Campagne de communication sur les accidents du travail graves et mortels : la CGT déplore l’absence de mention du droit de retrait
02/10/2023
Le syndicat CGT du ministère du travail réagit vivement au lancement de la campagne de communication du gouvernement sur les accidents graves et mortels. Si le syndicat se réjouit de voir le ministère du travail “s’atteler enfin à ce sujet majeur”, il déplore que cette action soit tardive et ne compense pas l’insuffisance, à ses yeux, de du 1er plan de prévention des accidents graves et mortels, lancé par le ministère en 2022.
“Le plan se revendique de la prévention primaire, mais consiste principalement en des actions de sensibilisation et de formation (mesures n°1, 2, 3, 5, 6, 8, 13, 16, 24, 25, 26 et 27) ou de rappel du cadre réglementaire en vigueur, sans modification des organisations du travail, donc sans combattre les risques à la source. De plus, les actions de formation sont principalement orientées en direction des salariés, comme si celles et ceux-ci avaient le pouvoir d’éviter les accidents, alors que les conditions de travail sont déterminées par les employeurs. Le slogan de la campagne lancée par O. Dussopt « responsabilité de l’entreprise, vigilance de tous » est, de la même façon, culpabilisant pour les travailleurs. Et ces actions de communication ne comportent même pas d’information des salariés quant à un de leur droit essentiel pour préserver leur santé et leur sécurité et se soustraire au danger : le droit de retrait”, estime la CGT.
D’autre part, le syndicat, qui revendique “une politique pénale du travail sévère” ainsi que le rétablissement des CHSCT, juge insuffisants les effectifs de l’inspection du travail : “Il reste moins de 1700 agents de contrôle pour tout le territoire, près de 450 sections d’inspection sont vacantes !”
Source : actuel CSE
Quand la logistique s’attaque à la diversité de genre
04/10/2023
Exosquelettes, armoires robotisées, chariots à hydrogène… En pleine pénurie de main d’œuvre, la logistique mise sur la technologie et l’aménagement des postes de travail pour réduire la pénibilité de ses métiers et attirer les femmes. Tout en accélérant la lutte contre les stéréotypes de genre. Retour sur la table-ronde “Femmes et logistique : quels enjeux d’attractivité et de santé sécurité ?” du dernier salon Preventica à Toulouse.
“Avant, dans les entrepôts, ça sifflait, c’était graveleux et vous aviez des calendriers Pirelli”, se souvient Thomas Daudré-Vignier, ex-président de l’association Pil’es et directeur des sites logistiques chez But. Quand Marie-Laure Furgala, ancienne diplômée du Master ISLI Supply Chain (institut supérieur de logistique industrielle) qu’elle dirige désormais (*), se mord la lèvre en évoquant le doux sobriquet dont les étudiants de sa promo étaient affublés : “Les bronzés du bras gauche”. Une image d’Epinal que le secteur tente encore aujourd’hui d’estomper, par souci d’attractivité. “La femme est l’avenir de l’homme”, reprend à son compte Thomas Daudré-Vignier, qui estime que « la solution à la pénurie de personnel dans les entrepôts passe par les femmes”.
A mon master en 1996, nous étions 6 femmes sur 46
Une féminisation déjà à l’œuvre. “Toutes les études montrent un accroissement notable du poids des femmes dans le secteur, de 7 % il y a quelques années à plus de 30 % aujourd’hui, plus de 40 % dans certaines activités”, se réjouit le Cercle Entreprises et Santé. “Quand j’ai fait le master ISLI en 1996, nous étions 6 femmes sur 46. Maintenant, j’ai à peu près 30 % de femmes. Donc oui, la logistique se féminise”, confirme la directrice de Master. Même son de cloche chez GXO Logistics.
“Nous comptons aujourd’hui 31 % de femmes et 52 % dans la catégorie des ouvriers : c’est plutôt pas mal !”, se félicite Samya Bellhari-Trahin, responsable ergonome et QVT (qualité de vie au travail) du prestataire pure-player de logistique contractuelle. “Quand je suis arrivée dans le secteur, je n’y connaissais rien mais je me suis aperçue très rapidement qu’il y avait quand même un certain nombre de femmes dans ce monde-là”, ajoute-elle. Même si “nous sommes loin de la parité”, tempère Marie-Laure Furgala.
Du côté du pôle d’intelligence logistique (Pil’es), “l’ensemble des permanents sont des femmes”, se targue Thomas Daudré-Vignier, avant de préciser qu’elles ne représentent que 16 % des employés des entrepôts qu’il gère chez But. “Ce qui est plutôt pas mal, défend-il, à l’instar de la responsable ergonome de GXO. Parce que les produits que nous manipulons sont lourds (meubles à plat, canapés, fauteuils, etc.). Toutes les femmes ne sont pas des nageuses soviétiques dopés”, se hasarde-t-il. “J’ai 20 ans de logistique donc j’ai vu effectivement arriver les technologies, y compris l’arrivée des femmes”, témoigne un homme de l’assistance.
La petite blague de Michel
Des tournures symboles de la lente mutation des mentalités. “C’est très difficile pour certaines personnes d’évoluer […], de comprendre que les discours un peu macho et virile n’avaient pas de raison d’être, que les femmes pouvaient prendre des postes à responsabilité, que parfois elles étaient meilleures que nous, et qu’il fallait une cohabitation bénéfique pour tout le monde”, soulève au passé Thomas Daudré-Vignier.
Une problématique à laquelle Samya Bellhari-Trahin répond par des formations sur les risques psychosociaux, le harcèlement moral et les agissements sexistes sous la forme d’un jeu de rôle, “une mise en situation que l’on retrouve généralement régulièrement dans les entrepôts et qui va générer des tensions”.
Est-ce que vous vous sentez crédible pour manager des caristes ?
“Ces formations sont très riches et intéressantes parce qu’autour de la table, des femmes et des hommes débattent ensemble sur la petite blague de Michel que toutes les femmes reçoivent, qui est facile et simple pour lui, mais qui peut être perçue péniblement par les femmes à moyen et long terme”, illustre l’ergonome. “Nous faisons également beaucoup de formations chez But justement sur le respect, la bienveillance, la diversité et le respect du droit des femmes”, enchérit au présent Thomas Daudré-Vignier. Avant de lorgner sur une différence culturelle disputable. “Moi j’aime bien dire les choses telles qu’elles sont : on constate un remplacement d’une population par une autre, c’est-à-dire qu’il y a beaucoup de gens issus de l’immigration qui viennent dans nos entrepôts et qui n’ont pas forcément cette culture de la femme, postule-t-il. Il faut par exemple rappeler que cela ne se fait pas de tourner le dos à une responsable qui dit bonjour”.
On manque encore de modèles féminins
Pour Marie-Laure Furgala, la réalité est différente aujourd’hui, même si. “Je me souviens encore d’un entretien de recrutement pour un stage dans un entrepôt de région parisienne il y a 28 ans. On m’a posé cette question : ”Est-ce que vous vous sentez crédible pour manager des caristes ?”, maugrée-t-elle encore. Si j’ai pris ma revanche, formant ceux qui vont manager les caristes, mes étudiantes ont toujours du mal à se projeter dans un univers entrepôt. Il est nécessaire de faire évoluer l’image de ce métier en mettant en place des mises en situation ou des visites de sites, leur faire visualiser qu’effectivement ce n’est pas un métier réservé aux hommes. Les femmes souffrent du syndrome de Cendrillon : on boulonne, on boulonne, mais on est moins visible. On manque aussi de rôle modèle féminin, mes mentors ont toujours été des hommes.”
La directrice suggère d’aller construire l’attractivité du côté de la Supply Chain, compris selon elle comme “tous les pavés en amont et en aval de la logistique, des entrepôts et des transports”. “L’élargissement à la Supply Chain aide à féminiser le sourcing de mes étudiants, explique-t-elle. Nous avons une nouvelle génération qui veut avoir un réel impact environnemental et sociétal, qui veut s’orienter vers des fonctions leur permettant d’avoir un vrai levier d’action.”
De quoi rester optimiste. “Je voudrais rassurer le public : pour mes étudiants, la Supply Chain n’est pas un métier genré ! Ils ne comprennent même pas pourquoi on pose le débat sur la table”.
Manutention assistée
À côté du changement de mentalités et de sa valorisation auprès du jeune public, le secteur compte sur les nouvelles technologies pour attirer les femmes. « La réduction de la pénibilité en entrepôt et dans la logistique au sens large est une source d’attractivité pour une population qui jusqu’à maintenant ne s’identifiait pas à ce métier », assure Marie-Laure Furgala, citant « l’intelligence artificielle, la mécanisation, la mise en place de convoyeurs et de robots, les armoires robotisées d’Amazon que vous voyez sur internet et les chariots élévateurs à l’hydrogène que l’on recharge comme une voiture, jugés plus rassurants pour les femmes ». « La population féminine se reconnaît davantage dans la manutention assistée que dans les entrepôts d’il y a 30 ans, qui ont quand même bien évolué », explique-t-elle.
Les standards non genrés génèrent des situations de travail plus adaptées à la population masculine
“Un tas de nouvelles technologies comme la cobotique (collaboration humain-robot, ndlr), les AGV (véhicule a guidage automatique qui conduisent un colis ou une palette d’un point A à un point B, ndlr) ou la réalité augmentée permettent aujourd’hui de limiter les contraintes et de permettre aux femmes et aux hommes d’effectuer ces métiers dans de meilleures conditions”, égrène Baptiste Truillet, ergonome au sein de la start-up Soter Analytics qui développe des capteurs capables de mesurer “les contraintes réelles que les opérateurs subissent”.
Des technologies qui éclairent l’inégalité de genre des postes de travail. “À métier et environnement égaux, nos capteurs ont remontés environ 30 % de contraintes supplémentaires (en volume) pour les femmes”, informe l’ergonome. La faute, selon lui, à des postes de travail conçus selon des “standards non genrés qui génèrent des situations de travail plus adaptées à la population masculine”.
De son côté, GXO a mis en place “un certain nombre d’actions techniques dont des exosquelettes”, précise Samya Bellhari-Trahin. Idem pour Thomas Daudré-Vignier. “Grâce aux exosquelettes, nous avons un site qui n’a plus d’accidents depuis deux ans”, se réjouit-il. Le directeur des sites logistiques de But reste toutefois dubitatif quant à l’apport de l’intelligence artificielle dans son métier. “Pour optimiser les approvisionnements ou l’organisation, oui. Mais je ne crois pas du tout à la robotisation globale, estime-t-il. Nous avons écumés les salons, il n’y a aucune entreprise qui a travaillé sur nos produits. Derrière l’intelligence artificielle, il y a de l’humain qui donne de la data. S’il n’y a pas la connaissance métier, elle peut vous proposer un truc sur le papier qui vous semblera magnifique mais qui ne marchera pas dans la réalité.”
Rotation des postes
Après les “actions humaines et sociales” et les “actions techniques”, un dernier pan à explorer : “Les actions en matière d’organisation du travail”, résume la responsable ergonomie et QVT de GXO, qui a classé pour l’occasion les initiatives de sa structure.
“Je pense qu’il va falloir que l’on travaille encore davantage sur les actions organisationnelles”, pointe-t-elle, pourtant “très fière” d’un récent “accord conclu main dans la main avec les élus sur la qualité de vie au travail, l’équilibre vie pro/perso et l’égalité professionnelle”. L’ergonome souhaite ainsi “encourager la promotion interne, réfléchir à la rotation des postes [au sein de GXO], à l’équilibrage des lignes de copacking, et d’une façon générale, à la manière dont [elle] va pouvoir préserver le mieux possible les femmes dans l’entreprise”.
Geodis travaille sur le paiement intégral du congé maternité
Marie-Laure Furgala insiste aussi sur la nécessité de mieux organiser le travail des femmes, mettant en avant de belles initiatives : “Au niveau monde, Geodis travaille sur le paiement intégral du congé maternité, voire à son allongement, et Amazon aménage les horaires de travail des femmes enceintes ou qui ont des jeunes enfants, en les assignant par exemple en équipe de jour et pas uniquement en équipe du matin ou de l’après-midi”.
La directrice de Master souligne aussi l’importance des journées « enfant ». “Parce qu’il y a beaucoup de mères célibataires dans ces métiers, cela les aide à se maintenir en poste”, explique-t-elle. “C’est compliqué les horaires changeants, répond Thomas Daudré-Vignier. Nous avons effectivement de plus en plus de mères célibataires alors nous essayons de trouver des solutions, tout en respectant une équité quand même globale de l’entreprise”. Une équité globale…de genre.
(*) Supply chain : chaîne logistique. Ces mots désignent les différentes étapes liées à la chaîne d’approvisionnement, de l’achat des matières premières à la livraison d’un produit ou service au client.
“L’écart salarial entre les femmes et les hommes est réel” |
Une autre manière d’attirer les femmes et la jeune génération serait d’agir sur les salaires. Or, Marie-Laure Furgala déplore le manque d’équité salariale dans le secteur. “L’écart salarial est réel entre les hommes et les femmes : à diplôme égal et compétences égales, mes étudiantes touchent 1 300 € de moins que mes étudiants à l’embauche. Comment ce métier peut continuer à vouloir être actif auprès d’une population discriminée dès le départ ?, s’agace-t-elle. Je ne vous parle même pas des écarts de salaire au bout de 5, 10 ou 20 ans. Je constate chaque jour l’écart salarial, étant marié à un ancien diplômé de l’ISLI.” Une sortie qui interpelle un congressiste. “Moi, je dis aux collègues qui sont déjà dans la logistique ”Reproduisez-vous entre vous ! ”. À quoi sourit la directrice de Master : “Merci Monsieur, je dis la même chose à mes étudiants pour assurer mon sourcing dans 20 ans”. |
Matthieu Barry
Indemnisation des accidents de travail : le PLFSS revient sur le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation
04/10/2023
Au moment même où le gouvernement lance une campagne de communication sensibilisant les entreprises aux accidents de travail graves et mortels, l’article 39 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) inquiète les professionnels de la prévention et les défenseurs des victimes de ces accidents et maladies professionnels (AT-MP). L’Andeva, l’association de défense des victimes de l’amiante, n’y va pas par quatre chemins : à ses yeux, ces dispositions constituent “un gros cadeau au patronat sur le dos des victimes et de la prévention, car les employeurs condamnés au titre de la faute inexcusable sont d’abord des délinquants qui se sont affranchis de leur obligation de sécurité et qui n’ont pas respecté les principes de prévention imposés par le Code du travail”.
Cet article prévoit en effet des dispositions visant à contrecarrer deux arrêts du 20 janvier 2023. Avec ces décisions, et en cas de faute inexcusable de l’employeur, la Cour de cassation accepte dorénavant que les victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP) obtiennent une réparation complémentaire pour les souffrances physiques et morales endurées après consolidation, sans qu’il soit besoin de prouver que la rente perçue au titre de ces AT-MP ne couvre pas déjà ces souffrances.
L’exposé des motifs de cet article explique que ce revirement de jurisprudence “risque de conduire à une augmentation très importante du coût financier reposant sur les employeurs en cas de faute inexcusable de l’employeur, au risque de provoquer des faillites pour les entreprises les plus petites”. En conséquence, “la redéfinition du caractère dual de la rente et l’évolution du calcul de cette dernière apparaissent donc indispensables”. De fait, le projet de loi prévoit donc de garantir “la nature duale de la rente AT-MP, qui doit couvrir à la fois le préjudice économique et une part des préjudices extra-professionnels de la victime. Ainsi, les victimes AT-MP de droit commun percevront une rente couvrant de manière certaine ces deux types de préjudices, et en cas de faute inexcusable de l’employeur (FIE), l’employeur ne sera pas seul à supporter la charge financière d’un préjudice fonctionnel déjà en partie couvert par la rente AT-MP”. L’article indique ainsi :
« Lorsque l’incapacité permanente est égale ou supérieure à un taux minimum, la victime a droit à une rente forfaitaire composée de deux parts : « 1° Une part, dite professionnelle, correspondant à la perte de gains professionnels et à l’incidence professionnelle de l’incapacité. Elle est égale au salaire annuel modulé, multiplié par le taux d’incapacité. Le salaire annuel modulé est égal à une fraction du salaire annuel de la victime ou du salaire annuel minimum mentionné à l’article L. 434-16, dégressive en fonction du niveau de ce salaire. Le taux d’incapacité peut être réduit ou augmenté en fonction de la gravité des lésions et de l’atteinte portée aux perspectives de la victime sur le marché du travail ; « 2° Une part, dite fonctionnelle, correspondant au déficit fonctionnel permanent de la victime. Elle est égale à une fraction du taux d’incapacité multipliée par une valeur de point d’incapacité fixée par un barème qui tient compte de l’âge de la victime (..)”.
Source : actuel CSE
Congés payés et maladie : AvoSial s’alarme du risque financier pour les entreprises
05/10/2023
Dans un communiqué publié hier, le syndicat des avocats d’entreprise en droit social, AvoSial, réagit aux arrêts du 13 septembre 2023 sur la prise de congés en cas de maladie du salarié. Tout comme la CPME l’avait exprimé, et à l’inverse de la réaction d’un syndicat comme FO, AvoSial s’alarme des conséquences financières pour les entreprises.
AvoSial déplore “l’inaction de l’Etat sur le sujet qui conduit maintenant à une situation « difficile » pour les entreprises qui peuvent se retrouver avec des demandes de rappels de congés payés qui peuvent avoir des incidences financières importantes”. Et ce, alors que ce revirement était prévisible de longue date.
“AvoSial va bien entendu tout mettre en œuvre pour accompagner les entreprises et ses adhérents dans la gestion de cette situation. La rencontre avec le ministère du travail déjà programmée cette semaine sera l’occasion d’en échanger et un groupe de travail dédié à ce sujet a été mis en place”, conclut le communiqué.
Source : actuel CSE