Le budget de François Bayrou suspendu au 8 septembre

26/08/2025

Lundi 25 août, le Premier ministre François Bayrou a annoncé l’engagement de la responsabilité de son gouvernement lors d’une session extraordinaire le 8 septembre. Si son discours de politique générale n’obtient pas le vote des députés, son gouvernement tombera. En attendant, il sera présent cette semaine aux événements CFDT et Medef. La rentrée s’annonce donc très agitée, alors que la pétition intersyndicale frôle désormais les 350 000 signatures et qu’un mouvement de blocage se préparait le 10 septembre.

Coup de théâtre. Sous la pluie des critiques de tous bords, François Bayrou préfère engager lui-même la responsabilité de son gouvernement plutôt que de plier sous l’effet d’une motion de censure. Une rentrée sociale chaude, musclée, agitée, se prépare. Le mois de septembre s’annonce dans la continuité des réactions au projet de budget présenté par François Bayrou le 15 juillet. Au menu, 43,8 milliards d’économies fondées en grande partie sur les retraités et le monde du travail.

Certes, le Premier ministre avait aussi évoqué une contribution de solidarité définie lors du vote du budget visant les plus hauts revenus, et accompagnée de mesures complémentaires pour lutte contre l’optimisation abusive des “patrimoines non productifs”. Mais cette mesure étant non chiffrée et non détaillée, on ignore encore son niveau de participation à la résorption de la dette du pays si ce projet de budget est maintenu. Deux options se présenteront le 8 septembre : soit François Bayrou est censuré sur la base de son discours de politique générale, soit son gouvernement se poursuivra et les discussions pourront commencer avec les partenaires sociaux qui le souhaiteront. 

Les syndicats avaient fait connaître mi-juillet leur mécontentement et prévenu qu’ils prépareraient une réaction à la rentrée. En plein mois d’août, ils ont reçu les lettres de cadrage et d’orientation des futures “négociations” relatives à une nouvelle réforme de l’assurance chômage et à la suppression des jours fériés. Ces documents ont de nouveau généré leur ferme opposition.

Négociation sur les jours fériés : c’est déjà non pour FO, la CFTC et l’U2P

Datées du 8 août, deux lettres sont parvenues aux partenaires sociaux en plein été. La première confirme la volonté du Premier ministre d’engager une négociation avec les syndicats et le patronat sur la suppression de deux jours fériés. Les partenaires sociaux doivent indiquer au gouvernement d’ici le 1er septembre s’ils acceptent de participer à ces discussions. Le 11 août, la CFTC a déjà fait connaître son refus par la voix de son Président, Cyril Chabanier. Il fût suivi le même jour par Michel Picon, Président de l’U2P, l’organisation patronale des petites entreprises de proximité. Il n’est pas non plus question de négocier sur les jours fériés ni sur la modernisation du marché du travail pour Frédéric Souillot (FO). Ce dernier a par ailleurs rencontré hier matin la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, sans avancée majeure : “Chacun a campé sur ses positions. La ministre nous a dit qu’on discuterait des modalités des mesures après le vote de confiance”. Aucun détail n’a dont été apporté sur l’année blanche ou le paiement des jours fériés. Il manque déjà trois partenaires pour la négociation sur les jours fériés qui commence déjà à ressembler au “conclave” sur les retraites auquel la CGT, FO et l’U2P avaient opposé leur refus.

Le document d’orientation indique que le rendement attendu par le gouvernement sur cette mesure s’élève à 4,2 milliards. Les syndicats et le patronat sont invités à négocier “sur les modalités concrètes de mise en œuvre de cette réforme”. Le Premier ministre poursuit en ces termes : “Il s’agira en particulier de déterminer si davantage de marges de manœuvre dans la réalisation de ces deux jours de travail supplémentaires peut être laissée aux entreprises à titre supplétif, notamment pour les salariés qui travaillent déjà le lundi de Pâques et le 8 mai, sans pour autant laisser place à des organisations trop souples favorisant les contournements”.

Ils devront également évoquer des spécificités pour l’Alsace-Moselle et Saint-Pierre-et-Miquelon, sachant que François Bayrou leur laisse le choix des dates pouvant remplacer le lundi de Pâques et le jour de l’Armistice. Quoi qu’il en soit, cette négociation, si elle s’ouvre, devra s’achever d’ici le 30 septembre 2025.

2 milliards d’économies sur l’assurance chômage

“Je n’ignore pas que ces règles ont fait l’objet d’évolutions successives”, entame le Premier ministre dans sa lettre sur la réforme de l’assurance chômage. Les partenaires sociaux seront d’accord : l’assurance chômage fait l’objet d’un intérêt politique soutenu, un peu trop même. L’intersyndicale avait d’ailleurs obtenu l’abandon du projet de décret de Gabriel Attal au moment de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron.

La lettre de cadrage demande aux syndicats et patronat de “favoriser le retour rapide à l’emploi” des chômeurs :

  • en renforçant les incitations à un retour rapide en emploi pour les personnes ayant conclu une rupture conventionnelle individuelle ;
  • en modifiant les paramètres de l’accès à l’assurance chômage, notamment la durée minimale d’emploi et la période de référence nécessaires à l’ouverture d’un droit au chômage qui détermine la durée maximale d’indemnisation. La France est en effet l’un des pays de l’Union européenne où les conditions d’indemnisation sont parmi les plus favorables et présente une durée maximale d’indemnisation plus élevée que la moyenne européenne ;
  • en examinant l’opportunité d’adapter les différences d’incitation de retour à l’emploi selon le niveau de rémunération et le montant d’allocation afin de tenir compte des capacités effectives à retrouver un emploi : les paramètres d’indemnisation (montant et durée par exemple) pourraient être mieux adaptés au niveau de revenu préalable à la perte d’emploi.

Ils devront également “intensifier l’effort réalisé pour le retour en emploi des seniors, via une adaptation des règles spécifiques applicables aux salariés seniors et sur les moyens de les inciter à reprendre un emploi” ainsi que “poursuivre l’incitation à l’allongement de la durée des contrats de travail et la dissuasion d’un recours excessif aux contrats courts”.

Sujet épidermique pour la CGT, le Premier Ministre exige de revenir sur le régime des intermittents du spectacle, des artistes du spectacle et des ouvriers et techniciens de la production sonore et audiovisuelle (annexes 8 et 10 du règlement général). Les partenaires sociaux devront également tenir compte du régime propre à Mayotte.

Mais ce n’est pas tout : la nouvelle convention d’assurance chômage 2026-2029 devra permettre de dégager entre 2 et 2,5 milliards d’économies par an en moyenne au cours des quatre années de la convention, soit entre 8 et 10 milliards d’euros en tout. En revanche, la contribution de l’Unédic à France Travail, autre sujet épidermique, serait maintenue au taux de 11 %.

François Bayrou exige enfin que l’accord sur l’assurance chômage reprenant son projet de réforme soit conclu d’ici le 15 novembre. Quant à la lettre de cadrage, FO nous a fait part de son intention de l’attaquer en justice : selon Frédéric Souillot,”la dernière convention a été agréée par le gouvernement pour une durée de quatre ans. Rien ne motive le fait de revenir dessus, il n’y a pas eu de crise sanitaire par exemple. De plus cette convention n’est pas totalement mise en place, les règles sur les primo-entrants et les saisonniers doivent passer par une loi la dernière semaine de septembre”.

L’intersyndicale dénonce des “contre-vérités”

La réponse de l’intersyndicale à ces deux courriers n’a pas tardé. Rappelant les 211 milliards d’euros d’aides publiques versés chaque année aux entreprises, les cinq syndicats représentatifs (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC) ont immédiatement fait connaître leur hostilité : “Le gouvernement décide une nouvelle attaque en règle des droits des travailleurs”. Ils reprochent également à François Bayrou de “ne rien écouter de l’avertissement unanime des organisations syndicales” face à ce projet de budget qui “[revient] sur 70 ans d’acquis sociaux avec de nombreuses contre-vérités”.

En premier lieu, l’intersyndicale dénonce l’utilisation d’un argument de dégradation de la trajectoire budgétaire de l’assurance chômage. “Or, ces prévisions étaient fausses et même faussées comme le montraient celles de l’Unédic, de la Banque de France ou de la Commission européenne”. De plus, les syndicats rappellent que le gouvernement a agréé sans objection leur accord du 14 novembre 2024. Selon l’intersyndicale, “7 mois après, les prévisions économiques sont sensiblement identiques. Il n’y a donc aucune justification légale à exiger une nouvelle négociation sur l’assurance chômage”.

Alors que sa pétition lancée en juillet dépasse les 347 000 signatures, l’intersyndicale prévient qu’elle se réunira “pour examiner ensemble les moyens de réagir pour contrer ce nouvel accès de brutalité envers la société et le monde du travail”. Sa réunion du 1er septembre a été avancée au vendredi 29 août.

Déjà un préavis de grève et un appel au blocage

Pour l’instant, tout est suspendu au sort du vote sur le discours de politique générale du 8 septembre. Rappelons que FO a déposé un préavis de grève couvrant les secteurs public et privé du 1er septembre au 30 décembre. Marylise Léon sera par ailleurs reçue cette semaine par la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet, jeudi 28 août à 9 heures.

De son côté, la CGT tiendra un comité confédéral national les 26 et 27 août. Ses fédérations de la chimie, du commerce et de la culture ont appelé à rejoindre l’appel “Bloquons tout” du 10 septembre, né sur les réseaux sociaux et auquel s’est déjà joint Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise) et le syndicat SUD Rail. Il est cependant peu probable que l’intersyndicale suive cette voie : elle fixera plutôt sa propre date de mobilisation. De son côté, Frédéric Souillot se dit “méfiant” et aimerait connaître plus précisément leurs revendications. Il ne joindra donc pas non plus ses militants au mouvement. 

Pendant l’été, la CGT et l’Unsa ont par ailleurs réprouvé les trois projets de décret transmis par le gouvernement à la Caisse nationale d’Assurance maladie et visant à augmenter à nouveau les participations forfaitaires et franchises médicales à la charge des patients.

En attendant le 8 septembre, les sondages montrent l’opposition des Français aux mesures annoncées. Selon Elabe pour BFMTV, 75 % de la population se dit opposée à la suppression de deux jours fériés. Une tendance confirmée en cette rentrée par l’institut Odoxa pour Le Parisien, à hauteur de 84 %. La mesure fait donc décidément figure d’épouvantail. Reste à voir si le Premier Ministre obtiendra la validation de son discours de politique générale. Si c’est le cas, il est peu probable qu’il encoure une censure quelques semaines plus tard. Il pourrait alors laisser de côté la mesure sur les jours fériés afin de “faire passer” le reste. Interrogé en conférence de presse sur une absence de recours au 49-3 pour “forcer” le vote du budget, il a répondu que cette éventualité était à l’étude.

La nouvelle session parlementaire ordinaire devrait commencer le 1er octobre, on attend encore le décret d’ouverture au Journal officiel. Sous réserve de cette publication, la prochaine Conférence des Présidents fixant l’ordre du jour de l’Assemblée, devrait se réunir le 16 septembre. A partir de cette date, on devrait donc connaître la date d’ouverture des débats budgétaires, sauf si le 8 septembre rebat toutes ces cartes.

Les réactions syndicales et patronales
Hier en fin d’après-midi, FO a qualifié la conférence de presse d'”irréelle” et ne servant qu’à confirmer que les 44 milliards d’euros d’économies “ne seraient portés que par les travailleurs, les retraités, les demandeurs d’emploi et les assurés sociaux, sans jamais évoquer les 211 milliards d’aide publiques aux entreprises sans contrepartie ni les 100 milliards de dividendes records versés aux actionnaires en 2024”. Le projet de François Bayrou demeure “un budget de violence sociale” nous a indiqué le secrétaire général Frédéric Souillot.

Chez Solidaires, on refuse toujours “des économies sur nos vies”. Son communiqué affirme : “Le professeur Bayrou s’est beaucoup répété mais n’aura pas dit grand-chose. (…) Cet exercice de fuite en avant confirme qu’il va nous falloir mettre en place le rapport de force pour bloquer ce projet de budget injuste et brutal”. Les instances du syndicat seront réunies le 27 août “le 27 août pour discuter de sa stratégie et des indispensables mobilisations à venir”. 

Côté patronal, si la CPME regrette que le Premier ministre “[soit] resté beaucoup trop vague sur la réforme de l’action publique, la seule diminution des dépenses ne pouvant en réalité suffire à redresser durablement la situation”, l’organisation des PME se dit “dans le camp de « ceux qui cherchent à construire plutôt qu’à détruire la France »” en reprenant les termes de François Bayrou. Elle plaide donc” pour qu’on rétablisse l’équilibre des finances publiques”.

Marie-Aude Grimont

Actualité sociale de l’été : mettez-vous à jour !

26/08/2025

Lutte contre les fraudes aux aides publiques, reste à charge pour les contrats d’apprentissage, projet de loi seniors… Faites le tour de l’actualité sociale de cet été avant de préparer la rentrée !

L’actualité a continué de tourner pendant les vacances, en particulier autour de la publication des nouvelles lois et des textes réglementaires. Consultez également dans cette édition notre article consacré à la rentrée sociale.

Représentation du personnel

Un décret du 8 juillet 2025 fixe les modalités de contestation de la désignation d’un représentant de proximité. Concrètement, le tribunal judiciaire est saisi par requête, laquelle n’est recevable que si elle est remise ou adressée dans les 15 jours suivant cette désignation. Le tribunal statue dans les 10 jours de la saisine sans frais ni forme de procédure et sur avertissement qu’il donne 3 jours à l’avance à toutes les parties intéressées. La décision du tribunal est notifiée par le greffe dans les 3 jours par lettre recommandée avec accusé de réception.

Représentativité syndicale

Divers arrêtés de représentativité ont été publiés au Journal officiel du 3 août et au JO du 6 août pour la branche du bâtiment. Au JO du 7 août, ces arrêtés concernent notamment les exploitations frigorifiques, la chaussure, le cartonnage, les vins, les pompes funèbres, les bâtiments et travaux publics de La Réunion, la charcuterie de détail, le génie climatique, les services de l’automobile, les laboratoires de prothèses dentaires, l’ameublement, les travaux publics ou encore les cabinets d’expertise en automobile. Au JO du 8 août, les arrêtés concernent par exemple les coopératives de consommation, la production agricole, la santé au travail interentreprises. Au JO du 13 août, les arrêtés concernent notamment le transport, l’industrie textile, le commerce de détail alimentaire.

Projet de loi seniors : dernière ligne droite à la rentrée

Après un accord trouvé en commission mixte paritaire, le 8 juillet, le Sénat a adopté, le 10 juillet 2025, dans sa version finale, le projet de loi transposant les accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés, de l’évolution du dialogue social et des transitions professionnelles. Le texte doit encore être définitivement voté par l’Assemblée nationale à la rentrée.

Les sénateurs ont enrichi le texte avec un amendement visant à préciser, dans l’article 12, le pilotage des fonds pour le financement du projet de transition professionnelle (PTP). Concrètement, l’amendement prévoit que France compétences transfère à l’association paritaire, Certif Pro, les crédits pour la prise en charge du projet de transition professionnelle. Ce transfert sera effectif au 1er janvier 2027.

Cette association sera chargée de déterminer les règles, critères et priorités de prise en charge des projets ainsi que la répartition des fonds entre les commissions paritaires interprofessionnelles régionales.

Retraites

Un décret du 4 août 2025 met à jour les conditions d’affiliation au régime d’assurance vieillesse géré par la Caisse nationale des industries électriques et gazières. Un décret du 11 août fixe la liste des congés qui permettent, à compter du 1er septembre 2023, le maintien de l’affiliation au régime d’assurance vieillesse géré par la caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires.

Attention, au 1er septembre prochain, tous les assurés totalisant 150 trimestres pourront demander une retraite progressive dès l’âge de 60 ans, quelle que soit leur année de naissance, en vertu du décret du 15 juillet.

La retraite progressive permet de diminuer son activité professionnelle, notamment en passant à temps partiel ou à temps réduit, tout en commençant à percevoir une partie de sa pension de retraite. Elle était jusqu’à présent ouverte aux assurés totalisant 150 trimestres d’assurance et ayant atteint “l’âge légal de départ à la retraite moins deux ans”, soit 62 ans pour les assurés nés à partir de 1968.

Bulletin de paie : le modèle reportée d’un an

Un arrêté du 11 août 2025 prolonge d’une année supplémentaire l’application du modèle temporaire de bulletin de paie, soit jusqu’au 31 décembre 2026. Le modèle pérenne officiel de bulletin de paie serait donc applicable à compter du 1er janvier 2027. Pour rappel, il fait notamment la distinction entre cotisations obligatoires et facultatives.

Alternance : nouvelle donne pour la rentrée scolaire

Un décret du 27 juin instaure un reste à charge de 750 euros pour tous les contrats d’apprentissage visant un diplôme de niveau licence, master ou au-delà (niveaux 6 et 7 du cadre national des certifications professionnelles). Cette contribution s’applique à toutes les entreprises sans distinction de taille. Dans la foulée, le ministère du travail a mis en ligne un nouveau modèle de convention de formation par apprentissage tenant compte des nouvelles dispositions.

À noter également, les sénateurs ont adopté, le 3 juillet, la proposition de loi visant à pérenniser le contrat de professionnalisation expérimental. Constitué d’un article unique, le texte prévoit de pérenniser ce dispositif qui permet aux bénéficiaires d’acquérir tout ou partie de la formation via la validation de blocs de compétences et qui a pris fin le 31 décembre 2024. La proposition de loi, pour laquelle la procédure accélérée a été enclenchée, doit désormais être examinée à l’Assemblée nationale

Formation professionnelle

La loi du 30 juin 2025 contre les fraudes aux aides publiques instaure de nouveaux mécanismes de contrôle et de sanction à l’égard des organismes de formation. Leur déclaration d’activité peut être annulée et le paiement par la Caisse des dépôts au titre du CPF peut être suspendu.

En parallèle, le gouvernement a présenté, le 24 juillet, un plan interministériel en faveur de la qualité des formations. Parmi les mesures, enrichir le référentiel de Qualiopi, lutter contre les dérives sectaires, améliorer les indicateurs de portant sur l’insertion professionnelle, renforcer les missions des CFA à la prévention des accidents du travail.

Côté VAE, un décret du 18 juillet 2025, applicable au 1er août 2025 fixe les conditions et les modalités d’éligibilité au CPF des actions permettant de faire valider les acquis de l’expérience.

Enfin, divers arrêtés révisent des titres professionnels. Un arrêté du 1er août 2025 révise le titre professionnel de conducteur livreur sur véhicule utilitaire léger. Un arrêté du 31 juillet révise le titre de technicien en systèmes de sûreté. Un autre arrêté du 31 juillet révise le titre de technicien d’études en construction bois.

PMA : davantage de protection pour tous les salariés engagés dans un parcours de PMA ou d’adoption

La loi du 30 juin 2025 visant à protéger les personnes engagées dans un projet parental des discriminations au travail a été publiée, le 1er juillet, au Journal officiel. Elle étend et renforce la protection contre les discriminations dont bénéficiaient déjà les femmes engagées dans un parcours de procréation médicalement assistée (PMA) à tous les salariés : hommes recevant des traitements médicaux dans le cadre d’une PMA, salariées et salariés engagés dans un parcours d’adoption. Elle étend en outre le périmètre des personnes pouvant bénéficier d’autorisations d’absence pour se rendre aux rendez-vous médicaux ou administratifs nécessaires à la poursuite d’un projet parental.

Une nouvelle procédure de saisie sur rémunération 

Depuis le 1er juillet, la procédure des saisies sur salaire, qui permet à un créancier privé de saisir une partie des rémunérations d’un salarié débiteur via son employeur, a connu des retouches. Conformément au décret du 12 février 2025 pris en application de la loi du 20 novembre 2023, l’interlocuteur de l’employeur en cas de saisie n’est plus le juge de l’exécution, mais le commissaire de justice répartiteur.

Jusqu’ici, cette procédure ne pouvait pas être mise en œuvre qu’après avoir obtenu une autorisation judiciaire.

Santé au travail : du nouveau pour le passeport de prévention

Un décret du 1er août 2025 précise les modalités de déclaration des formations en santé et sécurité au travail (SST) par les organismes de formation et les employeurs dans le passeport de prévention. Il complète le décret du 29 décembre 2022 relatif à l’approbation de la délibération du comité national de prévention et de santé au travail du conseil d’orientation des conditions de travail fixant les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l’employeur.

Les dispositions du décret du 1er août 2025 sont entrées majoritairement en vigueur le 3 août 2025.

Pour rappel, le passeport de prévention a pour objectif de mettre en relation les travailleurs, les employeurs et les organismes de formation dans le but d’assurer la gestion facilitée et la traçabilité des formations en matière de prévention des risques professionnels.

Par ailleurs, la ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a présenté, le 11 juillet, devant le Comité national de prévention et de santé au travail les grandes orientations du futur plan santé au travail (PST 5). Parmi les mesures envisagées : une refonte de la tarification des cotisations accidents du travail et maladies professionnelles, le renforcement de la prévention contre la consommation de stupéfiants sur le lieu de travail, une réflexion sur l’extension du régime de responsabilité des donneurs d’ordre ou encore  la possibilité de limiter les rangs de sous-traitance sur les chantiers et lieux de travail…

À noter également : une instruction ministérielle publiée en juillet entend resserrer les liens entre l’inspection du travail et l’appareil judiciaire lors d’accidents graves ou mortels survenus sur le lieu de travail. Le texte privilégie deux orientations majeures. D’une part, il encourage la saisine conjointe des services d’inspection du travail avec ceux de la police judiciaire ou de la gendarmerie, favorisant ainsi une approche coordonnée des enquêtes. D’autre part, il organise un dispositif d’accompagnement des victimes et de leurs proches, en désignant l’inspection du travail d’informer sur les démarches de réparation à leur disposition.

Égalité professionnelle

Un décret du 30 juillet 2025 détaille l’application de l’équilibre femmes-hommes aux administrateurs salariés. Il instaure un principe de priorité claire : en cas de candidatures à égalité de qualifications, le candidat du sexe sous-représenté doit être privilégié. Cette règle s’applique tant aux élections qu’aux désignations par les organisations syndicales.

Handicap

Un arrêté du 8 août 2025 fixe (en annexe) les montants des subventions définitives de l’État aux maisons départementales des personnes handicapées au titre de l’année 2025

Insertion dans l’emploi des étrangers : une circulaire propose un nouveau cadre d’action

Une circulaire des ministres de l’intérieur et du travail du 26 juin 2025 propose un cadre d’action afin de “favoriser l’insertion dans l’emploi des étrangers primo-arrivants”, notamment dans les métiers en tension. Le texte qui s’inscrit dans le cadre des lois du 18 décembre 2023 pour le plein-emploi et “immigration” du 26 janvier 2024 détaille un certain nombre de mesures afin de mieux intégrer les primo-arrivants et de faire des entreprises des “éléments moteurs de l’intégration des étrangers”.

Temps de travail : la proposition de loi sur le travail le 1er mai adopté par le Sénat

Le Sénat a adopté, le 3 juillet, la proposition de loi visant à permettre aux salariés de certains secteurs de travailler le 1er mai, déposée par deux sénateurs de l’Union centriste. Deux amendements ont modifié le texte initial. Le premier ajoute que “seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur peuvent travailler et le “refus de travailler le 1er mai pour un salarié ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement”. Le second précise le périmètre des activités de fleuristes autorisées en exigeant qu’ils exercent “à titre principal, une activité de vente de fleurs naturelles”.

Anne Bariet, Marie-Aude Grimont

Saisie sur salaire : le RSA revalorisé en outre-mer

27/08/2025

Un décret du 4 août 2025 revalorise le revenu de solidarité (RSA) en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et dans les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le montant mensuel du RSA est ainsi porté de 598,73 euros à 608,91 euros.

Rappelons que ce montant est pris en compte en matière de saisies sur salaires à un double titre :

  • d’une part, il s’agit de la fraction absolument insaisissable du salaire ;
  • d’autre part, il permet de déterminer si le conjoint, le concubin ou le partenaire lié par un Pacs, ainsi que les ascendants du salarié, sont considérés comme personnes à charge.

Source : actuel CSE

Le cancer du sein d’une ancienne ouvrière reconnu en maladie professionnelle

27/08/2025

Colles, vernis, poussières de bois, travail de nuit… Une ancienne ouvrière travaillant dans une usine de transformation de bois (Parquets Marty) à Cuzorn (Lot-et-Garonne) a obtenu le 30 juin 2025 la reconnaissance en maladie professionnelle de son cancer du sein. Le pôle social du tribunal judiciaire d’Agen a retenu l’existence d’un lien de causalité direct et essentiel entre son cancer et son travail habituel.

Selon l’avis favorable du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) d’Occitanie, sur lequel s’est appuyé le tribunal, la victime a été exposée à des perturbateurs endocriniens à des doses dépassant les valeurs limite des seuils d’exposition. Elle a été accompagnée par maître Elisabeth Leroux du cabinet TTLSA et par le CERADER 47 Fumélois (Collectif pour l’élimination rapide de l’amiante et la défense des exposés aux risques).

Un autre cas a été reconnu pour une infirmière au mois de juin également par le tribunal judiciaire de Metz. Ces décisions de justice développent une jurisprudence, alors qu’en 2023, seulement 5 cancers du sein avaient été reconnus comme des maladies professionnelles. La CFDT avait à cet égard organisé une campagne. Mais le chemin est encore sans doute long avant une reconnaissance officiel dans le tableau des maladies professionnelles.

Source : actuel CSE

Rentrée scolaire : peut-on s’absenter du travail pour accompagner son enfant ?

28/08/2025

Lundi 1er septembre, les élèves français retrouveront les bancs de l’école. Les parents peuvent-il s’absenter afin d’accompagner leur enfant ? Le point sur les autorisations d’absence des salariés.

Lundi 1er septembre, les élèves feront leur rentrée des classes et de nombreux parents auront envie de les accompagner. Salariés syndiqués ou pas, il existe quelques règles à connaître, et en priorité, il faut demander l’autorisation de s’absenter si rien d’autre n’est prévu.

Les salariés peuvent-ils s’absenter du travail pour accompagner leur enfant le jour de la rentrée scolaire ?

Le code du travail ne prévoit aucune disposition spécifique concernant l’absence du salarié pour la rentrée scolaire. Il faut donc vérifier les dispositifs existants au sein de la branche professionnelle ou de l’entreprise.

Les conventions collectives peuvent-elles prévoir ce type d’absence ?

Oui, certaines conventions collectives se sont saisies de cette question et prévoient une possibilité d’absence rémunérée pour la rentrée scolaire. Par exemple :

  • la convention collective de la coiffure du 10 juillet 2006 accorde, avec son article 6.2.2, trois heures d’absence rémunérée aux salariés ayant des enfants scolarisés de 13 ans maximum, avec possibilité de fractionner ces heures en cas de rentrées échelonnées de plusieurs enfants ;
  • dans le négoce d’ameublement, l‘article 38.1 de la CCN prévoit pour les parents d’enfants en maternelle ou entrant en CP ou sixième deux heures d’absence rémunérée.

Attention : toutes les conventions collectives ne prévoient pas de telles dispositions.

Faute de dispositions conventionnelles particulières, comment savoir si l’entreprise dispose d’un “usage” permettant cette absence ?

Un usage d’entreprise existe quand trois conditions sont réunies simultanément :

  • caractère général : l’avantage doit bénéficier à tout le personnel ou à toute une catégorie ;
  • caractère constant : l’employeur doit l’attribuer de façon répétée et périodique
  • caractère fixe : la fixité concerne le montant ou le mode de détermination

À défaut, le salarié doit-il demander l’autorisation de s’absenter à son employeur ?

Oui. Cependant, attention : il n’est pas obligé de rémunérer ce temps d’absence. Les parties doivent convenir à l’avance des modalités : cette journée pourra-t-elle être rattrapée ou sera-t-elle décomptée comme absence non rémunérée. Rappelons qu’une absence injustifiée du salarié sans autorisation préalable de l’employeur peut justifier une sanction disciplinaire.

Quelles sont les autres alternatives pour s’absenter légalement ?

Le salarié peut :

  • prendre un jour de congé payé ;
  • utiliser une journée de RTT.

Quelle que soit l’option choisie, il est essentiel d’obtenir l’autorisation de l’employeur au préalable pour éviter toute sanction pour retard ou absence non justifiée.

Anne Bariet

Période d’essai rompue pour un motif discriminatoire : quelle indemnisation pour le salarié ?

28/08/2025

La rupture de la période d’essai pour un motif discriminatoire est considérée comme nulle. Le salarié peut alors prétendre à la réparation du préjudice subi du fait de cette nullité mais pas à l’indemnité pour licenciement nul, rappelle la Cour de cassation.

Pendant la période d’essai, les parties peuvent à tout moment et sans motif rompre le contrat de travail. Par ailleurs, l’application des règles relatives à la rupture du contrat est expressément écartée par le code du travail durant cette période (article L1231-1 du code du travail).

Dans la mesure où la rupture de la période d’essai n’a pas à être motivée, l’employeur peut donc se contenter de notifier au salarié qu’il a décidé de mettre fin à l’essai. Mais en aucun cas, il ne peut fonder sa décision de rompre l’essai sur un motif discriminatoire. A défaut, la rupture de la période d’essai sera considérée comme nulle et le salarié pourra demander réparation comme l’illustre une décision de la Cour de cassation du 25 juin 2025.

La rupture de la période d’essai fondée sur des raisons de santé…

Dans cette affaire, une salariée avait été engagée par une compagnie d’assurance le 16 décembre 2013. Du 13 janvier au 17 août 2014, elle avait été placée en arrêt de travail. Le 22 juillet 2014, son employeur lui avait notifié la rupture de sa période d’essai avec effet au 18 août 2014.

La salariée conteste, devant la juridiction prud’homale, le bien-fondé de cette rupture s’estimant victime d’une discrimination liée à son état de santé.

La cour d’appel prononce la nullité de la rupture : la salariée avait apporté des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination liée à son état de santé et l’employeur de son côté n’avait pas démontré que sa décision reposait sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Elle condamne également l’employeur à verser au salarié une indemnité de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour réparation du préjudice subi, soit un montant inférieur à l’indemnité prévue par l’article L.1235-3-1 du code du travail pour un licenciement nul, au motif que les règles du licenciement ne sont pas applicables à la période d’essai en vertu de l’article L.1231-1 du code du travail.

La salariée conteste cette décision devant la Cour de cassation. Elle fait valoir que la rupture de sa période d’essai ayant été jugée nulle, il était logique qu’elle bénéficie de l’indemnité prévue par l’article L.1235-3-1 du code du travail. Elle invoque, en outre, l’application de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000 aux termes de laquelle la sanction d’une discrimination doit être effective, proportionnée et dissuasive considérant que cela n’avait pas été le cas en l’espèce.

… ouvre droit, au profit du salarié, à des dommages-intérêts en fonction du préjudice subi

La Cour de cassation confirme la décision d’appel et rejette la demande de la salariée et ce pour plusieurs raisons.

Sans surprise, la Haute Cour rappelle tout d’abord que la rupture du contrat de travail en raison de l’état de santé du salarié est nulle conformément à l’article L.1132-4 du code du travail.

► Il s’agit d’une confirmation de jurisprudence. La cour de cassation avait déjà jugé que la rupture de la période d’essai prononcée pour un motif discriminatoire (en l’occurrence pour raisons de santé) était nulle au sens de l’article L.1132-1 du code du travail (arrêt du 16 février 2005).

Concernant la directive européenne 2000/78/CE du 27 novembre 2000 dont le salarié réclamait l’application, la Cour de cassation répond qu’elle ne l’est pas en cas de discrimination fondée sur l’état de santé.

Enfin, elle poursuit en rappelant que le salarié, dont la rupture de la période d’essai est nulle pour motif discriminatoire, ne peut prétendre à l’indemnité prévue en cas de licenciement nul, mais à la réparation du préjudice résultant de la nullité de cette rupture. Elle se fonde sur l’article L.1231-1 du code du travail qui exclut l’application des règles légales régissant le licenciement et son indemnisation pendant la période d’essai.

Il revient donc aux juges, qui disposent en la matière d’un pouvoir souverain d’appréciation, de déterminer le montant des dommages-intérêts à verser au salarié. Mais ils ne sont pas tenus de lui accorder une indemnité correspondant à au moins six mois de salaire.

► Cette décision du 25 juin 2025 de la Cour de cassation se situe dans le prolongement de sa jurisprudence antérieure. Elle a en effet déjà jugé qu’en cas de nullité de la rupture de la période d’essai fondée sur des motifs discriminatoires, le salarié ne peut  prétendre ni aux indemnités de ruptures ni à l’indemnité de préavis (arrêt du 12 septembre 2018).

Françoise Andrieu

Le recrutement des cadres en petite forme au troisième trimestre 2025

28/08/2025

Le marché de l’emploi des cols blancs traverse une passe difficile. Seules 8 % des entreprises envisagent d’embaucher au troisième trimestre 2025, selon le baromètre trimestriel de l’Apec, publié hier. Cette contraction touche particulièrement les entreprises de taille intermédiaire et les grands groupes, où la proportion d’employeurs envisageant d’embaucher chute de 13 points sur un an, à 45 %.

Le secteur industriel pâtit le plus de ce repli, avec seulement 9 % d’entreprises disposées à recruter des cadres (- 3 points en un an).

Paradoxalement, cette frilosité n’entame pas l’appétit de mobilité des intéressés. Au contraire : 31 % des cadres se disent désormais ouverts à une proposition externe, contre 28 % en juin 2024. Plus révélateur encore, 15 % envisagent de changer d’employeur dans les trois mois, soit deux points de plus qu’il y a un an.

Cette dynamique dessine un “rapport de force” défavorable aux candidats, prévient l’Apec qui anticipe une détérioration des conditions de négociation des nouveaux contrats de travail.

Source : actuel CSE

L’emploi privé marque le pas malgré un rebond des CDI

28/08/2025

L’emploi salarié privé traverse une zone de turbulences. Stable sur le trimestre, il accuse un recul de 0,4 % sur un an, soit la suppression de 93 900 postes, révèle une étude de la Dares, publiée hier.

Cette érosion contraste avec le rebond des déclarations préalables à l’embauche en CDI, qui affichent une progression pour le deuxième trimestre consécutif après un creux en 2024. Au total, 1,23 million de déclarations d’embauche en CDI ont été enregistrées au deuxième trimestre 2025, soit une variation positive de +53 000 par rapport au trimestre précédent.

Les difficultés de recrutement s’atténuent dans la plupart des secteurs, à l’exception du bâtiment. Dans la construction, 68 % des entreprises peinent encore à recruter, contre 40 % dans l’industrie et 30 % dans les services. Cette proportion tend même à s’aggraver depuis juillet.

Sur le front salarial, la décélération se confirme. Les rémunérations nominales ralentissent au deuxième trimestre tout en demeurant supérieures à l’inflation, permettant aux salariés de rattraper les “pertes de pouvoir d’achat” enregistrées ces “dernières années”, selon la Dares.

Source : actuel CSE

Pas de déni de justice du tribunal judiciaire en matière de répartition du personnel et des sièges entre les collèges

29/08/2025

Si le Dreets ne se prononce pas dans le délai imparti sur la demande de répartition entre les collèges électoraux, le juge doit procéder lui-même à cette répartition. À cette fin, il doit déterminer si les éléments d’information demandés par les organisations syndicales existent et lui sont nécessaires pour procéder à cette répartition et, dans l’affirmative, en ordonner la production.

En application des articles L.2314-13 et R.2314-3 du code du travail, si au moins un syndicat a répondu à l’invitation de l’employeur de négocier le protocole préélectoral (PAP), mais qu’aucun accord n’a pu être obtenu sur la répartition des sièges et du personnel dans les collèges électoraux à l’issue d’une tentative loyale de négociation, il revient à la Dreets de décider de cette répartition. Sa décision (ou sa décision implicite de rejet, au bout de deux mois) peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal judiciaire.

Qu’en est-il de l’office du juge dans ce cadre ? Peut-il refuser de statuer, et renvoyer les parties à la négociation du PAP, au motif que l’employeur, n’ayant pas transmis certaines informations demandées par les syndicats, n’a pas négocié loyalement ? C’est sur ce point que la Cour de cassation se prononce dans cet arrêt publié du 25 juin 2025.

Le refus de statuer du juge sur la répartition entre les collèges…

Dans cette affaire, une unité économique et sociale (UES) organise ses élections professionnelles. Dans ce cadre, un accord collectif prévoit que les sociétés de l’UES présentes en Ile-de-France sont regroupées en trois établissements distincts. Pour ces trois CSEE, l’employeur invite les organisations syndicales intéressées à négocier un protocole d’accord préélectoral.

En l’absence d’accord pour deux des CSEE, l’employeur saisit la Dreets (Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) pour fixer la répartition du personnel dans les collèges électoraux et la répartition des sièges entre les collèges, conformément à l’article L.2314-13. Cependant la Dreets ne se prononce pas dans le délai imparti de deux mois. Il en résulte une décision implicite de rejet, que conteste l’employeur devant le juge judiciaire, auquel il demande de procéder à ces répartitions.

Le juge judiciaire refuse cependant de se prononcer sur cette répartition. Il constate que la négociation du protocole d’accord préélectoral n’a pas été menée loyalement : il déclare la demande irrecevable et ordonne la reprise des négociations dans un délai de huit jours. 

Pour lui, constitue une absence de négociation loyale, le refus de l’employeur de délivrer aux syndicats participant à la négociation les fiches de postes et toutes les informations susceptibles de permettre la vérification de la correspondance entre les classifications de la convention collective applicable et la réalité des tâches exercées dans l’entreprise, ainsi que toutes les informations utiles à la sous-traitance.

► Rappelons que pour répartir les salariés dans les collèges électoraux, il convient de rechercher la nature des fonctions réellement exercées par les intéressés (arrêt du 12 mai 2021 ; circulaire DRT n° 93-12, 17 mars 1993, annexe fiche 5, n° 2.3). Peu importe la qualité en laquelle ils les accomplissent. En effet, l’appartenance d’un salarié à un collège électoral est déterminée par la nature de l’emploi qu’il occupe effectivement (arrêt du 10 mai 1983).

… est un déni de justice

Mais la Cour de cassation n’est pas d’accord. Elle rappelle les articles L.2314-13 et R. 2314-13 du code du travail, et vise l’article 4 du code civil. C’est l’article définissant et sanctionnant le déni de justice : “Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice”.

La Haute cour en déduit qu’il “appartient en conséquence, au tribunal judiciaire d’examiner l’ensemble des contestations lorsqu’aucune décision n’a été rendue par le Dreets et de statuer sur les questions demeurant en litige d’après l’ensemble des circonstances de fait à la date où le juge statue”.

Le tribunal judiciaire ne peut donc pas déclarer irrecevable la demande d’une société de fixer la répartition du personnel et des sièges entre les différents collèges électoraux. Il doit se prononcer et procéder à ces répartitions. Si les éléments d’information demandés par les syndicats existent et sont nécessaires pour ce faire, il doit en ordonner la production.

► Si cette solution semble de prime abord contraire à une décision de la même chambre sociale du 6 mai 2025, d’après nous, il n’en est rien. En effet, dans cette affaire, il a été décidé que lorsque l’employeur a manqué à son obligation de loyauté dans la négociation, il n’est pas légitime à saisir la Dreets, et donc le juge judiciaire, lequel peut le renvoyer à la négociation. Cependant, ici, non seulement l’employeur a manqué à la transmission aux syndicats d’éléments d’informations déterminants, mais surtout, souligne la Cour, un courrier de l’inspecteur du travail confortait les déclarations de plusieurs syndicats sur les conditions délétères dans lesquelles se tenaient les réunions de négociation du PAP et sur les agissements déloyaux de l’employeur dénoncés par ceux-ci (arrêt du 6 mai 2025). Un autre arrêt du 12 juillet 2022 explique que la tentative loyale de négociation est une condition du recours à l’autorité administrative, et vérifie qu’il n’y a effectivement pas eu de tentative loyale de négociation. Sont en cause, certes, la communication d’informations, mais à nouveau, également, les conditions de la négociation (actualisation de l’effectif l’avant-veille de la réunion de négociation, demande de positionnement immédiat des organisations syndicales et interruption unilatérale par l’employeur des négociations).  Ainsi, le manquement à l’obligation de loyauté ne se déduit pas automatiquement du silence gardé par la Dreets, ni de la non-transmission de certaines informations déterminantes à la négociation. Le juge judiciaire doit alors remplir son office et vérifier si ces informations sont nécessaires pour procéder à la répartition, et au besoin les demander à l’employeur, puis procéder à la répartition. Cette solution n’est pas nouvelle. Il a en effet déjà été jugé que faute de PAP, le juge saisi d’une demande visant à répartir les sièges entre les collèges électoraux, doit effectuer cette répartition en s’appuyant sur les pièces fournies par l’employeur, et dans le cas où ces pièces lui paraissent insuffisantes, demander la production de justificatifs complémentaires (arrêt du 27 mai 2021).

La Cour de cassation casse donc le jugement du tribunal judiciaire et renvoie devant un autre tribunal judiciaire, qui devra se prononcer selon les règles édictées.

Séverine Baudouin

[Veille JO] Les textes parus cette semaine : Droit des étrangers, gouvernement, handicap, procédure

29/08/2025

Voici un récapitulatif des textes parus au Journal officiel (JO) du samedi 23 août au jeudi 28 août inclus, avec les liens renvoyant aux articles que nous avons pu faire sur ces sujets. Pour mémoire, les textes des JO de l’été figurent dans le récap d’actu du mardi 26 août.
► Nous ne traitons pas ici les textes liés aux conventions collectives, car nous vous proposons tous les mois un baromètre des branches sur ces nouveautés.

Droit des étrangers

  • Un arrêté du 20 août 2025 modifie la procédure d’agrément des organismes en charge de la mise en œuvre de l’examen civique

Gouvernement

Handicap

  • Un décret du 25 août 2025 précise les modalités de mise en œuvre des établissements et services d’accompagnement par le travail et du contrat d’accompagnement par le travail conclu avec les travailleurs admis au sein de ces établissements ou services
  • Un décret du 25 août 2025 précise les droits et aux parcours professionnels des travailleurs handicapés admis en établissements et services d’accompagnement par le travail

Procédure

  • Un décret du 18 juillet 2025 porte réforme de l’instruction conventionnelle et recodification des modes amiables de résolution des différends (rectificatif)

Source : actuel CSE

Les apprentis de 17 ans ne peuvent pas bénéficier de l’aide au permis

29/08/2025

Dans une réponse écrite au Sénat, la ministre du travail, clarifie la question de l’aide au financement du permis de conduire pour les apprentis.

Le 26 juin 2025, le sénateur PS du Pas-de-Calais, Jérôme Darras, demande à la ministre si les apprentis de 17 ans peuvent bénéficier de l’aide au financement du permis de conduire pour les apprentis prévue par la loi du 5 septembre 2018. 

“Depuis le 1er janvier 2019, il existe une aide au permis de conduire d’un montant forfaitaire de 500 euros pour les apprentis majeurs inscrits dans une école de conduite pour la préparation des épreuves du permis de conduire autorisant la conduite des véhicules de la catégorie B. Cette aide au permis vient en complément des autres dispositifs existants, notamment déployés par plusieurs régions”, rappelle Astrid Panosyan-Bouvet. “Cependant, l’abaissement de l’âge permettant l’obtention de cette aide, en lien avec l’abaissement de l’âge légal de passage de l’examen du permis de conduire à 17 ans, effectif depuis le 1er janvier 2024, n’est pas envisageable dans le contexte budgétaire très contraint que nous connaissons”. 

Source : actuel CSE