CSE, ASC, Ires, Ceser, défenseurs syndicaux : quelques amendements en discussion dans le projet de loi simplification

07/04/2025

Le projet de loi simplification arrive en séance publique de l’Assemblée nationale à partir de ce mardi. Plusieurs amendements concernent directement les CSE, notamment en reprenant les propositions de hausse des seuils et de limitation de la BDESE. Plusieurs autres amendements souhaitent rétablir la conditions d’ancienneté dans les activités sociales et culturelles.

À partir de mardi 8 avril en soirée, le projet de loi sur la simplification de la vie économique va reprendre son examen parlementaire. Il y a peu, les syndicats étaient de nouveau reçus par le Parlement  afin de réagir aux principales mesures étudiées, notamment la simplification du bulletin de paie. 

Bulletin de paie, heures de travail, transmission électronique

Pas de retour du bulletin de paie simplifié. Les amendements déposés par le gouvernement au projet de loi Simplification de la vie économique ne reviennent pas sur l’article 7 supprimé par le Sénat en première lecture. En revanche, un amendement 2538 propose de poursuivre la simplification des échanges entre l’employeur et le salarié, en permettant d’envoyer par défaut tout autre type de documents ou d’informations émis par l’employeur au salarié, sous forme électronique, par le même canal que le bulletin de paie : contrat de travail, avenant, certification, attestation, formation, informations relatives au calcul des congés, de la fin de contrat, solde de tout compte”.

Plusieurs amendements (2257 par exemple) suggèrent de prolonger l’expérimentation du contrat de travail à durée déterminée “multi-remplacements” (CDDM) pour une durée de trois ans. D’autres (130) souhaitent renforcer l’usage du droit à l’acompte sur salaire, tant pour les entreprises que pour les salariés.

Un amendement 102 propose de créer une “carte travail sur le même modèle qu’une carte bancaire” afin de simplifier la gestion des heures travaillées pour l’employeur et “redéfinir la notion de travail fondée sur le nombre d’heures travaillées productrices de richesse”. Elle permettrait au salarié de pointer avant et après le travail. Ce pointage “constituera ainsi un acte de déclaration d’embauche automatisé”.

Seuils de CSE , ASC, défenseurs syndicaux

Un an après le rapport parlementaire “Rendre des heures aux Français” qui avait suscité une levée de bouclier des syndicats et des experts, les seuils de CSE reviennent sur le tapis du projet de loi. Plusieurs amendements 15731571,  1179 et 1568 reprennent la proposition du rapport parlementaire sur la simplification et suggèrent de rehausser les seuils des obligations liées à la mise en place des CSE. Le 1572 demande un rapport sur les charges administratives qui pèsent sur les entreprises et sur l’opportunité de relever le seuil des obligations “qui pèse sur les structures” lors de leur passage de 49 à 50 employés.

La BDESE revient également parmi les sujets à l’ordre du jour.  L’amendement 1188 propose de fixer l’obligation de disposer d’une BDESE aux entreprises de plus de 300 salariés contre 50 aujourd’hui et de conditionner sa production à la demande des membres de la délégation du personnel du CSE. Le 1251 veut rendre la BDESE facultative et conditionner sa production à la demande des membres de la délégation du personnel du CSE.

Il est également question des réunions de l’instance : l’amendement 1178 souhaite revenir sur le principe de la réunion mensuelle des CSE dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Sur les activités sociales et culturelles, des amendements 412580 et 455 par exemple veulent revenir sur l’arrêt de la Cour de cassation qui avait supprimé la condition d’ancienneté dans l’attribution des ASC. Selon l’exposé des motifs de ces amendements, l’arrêt de la Cour de cassation “vient perturber l’économie des CSE, et complexifier la vie des entreprises et des salariés, en remettant en cause des règles appliquées de longue date”. Les députés font également valoir que “l’afflux de nouveaux bénéficiaires va déséquilibrer la répartition du budget des ASC entre les salariés” ou encore “entraîner une surcharge de travail pour la gestion des ASC, pas toujours absorbable par les élus du personnel”.

Cet amendement se télescope avec un nouvel arrêt rendu par la Cour de cassation le 12 mars 2025 (n°23-21.223) qui se prononce dans le même sens que celui de 2023 : “S’il appartient au comité social et économique de définir ses actions en matière d’activités sociales et culturelles, l’ouverture du droit de l’ensemble des salariés et des stagiaires au sein de l’entreprise à bénéficier des activités sociales et culturelles ne saurait être subordonnée à une condition d’ancienneté”.

Un amendement 1533 vise à empêcher la suppression de la procédure d’agrément régional des organismes, centres et institut de formation des représentants du personnel, membres du comité social et économique. Le 1534 vise à simplifier la reprise d’entreprises par les salariés en rendant obligatoire la formation des représentants des CSE dans le cadre d’un stage de formation économique sur les possibilités de reprise d’entreprise par les salariés.

Enfin, des amendements 413662 et 456 souhaitent limiter par décret le nombre de salariés qui, au sein d’une même entreprise peuvent exercer des fonctions de défenseur syndical. Pour mémoire, ces derniers sont désignés par les syndicats pour une durée de quatre ans. La liste en est tenue dans chaque région par les Dreets (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités). Ils défendent les salariés devant les conseils de prud’hommes et les cours d’appel. L’exposé des motifs de ces amendements se plaignent “d’une multiplication des désignations” des défenseurs syndicaux “qui ont le statut de salariés protégés” et “disposent d’autorisations d’absences indemnisées pour exercer leurs missions”.

Les Ceser et l’Ires

Divers amendements non gouvernementaux visent à revenir sur la suppression potentielle des Ceser (n° 1252 par exemple), les conseils économiques sociaux et environnementaux rattachés aux régions. Leur potentielle suppression par la commission de simplification avait déclenché une levée de boucliers. 

Par ailleurs, l’Ires semble dans le viseur des députés rassemblement National. L’institut de recherche syndical met en œuvre des travaux de recherche de haut niveau au bénéfice des cinq confédérations représentatives (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC et CFTC) et de l’Unsa.

Selon l’exposé des motifs de cet amendement n° 166, il “vise à interroger l’existence de l’Institut de recherche économique et social”. Le texte revient sur un rapport de la Cour des comptes de 2023 qui “recommandait un réexamen du mode de fonctionnement de l’Ires”. L’amendement demande que le gouvernement remette au Parlement un rapport, au plus tard le 1er janvier 2026, “concernant la pertinence des subventions versées à l’Institut de recherche économique et social sur l’utilité de son travail et les modalités de son fonctionnement”.

En 2023, l’institut de recherche avait répondu à la Cour des comptes en faisant valoir notamment que l’Ires fonctionne autour “du principe d’études pilotées par les organisations syndicales (…) qui garantit un point de vue syndical dans la réflexion et le débat public, et concourent au pluralisme de l’analyse économique et sociale”.

Un an auparavant, à l’occasion de son 40e anniversaire célébré au Conseil économique social et environnemental, les cinq confédérations et l’Unsa avaient mis en avant l’utilité de l’Ires, notamment pour enrichir le répertoire syndical, anticiper les stratégies et former les militants.

Test PME, handicap, Urssaf

Deux amendement 2257 et 1502 du gouvernement prévoient le rétablissement du “test PME” visant à évaluer l’impact des nouvelles normes sur les TPE-PME avant leur adoption.

Sur le handicap, un amendement 2256 propose de supprimer le label valorisant l’engagement des entreprises en matière d’emploi des travailleurs handicapés, créé par l’article 171 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019. L’amendement 1494 revient sur le remplacement de la conciliation par la médiation lorsqu’une personne en situation de handicap ou ses parents si elle est mineure estiment qu’une décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées méconnaît ses droits. 

Un amendement 1842 propose la suppression des zones à faibles émissions (ZFE).

Sur les Urssaf, un amendement 157 veut modifier le délai dans lequel un cotisant souhaite demander le remboursement de cotisations versées à tort. Un amendement 1846 propose d’instaurer un Examen de Conformité Sociale permettant aux entreprises de solliciter un audit préventif de leurs obligations sociales. Le 427 suggère d’obliger la Commission de recours amiable à entendre le cotisant oralement si ce dernier en fait la demande. Le 184 vise à étendre la possibilité de transaction à l’ensemble des domaines du recouvrement, incluant notamment les allègements et exonérations de charges sociales ou encore le régime social des indemnités de rupture du contrat de travail. Enfin, le 221 charge le Gouvernement d’établir un rapport exhaustif sur les relations entre les entrepreneurs et l’Urssaf.

Marie-Aude Grimont

Discriminations liées à l’apparence physique : une réalité “prégnante” en entreprise

07/04/2025

Surpoids, style vestimentaire, maquillage jugé trop prononcé, couleur ou coupe de cheveux… Les discriminations liées à l’apparence physique sont souvent sous-estimées en entreprise, atteste le Groupe Apicil, à la lecture de la cinquième édition de son baromètre “Les Français et l’inclusion”, réalisée avec OpinionWay et dévoilée le 3 avril.

La quasi-totalité des Français (97 %) considère que l’apparence physique exerce une influence sur au moins une étape de la carrière. Ainsi, ils estiment qu’elle joue un rôle primordial dans le recrutement (77 %), l’intégration des nouveaux embauchés (71 %), l’accès à de nouvelles missions (71 %), ainsi que pour les promotions (68 %) et les augmentations (54 %).

À tel point que 31 % des salariés ont déjà adapté leur apparence à la suite d’une remarque dans leur entreprise sur leur apparence ou leur tenue et que 57 % des Français seraient prêts à réaliser au moins un ajustement physique pour des raisons professionnelles.

Source : actuel CSE

Un accord peut limiter la qualité de représentant de proximité aux seuls membres du CSE élus

08/04/2025

Si l’accord d’entreprise instituant les représentants de proximité (RP) prévoit qu’ils sont désignés uniquement parmi les membres du CSE, le représentant syndical au CSE ne peut pas être désigné représentant de proximité.

L’accord d’entreprise déterminant le nombre et le périmètre des établissements distincts peut mettre en place des représentants de proximité (C. trav., art. L. 2313-7, al. 1).

► Rappelons que les représentants de proximité sont des représentants du personnel intervenant dans des entreprises dotées de CSE mais dont le champ de compétence est plus restreint que celui de cette instance. Leur mise en place est purement facultative et se fait par accord. L’objectif est d’éviter une trop grande centralisation de la représentation du personnel au niveau de l’entreprise, surtout dans les entreprises ayant plusieurs établissements distincts, en donnant un rôle spécifique à certains salariés.

Les représentants de proximité sont membres du comité social et économique (CSE) ou désignés par lui pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité (C. trav.,

art. L. 2313-7, al. 7). Dans son questions-réponses sur le CSE, le ministère du travail a précisé que :

  • les représentants de proximité qui ne sont pas membres du CSE sont des salariés de l’entreprise désignés par lui (question n° 35) ; 
  • il revient à l’accord d’entreprise instituant les représentants de proximité de prévoir les modalités de leur désignation (C. trav., art. L. 2313-7 al. 5). Les représentants de proximité sont soit des membres du CSE, soit des personnes désignées par lui. L’accord d’entreprise ne peut pas prévoir que les représentants de proximité sont désignés parles organisations syndicales représentatives parmi les salariés de l’entreprise. L’accord ne peut pas non plus prévoir que les représentants de proximité sont directement élus par les salariés du périmètre d’implantation concerné (question n° 36).

L’accord d’entreprise qui prévoit que les représentants de proximité sont désignés parmi les membres du CSE doit-il être interprété comme visant uniquement les membres élus du CSE ou peut-il inclure les représentants syndicaux au CSE ?

Le représentant de proximité doit être désigné parmi les membres du CSE

Dans cette affaire, un salarié, représentant syndical au CSE, a été désigné représentant de proximité. Soutenant que cette désignation était contraire à l’accord applicable à l’entreprise exigeant que les représentants de proximité soient désignés par le CSE parmi ses membres, la société a saisi le tribunal judiciaire aux fins d’annulation de cette désignation.

Le tribunal a fait droit à cette demande. Le salarié n’étant pas membre élu du CSE, il ne pouvait pas être désigné comme représentant de proximité.

Le représentant syndical au CSE n’est pas un membre du CSE

Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation confirme cette décision. Elle rappelle dans un premier temps :

  • la composition du CSE : selon l’article L. 2314-1 du code du travail, le CSE comprend l’employeur et une délégation du personnel comportant un nombre de membres déterminé par décret en Conseil d’État compte tenu du nombre des salariés ;
  • les modalités de désignation et le rôle du représentant syndical au CSE : aux termes de l’article L. 2314-2 du même code, sous réserve des dispositions applicables dans les entreprises de moins de 300 salariés prévues à l’article L. 2143-22, chaque organisation syndicale représentative dans l’entreprise ou l’établissement peut désigner un représentant syndical au comité. Il assiste aux séances avec voix consultative. Il est choisi parmi les membres du personnel de l’entreprise et doit remplir les conditions d’éligibilité au CSE fixées à l’article L. 2314-19.

La chambre sociale en déduit qu’un salarié ne peut pas siéger simultanément dans le même CSE en qualité à la fois de membre élu, titulaire ou suppléant, et de représentant syndical auprès de celui-ci. En effet, le salarié ne peut pas, au sein d’une même instance et dans le même temps, exercer les fonctions délibératives qui sont les siennes en sa qualité d’élu et les fonctions consultatives liées à son mandat de représentant syndical lorsqu’il est désigné par une organisation syndicale, sans qu’un accord collectif puisse y déroger (Cass.soc., 22 janv. 2020, n° 19-13.269).

► Remarque : en l’espèce, l’accord d’entreprise exclut expressément que le représentant syndical au CSE, qui n’est pas membre du CSE même s’il assiste avec voix consultative aux séances de celui-ci, soit désigné représentant de proximité.

L’accord est donc interprété strictement par la Cour de cassation. Elle explique que l’accord exclut que le représentant syndical au CSE “qui n’est pas membre du comité social et économique, même s’il assiste avec voix consultative aux séances de celui-ci, soit désigné représentant de proximité”. Sa désignation en qualité de représentant de proximité doit être annulée.
En revanche, si l’accord prévoit la possibilité pour le CSE de choisir le représentant de proximité parmi les salariés de l’entreprise, le CSE pourrait, selon nous, désigner un représentant syndical au CSE comme représentant de proximité, en sa qualité de salarié de l’entreprise.

► Remarque : l’arrêt du 12 mars 2025 concerne l’interprétation d’un accord prévoyant que le représentant de proximité est désigné par le CSE “parmi ses membres”. A cette occasion, la Cour de cassation précise expressément, et de façon générale, que le représentant syndical au CSE “n’est pas membre du comité social et économique même s’il assiste avec voix consultative aux séances de celui-ci”. Cette solution permet, d’après nous, de trancher une question : lorsqu’il est prévu par le code du travail une désignation par le CSE “parmi ses membres”, le représentant syndical au CSE ne peut pas être désigné. C’est le cas du référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes (C. trav., art. L. 2314-1, al. 4), des membres de la CSSCT (même si l’administration avait déjà précisé que seuls les élus du CSE pouvaient y être désignés) (Questions-réponses CSE, 17 janv. 2020, n° 102 ; C. trav., art. L. 2315-39, al. 2), et des membres de la commission économique mise en place en l’absence d’accord (C. trav., art. L. 2315-47).

Julie Castro

Les faits reprochés au salarié atteint de troubles psychiques ne lui sont pas imputables

08/04/2025

Le licenciement pour faute grave prononcé à l’encontre d’un salarié ayant envoyé des messages menaçants à l’une de ses collègues est jugé sans cause réelle et sérieuse dès lors qu’il était atteint de troubles psychiques au moment des faits qui lui sont reprochés.

Un salarié ayant 28 ans d’ancienneté dans l’entreprise fait l’objet de nombreux arrêts de travail pour dépression. Après avoir envoyé des messages menaçants, de façon répétée, à l’une de ses collègues, le salarié est mis à pied à titre conservatoire. Il est ensuite hospitalisé à la suite d’une décompensation psychotique, ce qui a entraîné le report de son entretien préalable. Il est enfin licencié pour faute grave.

Les faits reprochés au salarié ne lui sont pas imputables

Le salarié conteste son licenciement. Pour la cour d’appel, les faits qui lui sont reprochés ne lui sont pas imputables puisqu’il se trouvait dans un état psychique fortement altéré pouvant obérer ses facultés de discernement quant au caractère répréhensible de son comportement, et qu’il était en rupture de traitement depuis plusieurs mois selon le médecin psychiatre. Elle juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’employeur forme un pourvoi contre cette décision en faisant valoir qu’il ignorait l’état de santé psychique du salarié lors de son licenciement puisqu’il n’avait, comme l’avaient expressément constaté les juges du fond, découvert le motif des arrêts de travail pour maladie qu’à l’occasion de la procédure prud’homale.

La Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel : du fait des troubles mentaux du salarié, les faits reprochés ne lui étaient pas imputables.

L’état psychique du salarié peut, a minima, être pris en compte pour apprécier la gravité d’une faute (arrêt du 5 novembre 1991 ; arrêt du 28 mai 2008 et arrêt du 17 juin 2009). Ainsi, les juges du fond doivent rechercher, lorsque cela leur est demandé, si le comportement du salarié invoqué comme motif de la rupture du contrat de travail n’était pas en rapport avec son état de santé (arrêt du 28 janvier 1998 ; arrêt du 31 octobre 2006). Les juges du fond peuvent donc, a fortiori, lorsqu’ils estiment que les faits reprochés ont été commis alors que le discernement du salarié était aboli, retenir qu’ils ne sont pas imputables au salarié, quand bien même leur réalité n’était pas contestée (dans le même sens s’agissant d’un salarié protégé : Conseil d’Etat, 3 juillet 2013 ; et pour une décision des juges du fond : cour d’appel de Metz, 17 mai 2005 n° 03-947). Il s’agit là de l’exercice, par les juges du fond, du pouvoir qu’ils tiennent de l’article L.1235-1 du code du travail pour apprécier la réalité et le sérieux de la cause de licenciement, appréciation qui n’est pas contrôlée par la Cour de cassation. Et le fait que l’employeur soit ou non avisé de l’existence des troubles est, à cet égard, indifférent, l’appréciation de l’imputabilité des troubles au salarié étant nécessairement subjective et liée à l’existence ou non de son discernement.

On observera au demeurant que la chambre sociale a récemment précisé que le licenciement d’un salarié prononcé en raison de son état de santé est nul (sauf inaptitude constatée par le médecin du travail), en sorte qu’une cour d’appel ayant constaté le lien entre les faits reprochés et l’état de santé du salarié ne peut pas dire le licenciement fondé au motif que l’employeur n’aurait pas été informé de la nature de la pathologie dans les suites de l’incident sur le lieu de travail et que l’intention de nuire ou de dissimuler la véritable cause du licenciement n’était pas établie (arrêt du 7 mai 2024).

La rédaction sociale

L’Apec envisage d’élargir ses missions

08/04/2025

L’Association pour l’emploi des cadres (Apec) réfléchit à étendre ses prérogatives, notamment vers l’accompagnement des nouveaux managers, comme le préconisait l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) dans son rapport du 28 mars sur les pratiques managériales. “Clairement, c’est un axe de réflexion pour nous”, a confirmé Gilles Gateau, directeur général de l’Apec, lors d’une conférence de presse le 3 février. Cette orientation s’inscrit dans la préparation du prochain mandat de service public 2027-2031 avec l’Etat, lequel consolide l’action de l’Apec dans le champ de l’intérêt général, en complémentarité avec le service public de l’emploi.

Les équipes de l’association se préparent donc à explorer ce sujet parmi d’autres nouvelles pistes d’activité. Dans cette perspective, l’Apec vient de recruter Florence Gelot, ancienne directrice éducation-formation au pôle social du Medef.

Source : actuel CSE

Travailleurs étrangers : le projet de loi DDADUE transpose les dispositions de la directive du 20 octobre 2021

08/04/2025

Le texte de compromis élaboré en commission mixte paritaire sur le projet de loi portant “diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes”, a été adopté le 2 avril 2025 par l’Assemblée nationale et le 3 avril 2025 par le Sénat. 

Alors que la France était sous le coup d’une mise en demeure de la Commission européenne, le Titre IV du texte, consacré à l’adaptation “au droit de l’Union européenne en matière d’entrée et de séjour” et composé d’un seul article, a pour objectif de mettre en conformité le droit français à la Directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié.

Il modifie principalement les articles L.411-4, L.421-11 et L.421-12 du Ceseda pour, notamment, les adapter aux conditions prévues par la directive pour bénéficier d’une carte de séjour pluriannuelle portant la mention “talent – carte bleue européenne”, réduire la durée de séjour légal dans chaque Etat membre successif de l’UE en cas de mobilité de longue durée, mieux protéger les étrangers contre les employeurs abusifs ou prendre en compte le cumul des séjours effectués par les membres de famille de détenteurs de carte bleue européenne dans différents Etats membres, dans le calcul de la durée de résidence exigée pour obtenir un titre de séjour autonome.

Source : actuel CSE

Mayotte : les majorations des taux de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle prolongées jusqu’au 30 juin 2025

08/04/2025

Un décret du 3 avril 2025 prolonge jusqu’au 30 juin 2025 la durée d’application de la majoration temporaire des taux horaires de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle pour les établissements situés à Mayotte. 

La loi d’urgence pour Mayotte du 24 février 2025 précise en effet que la période fixée initialement jusqu’au 31 mars 2025 pourra être prolongée par décret en fonction de l’évolution de la situation sociale et des conditions matérielles locales, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2025.

Rappelons qu’un décret du 20 mars 2025 a précisé que : 

  • le taux horaire de l’allocation d’activité partielle est fixé, pour chaque salarié concerné, à 70 % de la rémunération horaire brute, limitée à 4,5 fois le taux horaire du Smic, sans pouvoir être inférieur à 8,10 euros ; 
  • le taux horaire de l’indemnité versée par l’employeur au salarié placé en activité partielle est fixé à 70 % de la rémunération brute servant d’assiette de l’indemnité de congés payés.

► Le décret prolonge également, jusqu’au 30 juin 2025, pour les demandeurs d’emploi résidant à Mayotte et ayant épuisé leurs droits, le bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) et de l’allocation des travailleurs indépendants (ATI), ainsi que la période de référence au cours de laquelle est recherchée la durée d’affiliation à l’assurance chômage et le délai à compter de la fin d’un contrat de travail et avant l’expiration duquel doit intervenir l’inscription comme demandeur d’emploi ou le dépôt de la demande d’allocation. 

Source : actuel CSE

Même autorisé par l’administration, le licenciement d’un salarié protégé peut être jugé nul

09/04/2025

Le juge prud’homal ne peut pas se prononcer sur la légitimité du licenciement économique d’un salarié protégé, autorisé par l’administration. Il peut en revanche se prononcer sur les fautes commises par l’employeur avant la rupture et sur leurs conséquences pour le salarié.

Un salarié protégé est licencié pour motif économique, après autorisation de l’inspecteur du travail. Il conteste cette autorisation de licenciement devant le juge administratif, mais celui-ci le déboute, par une décision devenue définitive. Le salarié saisit alors le juge prud’homal, pour remettre en cause la légitimité de son licenciement : il soutient, notamment, que le licenciement est nul car son contrat de travail était toujours suspendu par un arrêt de travail d’origine professionnelle, faute pour l’employeur d’avoir organisé la visite médicale de reprise.

La Cour de cassation lui donne raison, dans un arrêt publié au bulletin de ses chambres civiles.

Le juge prud’homal est tenu par le principe de la séparation des pouvoirs

La règle de principe est simple : si le licenciement du salarié protégé a été autorisé par l’administration, le juge prud’homal ne peut pas se prononcer sur sa légitimité (jurisprudence constante, voir notamment (arrêt du 20 juin 2012). En effet, le conseil de prud’hommes n’est pas compétent pour apprécier la légalité d’une décision administrative, en application du principe dit “de la séparation des pouvoirs”. L’employeur et le salarié ne peuvent pas demander au juge prud’homal de réexaminer une question qui a déjà fait l’objet d’une décision administrative.

En matière de licenciement, tous les points contrôlés par l’inspecteur du travail échappent à la compétence du conseil de prud’hommes : par exemple, l’existence de la rupture (arrêt du 10 mai 2006), la question de savoir si le salarié était protégé au moment de la rupture (arrêt du 18 novembre 2008) ou encore le caractère réel et sérieux du motif invoqué à l’appui du licenciement (arrêt du 3 mai 2011).

► Rappelons, néanmoins, qu’en matière disciplinaire, l’inspecteur du travail ne se prononce que sur la question de savoir si la faute commise par le salarié protégé justifie, ou non, la rupture de son contrat de travail. Par conséquent, si le salarié a été licencié pour faute grave et qu’il conteste la qualification des faits qui lui sont reprochés, il peut saisir le juge prud’homal pour qu’il se prononce sur le degré de gravité de sa faute : si les faits sont constitutifs d’une faute simple, l’employeur peut être condamné à verser au salarié une indemnité de licenciement et une indemnité compensatrice de préavis (voir par exemple arrêt du 27 février 2013).

En revanche, le salarié protégé est en droit de saisir le juge prud’homal d’une demande d’indemnisation du préjudice résultant, non pas de la rupture de son contrat de travail en elle-même, mais de manquements de l’employeur antérieurs à cette rupture et qui n’auraient pas été pris en compte par l’inspecteur du travail lorsqu’il a autorisé le licenciement.

Ainsi, malgré l’autorisation administrative de licenciement, le juge prud’homal reste compétent pour examiner :

Un défaut de visite de reprise avant le licenciement peut-il justifier une annulation ?

Dans cette affaire, le salarié avait été licencié pour motif économique, et ce motif de licenciement n’était pas, en soi, remis en question.

Mais l’intéressé soutenait que l’employeur avait manqué à son obligation d’organiser la visite de reprise auprès du médecin du travail, à l’issue de son arrêt de travail provoqué par un accident du travail. Or :

  • il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation que, tant que la visite médicale de reprise, lorsqu’elle est obligatoire, n’a pas été organisée, le contrat de travail reste suspendu (arrêt du 25 mars 2009), et ce même si le salarié a repris le travail (arrêt du 15 octobre 2014) ;
  • tant que dure la suspension du contrat de travail, le salarié est protégé : il ne peut être licencié que pour faute grave ou pour impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie (article L.1226-9 du code du travail) ;
  • le motif économique de licenciement ne suffit pas, en soi, à caractériser l’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif non lié à l’accident du travail (arrêt du 7 juillet 2009) : la lettre de licenciement doit mentionner à la fois le motif économique et la raison pour laquelle ce motif rend impossible le maintien du contrat de travail (arrêt du 28 octobre 2009), sauf en cas de cessation d’activité (arrêt du 11 septembre 2024) ;
  • toute rupture prononcée en méconnaissance de cette protection est nulle, et ouvre droit à réintégration et indemnisation pour le salarié (C. trav. art. L 1226-13).

► La Cour de cassation juge que le représentant du personnel licencié à la fois sans autorisation administrative et en méconnaissance de la protection applicable aux victimes d’accident du travail ne cumule pas les réparations, mais a droit à l’indemnité la plus élevée (arrêt du 30 juin 2010 ; arrêt du octobre 2017).

La Cour de cassation, saisie du litige, constate que l’employeur a manqué à son obligation d’organiser la visite médicale de reprise. Et, selon elle, le principe de la séparation des pouvoirs n’empêche pas le juge prud’homal d’apprécier les fautes commises par l’employeur pendant la période antérieure au licenciement, y compris les conséquences du défaut d’organisation de la visite de reprise après l’arrêt de travail pour cause d’accident du travail.

La Cour de cassation substitue ce motif à celui retenu par la cour d’appel pour débouter l’employeur, qui voulait voir juger irrecevable la demande du salarié en nullité de son licenciement. Mais elle censure les juges du fond sur un autre point : ils avaient en effet débouté le salarié de sa demande de nullité du licenciement, au motif erroné qu’il n’avait pas droit à une visite de reprise. La cour d’appel de renvoi devra donc se prononcer sur la légitimité du licenciement du salarié, sous cet angle.

► Quelle sanction pourra prononcer la cour d’appel de renvoi ? Le salarié pourra obtenir la nullité de son licenciement, sur le fondement de l’article L.1226-13 du code du travail. En effet, l’inspecteur du travail qui a autorisé le licenciement économique ne s’est pas penché sur la question de la protection du salarié en application de l’article L 1226-9 : le principe de séparation des pouvoirs sera respecté (voir en ce sens, à propos du licenciement pour inaptitude d’un salarié protégé victime de harcèlement moral : arrêt du 15 avril 2015 ; arrêt du 15 juin 2022). Le salarié pourra donc prétendre à l’indemnité d’au moins 6 mois de salaire prévue par l’article L.1235-3-1 du code du travail.

La rédaction sociale

Coopératives agricoles : deux projets de fusion inquiètent la FGTA-FO

09/04/2025

Après Euralis et Maïsadour, deux nouvelles coopératives agricoles ont annoncé un projet de fusion : Terres du Sud (Lot-et-Garonne/Dordogne) et Vivadour (Gers). Près de 9 000 salariés pourraient être impactés par ce dernier projet. Les coopératives agricoles regroupent et mutualisent des moyens commerciaux, matériels, de production et de transformation au bénéfice des exploitants, c’est-à-dire des employeurs agricoles.

Les projets doivent faire l’objet d’une consultation des CSE et sont soumis à l’Autorité de la concurrence qui vérifie que les regroupements ne créent pas de position dominante ou de monopole et respectent le droit de la concurrence.

La FGTA-FO (Fédération générale des travailleurs de l’alimentation, des tabacs et des services annexes) a fait connaître son inquiétude sur le devenir des emplois, des conditions de travail et l’harmonisation des statuts et conventions collectives. Elle considère comme “impératif que les équipes syndicales soient pleinement associées aux négociations et que l’ensemble des représentants du personnel soient tenus informés, sans délai, des impacts et des avancées de cette fusion”. Les élus de tous horizons syndicaux rencontrés au Salon de l’agriculture 2025 nous avaient également fait part de leurs difficultés et leur anxiété sur l’avenir du secteur agricole.

Source : actuel CSE

La transformation d’un contrat de travail en mandat social ne se présume pas

09/04/2025

Sauf novation ou convention contraire, le contrat de travail d’un salarié devenu mandataire social et qui cesse d’exercer des fonctions techniques dans un état de subordination à l’égard de la société est suspendu pendant la durée du mandat, pour retrouver tous ses effets lorsque le mandat prend fin. L’affaire suivante a été l’occasion pour la Cour de cassation de rappeler les conditions de la novation (arrêt du 12 février 2025).

Un an après le début de son contrat de travail, le salarié d’une société en est nommé président. Quelques mois plus tard, la société est mise en liquidation judiciaire et le salarié est licencié pour motif économique. Il saisit le conseil des prud’hommes de demandes liées à la poursuite de son contrat de travail. Le liquidateur s’y oppose, contestant le maintien de la qualité de salarié de l’intéressé après sa nomination comme président.

Une cour d’appel rejette les demandes en déduisant des éléments suivants que le contrat de travail avait été nové en mandat social à compter de la nomination du salarié comme président : l’intéressé n’exerçait plus de fonctions techniques distinctes du mandat social ; sa désignation dans les statuts de la société comme président pour une durée indéterminée confirmait l’absorption des fonctions salariales par les fonctions sociales et démontrait l’intention novatoire.

Cassation de cette décision par la Haute Juridiction : dès lors que n’était pas caractérisée la volonté claire et sans équivoque des parties de mettre fin au contrat de travail en raison de l’exercice du mandat social, il ne pouvait pas y avoir novation.

Source : actuel CSE

À peine quatre salariés sur dix ont bénéficié d’une formation sur l’intelligence artificielle

09/04/2025

L’intelligence artificielle s’est imposée dans le monde du travail, mais la formation des salariés peine à suivre le rythme de cette révolution technologique. Selon le baromètre de la formation et de l’emploi, réalisé du 3 au 11 février 2025 auprès de 1 621 actifs français par le CSA pour le compte de Centre Inffo, et dévoilé hier, 43 % d’entre eux perçoivent une transformation rapide de leur métier.

Dans ce contexte mouvant, 74 % considèrent qu’ils sont les premiers responsables de leur parcours de formation. Une perception toutefois en baisse de six points par rapport à 2022. Et s’ils se sentent globalement bien informés, notamment sur l’apprentissage et le bilan de compétences, certains dispositifs restent méconnus : c’est le cas des outils comme Pro-A (36 % de notoriété) et de CléA (31 %) qui demeurent confidentiels.

Surtout, les salariés expriment un désir croissant de formation à l’intelligence artificielle. 78 % des actifs sondés sont convaincus que l’IA va avoir un impact significatif à l’horizon de cinq ans. D’ores et déjà, en 2025, plus de 68 % d’entre eux déclarent l’utiliser, que ce soit pour leur activité professionnelle ou dans leur vie quotidienne. Ses usages sont multiples et touchent des aspects clés du travail : 46 % s’en servent pour la recherche d’informations, 43 % pour la rédaction de documents et 33 % pour l’analyse des données ou l’assistance logicielle.

Mais tous ne sont pas à l’aise face à cette technologie. 72 % des actifs sondés expriment un besoin de formation face à cette mutation technologique. Parmi leurs demandes : choisir des outils adaptés à leurs différents besoins, utiliser les outils d’IA pour automatiser des tâches répétitives, évaluer la fiabilité des informations ou encore formuler des demandes efficaces sur les IA conversationnelles.

Or, pour l’heure, on est loin du compte : seuls 38 % ont suivi un programme de formation dédié à l’intelligence artificielle, créant ainsi un décalage entre l’adoption rapide de ces technologies et la capacité des salariés à les maîtriser pleinement.

Source : actuel CSE

Droit social : face à l’offensive américaine, syndicalistes et élus de CSE construisent leurs stratégies

10/04/2025

La Maison Blanche n’en finit plus de résonner de ses prises de positions intempestives. Depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, le président américain a multiplié les menaces et ingérences. Après les tentatives d’intimidation des entreprises françaises sur leurs politiques en faveur de l’inclusion, les récentes hausses de droits de douane font valser les Bourses. Alors que tout devient incertain, comment réagissent les syndicalistes et élus de CSE ?

De provocations en idées saugrenues, le second mandat de Donald Trump a commencé en fanfare et se poursuit avec une politique commerciale hostile, teintée de menaces et d’ingérence dans les entreprises françaises. La hausse des droits de douane risque de pénaliser presque tous les secteurs de l’économie tricolore comme l’agroalimentaire, l’automobile, la chimie, ou encore les produits de luxe. Ces derniers jours, les valeurs boursières mondiales ont accusé une chute de leur cours à mesure que les nouveaux tarifs douaniers sont entrés en vigueur aux États-Unis et que la Chine a annoncé ses représailles.

Mais l’administration Trump ne se limite pas là. Un courrier est envoyé depuis fin mars par l’ambassade américaine à Paris à de grandes entreprises françaises, exigeant d’elles une renonciation aux politiques internes de lutte contre les discriminations. Les directions doivent donc étudier le sujet délicat de se plier à cet ultimatum ou de voir les contrats conclus avec l’État fédéral américain remis en question.

Discriminations dans l’entreprise : l’impasse du conflit de loi

“All Department of State contractors must certify that they do not operate anay programs promoting DEI that violate any applicable anti-discrimination laws…”.

Traduction : les contractants avec l’État fédéral américain doivent certifier qu’ils ne pratiquent pas de politique interne contraire aux lois américaines en matière de discrimination positive”. C’est le début du formulaire envoyé par l’ambassade américaine à quelques dizaines de groupes français fin mars et révélé, via le témoignage de grands patrons, au journal Les Echos le 28 mars dernier.

L’enjeu est large : le courrier et le formulaire vise toute politique interne visant à favoriser les minorités, les personnes en situation de handicap, les femmes ou encore les seniors. De plus, la tournure vise non seulement le recrutement mais aussi l’exécution du contrat de travail. En ce qui concerne les femmes, la menace américaine inclut aussi bien les politiques d’augmentations salariales de retour du congé maternité que l’application de la loi Rixain sur la représentation féminine dans les instances dirigeantes. L’idéologie américaine consiste à faire prévaloir ce qu’elle considère comme de la “méritocratie” au détriment des aides en faveur de catégories particulières.

La CGT a rappelé dans un communiqué les obligations des entreprises et alerté sur le risque de retour en arrière : “Nous avons besoin de la garantie qu’aucun ‘backlash’ ne sera toléré. Nos organisations syndicales demandent, à contrario, à ce que l’ensemble des revendications en matière d’égalité soient enfin entendues, appliquées et que les paroles se traduisent en actes”.

La mise en œuvre de ces pratiques mais aussi la communication des entreprises destinées à améliorer la “marque employeur”, par exemple sur les réseaux sociaux, peut constituer une mise en avant des “discriminations” visées. On voit alors le piège tendu : l’entreprise se trouve dans le dilemme, soit choisir le maintien des contrats en cours avec l’État fédéral, soit se mettre en infraction avec la loi française. La première option pénalise les affaires, la seconde crée un nid potentiel de contentieux avec les salariés, les élus de CSE, les syndicats…

La faille juridique : le champ d’application extraterritorial

En revanche, le champ territorial n’est pas précisé dans le courrier et le formulaire. C’est sans doute le point d’achoppement de la menace. Quoiqu’en dise l’ambassade ou le Président Trump, les entreprises sur le sol français restent soumises au droit français. Il en va différemment des entreprises françaises disposant de filiales et succursales installées chez l’Oncle Sam.

“D’après les DRH interrogés, les communications des entreprises installées aux États-Unis en faveur des femmes par exemple vont être mises en sourdine. En revanche, sur le sol national, l’entreprise doit appliquer les lois Rixain et Coppé-Zimermann en faveur des femmes et tant pis pour Trump si ça l’énerve” nous a confirmé Béatrice Lestic, secrétaire nationale de la CFDT”.

Pas de sujet non plus côté Medef, Patrick Martin ayant déclaré “hors de question de renoncer” aux règles d’inclusion dans les entreprises avant d’ajouter : “On ne peut pas s’incliner, nous avons des valeurs, des règles, nous nous devons de les respecter”.

Quid des sanctions ?

Si le décret américain prévoit “une sanction civile de 5 000 $ minimum et 10 000 $ maximum, (…) plus 3 fois le montant des dommages subis par le gouvernement en raison de l’acte de cette personne à l’encontre des entreprises situées sur son sol”, la sanction ne va pas de soi pour celles qui demeurent en territoire national.

Selon les retours qu’elle a reçus de la part des entreprises, l’administration américaine aurait indiqué aux employeurs français qu’elle ne “pratiquerait pas de contrôle à postériori”, nous a appris Béatrice Lestic. “C’est donc grotesque et cela illustre une idéologie inquiétante”, conclut la secrétaire nationale.

Et les élus de CSE dans tout ça ?

Pour Béatrice Lestic, les élus de CSE français ne sont pas concernés. “Ce sera plutôt aux élus siégeant dans les conseils d’administration ou dans des comités de groupe monde”. A Force Ouvrière, Branislav Rugani juge cependant que “les élus devront rappeler les droits fondamentaux de tous les travailleurs”.

Pour mémoire, les élus de CSE auront l’occasion de réagir lors de la consultation annuelle obligatoire sur la politique sociale de l’entreprise. Un guide du ministère du travail a été diffusé en juin 2024, spécialement dédié aux élus de CSE, dans le cadre du plan de lutte 2023-2026 contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine. Rappelons également que l’intersyndicale a lancé il y a quelques semaines une campagne de lutte contre ces phénomènes.

Attention cependant à ne pas oublier les effets délétères de la politique de Trump pour les salariés français travaillant en France dans des entreprises américaines : McDonald’s, Pepsi et autres KFC. Chez l’embouteilleur Coca-Cola Europacific Partners, les élus et délégués syndicaux craignent que des appels au boycott de marques américaines ne pénalisent les volumes de vente, fragilisant ainsi les emplois.

Selon Cyril Herbin, représentant du personnel FO (majoritaire), “on a déjà eu des précédents avec le conflit israélo-palestinien qui avait créé un déclin dans certains points de vente. J’ai donc déjà interrogé notre expert sur la politique économique de l’entreprise et on reste vigilants car les salariés sont inquiets. Les commerciaux de terrain peuvent également redouter d’être pris pour cible, dans ce cas on retire les logos Coca-Cola de leurs voitures. De plus, nous importons le concentré que nous embouteillons, donc des droits de douane à l’importation en France peuvent nous pénaliser”.

Droits de douane : la mauvaise donne

Après plusieurs secousses sismiques encaissées par les marchés américains le week-end du 5 et 6 avril, les places européennes ont à leur tour dévissé à la suite des marchés asiatiques lundi 7 avril. Entre les réactions de nonchalance de Donald Trump au tremblement de terre qu’il a lui-même provoqué et les représailles de la Chine annonçant à son tour une hausse de ses droits de douanes en représailles, le CAC 40 (les 40 premières valeurs boursières françaises comme Dassault, Airbus, Safran etc.) a accusé un recul de 6 %, sous le seuil symbolique des 7 000 points.

Les réactions politiques n’ont pas tardé jours. Le Premier ministre François Bayrou a repris les chiffres de l’Insee (institut national de la statistique et des études économiques) : les effets sur le Pib se chiffreraient entre 0,2 et 0,5 point. Les prévisions de croissance se limitant à 0,7 point, le risque de stagnation voire de récession devient réel cette année. Côté syndical, les inquiétudes portent naturellement sur les emplois et le risque de nouvelles politiques d’austérité. Interrogée hier matin sur LCI, Marylise Léon (CFDT) a appelé à une réunion au-delà du seul ministère de l’industrie avec les représentants des organisations syndicales. Elle ajoute : “Il est temps de parler de ces droits de douane en termes d’impacts sociaux et pas uniquement de guerre économique, de taux de pourcentages”.

Toujours à la CFDT, Béatrice Lestic appelle à une réaction européenne coordonnée : “Il n’est pas question de laisser les États-Unis dicter leur loi mais la séquence est potentiellement dangereuse pour l’Europe à cause de sa faiblesse politique. Elle garde quand même une carte à jouer mais il va falloir s’entendre et aller chercher des alliances par exemple avec des pays émergents autres que la Chine”.

Sur FranceInfo, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet se dit aussi favorable à une cellule de crise avec le patronat, la Banque publique d’investissement et la Caisse des dépôts. Elle renouvelle également une demande déjà formulée à l’exécutif : “Nous demandons au gouvernement de mettre un place un moratoire sur les licenciements pour protéger notre outil industrie”. Elle critique également les politiques de court terme, appelant à ne pas répondre “au coup-par-coup (…) avec une stratégie du choc et un opportunisme patronal que nous voyons d’ores et déjà, avec une partie du patronat qui en profite pour réclamer une déréglementation et une remise en cause des droits des travailleurs, une remise en cause de la protection sociale et toujours plus de chèques”.

Dans l’émission Écorama, Frédéric Souillot (FO) a appelé les patrons français au “patriotisme économique” et à ce que ce ne soit pas “toujours les mêmes qui paient la facture”. Lui aussi se dit inquiet pour les emplois et ajoute : “Il faudrait l’ajouter dans la conditionnalité des aides publiques versées aux entreprises. En cas d’investissement aux États-Unis ou ailleurs, les aides pourraient être retirées”. Son secrétaire confédéral, Branislav Rugani reste combatif : “Il ne faut pas se laisser faire mais se réorganiser, conclure des accords commerciaux différents avec les autres continents. Peut-être que Trump met un grand coup de pied dans la fourmilière pour ensuite tout remettre en ordre”. Le secrétaire confédéral pointe cependant que la crise boursière fait chuter les pensions des retraités américains, alors que les organisations patronales poussent en faveur de l’introduction d’une dose de capitalisation dans le système de retraites français…

Le ministre de l’Économie Éric Lombard a annoncé hier devant l’Assemblée qu’il acceptait de réunir les organisations syndicales et patronales et qu’il demanderait aux entrepreneurs les mesures qui leurs seraient utiles. “Notre réponse sera graduée mais rigoureuse”, a-t-il affirmé devant les députés. Ce mercredi 9 avril, la Chine a publié son intention de surenchérir avec une hausse de 84 % de ses tarifs douaniers. Les entreprises françaises ont de nouveau chuté en Bourse après d’une légère remontée des marchés liée à la hausse des valeurs japonaises liées à l’ouverture de négociations douanières entre les États-Unis et le Japon. Afin de calmer tout le monde et d’apaiser le climat avec élégance, Donald Trump s’est félicité que “tous ces pays viennent me lécher le c…” lors d’un dîner avec des membres du Parti Républicain. Avant de suspendre pour 90 jours ses tarifs douaniers (sauf 10 % appliqués immédiatement) au bénéfice de 75 pays, à l’exception de la Chine.

Marie-Aude Grimont

Transparence salariale : les entreprises se mettent progressivement en ordre de marche

10/04/2025

Les entreprises françaises anticipent la directive européenne sur la transparence des rémunérations qui entrera en vigueur le 1er juin 2026. Selon une enquête de Pagegroup et Indeed, publiée hier, 50 % d’entre elles mentionnent désormais le salaire dans leurs offres d’emploi, contre seulement 21 % en 2019. La France devance ainsi l’Allemagne, où cette pratique ne concerne que 45 % des sociétés interrogées.

Cette évolution répond à une forte attente des salariés : 69 % estiment que cette obligation va “libérer la parole et offrir des conditions permettant d’aborder ce sujet plus facilement”. Toutefois, six salariés sur dix redoutent de découvrir qu’ils sont moins bien rémunérés que leurs collègues occupant des postes équivalents. 29% des recruteurs sont d’ailleurs inquiets de leurs réactions.

Dans ce contexte, les entreprises affinent leurs grilles de classifications d’emplois pour “objectiver” les rémunérations en fonction du contenu des missions, de l’expérience, du diplôme et des compétences requises.

La question des ajustements budgétaires reste entière. D’après Mathieu Eloy, directeur général d’Indeed France, les grandes entreprises ayant finalisé leur diagnostic identifient un écart salarial représentant 2 % à 3 % de leur masse salariale.

Source : actuel CSE

L’Anact lance un appel à projets axé sur les conditions de travail en vue d’améliorer la santé des femmes au travail

10/04/2025

Le Fonds pour l’amélioration des conditions de travail (Fact), piloté par l’Anact, lance un appel à projets auprès des entreprises de moins de 300 salariés, des associations et des organismes qui les “accompagnent” (fédérations, services de prévention et de santé au travail, organismes consulaires, Opco, organisations syndicales ou patronales… ) pour soutenir les nouvelles approches visant à améliorer la santé des femmes par des actions portant notamment sur l’organisation du travail. Il est doté d’une enveloppe globale de 500 000 euros.

Dans le détail, les projets retenus doivent porter sur une évaluation différenciée des risques professionnels selon le sexe dans le DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels), la limitation des risques des violences sexuelles et sexistes au travail par des actions de prévention primaire et la mise en place de dispositifs d’adaptation du travail pour prévenir le risque de désinsertion professionnelle.

Date limite de candidature : le 18 juillet 2025.

Source : actuel CSE

Simplification : les syndicats appellent les parlementaires à rejeter les amendements CSE

10/04/2025

Les syndicats mettent la pression. À la suite de la présentation de plusieurs amendements remettant en cause les prérogatives des CSE, réduisant les défenseurs syndicaux, supprimant les Ceser ou encore menaçant l’Ires, une intersyndicale à sept (hors CFDT) a publié, hier soir, un communiqué commun. Il réunit donc la CGT, FO, la CFE-CGC, la CFTC, l’Unsa, la FSU et Solidaires.

Ce texte considère les amendements en question comme des “solutions destructrices” à rebours de toute philosophie de simplification, “qui n’est pas nocive a priori pour les travailleurs”. Sur les CSE, le communiqué en revient aux ordonnances Macron : “D’autres [amendements] enfin, proposent que les seuils de représentation dans les entreprises soient relevés, comme si les ordonnances Macron (en 2017) n’avaient pas fait assez de mal au corps social”. Le texte s’en prend avec ironie à cette idée de fausse simplification : “Pour réduire les droits sociaux de représentation dans l’entreprise, on simplifie le code du travail”.

L’idée de supprimer les Ceser ne passe toujours pas : “La mission du Ceser est de faire dialoguer dans une même enceinte les différents acteurs économiques et sociaux à la maille de la région. (…) Pourquoi supprimer le Ceser ? Parce que c’est un lieu de débat ! Et c’est impardonnable”.

Les syndicats n’apprécient pas non plus que les députés (Rassemblement national) s’en prennent à l’Ires en demandant au gouvernement un rapport sur ses modes de fonctionnement et de financement : “On propose de supprimer l’Institut de Recherches Economiques et Sociales (Ires), un des rares lieux où l’on réfléchit encore aux impacts croisés entre les réformes économiques et sociales”.

C’est finalement le “méprise des corps intermédiaires” que l’intersyndicale dénonce avant de conclure : “Les organisations syndicales appellent les parlementaires à repousser ces amendements dangereux. Alors que nous sommes confrontés à des bouleversements toujours plus rapides et violents, l’urgence est au renforcement de la démocratie sociale et des lieux où les acteurs sociaux et la société civile peuvent confronter leurs analyses, anticiper les enjeux et ouvrir des perspectives de progrès social et environnemental”.

La CFDT n’a pas souhaité signer ce communiqué. Selon Yvan Ricordeau, secrétaire général adjoint, la CFDT a considéré ce communiqué comme “trop tardif” par rapport au début des débats du projet de loi à l’Assemblée nationale. De plus, nous a-t-il indiqué, “la CFDT a déjà communiqué sur son opposition à la suppression des Ceser et des Hauts Conseils et intervient auprès des députés”.

Source : actuel CSE

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : cotisations, fonction publique, nominations, Outre-mer, prud’hommes

11/04/2025

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du vendredi 4 avril au jeudi 10 avril inclus.
► Nous ne traitons pas ici les textes liés aux conventions collectives, car nous vous proposons tous les mois un baromètre des branches sur ces nouveautés.

Cotisations

  • Un décret du 4 avril 2025 fixe les modalités d’application de divers dispositifs de réduction de cotisations patronales  

Fonction publique

  • Un arrêté du 17 mars 2025 modifie l’arrêté du 23 janvier 2023 fixant la liste des membres titulaires et suppléants représentant les organisations syndicales de fonctionnaires territoriaux au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

Nominations

  • Une décision de la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté du 1er avril 2025 porte nominations et fins de fonctions au Contrôleur général des lieux de privation de liberté
  • Un arrêté du 8 avril 2025 porte nomination au cabinet de la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations

Outre-mer

  • Un décret du 3 avril 2025 porte prolongation de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) et l’allocation des travailleurs indépendants (ATI) et de la majoration des taux horaires de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle à Mayotte
  • Un décret du 3 avril 2025 revalorise l’allocation de solidarité spécifique à Mayotte

Prud’hommes

  • Un arrêté du 7 avril 2025 fixe le tableau de répartition entre les sections du conseil de prud’hommes pour le mandat prud’homal 2026-2029

Source : actuel CSE

La qualité de l’emploi et la démocratie sociale au menu du programme de travail 2025-2026 de France Stratégie

11/04/2025

France Stratégie va très bientôt fusionner avec le Haut-commissariat au plan sous la houlette de l’ancien ministre des transports et député, Clément Beaune. 

À cet effet, le think tank rattaché au Premier ministre a défini son programme de travail 2025-2026

Parmi les sujets qui intéressent le monde de l’entreprise et les représentants du personnel : 

  • “Comment accroître la quantité et la qualité de l’emploi ?”. Il s’agira d’identifier les leviers d’amélioration de la qualité des emplois et de la formation professionnelle, et de réduction des freins à l’emploi avec l’appui du Réseau emplois compétences et du Haut Conseil des rémunérations, de l’emploi et de la productivité ; 
  • “Démocratie sociale : quels modèles pour la représentation des salariés dans la gouvernance des entreprises ?”. France Stratégie se penchera sur le renforcement de la présence des représentants des salariés dans les conseils d’administration en France (loi Pacte), son impact sur le développement des entreprises (investissement, chiffres d’affaires, partage de la valeur ajoutée) et sur la qualité du dialogue social. 

Source : actuel CSE