreprises et parce que les sanctions sont dérisoires.”

“La sanction qu’encourt une entreprise qui n’a pas de DUERP, c’est 1 500 € d’amende forfaitaire*, poursuit-elle. Pour une entreprise de moins de 10 salariés, c’est un peu dissuasif mais une multinationale n’en a strictement rien à faire. Il faut des sanctions dissuasives pour les entreprises et les chefs d’entreprise pour que les responsabilités soient prises. Aujourd’hui, on meurt et on tue au travail en silence. Il y a une impunité totale en matière de santé au travail qui est scandaleuse.”

“Interdire la sous-traitance en cascade”

Une impunité organisée surtout, selon la secrétaire générale, par les majors du bâtiment : Bouygues, Vinci et Eiffage. “Ces multinationales multiplient les niveaux de sous-traitance pour diluer leur responsabilité, dénonce-t-elle. Elles ont du sang sur les mains. Dans leur périmètre, il y a des dizaines de dizaines de morts chaque année qui ne sont même pas comptabilisés. Il faut que cette délinquance en col blanc cesse”. Des “délinquants en col blanc” vis-à-vis desquels au passage, la justice pénale “aux abois” offre une “espèce de complaisance”, dénonce Gérald Le Corre.

“Les précaires, intérimaires et sous-traitants sont les premiers touchés, poursuit Sophie Binet. Nous n’avons pas les chiffres mais nous le savons et le voyons sur le terrain. Quand on est sous-traitant, on a beaucoup plus de risques et beaucoup moins de prévention. Et par principe, personne n’est responsable. On a des cas où les familles mettent cinq jours pour pouvoir accéder au corps. Les majors dissimulent les morts et les circonstances pour fuir leur responsabilité”.

Avant de reprendre le slogan d’Olivier Besancenot du nouveau parti anticapitaliste (NPA), lui-même repris étonnamment par Emmanuel Macron en 2022 : “Ce qui tue, c’est le fait de toujours faire primer le profit sur les vies. Or, nos vies valent plus que leurs profits”.

Philippe Gaborieau, secrétaire fédéral à la CGT Construction Bâtiment Bois et Ameublement, au pupitre de la CGT le 25 avril, sur la place de l’Hôtel-de-Ville à Paris.

La CGT propose ainsi d’”interdire la sous-traitance en cascade en la limitant à un niveau” et de supprimer son recours pour les activités à risque. “Sur les grands chantiers, on se retrouve avec 4, 5, 6 ou 7 niveaux de sous-traitance avec des choses impossibles à contrôler en termes de responsabilité du travail illégal, poursuit la syndicaliste. Dans ce cas-là, les politiques de prévention ne peuvent pas être efficaces. Quand le collectif ne se connaît pas parce qu’il y a des patrons différents, des salariés précaires qui changent de jour en jour, les gestes professionnels ne sont pas intégrés. Quand on casse les collectifs de travail, on multiplie les risques et les dangers.”

“Nous voulons limiter la sous-traitance à la seule technicité, interdire la sous-traitance de capacité, établir une liste noire des entreprises condamnées ou verbalisées pour non-respect grave de la législation du travail, lesquelles seraient interdites de répondre à des appels d’offres, y compris les donneurs d’ordre, maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre, et créer un homicide volontaire du travail”, complète Philippe Gaborieau, secrétaire fédéral à la CGT Construction Bâtiment Bois et Ameublement. Ce dernier déplore le peu de visibilité des morts sur les chantiers. “Si le décès d’un militaire, d’un policier ou d’un pompier déclenche à juste titre une vague d’émotions dans les médias, le salarié du BTP aura droit dans le meilleur des cas à un entrefilet dans la rubrique des chiens écrasés”, dénonce-t-il.

“L’INRS est exsangue”

Enfin, la CGT appelle à mettre en œuvre “en urgence” la convention d’objectifs et de gestion (COG) pour 2023-2027 transcrivant l’accord national interprofessionnel (ANI) de mai 2023 pour débloquer “l’enveloppe de 300 M€ décidée par les partenaires sociaux dans l’ANI de 2023 pour la prévention, les Carsat (caisses d’assurance retraite et santé au travail) et l’INRS (institut national de recherche et de sécurité)”. Une enveloppe qui pourrait bien être allégée.

“Nous voulons les 300 millions prévus par l’ANI à l’euro près, a insisté Sophie Binet. Le gouvernement veut puiser dans les caisses AT/MP qui croulent de réserves pour faire autre chose. Il faut qu’il arrête de penser que nos cotisations sociales sont son argent de poche. Sur ces 300 millions, 15 millions doivent aller à l’INRS. Ce n’est rien”.

“Par contre, le résultat, on le voit très concrètement, poursuit-elle. Les salariés de l’institut m’ont expliqué ce matin [25 avril] qu’en 2023, il y aurait dû avoir une étude sur les risques d’exposition des produits chimiques pour les femmes enceintes. Cette étude n’a pas pu être faite. Ils devaient également faire un recrutement d’une personne en charge des risques professionnels dans le secteur du bâtiment. Ils n’ont pas pu le faire donc il n’y a plus de personne dédiée aux accidents et aux morts dans le secteur du bâtiment. C’est grave.”

Sophie Binet et une délégation CGT ont rencontré le matin du 25 avril la direction générale de l’INRS au siège social parisien de l’institut, boulevard Richard Lenoir, à Paris.

Sophie Binet invite ainsi la ministre de la santé et du travail, Catherine Vautrin, “à visiter l’INRS pour voir à quoi ça sert. “L’INRS est la clef de voûte de la prévention, poursuit-elle. L’institut est dans une situation de crise inédite. Pour la première fois depuis sa création en 1947, il n’a plus de budget pour fonctionner. Depuis un an et demi, il fonctionne en mode dégradé”.

*Le défaut de transcription des risques professionnels de l’entreprise dans un DUERP(ou le défaut de mise à jour) est puni dune amende pour les contraventions de 5eclasse : ​1 500 et 3 000 en cas de récidive pour une personne physique, 7 500 et 15 000 en cas de récidive pour une personne morale (C. trav., art. R. 4741-1).

** Sur l’INRS, lire notre interview du délégué syndical CFDT Christian Darne

La ministre du travail devait annoncer hier, à l’issue d’un Conseil national d’orientation des conditions de travail (CNOCT), une série de “12 mesures” concernant la prévention des accidents du travail. Dans la journée, le ministère a indiqué à la presse que ces mesures seront présentées ultérieurement. 

Matthieu Barry

JO 2024 : l’inspection du travail stoppe des travaux pour danger grave et imminent

30/04/2024

Selon les informations du journal L’Équipe, l’inspection du travail a arrêté du 9 mars au 18 avril 2024 la construction d’une tribune temporaire sur le site olympique de Versailles – qui accueillera cet été les épreuves d’équitation et de pentathlon moderne – pour danger grave et imminent de chute de hauteur. “Des salariés travaillaient sur le montage de la partie décrochée [et] se trouvaient pour certains à une hauteur estimée entre 19 et 20 mètres”, justifient notamment les inspecteurs interrogés par L’Équipe.

Selon le quotidien sportif, la société en charge des travaux, GL Events, a réclamé la reprise du chantier devant le tribunal administratif un mois plus tard, invoquant notamment un “intérêt public majeur” lié à la tenue des évènements sportifs liés aux Jeux Olympiques. Un argument balayé par la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités d’Île-de-France (DREETS) qui estime au contraire que “l’intérêt public justifie l’exécution des arrêts de travaux” .

Dans une ordonnance rendue en référé le 11 avril, les juges administratifs soulignent par ailleurs que “aucun élément concernant la solidité des harnais, seul moyen de protection, n’a pu être apporté lors du contrôle ou ultérieurement”» et que “aucune notice du fabricant ou mode opératoire lié au montage de cette structure n’a pu être présenté”. Selon Paris 2024, le chantier n’a pas pris de retard. 

Source : actuel CSE

L’expert habilité désigné par le CSE en cas de risque grave peut librement auditionner les salariés

03/05/2024

L’organisation d’entretiens individuels avec les salariés par l’expert habilité désigné par le CSE en raison d’un risque grave n’est pas soumise à l’autorisation de l’employeur.

Depuis une jurisprudence du 28 juin 2023 (n° 22-10.293), on sait que l’expert-comptable désigné par le CSE dans le cadre de la consultation obligatoire sur la politique sociale ne peut auditionner les salariés qu’avec l’accord exprès de l’employeur.

Qu’en est-il pour l’expert habilité qu’un CSE peut faire intervenir en cas de risque grave identifié et actuel ou de projet d’aménagement modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (article L. 2315-94 du code du travail) ?

Pour la première fois nous semble-t-il, un tribunal judiciaire répond à cette question.

35 entretiens sont prévus par l’expert

Au commencement de cette affaire, la décision du CSE de la société Staub Fonderie de se faire assister par un expert habilité en raison d’un risque grave. L’expert, notamment chargé d’analyser les conditions de travail et les facteurs de risques psychosociaux au sein de l’entreprise, prévoit dans sa lettre de mission la réalisation de 35 entretiens individuels pendant le temps de travail : 15 avec des salariés affectés à la production, 10 à la demande des salariés et, enfin, 10 avec des salariés des fonctions “Support”.

En désaccord avec le nombre d’entretiens prévus, et face au refus de l’expert de revoir sa copie, la direction de Staub Fonderie, qui avait suggéré de se limiter à 9 entretiens en présentiel et de diffuser un questionnaire auprès de tous les salariés, porte l’affaire en justice. Il est demandé au tribunal judiciaire d’annuler le point de la lettre de mission portant sur la réalisation de ces 35 entretiens. 

L’employeur estime que ces entretiens ne peuvent lui être imposés

Pour l’employeur, par analogie avec ce qui a été décidé par la jurisprudence pour l’expert-comptable du CSE, l’expert habilité “ne peut pas imposer la réalisation d’entretiens individuels sur le temps de travail”. De leur côté, le CSE et son expert font valoir que les prérogatives et les règles d’intervention d’un expert habilité, dont la mission concerne la santé au travail, diffèrent de celles applicables à l’expert-comptable et que le recours à des entretiens permet d’avoir une “analyse dynamique de la situation”.

Tenant compte du fait que la mission de l’expert habilité “concerne la prévention des risques professionnels, et, plus largement, la santé des salariés”, le tribunal judiciaire rejette la demande de la direction de Staub Fonderie.

L’expert doit pouvoir interroger les salariés sur leurs conditions de travail 

Pour les juges, “contrairement à l’expert-comptable, qui procède essentiellement par voie d’analyses documentaires dans le domaine du chiffre, l’expert habilité est amené à produire lui-même son support de travail, dans le champ notamment de la psychologie du travail, de l’ergonomie et de la sociologie”. Il est donc important qu’il “puisse interroger les salariés sur leurs conditions de travail”. D’ailleurs, l’arrêt du 7 août 2020 relatif aux modalités d’exercice de l’expert habilité prévoit bien que l’expert est “notamment chargé d’organiser les analyses du travail pertinentes et mettre en place les entretiens permettant de recueillir les points de vue des acteurs de l’entreprise” et qu’il “décide du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre”.

Conclusion des juges, l’organisation d’entretiens par l’expert habilité n’a donc pas à être soumise à l’autorisation de l’employeur. La direction de Staub Fonderie ne pouvait pas s’opposer à la tenue des 35 entretiens individuels prévus par l’expert du CSE.

► Remarque : attention, même s’il est très intéressant, il ne faut pas donner à ce jugement de tribunal judiciaire plus d’importance et de portée qu’il n’en a. En effet, tant que la Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur le sujet, on ne peut pas affirmer avec une certitude absolue que l’expert habilité peut organiser des entretiens individuels sans avoir besoin de l’accord de l’employeur.

Frédéric Aouate

Un outil d’évaluation de la santé au travail pour les experts-comptables franciliens

03/05/2024

L’Ordre des experts-comptables Paris Île-de-France met en place, avec l’Observatoire Amarok, un dispositif qui évalue la santé au travail et détecte les risques de burnout chez les experts-comptables franciliens. Si le bilan de l’évaluation révèle un niveau de stress supérieur aux effets des actions positives, les dirigeants seront invités à contacter le comité Solidaire du conseil régional ou le numéro vert d’Amarok. Une assistance adaptée sera ensuite mise à leur disposition pour les soutenir. Le test est disponible ici.

Source : actuel CSE